Procès ayant opposé Dratus au Comté du Languedoc
Dratus était accusé de Escroquerie.
Nom du procureur : Eliox
Nom du juge : Phelipe
Date du verdict : 21/12/1455
Lieu concerné par l'affaire : Carcassonne
En ce jour du 7 décembre 1455, nous, Actarius, procureur adjoint du Languedoc, intentons un procès à l'encontre de dame Dratus pour escroquerie.
Cette personne a vendu 2 seaux non cerclés à 28 écus sur le marché de Carcassonne au jour du 22 novembre 1455, comme l'atteste ce document:
http://img250.imageshack.us/img250/1756/preuve2un9.jpg
Elle a ainsi contrevenu à l'édit suivant de la ville de Carcassonne, qui fixe les prix de vente minimum pour les charpentiers:
[A tous ceux qui ce présent édit verront,
nous, membres du Conseil Municipal de Carcassonne, sous la présidence du maire Gurgald,
à tous présents et à venir, faisons savoir que pour asseoir les institutions de notre ville avons, par décret, statué et arrêté, statuons et arrêtons les choses qui s'ensuivent :
Art 1 Nul n'est autorisé à vendre des petites échelles ou des seaux non cerclés à moins de vingt neuf (29) écus ainsi que de grandes échelles à soixante dix neuf (79) écus sur le marché (sauf avec accord préalable de la mairie ou de son représentant)
Art 2 Tout contrevenant pourra être poursuivi en justice par la ville de Carcassonne pour escroquerie et s'expose à une amende modulable selon la l'appréciation du juge en fonction.
Art 3 Que cet édit entrera en vigueur le 7 août 1454.
Art 4 Qu'aucun ne puisse enfreindre la page de notre concession, ou aller à son encontre par une audace téméraire. Si cependant quelqu'un osait le tenter, qu'il sache qu'il encourra l'indignation du Dieu tout-puissant et des bienheureux Pierre et Paul.
Et afin que ce soit ferme chose et stable pour la durée de ce Conseil, nous avons fait mettre notre sceau à ce présent édit.
Gurgald, maire, a proposé,
Les conseillers présents ont adopté,
Gurgald, Maire de Carcassonne, a ratifié,
Gurgald a écrit.
Date en l'enceinte de la Mairie de Carcassonne, le 6 août 1454.
Qu'il en soit ainsi, heureusement ]
L'accusée n'a pas donné suite à la tentative d'arrangement à l'amiable. Ainsi et au vue des faits précédemment cités, nous demandons à dame Dratus de s'expliquer devant le tribunal du Languedoc.
Nous informons l'accusée qu'elle peut gracieusement faire appel au Barreau du Languedoc pour l'aider à assurer sa défense (http://chateau-montpellier.discutforum.com/salle-publique-f111/).
un courrier est déposé tôt ce matin là sur le bureau du juge
"Monsieur le Juge,
Etant en retraite spirituelle et en période de jeune en ce moment, je délègue le soin de me défendre à sieur Gurgald.
Avant qu'il ne vienne prendre la parole, j'attire déjà votre attention sur l'absence de possibilité de conciliation, Messire Thibault n'ayant donné suite à aucun de mes courriers pour réparer mon erreur.
J'espère qu'il est encore temps de résoudre ce mal entendu par d'autres voies que celle ci.
Merci
Dratus"
Après lecture de la missive, le coursier prend congé de l'assemblée
*Dès le départ, le procureur adjoint avait des doutes sur cette affaire. Mieux eut-il valu qu'il envoie un courrier aux intéressés plutôt que de porter l'affaire de suite devant le tribunal... telle était la pensée qui le traversait à l'écoute de la défense. La plaidoirie de Gurgald terminé, il prit la parole après un léger soupir*
Messire Gurgald, ancien coms de Lengadòc, je vous remercie d'avoir fait le déplacement jusqu'en ce lieu pour défendre de bonne foi l'accusée, dame Dratus, ancien maire de Carcassonne.
Au vue de vos propos, il apparaît clairement que le méfait n'a pas été intentionnel et qu'il s'agit d'une simple erreur de la part de dame Dratus. Vous avez également évoqué la bonne volonté de votre protégée, le fait qu'elle reconnaisse et qu'elle soit prête à la réparer. En regard de ces éléments, je n'ai rien à ajouter.
L'accusation retire les charges retenues contre dame Dratus et demande au tribunal de relaxer l'accusée à la condition expresse que cette dernière s'engage à réparer sa faute au plus vite et à faire plus attention à l'avenir aux décrets en vigueur.
Messire Gurgald avait quitté depuis quelques temps déjà l'enceinte du palais de justice, justifiant son départ par la lenteur édifiante de l'accusation à répondre à sa plaidoirie.
Il était arrivé dans leur demeure de Carcassonne, fort las de cette trop longue attente.
C’était au tour de Dratus de venir à la barre pour affronter la sentence qui serait sienne.
A l’écoute du réquisitoire de l’accusation, ses joues s’empourprent, elle se sent gênée de cette situation qui vue de l'extérieur prête à sourire...
