[Ses dossiers sous le bras, l'humble mais néanmoins mirifique Gouverneur de Montauban-la-Réformée se présenta à la cour de Justice pour ouvrir son premier procès.]

Votre excellence,

En ce 29ème jour de juin de l'an de grâce 1458, moi Sancte Iohannes, bon et généreux bourgmestre de Montauban au service de l'éternel duché de Guyenne, ouvre un procès sous le qualificatif de la Jurisprudence « Aqualung » le curé à l'encontre du Senher ' heu ' [Il relut plusieurs fois ses archives pour être sûr tant le nom lui paraissait improbable.] ' du Senher Yo_Yo et donc pour escroquerie à l'encontre du Duché de Guyenne.


« Le terme d'escroquerie reste assez flou et recouvre un nombre importants de cas.» ici le suivant :

« Cas particulier pour le non-paiement d'impôt.

Il n'y a pas de décret, il faut faire référence à la Jurisprudence « Aqualung » le curé qui en ayant été condamné pour non-paiement fait de cet acte un délit pour l'ensemble des autres sujets de Guyenne »

Par cette obstination inqualifiable, le senher Yo_Yo enfreint le règlement de l'impôt:
Yo_yo : 6,00 écus (+3,18 écus de pénalité) avant le 2010-05-17
Yo_yo : 6,00 écus (+2,10 écus de pénalité) avant le 2010-06-04
Yo_yo : 6,00 écus (+1,38 écus de pénalité) avant le 2010-06-16
Yo_yo : 6,00 écus (+3,96 écus de pénalité) avant le 2010-05-04
Yo_yo : 6,00 écus (+0,00 écus de pénalité) avant le 2010-06-30

Soit une dette s'élevant à 30 écus (+10,62 écus de pénalité)
Soit au total: 40 écus et 62 deniers


Sachez néanmoins Senher Yo_Yo que, dans sa grande mansuétude, la Cour vous accorde le droit de faire appel à un avocat, lequel vous prêtera assistance et vous défendra durant ce procès.

La municipalité Montalbanaise, quant à elle, exige simplement que l'impôt soit payé et cette situation régularisée au plus tôt.

Ce sera tout pour le moment votre Excellence.

[Il inclina légèrement le buste face à la cour, et retourna gentiment à sa place.]

La personne intéressée ne s'est pas manifestée.

[Lorsque ce fut à son tour de s'exprimer, l'humble mais néanmoins mirifique Gouverneur de Montauban-la-Réformée se redressa.]

Très chers membres de la Cour, la plaidoirie de la défense est certes sympathique et pour le moins poignante, mais en quoi le fait que le senher Yo_Yo considère les non-Aristotéliciens comme des ennemis pourrait bien le dispenser de s'acquitter de ses devoirs envers la municipalité Montalbanaise ? Aussi, un végétarien pourrait-il seulement prétendre à l'exonération fiscale au motif que son bourgmestre serait carnivore ? Tout cela n'a malheureusement guère de sens et une fois encore le Seigneur de Tramecourt nous montre que le métier d'avocat bénévole (quelle horreur) tend à ressembler de plus en plus à un numéro de bateleur destiné à amuser la galerie plutôt que d''uvrer sérieusement au bon fonctionnement de la justice.

D'ailleurs, le senher Yo_Yo l'a bien compris, puisque avant même que son avocat ne se soit exprimé en ces lieux, on m'a informé que le prévenu venait de régler l'ardoise qu'il devait à la Municipalité de Montauban.

Par conséquent, les impôts ayant été réglés, pénalités comprises, et si nous regrettons que le prévenu n'ait pas répondu à nos lettres de conciliation en vue d'éviter une procédure emmerdante, nous informons la cour que le dossier du Senher Yo_Yo est désormais classé à nos yeux.

Plaise à la cour de rendre le verdict qu'elle jugera approprié.

La personne intéressée ne s'est pas manifestée.

* L'avocat apparut revêtu d'une robe aussi sombre que la suie, le torse barré d'un baudrier vide, car il sortait tout juste de la caserne et n'avait laché qu'à contrecoeur son arme *

Membres de la cour de Guyenne, salut !

Je suis Nicolas Eymerich de Tramecourt, avocat du dragon. Je suis mandaté ici par le sieur yoyo pour le représenter et le conseiller lors du procès qui l'oppose à la mairie de Montauban, dont son maire, le sieur Sancte Iohannès, l'accuse d'escroquerie pour non paiement de ses impots.

Au cours de cette plaidoirie, nous chercherons à prouver que notre client, s'il reconnait ne pas payer ses impots, a aussi une bonne excuse à cela, et est donc innocent, de sorte que nous plaiderons non coupable.

* tire un peu sur sa fraise, qui se coince dans son baudrier *

Mon client est un aristotélicien fervent et très pieux. De nature, il est d'âme vagabonde, errant de ville en ville pour y rencontrer les sédentaires et discuter avec eux de sa foi et des raisons qui le poussent à croire en le Très Haut. Aussi, quand il a appris que l'hérésie s'infiltrait insidieusement dans la ville de Montauban, il a décidé d'y emménager afin d'aider les habitants à résister aux tentations de la bête sans nom par ses innombrables récits à la gloire de l'aristotélisme, qu'il a pu glaner au long de son périple.

