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[RP] Les ruines: légende ou malédiction ?

Dameisabeau
[Sur la place du village]

C’est au bureau du cadastre qu’elle avait rencontré la jeune femme qui marchait à ses côtés.
Elle ne la connaissait point, mais la curiosité qu’elle avait affichée pour les ruines l’avait interpellée, voir troublée.
Elle l’avait alors invitée à sortir, à l’abri des oreilles indiscrètes.

Ces choses-là, on n’en parle pas en public, non !
Ces choses-là, on en parle à mots couverts, on les murmure en confidence, par crainte de s’attirer le mauvais œil.

Comment allait-elle aborder cela ? Elle ne le savait pas encore quand elles sortirent dans le jour déclinant et se contenta d’esquisser un sourire engageant en avisant le vieux banc de pierre sur la place.
Celui-là même qui, depuis des années était le témoin muet des intrigues, des serments et des secrets des habitants de cette ville.

Venez, prenons place.
Damoiselle Istanga De Landelin, ravie de vous connaitre, Je suis Isabeau , Dame De Hauterives.
Mon domaine est au Nord, sur la route de Vienne mais j’avoue passer le plus clair de mon temps à Valence, en cette mauvaise saison.


Elle ne lui dit pas qu’elle s’y sentait bien seule dans ce château aux pierres froides, combien le silence y était pesant , elle ne lui dit non plus qu’elle n’y séjournait que pour aller y fleurir le caveau familial.
A quoi bon!.


Ainsi donc, vous étudiez la Théologie ? C’est une très bonne nouvelle, nous manquons cruellement de curé depuis si longtemps.
Que le très haut vous inspire ! Je vous souhaite courage et réussite pour vos études.


Voilà ! Les civilités étaient dites. A présent il fallait en venir au fait.

Un léger vent s’était levé en ce début de soirée, mais ce n’est pas son souffle qui la faisait frissonner et ramener les pans de sa cape sur elle.
Prenant une grande inspiration, elle se saisit alors brusquement, peut-être un peu trop brusquement , des mains de la jeune fille et captura son attention du regard, débitant sa mise en garde d’une traite.


Je vous en conjure ! Oubliez les ruines et la forêt qui les borde.
Il n’y a rien de bon là-bas. Que désolation.
Ce n’est pas un endroit pour une jeune fille pure qui veut consacrer sa vie à notre mère l’église.

Oubliez….

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Istanga
Intriguée par l'air mystérieux de la jeune femme, je la suis jusqu'au banc de pierre, dont l'assise témoigne des années passées à égrener les souvenirs, les joies et les médisances. Je songe alors à son jumeau, accueillant sous un tilleul les trois vieillards, mémoire de la ville gasconne , je songe à mon banc moussu, niché au milieu des buis qui s'étaient échappés de leurs formes étranges pour prendre leur vie propre, au fond de mon jardin de Montauban, où j'ai passé si peu de temps.

Je prends place avec Dame Isabeau, soulevant légèrement ma robe sur les hanches pour ne point étirer le velours grenat, l'écoute se présenter.

Enchantée, Donà Isabeau. Mais ne m'appelez point Mademoiselle, je vous en conjure. J'ai passé l'âge de l'être et, pour tout vous dire, je suis veuve et j'élève le jeune fils de mon époux. Vous pouvez m'appeler Istanga.


L'allusion très brève à son domaine me ramène à mon intendant. Quel travail vais-je bien pouvoir lui fournir?

Quand elle aborde le sujet de mes études, je me devrais de lui dire que je n'ai pas rassemblé les liquidités nécessaires à mon inscription à l'université, mais nous ne sommes pas là pour en parler. Ce qui attise ma curiosité, ce sont ces ruines.

Aussi, quand elle me prend les mains, me mettant en garde contre cet endroit, suis-je à peine surprise de déceler la peur dans sa voix.


Mais, que voulez-vous dire? Des mendiants, des lépreux, des brigands même, y auraient-ils élu domicile? Mais... non, elle aurait pu me le dire de but en blanc, sans en faire mystère... il y a autre chose... des djinns, peut-être?
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Dameisabeau
.
Ah ! son minois est encore frais, elle ne l’aurait pas cru si âgée....

