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[RP] De la roulotte à l'hacienda

--Joaquim


Un soir, dans la région du Minho au Portugal, région frontalière de la Galice.
Un homme d’âge mur, assis une plume à la main, est penché sur un parchemin.
L’homme, grand gaillard aussi fort qu’un ours, les cheveux blancs coupés à la brosse, de longues moustaches tout aussi blanches et une barbe de trois jours rédige une missive.
L’air sévère, il se tient les côtes.
Malgré sa carrure imposante il semble très marqué par la douleur.


Lettre à mon fils Rodrigo don Setubal,

Moi, Dom Joaquim Joao Do Setubal do Minho, je te réclame mon fils. Malgré nos différents, nos brouilles, il est temps pour toi de venir retrouver ton pauvre père qui te réclame.
Hâte-toi mon fils !
Sinon, il se pourrait que tu arrives trop tard.
J’ai, je dois le dire, une santé de fer. Mais devant les derniers évènements, je me demande si ma dernière n’est pas arrivée. Il est vrai que ma retraite sur mes terres m’a rouillée.
Moi, qui aie servi mon pays. Moi un bâtard de feu notre roi Jean. Me voici minable, bloqué sur une chaise à me faire torcher par des laquais.

Peste soit sur la vieillesse !

Mon fils, il faut que tu saches qu’avant ta naissance moi aussi j’ai parcouru les routes, fais des guerres, et même si cela peut te surprendre j’ai brigandé.
Je t’ai négligé, et ignoré mais il arrive un âge où les fautes appellent à être réparées.
Je dois te confesser que ma vie n’a pas été toujours aussi tranquille et champêtre qu’aujourd’hui.

J’ai connu la guerre et les champs de bataille. J’ai même pris une fois une nef pour me rendre sur un lieu de conquête. Tu vois l’appel du large est dans nos veines, fils !
Certes tu es le premier notonier, mais tu n’es pas le premier de la famille à navier.

Même si je hais tous ces sacs à foutres de grands nobles et de courtisans, j’ai servi mon roi et mon pays. Il est vrai que je me suis fourvoyé avec un homme que l’on surnommé l'Empereur des brigands ou l'Écorcheur. Nous avons mis à feu et à sang une grande partie du royaume de France.
Notre compagnie de brigandage était puissante, avec elle nous avons connus de nombreuses batailles. Hélas, et je me repends… nous avons également perpétré nombre d’actes répréhensibles :
pillages, massacres, viols, enlèvements, buchers, tortures, oui j’ai participé à tous ça !
Les rançons, les ripailles, les tueries, les catins étaient mon quotidien.

Nous avons changé plusieurs fois de camps dans les guerres qui ravageaient le royaume, servant tour à tour la Bourgogne, la Savoie, le Dauphiné, le Bourbonnais et les trahissant tous dès que l’argent manqué. On s’est également distingué en infligeant une raclée aux fourriers du roi de France.

J’étais un des lieutenants du chef de cette armée. Il s’appelait Rodrigue, tu devineras d’où te vient ton prénom. D’origine espagnole, notre capitaine voulait revoir son pays. C’est un castillan, quelle ironie, moi qui est combattu la castille dans ma jeunesse ! Me voici au service d’un de leur plus fameux capitaine ; héritant au passage de mon surnom d’Arminho en l’honneur de ma région le Minho et de mon caractère aussi teigneux qu’une hermine.

Imagine, cette troupe hétéroclite se déplaçant et ne laissant rien debout après son passage. Les « Attila » médiévaux n’avaient aucune pitié. Ces mercenaires sanguinaires de toutes nationalités ne connaissaient nul repenti.
Imagine, ce mélange d’angloys, castillans, français, espagnols, portugais, savoyards, lorrains, bretons, bourguignons, francs-comtois, et j’en passe. Notre unique patrie était la brigande. Est-ce pour l’argent ou le combat ?

Nuls châteaux, bastides, ou places fortes ne résistaient, nous entrainant sans cesse vers l’euphorie de la victoire. Nous étions grisés par tant de réussites.
Nous avons terrorisé le sud, et traversé les Pyrénées. Notre capitaine a rejoint la Castille et s’est rangé. J’en ai fait pareil. Il mène à présent une vie de reclus. On m’a rapporté qu’il était gravement malade. On dirait que nous sommes maudits et que nos crimes nous rattrapent.

Je me suis donc retiré sur mes terres. Je me suis repenti depuis cette époque, grâce à ta mère. Tu es né sur une de mes propriétés à Setubal.
Tu hériteras de toutes ces terres à ma morte. : une partie du Minho, Setubal, Braga et quelques arpents de terre dans le Tras-Os-Montes.

Je t’écris cette confession pour le salut de mon âme. Mais ce qui m’importe le plus est d’être en paix avec toi.
Tant d’années d’absence, tes combats, tes aventures je veux que tu me contes tout.

Et n’oublie pas Isabella !
Le mariage est encore d’actualité.

