*Sourire aux lèvres et marche enjouée, Glawach arriva au Tribunal. Pauvre Juge, il était en train de lui donner beaucoup de choses à faire, mais malheureusement, le Maire n'en pouvait rien. C'est donc d'une voix calme qu'il commença à dicter son Acte :*

Vostre Honneur,

Pardonnez moi de vous déranger de nouveau, sachant que vous deviez avoir autre chose à faire, mais nous sommes devant vous en ce jour pour comparaître une autre personne devant cette Cour pour Escroquerie. Celui-ci a pour nom : Osjman. La Municipalité de Bayonne reproche à cet homme d'avoir balayé d'un geste de la main la conciliation qui avait comme but de régler ce problème à l'amiable. Sieur Osjman a refusé, le 3 Juillet de l'An de Grasce 1456, de racheter à la Mairie la marchandise qu'il avait mis auparavant sur le Marché à un prix bien supérieur, enfreignant alors la Grille de Prix qui a été mise en place depuis le 2 Juillet. En effet, cet individu avait mis en vente 1 chemise pour femme à 135,00 écus. Mais comme le stipule le Décret concernant les prix maximum du Marché, en date du 2 Juillet, le prix maximum de la chemise est de 129 écus.

"DECRET MUNICIPAL concernant les prix maximum du marché : A compter du 2 Juillet 1456, la grille suivante doit être respectée.

Matières premières :
Blé (sac) : 13,20
Cochon (demi-quintal) : 16,00
Légume : 11,00
Laine (pelote) : 13,00
Lait (bouteille) : 9,25
Maïs (épi): 3,75
Peau : 16,00
Poisson (cabillaud, congre, daurade, hareng, merlan, raie, sole, thon, turbot, rouget, mulet, rascasse, saumon, omble chevalier, ombre, brochet, silure, anguille, carpe, goujon, truite) : 18,50
Vache (quintal) : 32,00

Filière Boulanger/Meunier :
Miche de pain : 6,70
Sac de farine : 15,70

Filière Boucher :
Morceau de viande : 18,50

Filière Charpentier :
Barque : 122,50
Manche : 9,85
Seau non cerclé : 29,50

Filière Forgeron :
Couteau : 16,50
Seau : 46,00
Fer brut : 49,50
Lame non forgée : 79,00
Lame épée : 108,50
Epée non aiguisée : 183
Epée : 208
Casque : 156

Filière Tisserand :
Bouclier : 73,00

Vêtements communs (passage de niveau) :
Bas (H/F) : 51,00
Braies (H/F) : 77,00
Ceinture (H/F) : 41,00
Chapeau (H/F) : 57,00
Chausses (H/F) : 28,50
Chemise (H/F) : 129,00

Toute personne ne respectant pas ce décret serait poursuivie en Justice pour Escroquerie par la ville de Bayonne. Entendu que la mise en accusation devra être précédée d'une tentative de conciliation de la part du maire ou de son représentant"

Nous avons une différence de 6 écus. La Mairie a donc acheté son produit et a demandé à cet être de le racheter. Mais celui-ci a refusé, prétextant qu'il avait acheté cette chemise par mégarde, et l'a revendu à un prix plus élevé. On peut donc considérer cela comme de la spéculation et c'est pour une de ces raisons qu'il est présent devant cette Cour.

Preuves :
http://img352.imageshack.us/img352/4324/osjmangc8.png
http://img352.imageshack.us/img352/5743/osjmanlettrejd0.png

Messire le Juge ! Nous avons deux faits dans cette Affaire. Cet homme n'hésite pas à clamer qu'il a spéculé et que pour lui c'est légal, et il a de plus refusé d'acheter son habit alors que celui-ci était à un prix supérieur à celui de la Grille des Prix. Espérons que sa Défense sera véridique et non mensongère.

Glawach de Qualinost,
Baron de Caylus,
Maire de Bayonne.

