Monsieur le juge, vous avez à juger une personne dont il est absolument certain qu'elle a commis des actes de sorcellerie. Est-elle une invocation ou un invocateur ? Nul ne sait. Ce qui est assuré, c'est qu'elle a perpétré ces crimes en compagnie de Annabel.

De tels actes sont véritablement effroyables. Cependant, monsieur le juge, n'oublions jamais que cette ignoble créature, transfigurée par un affreux rictus qui est celui du Malin, est une créature de Dieu. Pour lui donner une petite chance d'échapper à la damnation éternelle, je vous demande donc la brûler sur la place publique.
Obéissant aux consignes laxistes du pouvoir temporel, nous allons néanmoins écouter le prévenu nous dire qui, parmi les personnes accusées, est l'invocateur, et qui sont les invocations. Peut-être, monsieur le juge, serez-vous touché par le témoignage du sorcier et ne le condamnerez-vous pas à la peine maximale. Je vous recommande, quant à moi, d'être clément envers l'âme du pêcheur, en étant sévère avec son corps.

L'évèque Zippo

En ce 25e jour du mois de janvier 1459, nous, Hardryan Devirieux, Juge du Lyonnais-Dauphiné, allons rendre jugement au nom du Duché du Lyonnais-Dauphiné et de son Gouverneur, Sa Grâce Ka Devirieux.

Damoiselle Lorine, vous êtes accusée de Sorcellerie, celle-ci étant définie dans le coutumier lyonnais-dauphinois comme:

IV.2 : Sorcellerie
IV.2.a : Unicité de l’âme
L’unicité de l’âme et du corps ne saurait connaître d’exception. Toute sorcellerie visant à multiplier les âmes ou les corps est passible de poursuites au chef de sorcellerie.

Ayant entendu votre témoignage où vous avez avoué avoir pris possession du corps d'une femme dont vous dites être l'amie, et ayant entendu le témoignage de l'évêque Zippo nous ne pouvons que considérer que vous avez bien contrevenu à l'énoncé sur l'unicité du corps.

L'unicité du corps ne pouvant connaitre exception, nous vous reconnaissons donc coupable de Sorcellerie et d'idiotie pour avoir usé de procédés malveillants.

Je vous condamne donc à une journée de prison pendant laquelle vous devrez réfléchir à votre comportement illégal et vous repentir, avec comme seul compagnon le Livre des Vertus où vous trouverez la sagesse. Vous n'aurez droit à aucune visite et n'aurez pas de co-détenu afin de ne pas vous tenter de jouer à touche-pipi avec un autre corps que le votre ou d'y entrer par effraction, ou infracfion ou je-ne-sais-trop-comment.

La sorcellerie c'est fini! Vous avez de la chance d'être tombée sur un Juge aussi clément que moi et surtout de ne pas encore avoir été envoyée dans l'enfer lunaire avec le Sans-nom et les hordes de damnés.

Justice est rendue.

Fait à Lyon le 25 janvier 1459 par Hardryan Devirieux.