Il faut maintenant que je t’explique pourquoi ce désir soudain de te voir et de me confesser. J’ai défendu la vie de ta belle contre une bande de brigands amateurs. Je l’escortais jusqu’à ses parents. Lors d’un arrêt dans une taverne, trois gredins nous ont attaqués, voulant nous détrousser et certainement abuser de l’honneur de ta promise. J’en ai retenu deux, serrant leur tête sous mes bras. Par contre le troisième larron m’a brisé les reins avec un tabouret. Sous la douleur de mille poignards, j’ai brisé la nuque des deux jeunes freluquets. Le dernier a été abattu par mon écuyer.
Seul face contre terre j’ai cru ma dernière heure arrivée, ce n’est que partie remise. Je crains de sentir à nouveau le souffle fétide de la morte.
Je voudrais me racheter de mes crimes et faire une bonne œuvre avant de rejoindre les enfers.
Les excès de madère ou de vin de porto ne m’apportent la tranquillité de l’esprit que quelques heures. Les parents d’Isabella ont contracté une dette envers moi. Le mariage pourra se faire quand tu le souhaiteras. Rapidement j’espère !
Je ne sais pas si je me remettrais de mes blessures.

Ce mariage est un gage d’avenir radieux pour toi. Je te le jure sur le sceau de notre famille. Ce sceau sacré que je garde en sureté.

Une dernière fois, Rodrigo j’implore ta visite.

Mon fils que ton voyage soit sans danger.



Dom Joaquim Joao Do Setubal do Minho dit Arminho



Le vieil homme posa sa plume, soufflant sur le parchemin. Il fit fondre un peu de cire et appuya fortement le sceau où figuraient ses armoiries.

Il appela un page :
Mon fils se trouve à Paris, à la cour des miracles. Retrouve-le ! Remet lui cette missive !
Inutile de revenir si tu ne le trouves pas !



L’ancien était craint de ses serviteurs. Il était aussi doux et aimable qu’un ours affamé.



Borne RP rajoutée par Milo
--Malika


A quelque temps de là........

Par la fenêtre de la roulotte, la clarté lumineuse du soleil, or et rose, a pris la place de la douceur lactée de la nuit. Malika se serre contre le jeune officier, écoutant son souffle profond et lent. Elle n’ose pas bouger pour ne pas rompre le charme, et pour prolonger cet instant de bonheur.

Même Igor pour ses joyeux combats a trouvé un partenaire à sa hauteur.

De baisers en caresses, de passion en tendresse, de sourires en fous rires, il est déjà l’heure de se lever.

Tourrrrrrne toi mon coeurrrr ! Je dois me changer, puisque tu veux aller à ton Hostellerie chercher ton sac.

Le sourire aux lèvres, elle se détourne, et commence à enlever sa chemise blanche. Elle se retrouve nue, et une bassine d’eau est là, une éponge qu’elle a ramenée d’Italie aussi.
Elle frotte doucement son corps, l’eau ruisselle entre ses seins et sur ses hanches rondes.

Elle aperçoit le regard amusé de Rodrigo, elle est fière de sa beauté, elle est fière qu’il la désire, elle est heureuse la petite gitane.

Non ! Ne me regarrrrrrde pas comme ça !
Un grand éclat de rire fait suite à cette réflexion pas tout à fait honnête.
Il lui tend un drap de coton et l’enroule autour de son corps , un baiser dans le cou, un autre… C’est vraiment un homme merveilleux.

Elle se détourne et prend dans une male une chemise brodée, un corselet de velours noir, une jupe rouge, flamboyante comme son amour pour Rodrigo ! Elle est gitane et peut sortir en « cheveux » , comme les catins, nul besoin de bonnet sur sa tignasse dorée. Elle prend une cape noire et s’enroule dedans.
Rodrigo à remis son uniforme, elle le regarde avec admiration.

Igorrrrr ? tu garrrdes, nous serrrons de retourrr ce soirrr ! Elle lui donne le reste de la miche de pain, pendant que Rodrigo donne du fourrage à Terra. Rolio saute joyeux sur son épaule.
Ils sortent de la roulotte, le froid est vif, mais la journée radieuse, les bois alentour sont comme figés par le froid, et, main dans la main, ils quittent le campement pour se rendre aux portes de Paris. Il faut encore traverser les ruelles des miracles, et, ça et là ils s’arrêtent pour échanger des je t’aime et des baisers.
En fin de matinée, ils arrivent vers les halles de Paris, Rolio à déjà fait son travail de chenapan, et c’est en croquant chacun une pomme chapardée qu’ils arrivent devant une porte cochère de belle dimension. La cour est grande, un puits en son centre, à gauche des écuries, à droite un lavoir, et le corps du bâtiment impressionne Malika. Jusque là elle n’avait jamais osé s’approcher des riches demeures, des murs à colombages, et des fenêtres couvertes de petits vitraux colorés. Arrivés à la porte, elle est intimidée et n’ose pas entrer.
Va !va !mon coeurrrr ! Je t’attends dehorrrs.

