Errance.
Quelquepart Quelqu'un ???
Sur le haut d'une barge lourdement chargée de foin, un rayon de soleil se glissant entre deux tuiles mal ajustées vint frapper le visage de la rousse endormie... Elle lui donna en réponse quelques jurons bien sentis alors qu'elle tentait, se perdant dans les plis de sa crasseuse pèlerine, de rattraper Morphée, de fuir encore le jour ....
Mais trop tard
Où trop tôt
Bref
Foutu
Réveil endolori et frileux, à essayer de se remémorer dans la brume épaisse du regretté sommeil, dans quelle grange elle pouvait bien avoir trouver refuge cette nuit là, rien ne ressemblant décidément plus à un tas de paille qu'un autre....
Chassant les agressives brindilles immiscées sous sa chemise, elle s'assit, défroissa sa tignasse, tâtonna machinalement pour vérifier la présence de son baluchon, prit longue inspiration, ferma les yeux.... et les rouvrit enfin sur le présent.
...Alençon....
Mortagne exactement....
V'là où elle s'trouvait... ouep... c'était bien ça .
Et vlan tout qui revient d'un coup !
Car pour une fois depuis longtemps Errance avait un but.... ridicule, une gageure, un "et si" qui se traîne mais qui ne lâche plus l'âme... un "et pourquoi pas" donnant, en fait, une raison franchement pas plus mauvaise qu'une autre de poursuivre la route....
Une conversation volée en taverne tourangelle entre deux rustres avinés .... Une femme, brune, hautaine, provocatrice, une lanterne rouge rivé à sa roulotte et quelques autres détails... troublants ....
Limage de tante Séphina aussi prompte à donner de la voix qu'à dévoiler ses charmes lors des escales de la troupe l'avait immédiatement submergée.... et si c'était elle ?.... Folie que d'espérer cela... Folie que de croire encore vivant un des membre de sa famille ... Folie en forme de dangereux désaveu de cette solitude, qu'elle avait fait sa seule, unique force et amie depuis cette sombre et trop sanglante nuit
Les hommes avaient parlé d'Alençon... Parlaient t'il du Duché ou de sa capitale... elle n'en savait rien .... Mais cette dernière lui semblait le meilleur endroit pour mener enquête, toute consciente du ridicule de celle ci, car si il lui fallait courir après toutes les brunes filles de joie ou autres saltimbanques du Royaume...
Errance eut un sourire en sautant de la barge ...
Bah....au moins ferait elle du chemin ....
Mais voilà que dés son arrivée, un couple d'habitants l'informa que sans laisser-passer...ben pas de capitale .... Prisant fort peu les combats et encore moins les geôles, elle avait du, contre quelques écus, trouver aimable scribouillard pour faire courrier au prévôt...
Un jour, oui, oh combien elle aimerait que quelqu'un lui apprenne à tenir plume, à la faire crisser sur le vélin, à coucher en volutes d'encres l étrange pouvoir des mots... mais pour l'heure la gueuse analphabète frémissait de désarroi dés qu'on lui annonçait courrier à faire....ou à lire....
Dehors, la ferme se réveillait à peine... quelques bruits étouffés dans la maison qu'elle avait crue vide lors de sa nocturne arrivée, un chant du coq...
Il était de toute façon grand temps de quitter les lieux avant que le propriétaire ne l'en chasse de lui même...
Et Errance comme à son habitude partit errer en hère dans les rues de où déjà?...
Ah vi Mortagne.....
Elle se traînait sur le marché faisant jouer entre ses doigts une bourse épuisée par la route, trop maigrichonne pour offrir à son ventre douceurs réconfortantes, mâchouillant sans plaisir une moitié de pain rassis dégoté au fond de sa besace, quand ce ne fut pas un mais deux pigeons qui se mirent à lui tourner autour...
Après le prime instinct de les chasser à grand mouvement de bras agacés pour sauvegarder jalousement son reste de quignon, miettes comprises, elle avisa les vélins accrochés à leur pattes, déchiffra tant bien que mal son nom inscrit sur les plis, et encore une fois émerveillée par la capacité de ces maudits volatiles à trouver destinataire, alpagua avec moult politesse une dame bien mise pour qu'elle lui en fasse lecture ...
La première lettre fit naître un ému sourire sur son jeune visage ...
Le messire de Montmirail... peut être aurait elle put s'attarder un peu plus... les plaisantes, fraternelles et surtout rouquines rencontres étaient rares ... Il lui faudra tout de même trouver moyen de lui faire réponse à lui quune Duchesse attendait, mais qui avait converser avec elle, gueuse parmi les gueuses, comme avec une égale amie .
La deuxième lui fit ouvrir des yeux aussi ronds que satisfaits et lâcher un :
"Ahhhh Oui ???? Bon ben allez zou alors !!!!" ...
Et Laisser-Passer en poche elle quitta illico le marché Puis la ville....
Direction Alençon ....
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