Entendu Istanga, alors vous pouvez m’appeler Isabeau

Elle écoute sa réponse à sa mise en garde et soupire de plus belle.
La crainte ne se départissant pas de ses pensées, elle s’agite, ne voulant en dévoiler plus, mais la dame est curieuse, elle insiste ;
Elle aurait pensé que les paroles d’une ancienne, nommée sage de ce village aurait suffi à la décourager, mais il n’en fut rien.

Elle secoue négativement la tête.

Non ni brigands , lêpreux ou autres. C’est autre chose.

Baissant alors légèrement la voix, elle se mit à raconter détachant et appuyant sur les mots clés, propices à entretenir le mystère.

Je croyais comme beaucoup que ce n’était qu’une … légende, bonne à effrayer les enfançons, à se conter aux veillées, jusqu’à avoir été confrontée moi-même à des phénomènes tout ce qu’il y a de plus troublant.
Mais, commençons par le début.
Tout aurait commencé il y a environ une centaine d’années.
je me souviens en avoir entendu parlé par les vieux du village, détenteurs eux-mêmes de l’histoire par leurs anciens.
Tenez ! ici même, sur ce banc, c’est là qu’ils se retrouvaient les soirs de belle saison.
J’étais jeune à cette époque, et avec quelques amis, nous aimions nous grouper autour d’eux , écoutant avec horreur ou ravissement nous conter leurs souvenirs de bataille, nous faire partager les histoires de leur jeunesse passée.


A l’évocation de ces doux souvenirs, elle se détend un moment, en concordance avec l’intonation de sa voix qui se fait légère, puis, subitement, le ton redevient plus grave, montant en intensité au fur et à mesure qu’elle parle.

Un jour, nous étions là, à rire des facéties d’enfance du sabotier quand soudain, une jeune femme fit irruption sur la place , échevelée, courant en tous sens en hurlant comme une damnée, à portée de deux mains de nous.

MON BEBE qu’elle criait, MON BEBE ! DE GRACE, AIDEZ MOI !

Sur la place bondée ce soir-là, chacun profitant de la fraîcheur du soleil déclinant, ses paroles se répercutèrent dans la foule, dans un long murmure d’interrogations et de suppositions.


L’avez perdu où votre lardon ?

Qu’é qu’é hips ! dit ?

Bah ! Surement une dérangée.

Laissez-moi passer, je suis médicastre !

Je jurerai même en avoir vu quelques-uns se signer.
Et puis soudain…..


Là, elle s’interrompt, laissant passer quelques secondes, se fige, pour mieux tenir en haleine son auditrice.

La femme, d’une voix monocorde se met à parler dans un dialecte incompréhensible avant de s’écrouler à terre, inerte.
Les plus proches d’elle affirmèrent par la suite l’avoir entendu clairement prononcer: HECATE, FORET

Jeunes et insouciants que nous étions, nous ne faisions que rouler nos yeux en tous sens , ne comprenant pas trop ce qu’il se passait, mais ce qui nous surprit le plus , ce sont nos petits vieux, qui d’un bond , se sont levés, se sont concertés du regard et se sont éparpillés comme si ils avaient tous quelque chose d’urgent à faire, oubliant du coup l’histoire extraordinaire qu’ils nous avaient promis.


Mais vous devez me prendre pour une folle Istanga non ? je ne sais pas pourquoi je vous raconte tout cela et ne sais pas davantage si vous accordez crédit à mes paroles qui ne sont que les prémices de faits bien plus marquants.
Je ne sais si je dois continuer...

ma réaction était stupide, Pardonnez moi!
peut être que je n'aurai pas du
Istanga
Mon oreille se fait plus attentive à mesure de l'histoire que me conte Isabeau. Elle sait me tenir en haleine, ce qui n'est pas donné à tout le monde, je dois bien l'avouer.

Hecate? Mon intérêt s'accroit encore. Je connais l'histoire de cette déesse de la lune, à laquelle bien des sorcières font appel. Il me semble qu'elle s'acoquine avec trois compagnes, qui punissent les crimes horribles, comme un parricide, par exemple.