En chantonnant , elle va s’asseoir sur la margelle du puits, elle le regarde entrer dans l’hostellerie, et la porte se referme derrière lui.



--Rodrigo



La traversée des beaux quartiers, au bras de la jeune gitane, est particulièrement charmante. Deux mondes contigus, mais tellement opposés, les entourent l’un après l’autre. D’un côté ce florilège de bâtisses somptueuses, et de l’autre la fange des miracles … La mignonne est émerveillée par le luxe et la taille imposante des demeures bourgeoises, et elle pousse des « Oh » et des « Ah » admiratifs devant les vastes propriétés entretenues avec soin. La plus modeste d’entre elles, il est vrai, abriterait sans mal la moitié de sa nombreuse famille de fils du vent et de la plaine, dont les seuls domiciles connus sont ces roulottes anciennes qui cahotent à travers la campagne.

Amusé, sous le charme, une fois de plus, il dévisage la douce enfant qui s’extasie un peu plus à chaque pas. Et tout est prétexte à la serrer entre ses bras et à poser ses lèvres gourmandes sur son adorable minois. Ils flânent comme deux gosses insouciants. Ici, ils sourient à l’image cocasse que leur renvoie une vitrine de modiste, devant laquelle ils se font mille grimaces avant d’échanger un baiser interminable. Ce clocher, là-bas, par dessus les toits, tel un grand mât de caravelle dressé vers le ciel d’or et d’azur, il le lui montre en la soulevant légèrement par la taille et en lui bécotant le cou, sous les boucles blondes qu’elle secoue en riant de plus belle.

Tu étais bien loin de t’imaginer, Rodrigo, toi le fils d’une noble lignée, que cette délicieuse enfant de Bohème allait te faire perdre la tête, à la vitesse folle de ces tempêtes tropicales qui surgissent soudain au milieu de l’océan, et se nourrissent des vagues impétueuses.

Voilà, de trottoirs en ruelles, et de rires en câlins, ils parviennent face à l’hostellerie où Rodrigo a posé ses bottes et son baluchon à son arrivée à Paris. Ce n’est pas la plus luxueuse, loin de là, mais elle est calme et accueillante, et la Seine y étale ses méandres paresseux sous les fenêtres et le balconnet où il fait bon s’accouder, le soir.

Intimidée, Malika reste dans la venelle, adossée à un puits creusé sous les arbres. Le bel officier n’insiste pas, il sait se montrer patient. Il faut laisser le temps au temps pour que leurs corps se conjuguent et se découvrent parfaitement. Une petite sieste canaille ne lui aurait pas déplu, cependant. Hop, il grimpe les escaliers quatre à quatre, malgré sa hanche douloureuse, et se hâte de rassembler ses bagages. Bien-sûr, la couchette de la roulotte de Malika n’offre pas le même confort que le lit moelleux de cette chambre, mais les nuits entre les bras de la belle gitane sont la promesse d’heures merveilleuses.

Déjà prêt, Rodrigo se dirige vers le petit bureau de l’hôtelier, afin de lui faire part de son départ imminent et de régler sa note. Le brave homme l’écoute, lui souhaite bonne chance pour la suite de son séjour, puis lui tend une lettre déposée par un messager à l’accent étranger, lui explique t’il. Le jeune officier a reconnu les armoiries et s’empresse de lire en rejoignant Malika. Des nouvelles de son père, c’est plutôt surprenant, ça … l’atmosphère entre eux était plutôt tendue lorsqu’il a hissé les voiles de son trois-mâts, puis lorsqu’il a décidé de passer sa convalescence à Paris après ce coup d’épée dans le dos. Rodrigo débouche dans la ruelle, agitant le parchemin, puis tendant la missive à Malika.

Regarde, ma gitane, j’ai reçu un courrier de mon père. Il réclame ma présence dès que possible. Bien-sûr, pas question que je quitte Paris sans toi ! Tiens, amor, lis cette lettre, je n’ai pas de secrets pour toi. Il y aura sans doute certains points à éclaircir, pose moi toutes les questions que tu veux, mon ange.

--Malika


Malika prend le parchemin que Rodrigo lui tend, et lit la missive du père de Rodrigo.
Oui elle voit que le vieil homme est souffrant, qu’après quelques confessions sur son passé il souhaite que son fils revienne, qu’il veut que, que ?……….Un mariage ? Un mariage arrangé de longue date, et le jeune homme ne lui en a pas parlé ?

Son sang ne fait qu’un tour ! Ses joues s’empourprent, ses tempes battent, sa gorge se serre.
Rodrigo ébahi la regarde aller et venir, les cheveux en bataille, les poings sur les hanches.
Elle fait les cent pas la missive à la main, la colère s’empare d’elle, ses yeux sont devenus plus sombres, menaçants, elle invective le jeune homme !
Une màtka, une màtka ( fiancée) là bas au Portugal, qui t’attend ? Une fiancée choisie par ta ‘Ayala ! ( famille)
Ki ez az ember ?( qui est cette personne ? )

Dans sa colère elle mélange sa langue maternelle et paternelle, elle enrage, comment peut-il penser qu’elle va le suivre alors qu’il va être zawaja ( marié)
Tu ne veux pas quitter Parrris sans moi ?
Et pourrrquoi ? Que je me dessèche ? Que je perrrde ma beauté ? Dans l’ombrrrre de ton nej (épouse)?