Votre honneur, je vous offre ici ma version des faits en même temps que ma plaidoirie :
J'ai besoin d'une chemise pour homme pour mon évolution. J'ai par mégarde acheté une chemise pour femme. Au moment de la revendre, j'ai fixé volontairement son prix à un prix supérieur à celui auquel je l'avais acheté, en me disant que si quelqu'un voulait bien mettre ce prix là pour cet objet, je ne l'aurais pas forcé à le faire.
La seule faute que je peux reconnaitre est d'avoir omis de consulter la grille des prix. Si cela m'arrivait souvent, ce serait condamnable, mais à partir du moment où cela ne se produit jamais, cela prouve bien que c'est accidentel.
Je vend toujours mon maïs à 3,50 écus alors que je pourrais le vendre à 3,75 mais je ne le fais pas car cela arrange la mairie : je ne suis ni un escroc, ni même une personne vénale.
J'ai été dans l'impossibilité d'accepter la conciliation de la mairie car je n'ai vu le courrier en question après avoir obtenu ma chemise pour hommes, ce qui m'a couté trop d'argent pour racheter la chemise pour femme. Je considère que cette conciliation a été très mal menée : me faire racheter un objet a 148 ecus pour une amende de 13 écus, on dirait que l'on avait très envi que je ne puisse accepter cette conciliation...
Je ne comprend pas ce procès, autant que je ne comprend pas l'interet de la mairie de dépenser autant de temps à harceler son propre peuple par ces temps délicat. J'ai confiance à la justice de mon village. Ce sera tout.

*Glawach écouta avec attention la Défense de l'Accusé. Celui-ci pouvait se montrer très convainquant, il ne lui manquait plus que quelques larmes, encore plus de plainte, et il aurait été parfait pour jouer dans une Tragédie ancienne. C'est donc, se levant de son siège puis marchant pour se calmer, que le Maire dit d'une voix haute :*

"Par mégarde"... je vais vendre une chemise trop chère, oh, ce n'était pas ma faute ; je viens de brûler une Taverne, voyons, ce n'était que par mégarde ; je me suis permis de poignarder une amie, écoutez, ce n'était juste qu'un accident.. Allons bon ! Votre vie n'est-elle qu'étourderie ? Ouvrez les yeux la prochaine fois que vous irez sur le Marché, afin de ne pas vous acheter une robe à la place d'un pantalon. Vostre Honneur... cet homme a acheté une chemise pour femme, et donc il a enfreint une deuxième Loy, que ce soit par mégarde ou non, car "nul n'est censé ignorer la Loy", comme il est dit dans le Coutumier.

Le Deuxième Décret qu'il n'a pas respecté est celui concernant les achats interdits pour les produits :

"DECRET MUNICIPAL concernant les produits du marché :
A compter du 25 mai 1456, toute personne non habilitée a interdiction formelle d'acheter sur le marché toute marchandise qui lui sera pas directement utile à sa consommation et ou à sa production personnelle sans autorisation préalable de l'Adjoint aux affaires économiques et financières ou du Maire de Bayonne. En outre, l’achat des matières premières pour les artisans et érudits disposant d'une échoppe à Bayonne se fera en quantité raisonnable (pour une production de trois jours maximum). Toute personne ne respectant pas ce décret serait poursuivie en Justice pour Escroquerie par la ville de Bayonne. Entendu que la mise en accusation devra être précédée d'une tentative de conciliation de la part du maire ou de son représentant"

Il a donc acheté une chemise pour femme alors que c'est un homme, et après que celui-ci ait vu qu'il avait commis une erreur, il a remis en vente cet habit à un prix bien supérieur à la Grille des Prix, ainsi qu'à un prix supérieur au prix de départ. Voyez le vous-mesme, Monsieur le Juge, il nous dit bien qu'il a "volontairement" spéculé, oui, cela se nomme de la Spéculation, et vous n'avez pas hésité Messire Osjman de spéculer sur nostre Marché et après vous affirmez que tout ceci n'est qu'un accident ?