A près un long silence dans l’assemblée, elle prend une profonde inspiration et entame ce qu’elle a à dire.
"Monsieur le Procureur adjoint,
Soyez certain que mes intentions n’étaient nullement mauvaises, j’ai consacré une grande partie de ma vie ces dernières années à soutenir Gurgald au conseil municipal et aussi à contribuer au rayonnement de la radieuse cité de Carcassonne en qualité de maire.
Je suis parfaitement consciente que mon étourderie a mobilisé beaucoup de bonnes volonté pour au finale peu de tords, certaines personnes de la cité attendaient depuis longtemps un faux pas de ma part pour avoir le plaisir de faire perdre du temps à la justice de notre comté.
Quand j’étais maire, j’ai toujours plaidé pour une politique de médiation, et je n’ai à ma connaissance jamais incité à encombrer les couloirs du château pour des questions de fond de bourses.
Je ne souhaite qu’une chose, c’est rendre les écus que je dois, et éventuellement régler l’amende que vous jugerez ou non de m’imposer.
De cette affaire, je tire une leçon, il est impératif de veiller à transmettre son savoir faire à ses successeurs..
Je vous remercie de votre attention"
Dratus termine son discours, elle n'ose s'assoir, attendant que cette histoire se termine enfin, et qu'elle puisse retrouver la quiétude de son logis chaud et douillet
"Avant de vous exposer quelques éléments, je tiens à dire que Dame Dratus ne nie pas d'avoir vendu deux seaux non cerclés à un pris inférieur d'un écu au prix minimum en vigueur. Dame Dratus a toujours, et est toujours, prête à réparer sa faute.
Mais je souhaiterais revoir, avec vous, le fil des événements qui nous ont conduit à ce procès.
Dans son premier courrier -versé au dossier-, le lieutenant Thibault, fait mention de sacs de maïs indûment vendu et de la nécessité de leurs rachats à un prix ... non spécifié. Dame Dratus, sur le départ d'une retraite planifiée n'a malheureusement pas pris la peine d'y répondre, c'est une erreur. Il faut dire que tout dans ce courrier, y compris le titre.
Une semaine plus tard, nouveau courrier -versé aussi au dossier-, mais cette fois ci Dame Dratus répond. Elle lui explique le non sens de son premier courrier -sac de maïs à racheter à un prix inconnu-, lui fait part du peu de temps dont elle disposait à ce moment, mais ne nie pas les faits.
Aucun autre signe de vie de la part du lieutenant depuis. Ni courrier, ni rien, et dix jours après le dernier échange, un procès s'ouvre ...
Vu l'absence d'un processus crédible de justice de proximité nous demandons, simplement, que cette affaire puisse retourner au niveau local et que le non lieu puisse être prononcé par ce tribunal.
Ce procès représente bien plus que l'amende que vous pourriez lui infliger. une condamnation éleverait au rang de délinquante cette femme qui a prouvé à maintes reprises son dévouement pour son comté et sa cité.
Monsieur le Juge, merci de votre attention"
-« Accusé, levez-vous !
Nous, Phelipe de Saunhac, Jutge de Lengadòc, allons donner lecture du jugement rendu par nous.
Après avis de la dispute contradictoire, après avis éclairé de messire le Procureur adjoint, après audition des témoins de l’accusation et de la défense, nous avons statué, et statuons, pour que justice soit rendue, que :
Le manquement à la loi du Languedoc est réel et avenu. En conséquence, nous affirmons par là qu’il y a eu délibérément violation du décret municipal de Carcassonne relatif à la grille des prix minimaux. L’accusé a vendu des seaux non cerclé au dessous des tarifs en vigueurs.
Nous, Jutge de Lengadòc, relevons que l’accusé plaide coupable et s’excuse pour son manquement à la loi.
Nous, Jutge du Lengadòc, prenons acte du réquisitoire du procureur adjoint. Toutefois rejetons dans l’instant sa demande déplacée. Messire le Procureur, vous apprendrez à rester à votre place, vous êtes ici pour accuser, pas pour juger des faits… Une affaire portée en justice ne saurait en aucun cas, comme le stipule notre coutumier, être déclassée au motif de la gravité des faits.
Nous, Jutge de Lengadòc, notons et accusons le disfonctionnement évident dans le travail nécessaire à cette affaire de la justice de proximité de Carcassonne.
En conséquence de quoi, nous, Jutge de Lengadòc, au vu et su de tous, dans le pur respect de la législation languedocienne, nous concluons que :
Les erreurs de l’autorité conduisent l’affaire à un non lieu.
Ordonnons en sus que le présent verdict soit affiché en halle publique, au vu et su de tous, pour ce que la populace en soit informée ;
Faisons savoir à l'accusé, que le présent verdict est interjetable en appel suivant le mode opératoire défini par le règlement de la Cour d'appel du royaume.
Justice a été rendue !
Fa en Montpelhier, le 21 decembre de l'an 1455. »
Le prévenu a été relaxé.