Elle se voit déjà à attendre le bon vouloir de son aimé, attendre pour ses caresses, attendre pour sa tendresse, le savoir tous les soirs dans la couche de cette « Isabella » ! Non jamais elle ne l’acceptera, même si elle doit l’attendre dans un palato ( palais), elle n’est pas faite pour l’ombre, Malika, mais pour la lumière, le soleil, les plaisirs partagés, la vie !

Rodrigo fait un pas vers elle, essaie de l’enlacer, de ses poings serrés elle martèle sa poitrine, elle a l’air d’un magnifique coq de combat aux si belles couleurs ! Sa main se referme sur sa dague d’argent.

Ne t’apprrroches pas de moi !Parancsnok(Capitaine) Je ne serrrai pas ta szeretö ( maîtresse).Tu ne me garderas pas enfermée et cachée dans l’àrny ( ombre) pourr parrrader avec une autrrre !

De le voir là devant elle, désemparé, silencieux, sa colère retombe et un immense chagrin la submerge et commence à noyer son regard .
Non, il ne la verra pas pleurer, elle se détourne et part droit devant elle, les berges de la Seine ne sont pas éloignées, elle court, court, elle veut se cacher, mais quelle sotte de croire que ce bel officier pouvait la voir autrement qu’en une jolie distraction.
Arrivée au bord de l’eau, elle s’assied au pied d’un grand arbre dénudé. Enroulée dans sa cape elle se laisse alors aller à sa peine, repense aux instants délicieux passés avec lui, le respect, la tendresse, qu’il lui témoignait.
Elle l’aurait suivi au bout du monde, abandonnant ses traditions pour lui, sur la terre et les océans qu’il aimait tant. Elle s’imagina un instant dans ses bras enveloppants, sur le pont ciré d’un navire, accoudés au bastingage, à admirer les étoiles dont les noms dansaient dans sa tête, Cassiopé, Aldébaran…..

--Joaquim


Alité depuis quelques jours, le seigneur du Minho se morfondait. Depuis que son serviteur était parti à la recherche de son fils, il n’avait toujours pas eu de nouvelles.

Bien sur, il était encore trop tôt pour que le messager ait eu le temps d’accomplir sa tâche, mais l’inaction rendait le vieil homme irascible. Tous ses suivants en prenaient pour leur grade.
Un pot de chambre qui vole, des insultes qui fusent ; les accès de furie du maître sont phénoménaux.

Le rustre seigneur n’admet aucune remarque. Les apothicaires qui défilent devant son lit en font l’amère expérience. Seule la noble Philippa, son épouse est épargnée par l’ire du « mourant ».

Après plusieurs onguents, baumes, décoctions, l’état de santé semble évoluer vers la guérison.
Dame Philippa tient de suite à féliciter les médecins.
Mais ceux-ci à l’exception d’un seul d’entre eux avoue leur inefficacité.
« Votre mari est une force de la nature assurent les apothicaires, un véritable chêne, il est indéracinable. Le jour funeste de sa disparition n’est point encore arrivé, mais nous ne sommes pour rien dans sa guérison. »

Quid de ce médecin, qui ne se dit pas étranger à la guérison de son seigneur.
Un fou présomptueux penserait-on.
Que nenni ! Il n’a cure des séances de colère d’Arminho, et pour cause, Il s’agit d’un vieil ami de Joaquim, un ami d’enfance.
Rodolfo était le fils du forgeron du château. Le jeune Arminho courait la campagne et les forêts avec lui.
Arminho a été élevé par un petit noble à qui on l’avait confié.
L’absence de son père véritable lui avait donné un caractère indépendant, revêche, et aventureux.
Dès son plus jeune âge il exécrait les règles. Elles lui semblaient bonnes uniquement quand ces dernières lui étaient profitables, sinon il les reniait.
Alors jouer et se lier d’amitié avec un fils du peuple, quoi de plus révoltant pour les nobliaux qui tentaient de l’élever. C’était un prétexte suffisant pour le petit bâtard.

Arminho faisait déjà preuve de colères mémorables. De quoi se mêle t-ils ses petits nobles ? Comment osent-ils donner des ordres à un fils de roi ? Un bâtard, peut être, mais de sang royal.
Les punitions, les privations, les réprimandes, les harcèlements, n’ont fait que renforcer ce tempérament tempétueux.