Vous n'avez donc point une seule faute à racheter aux yeux de la Loy, mais plusieurs. En effet, vous avez acheté un produit que vous ne deviez pas acheter, vous l'avez revendu à un prix supérieur, vous moquant totalement de la Grille des Prix mise en place depuis le 2 Juillet, et vous nous affirmez en plus que vous avez spéculé en revendant volontairement cette chemise à un prix bien supérieur à celui de départ. Vous devez en avoir gros sur la conscience non ? Vous ne suffoquez pas à l'écoute de vos mensonges, de vos plaintes, n'avez-vous aucune honte ?

Ah ! Comme on le voit partout, vous nous sortez le parfait Villageois modèle qui aide sa Ville, et vous croyez qu'en spéculant sur le Marché en vendant une chemise à un prix exorbitant, c'est essayer de rendre Bayonne prospère ?

Non ! La conciliation a été très bien menée, et vous deviez racheter cette chemise à la Mairie avec l'amende fixée. Ne changez pas le rôle du méchant, car ici c'est vous que l'on juge pour Escroquerie et Spéculation. Nous n'harcelons personne, mais nous punissons les escrocs qui ne veulent pas faire l'effort d'aider à la reconstruction de l'économie d'une Ville. Des Loys sont mises en place, et elles doivent être respectées, et cet homme avait l'obligation de prendre connaissance de ces Décrets. Nous ne pouvons prendre les Habitants par la main.. ils sont grands pour aller lire un parchemin !

Nous souhaitons que cet individu rachète à la Mairie la chemise à 148.03 écus et qu'il paye une amende de 12 écus à ce Tribunal.

Faict à Bayonne,
Le 7 Juillet de l'An de Grace 1456,

Glawach de Qualinost,
Baron de Caylus,
Maire de Bayonne

Quel ardeur dans ce réquisitoire! Les faits réprochés doivent être gravissime! Et cet accusé doit être un multi récidiviste! Et l'accusation doit avoir un intérêt majeur dans cette affaire d'Etat!
Mais enfin, à quoi cela sert-il de se montrer aussi caricatural? N'avez rien d'autre à avancez que ces exemples minables? N'avez vous jamais commis une étourderie? Si j'avez voulu simplement spéculer, que l'on m'explique pourquoi aurais-je fait cela avec une chemise pour femme, sachant que cela n'aurais pu qu'attirer l'attention sur cette soi disant escroquerie? Et le fait que j'ai racheté une chemise d'homme tout de suite après prouve bien que je voulais une chemise pour me vetir, je la porte d'ailleurs aujourd'hui. Si cela était une escroquerie, considérez alors que je suis benêt pour l'avoir effectuée de la sorte. Et dans ce cas, faites en, je vous prie une circonstance atténuante.
Je n'ai plus le droit d'invoquer le fait que je suis un gentil villageois : dans la balance nous avons toute une période dans le droit chemin, et une seconde d'étourderie mal négociée... Mais quel affeux personnage suis-je donc!!! Et ce maire si gentil qui sert son village en s'acharnant sur un voyou comme moi, c'est donc ça la gentillesse incarnée... J'aurais au moins appris quelque chose. Et même deux : j'aurais aussi appris le courage que possède ce maire en s'apprêtant à remporter une immense bataille face à l'ennemi public numéro un.
A defaut de me faire rendre compte de ma malhonneteté, ce réquisitoire en forme de galéjade aura eu le mérite de me faire sourire!
Je suis désolé, votre honneur, si j'ai pu m'égarer lors de cette deuxième plaidoirie (meme si je ne suis pas plus égaré que l'accusation), mais je vous avoue que j'ai du mal à comprendre ce qu'il m'arrive, surtout quand cela vient du plus haut fonctionnaire de mon village.
J'ai confiance en la justice de mon village, qu'elle soit rendue.

Nous, Mikkii96, Juge de Gascogne sous le règne du Duc Ursin, déclarons osjman coupable des faits reprochés.

car "nul n'est censé ignorer la Loy", comme il est dit dans le Coutumier.

Mikkii96
Juge
15 juillet 1456