Je ne puis m'empêcher de penser que le frère de Darius, mon beau-fils, aurait bien mérité d'avoir affaire à ces déesses pour l'assassinat de mon époux, plutôt que de m'être laissée aller à le venger moi-même.

Mais je ne puis parler de cela, seuls Dieu et mon confesseur pouvant l'entendre.

Aussi, repoussant l'image ensanglantée qui se présente à mes yeux, je m'efforce de sourire à Isabeau.


Je vous en prie, continuez, je dois savoir ce qui s'est passé, ou je passerai le reste de mon temps essayer de deviner...
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Dameisabeau
Non, elle n’aurait pas du, elle aurait du se taire, ces quelques révélations n’avaient servi au final, qu’à attiser la curiosité de son interlocutrice.
Cependant, elle devait bien se l’avouer, tout ce mystère qui entourait les ruines , l’avait , elle aussi tenu en haleine fort longtemps jusqu’à ce que sa curiosité la pousse à franchir le pas et qu’elle comprenne enfin qu’il est des endroits que l’on doit éviter si on veut rester en vie.

Elle n’avait plus le choix, il lui fallait continuer, la convaincre d’abandonner et de faire comme tous les habitants de cette ville, occulter cette région qui bordait la ville.

D’ailleurs, on ne savait même pas où la forêt aboutissait, ceux qui s’y étaient hasardés, soit , n’étaient plus là pour en témoigner, soit, comme elle, ne devaient leur salut qu’à leur instinct de survie et la protection du très haut.

Après avoir scruté le visage d’Istanga, elle ne distingue encore nulle crainte, nul frémissement dans ses traits et pourtant……
Elle continue donc son récit.


Cette nuit là , mes amis et moi sommes allés nous coucher , l’esprit perturbé , nos imaginations débordantes nous faisant envisager mille hypothèses, et comme si il était encore besoin de les alimenter, en cette nuit de pleine lune, nos pensées , soudainement , s’accompagnèrent de hurlement stridents , trouant le silence de la ville endormie.
Je me souviens que ma curiosité m’a fait alors bondir hors de ma couche et que bravant la nuit,
Je me suis alors engagée dans les ruelles de la ville ; au demeurant, étrangement forts désertées par les malandrins en tout genre.
J’étais terrifiée mais Il fallait que je sache.
Le cœur battant à tout rompre, mon corps et la pierre ne faisant presque qu’un, tant je m’aplatissais contre elles dans ma progression, bouclier impuissant de mes appréhensions, de mes peurs.


Elle s’arrête à nouveau de parler, ferme un instant les yeux , fouillant dans sa mémoire, à la recherche de chaque détail qui pourrait lui faire comprendre l’état d’esprit dans lequel elle se trouvait cette nuit là.

J’ai ainsi traversé tout le village, jusqu’à la dernière demeure , guidée par ces hurlements , par la clarté de la lune.
Et là, je les vis….du moins les ai distingués, parmi les ruines, la distance n’étant pas propice à la meilleure des visions, mais le vent d'Est m'étant favorable, j’ai bien reconnu des hurlements de chiens.
On aurait dit que tous les canidés, tête levée vers le ciel, s’étaient réunis pour rendre hommage à la lune pleine.

Autour d’eux, j’ai cru apercevoir des formes humaines qui formaient une ronde, silhouettes sombres qui accompagnaient chaque hurlement par une litanie qui me parvenait ourdie ; j’ai alors ressenti comme une grande vague de froid, comme celle qui vous glace les os , à l’aurore d’un matin de Décembre.

Malgré tout, tous mes sens étant en en alerte, je jurerai avoir entendu un pleur d’enfant, bref, très bref même mais qui dénotait dans cette perception des sons que j’avais à ce moment-là.
C’était comme si la réalité reprenait ses droits dans un monde irréel.

Tandis que je scrutais les ténèbres, une lumière est alors apparue à une des fenêtres de la demeure où j’étais accolée.
C’est là que j’ai vraiment repris conscience avec la réalité, et que jamais je n’aurai du entrevoir ce dont mes yeux et mes oreilles avaient été témoin.
La panique me submergea alors, et c’est à perdre haleine que, relevant jupons, j’ai traversé les ruelles pour me mettre hors de portée.
Je n’avais plus qu’une idée en tête, FUIR !