Les fugues et les aventures vécus avec son ami Rodolfo lui seront d’un grand réconfort. C’est pourquoi l’amitié entre ces deux là n’est pas un vain mot. Les deux gamins vécurent mille aventures, mille déconvenues et mille sévices. Ils grandirent ensemble, apprenant l’un de l’autre. Puis Arminho, devenu jeune homme parti faire la guerre. Grâce à l’appuie de son noble ami, Rodolfo pu recevoir l’enseignement de grands médecins. Mais les deux jeunes gens se perdirent de vue.
Pourtant à chacune de leur entrevue, les deux amis ne perdaient rien de leur complicité.
Rodolfo était le seul qui pouvait tenir tête à Joaquim sans prendre le risque d’essuyer sa colère ou pire un mauvais coup.

Arminho n’a jamais estimé la vie recluse et superficielle des courtisans. Pour lui la vie ne vaut d’être vécue qu’à l’air libre, la nuit à la belle étoile ou sous une tente, et une épée à la main.
Alors régir des terres c’était la pire des punitions.

Rodolfo affirma à dame Philippa qu’il était le seul et l’unique artisan de la guérison du seigneur Joaquim. Elle ne douta aucunement de ses dires, en effet, il était considéré comme l’un des plus grands guérisseurs du royaume. Certains affirment d’ailleurs qu’il serait également sorcier !
Un trait de caractère qui ne serait pas sans déplaire à Arminho.
Décidément, ce n’est pas surprenant que ces deux personnages soient liés de la sorte.

Rodolfo prédit à l’épouse de son ami que la prochaine étape serait la convalescence, et qu’il s’installerait au château jusqu’à son rétablissement complet.
Cela inquiétait quelque peu la châtelaine… On annonçait la visite de sa future belle famille… Une alliance importante selon elle… La présence d’un être comme ce sorcier pouvait faire échouer son projet. Elle œuvrera pour la réussite de ce mariage entre son fils Rodrigo et Isabella.
--Rodrigo



Bon sang, tu n’es vraiment qu’un âne bâté, mon pauvre Rodrigo ! Comment as tu pu montrer cette lettre à Malika sans rien lui expliquer au préalable ? Tu devais bien te douter qu’elle n’allait pas rester sans réagir, sans éclater ! Elle est le feu et la foudre, cette enfant, et toi tu n’es vraiment qu’un triple idiot !

Tout en ruminant ces amères pensées et en regrettant les dégâts causés par son attitude irréfléchie, Rodrigo se lance à la recherche de Malika. Elle a pris la direction du fleuve, qui serpente au bout de la venelle. Elle n’a pas pu aller bien loin. Inquiet et penaud, le jeune officier disparaît également dans la végétation indisciplinée ombrageant les rives de la Seine. Oh oui, il avait imaginé une après-midi romantique, par exemple une longue promenade en amoureux, plutôt que cette poursuite parmi ces arbres recourbés, caressant la surface limpide de l’eau de leurs branches les plus basses. Cependant, tout espoir n’est peut-être pas perdu. Il va faire son mea-culpa le plus loyal, le plus sincère, et elle comprendra. Elle lui pardonnera.

Et soudain la voilà, silhouette délicate prostrée sous un tronc vermoulu. Petit oiseau blessé. Et maintenant, comment rafistoler les morceaux, comment remédier à cet affreux malentendu ? Cette fois-ci, tu dois absolument trouver les mots, Rodrigo !

Il s’agenouille face à elle, lui prend les mains, la dévisage longuement. La colère a quitté les yeux de la belle gitane, mais toute la misère du monde semble s’être abattue sur ses frêles épaules. Rodrigo se sent coupable, le seul coupable. Les larmes de Malika lui font très mal.

Je suis désolé, amor. Mais fais moi confiance, je vais te dire toute la vérité. Je connais Isabella depuis que je suis gosse. Nos deux familles ont toujours été très proches, et leurs domaines sont limitrophes. Leurs intérêts sont communs. Notre mariage a ainsi été réglé de longue date. Il évitera que les deux propriétés soient morcelées au fil du temps. Et je me suis laissé mener par le bout du nez, je n’ai pas voulu me heurter de front à la volonté de mes parents, sans doute par facilité, par nonchalance, voire même par lâcheté.

Il a libéré les petits doigts de Malika, caresse doucement sa joue, lui prend délicatement le menton pour que leurs regards se croisent et se pénètrent de façon indissoluble. Pour que les doutes s’évanouissent.

Mais tout ça c’était avant, ma douce. Avant toi. Avant nous. Cet arrangement n’existe plus pour moi, désormais. Bien-sûr je suis inquiet pour la santé de mon père, mais il est fort comme un ours, je suis certain qu’il sera vite sur pieds. Mais je veux avant tout t’emmener sur mes terres, amor, et te présenter à ma famille. Ils comprendront que tu es la seule qui compte à mes yeux. Il y aura certainement quelques grincements de dents, mais en définitive tout s’arrangera, tu peux me croire, trésor. Allez, souris moi et pardonne moi ma maladresse. Nous avons beaucoup de choses à préparer avant le départ …

--Malika



Ses larmes séchées, elle relève la tête vers lui. Un pâle sourire aux lèvres, elle l’écoute longuement, il tient ses mains dans les siennes, ou la berce tendrement en la tenant par les épaules.
Evidemment, elle comprend et comment ne pas lui pardonner avec les douces paroles criantes de vérité qu’il lui a dites.