En effet, bien qu'il ne paie pas de mine et qu'il ne soit ni prêtre, ni ne s'habille à la manière d'un dévot, mon client est aussi un pélerin, et d'ailleurs, il viendra nous chanter le credo un peu plus tard pour nous rappeler à nos devoirs envers dieu.

* Se tourne vers sancte, pointant un doigt accusateur dans sa direction *

Or, quel est le plus grand ennemi d'un pélerin comme mon client ? Un hérétique bien sur, et non seulement hérétique, mais obstiné, qui défie l'autorité de l'église malgré les avertissements et les appels au repentir, à tel point que le sieur sancte a même été excommunié il y a peu.

Or, cet hérétique, cette abomination à forme humaine, est aujourd'hui maire de montauban. Si mon client est inspiré par un désir sincère d'aider la ville par ses prières et ses récits hagiographiques, il n'a pour autant pas envie d'engraisser la bête immonde qui empoisonne notre belle cité guyennoise en y instillant son fiel réformé, c'est pourquoi il a décidé de ne pas payer ses impots

Et ce d'autant que le fait de payer ses impots sous le mandat d'un hérétique de la trempe du sieur Iohannes revient implicitement à obéir à ses instructions, et donc à s'associer à lui, ce qui signifie que mon client risque d'être excommunié juste par crainte de la justice ducale, un comblepour une justice censée collaborer avec l'église plutôt que la combattre.

* Petite pause, le temps que l'avocat se retourne vers le juge *

Certes, vous arguerez que mon client avait déjà cessé de payer ses impots bien avant que le sieur sancte ne devienne maire de Montauban. L'argument est cependant faux, car il avait refusé de âyer quand c'était une autre hérétique, la dame Kindjal, qui dirigeait la cité. Ensuite, quand le sieur Topheez a pris sa suite, devinant comme tous que celui ci était l'héritier de la précédente maire, il a craint que le nouveau maire ne soit lui aussi hérétique, aussi a-t-il continué à refuser de payer ses impots pour ne pas se compromettre avec un homme qu'il soupçonnait être à la botte de la réforme. Une intuition plus tard confirmée par les affirmations du sieur Hagden dans ce même tribunal, où le chevalier teuton n'hésite pas, au mépris de sa propre sûreté, à rappeler les liens suspects et troubles entre le parti du sieur Topheez et l'organisation militaire réformée du sieur Iohannes.

Evidemment, il nous est impossible de reprendre ses propos ici sous peine de diffamation, mais il existe suffisamment de présomptions, de zones opaques, pour que mon client se sente légitimement en droit de refuser de payer ses impots. Même la parenthèse de Noaillan n'aura pas suffi à le rassurer, puisqu'il pressentait déjà que la bête ne s'était retiré que pour revenir plus forte, ce qui nous a été prouvé par l'élection du chevalier du lion en personne.

* se retourne vers le public, bras levé dans une posture évangélisatrice *

De sorte que mon client ne pouvait que refuser de payer ses impots, à la fois pour éviter que cet argent ne serve à quelques but paien, mais aussi pour respecter la bulle romaine ordonnant l'excommunication du maire de Montauban. Entre ne pas payer ses impots et enfreindre la loi des hommes et les payer et enfreindre celle de Dieu, mon client a fait son choix.

* revenant au juge *

Et vous excellence, placerez vous la loi divine en dessous de la loi des hommes ?

Le prévenu a été relaxé.
*Melior avait écouté avec attention les différentes parties, et elle avait noté avec un certain soulagement que Maître Nicolas avait renoncé à sa fameuse pelle.
Lorsque fut prononcé le réquisitoire du bourgmestre de Montauban, il n'y eut rien à ajouter de la part de la défense, et de sa voix claire, elle dit :*

En ce jour du trentième du mois de juillet 1458,

Attendu que le sieur Yo_yo a finalement réglé ses impôts ainsi que les pénalités inhérentes, selon les propos du bourgmestre de Montauban,

Nous, Melior, Juge de Guyenne, rendons le verdict suivant :

La relaxe.

*Vif coup de maillet sur le lutrin.*

Si l'une des parties devait s'estimer lésée par ce verdict, recours est possible auprès de la Cour d'Appel du Royaume.

*Laissant de côté le maillet, et posant à plat les mains sur la table la jouxtant, elle poursuivit (oui, des fois quand on croit qu'il n'y en a plus, il y en a encore).*

Maître Eymerich, l'argument de la lutte religieuse me semble spécieux. Tout ramener à la religion en Guyenne peut conduire à bien des débordements.
Nous ne jugeons pas ici la dimension spirituelle des affaires, mais bien la dimension temporelle.
Chaque homme ou femme, se trouvant sur le sol de Guyenne, doit respecter les lois guyennoises, cela seul importe.