Elle ravale sa salive, repensant à ces instants oppressants qu’elle avait vécus et qui n’étaient pourtant encore rien, comparé à ce qui les attendait, elle et ses amis.
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Istanga
Le récit de Dame Isabeau me tient en haleine : elle a le sens de la mise en saynète et, au fur et à mesure de ses paroles, mon intérêt va grandissant. Je n'ai qu'une hâte, connaître la suite. Pourtant, elle s'arrête de parler, semble encore effrayée de ces instants du passé et je ne puis m'empêcher d'y aller de mon grain de sel :

Oh! Mais les chiens qui hurlent à la lune pleine, ce n'est rien!
Sans doute ont-ils flairé une meute de loups... et ce cercle que vous avez entraperçu, ce sont peut-être des sorciers, des sorcières, ou des prêtresses qui rendaient hommage à la lune...

Des aberrations de cette sorte sont monnaie courante, encore de nos jours.

Dans les pays que j'ai traversés, on parle de djinns, et la consigne est d'éviter les lieux où ils vivent, mais je me suis toujours moquée de ces superstitions et mes nombreuses tentatives pour en apercevoir se sont toutes soldées par un échec.

Mais.... n'avez-vous pas eu vous-même la curiosité de vous y rendre, pour vérifier ce que vos yeux ont cru voir, ce que vos oreilles ont cru entendre?

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Dameisabeau
Soupir désabusé en écoutant la réaction de la dame, dénie d’un hochement de tête.

Non ! à ce moment-là, je peux vous jurer que bien que bercée par les histoires de nos petits vieux, tout me portait à croire que ce que j’ai vu et entendu n’était pas du domaine de la superstition.
De plus, j’étais bien éveillée et je ne bois jamais, en dehors de tisanes, autre breuvage qui aurait pu influencer ma vision et mon jugement.
Tout ceci était bien réel et fortement étrange.

Le lendemain, ne pouvant garder ce lourd secret pour moi, j’en ai fait part à quelques-uns de mes amis proches.
Si certains, tout comme moi, ont fait le rapprochement avec les faits de la veille sur la grand place et es récits de nos conteurs, d’autres ont montré leur incrédulité, cherchant comme vous, des explications rationnelles.

Ils ont alors décidé de se rendre sur place, arguant, pour nous convaincre de les suivre, qu’il ne pouvait y avoir danger au grand jour.
C’est ce que je fis, non sans réticence, mais je voulais aussi en avoir le cœur net et espérais même fortement que ma frayeur de cette nuit-là n'était qu' irraisonnée.

Bien que jeune encore, je n’étais pas une couarde et je me suis dit que si ce que j’avais vu était bien le fait des hommes, il était préférable de prendre des précautions. C’est donc alors que, bien qu’encore apprentie sur le maniement des armes, j’ai suggéré de nous armer et c’est ainsi que nous avons pris le chemin des ruines, qui d'un bâton, qui d'une épée.


S'arrête un instant et se lève, traversée par une idée soudaine

Venez! la nuit n'est pas encore tombée, et ma voiture est juste là, allons à proximité de ce lieu maudit , ce sera la meilleure façon de vous plonger dans l'atmosphère.
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Istanga
Je l'écoute, qui tâche de me convaincre de l'existence d'une malédiction sur ces ruines et, à sa proposition de nous y rendre sur le champ, je laisse un long silence s'installer, durant lequel je la regarde pensivement, essayant d'aller au delà la sincérité qui y est écrite, réfléchissant aux possibles conséquences d'une sorte d'intrusion sur un domaine réservé. Oui, mais réservé par qui, par quoi? me dis-je 'in petto".

Au bout de cette longue réflexion, je lâche un grand sourire et lui réponds.

Dame, j'accepte votre proposition et, si vous avez raison, les armes conventionnelles seront inutiles mais, dans mon sac qui ne me quitte jamais, j'ai quelques talismans venus du fond des âges, qu'un vieil anachorète persan m'a confiés pour me protéger des dangers surnaturels que je pourrais rencontrer sur ma route.
Je ne m'en suis jamais servie, mais ils m'aident à surmonter les craintes superstitieuses qui pourraient m'atteindre...
Partons donc, démêlons ce mystère!

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