Malika comprend d’autant mieux, qu’elle-même a fui aidée par sa Grand-mère qui lui avait procuré une roulotte. Une presque enfant ne pouvait pas en avoir une a elle, un cheval et quelque argent pour qu’elle échappe à l’aube de ses quinze ans, au mariage arrangé par sa famille et le chef de la tribu voisine, ventripotent et édenté, de trente ans son ainé.

C’est le cœur serré, qu’une nuit elle a pris la route, quittant les vertes collines de Budapest, la douceur des courbes du Danube, sa famille, ses amis, sa tribu, pour aller vers Paris au « campement des fils du vent » retrouver un cousin un peu rebelle qui acceptera de l’aider , elle qui avait osé ne pas suivre ni accepter les règles établies depuis des siècles.
Mais à son arrivée, elle n’avait trouvé que ruines et désolation, un incendie ayant tout dévasté.
Que la peste soit sur ces parents qui sacrifient le bonheur de leurs enfants à leurs intérêts, qu’ils soient nobles, commerçants, paysans ou gitans.

Les mots qu’il lui disait dansaient dans sa tête « Fais moi confiance….Avant toi avant nous… Nous avons beaucoup de choses à préparer avant le départ… »

Elle se relève , lui prend la main se hisse sur la pointe des pieds ils échangent un long baiser rempli de tendresse. Oui !viens, retourrrrnons à la rrroulotte, je veux prrrendre un balluchon. Nous partirrrons à cheval, Terrra est un bon courrrsier, Igorrr à l’habitude de courrirrr les rroutes, nous allons chez toi….


--Joaquim




L’arrivée des beaux parents de Rodrigo allaient coïncider avec le rétablissement du seigneur du Minho.
La convalescence sous la bienveillance de son ami Rodolfo « l’apothicaire-sorcier » se déroulait sous les meilleurs hospices. Grace aux onguents, aux cataplasmes, et aux décoctions de ce médecin, le blessé se sentait mieux chaque jour. Les mains brulantes de Rodolfo lui faisaient un bien fou, comme une régénération… Bientôt, il se sentirait plus en forme que lors de ses 20 ans…
Le grand gaillard pouvait maintenant se lever et faire quelques pas.

La visite des parents d’Isabella n’était pas spécialement une bonne nouvelle pour Joaquim. Certes, l’alliance avec cette famille voisine offrait une bonne perspective d’avenir, et donnerait à Rodrigo une place importance au sein du royaume.
Même si une vieille rivalité animait les deux voisins, il faut avouer que la perspective d’unir les terres de tout le nord du royaume était alléchante.
Arminho connaissait bien le futur beau père de son fils, ils n’avaient que quelques mois d’écart. Il n’avait aucune estime pour ce couard. Les deux jeunes seigneurs se battaient au bâton lorsqu’ils étaient jeunes. Joaquim le battait à chaque fois lors des joutes ou tournois de la région.
A chaque fois ! Sauf, lors de l’anniversaire du roi. A cette occasion, des festivités étaient organisées dans chaque région. Des bateleurs, des montreurs d’ours, des troubadours, des bonimenteurs, faisaient leurs apparitions, des spectacles de toutes sortes se montaient ; et les tournois étaient le clou de toutes ces réjouissances.
Les plus jeunes nobles s’affrontaient au bâton. Evidemment, Arminho était le premier inscrit. Il n’aurait pour rien au monde, manqué la moindre occasion de montrer sa puissance et son habileté dans les épreuves de forces.
L’année qui nous intéresse, voyait notre jeune coq entrer dans sa dixième année, il arriva bien entendu dans le final de ces joutes. Il était opposé à ce fourbe de Diogo (futur beau père de Rodrigo). Les deux enfants se connaissaient bien. Joaquim ne fit qu’une bouchée de son adversaire, ne laissant aucune place au suspense. En trois coups de bâton, il avait humilié son camarade de combat. Ce dernier au sol, la pommette en sang fulminait de voir le seigneur du Minho et du Tras Os Montes récoltait le fruit de sa victoire. Il attendit qu’il se retourne pour lui asséner un violent coup à la tête. Joaquim en garda une rancœur et une cicatrice au cuir chevelu. Le jeune Diogo fut déclaré vainqueur sous les huées des spectateurs, en effet, le tuteur qui servait de père adoptif à Joaquim, était moins bien puissant que le père de son rival. Le préjudice ne fut pas oublié, même si Arminho mettait régulièrement une raclée à son voisin lors de chaque rencontre.
Le ressentiment était grand envers ce couard de Diogo, et la haine encore plus grande envers son père adoptif qui ne fit aucune protestation et aucune réclamation.
La rancune tenace du fils envers le père-tuteur ne fut jamais réglée. Pourtant, tous les vieux de la région se rappellent le jour ou un jeune fils a coupé la main de son paternel lors d’un combat mémorable.
Cette année-là, Arminho qui commençait à avoir du poil au menton, reçut au nom du roi, son père biologique toutes les terres qu’il gouverne encore à l’heure actuelle. Pour fêter cet évènement et devant le roi, de grandes réjouissances durèrent plusieurs jours. Le tournoi traditionnel était en l’occurrence attendu de tous.
Comme on pouvait s’y attendre, le nouveau seigneur de ces terres, gagna haut la main, surclassant tous ses adversaires. Le final de ce tournoi ne figure guère dans les mémoires, c’est un autre affrontement qui enchante les légendes d’aujourd’hui. C’est le deuxième ou troisième combat de la journée qui allait être le centre de toutes les discussions pendant des mois. Celui-ci voyait Arminho combattre son père adoptif. Fidèle à son habitude, le jeune guerrier, ne fit que quelques mouvements pour venir à bout de sa victime, mais cette fois-ci, il trancha net la main de son compétiteur.
La scène eut le don de faire sourire le roi.
Le père adoptif déchu de sa tutelle l’était également de son honneur.
Arminho regardait la main qui l’avait si souvent puni, elle n’était plus qu’un membre ensanglanté inerte à ses pieds. Ce jour-là, il ne jeta même pas un regard, qu’il soit de mépris ou de complaisance à ce petit noble qui l’avait élevé. Mal soigné, le pauvre hère mourra quelques jours après.

Tous ces souvenirs remontaient à la surface. Pourquoi ceux-là ?
L’idée de marier son fils à la fille de ce fourbe, de ce bougre de sodomite de Diogo fit remonter la rage et la hargne qui l’animait depuis toujours.

S’adressant à Rodolfo, il lui demanda s’il se souvenait lui aussi de tous ces épisodes. Suite à la réponse affirmative de son guérisseur, il se mit à deviser de ses états d’âmes.
- Partager les mêmes petits enfants avec cette famille de pleutres, est insupportable.
Ce dégénéré ferait mieux de faire trousser sa fille par un brigand de la bande des écorcheurs.
Dire que j’ai failli me faire trucider pour cette donzelle. J’aurais du moi-même m’offrir son hymen.

Partant dans un rire gras et paillard. Le maître des lieux et son comparse échangèrent quelques grivoiseries.


--Rodrigo



Non, finalement il n’a pas trouvé les mots qui convenaient le mieux pour convaincre la jeune gitane. Ces mots, il n’a pas dû les chercher, ils se sont imposés d’eux-mêmes. Dans son monde en vase clos, son monde de courbettes et de sophistication retorse, jamais il n’a été aussi sincère. Jamais il n’a mis son cœur à nu de cette manière. Jamais il n’a aimé autant. Jamais il n’a aimé auparavant, tout simplement.

Et le baiser qu’ils échangent constitue déjà le signal du départ. Rodrigo en réclame d’ailleurs un second, pour être bien certain d’avoir tout compris. Lorsqu’on naît coquin, on ne se refait pas. Le jeune officier éprouve bien du mal à libérer le corps souple et ferme qui s’abandonne à ses caresses. Il le serre étroitement, comme si une horde de démons voulait l’arracher à lui. Malgré ses paroles rassurantes, apaisantes, craindrait-il inconsciemment que leur séjour au Portugal soit parsemé d’obstacles et de tromperies. L’arrivée de la superbe fleur de Bohème, pendue à son cou, va inévitablement créer des tensions avec sa famille et avec la belle Isabella, prétentieuse et fourbe, capable des pires bassesses pour arriver à ses fins et pour lui passer la bague au doigt. Il la connaît par cœur, son ancienne promise, séduisante plante carnivore capable de déchiqueter ses proies sans sourciller. Impitoyablement.

Bon ! Rien ne sert d’imaginer déjà le pire ! L’affection et la compréhension de ses parents arrangeront peut-être les choses au mieux. Exceptionnellement, ils vont peut-être mettre de côté cet orgueil, ce désir de consolider leur suprématie dans leur région natale, ce qui les caractérise depuis plusieurs générations. Bof ! Rodrigo ne miserait cependant pas un seul écu sur cette hypothèse. Mais chaque chose en son temps ! D’abord les préparatifs du voyage.

Un court instant, il a imaginé qu’ils pourraient effectuer ce long trajet en roulotte, mais non, mon dieu non, ça leur demanderait des semaines pour parvenir à l’hacienda familiale. A cheval, c’est l’unique solution. Par ailleurs, le temps d’atteindre un port et d’embarquer sur un bateau faisant route vers le Portugal, ils seront loin. Inutile d’envisager cette possibilité.

Un deuxième cheval ! Mais où s’adresser ? Ils ne connaissent personne dans ces beaux quartiers. Malika trouve la solution. L’hôtelier. Effectivement, le brave homme leur procure les coordonnées d’un maquignon de ses amis, qui, contrairement à ses congénères peu scrupuleux, ne fera pas passer une carne famélique pour un impétueux pur-sang. En route, donc. Une bourse bedonnante change de main, et les voici propriétaires d’une monture de qualité, assurément digne de leur confiance et de leurs écus.

A présent le baluchon de la belle gitane. Ils regagnent rapidement le campement et la roulotte, tendrement enlacés sur leur nouvelle monture. Au loin, le tonnerre gronde. Mais non ce n’est pas un mauvais présage ! Les voilà sur place. Rolio dégringole de l’épaule de Malika et s’en va narguer le fidèle Igor. Après un coup d’œil circulaire, Rodrigo chuchote.

Mon petit cœur, n’oublie pas d’enlever les escarcelles de leur cachette. On en aura peut-être besoin en cours de voyage. Quant à la roulotte, bah je me pose des questions. Dans quel état la retrouverons nous à notre retour ? D’ailleurs, reviendrons nous ici un jour ?

--Malika


Le dos bien calé sur la poitrine de Rodrigo, la tête au creux de son épaule, enroulée dans sa cape, serrée dans ses bras, Malika se laisse porter par la magnifique monture qu’il vient d’acquérir. L’étalon à une magnifique robe brune, presque noire, l’œil est vif, les membres nerveux, il sera endurant pour le voyage qu’ils doivent entreprendre. Elle sera longue, la traversée de la France, les bêtes doivent être robustes pour passer les cols des Pyrénées et continuer après jusqu’au Portugal.

Le retour au campement se fait sans encombres ni mauvaises rencontres. La nuit d’hiver couvre d’un coup la grisaille du soir, l’orage gronde au loin et quelques gouttes commencent à tomber.
Igor les voit arriver de loin, ivre de joie il se tortille en les accueillant. Malika se laisse glisser du fier destrier pour ouvrir la barrière de l’enclos ou Terra mâchouille une botte de foin, il passe sa tête par-dessus la barrière pour regarder le nouvel arrivant.Avec douceur elle lui caresse le museau duveteux et si doux et souffle à son oreille inquiète
Hé oui mon bel ami ,il va falloirrr parrtager maintenant !
Un ou deux hennissements et il retourne paisiblement à son activité. Ils mettent les deux montures bien à l’abri, il peut pleuvoir ou geler à pierres fendre, les deux chevaux ne risqueront rien.
Assis près du feu que Rodrigo a réanimé, ils partagent en bavardant gaiement un conil qu’ils ont fait griller. Elle avait posé un collet au petit matin, et la pauvre petite bête s’y était prise, ce qui leur permettait d’apaiser leur faim.
Un coup de tonnerre plus fort que les autres, les nuages se déchirent et laisse tomber une pluie épaisse. Ils se précipitent en riant dans la roulotte. Ils sont trempés, ils se regardent avec passion, échangent un très long baiser, Rodrigo la serre contre lui, défait son corselet, elle s’accroche à lui, déboutonne sa vareuse, ouvre sa chemise avec maladresse.

Une pensée fugace, cette nuit horrible où, dans une ruelle des miracles, les trois soudards se sont jetés sur elle ….. Mais non elle ne veut plus y penser, Rodrigo est doux lui, patient, aimant, pour la première fois elle brûle de désir pour un homme et veut être sienne.
Elle le pousse délicatement vers la couche, se déshabille, laissant tomber ses vêtements, un par un sur le parquet, et c’est nue, et somptueuse, qu’elle lui apparaît au milieu des flammes mouvantes et dorées des chandelles.
Dràgàm(mon chéri) édes szerelem( mon amour) Aime moi. Je veux être à toi maintenant.

--Rodrigo



Elle est nue, merveilleusement nue, enveloppée d’un halo troublant et sensuel. Elle n’est pas désirable, non, elle est le désir. Elle n’est pas gracieuse, elle est la grâce. Elle est la fragilité et la pureté. Elle est l’amour. Sous la longue chevelure blonde qui cerne son visage aux traits parfaits, elle est une madone, un ange. L’ange du désir.

Coquine, elle lui dévore les lèvres, puis, glissant les mains sur le torse bronzé de Rodrigo, elle le pousse doucement vers la couchette. Et le filou n’oppose aucune résistance, au contraire. Le souhait de l’adorable gitane est aussi le sien. Ses jambes heurtent le bras du vieux divan, et il tombe lentement à la renverse sur l’amoncellement de coussins moelleux, prenant soin d’entraîner avec lui le petit corps brûlant de fougue et de passion, s’abandonnant à la tendre culbute.

L’ange du désir reste allongée sur lui. D’une voix rauque et impatiente, elle le réclame. Elle le veut en elle, sans plus attendre. Et lui aussi, il en crève de lui faire l’amour. Cependant, hier, elle le suppliait de lui laisser du temps, de peur de souffrir dans sa chair et dans son esprit, de peur de se heurter à nouveau à l’odieuse image de ses trois violeurs. Ce délai, Rodrigo l’acceptait de bonne grâce, bien entendu. Malika aurait-elle peur à présent de l’aventure qui les attend ? Désire t’elle se rassurer, ou bien le rassurer, en se donnant à lui ce soir ? Le jeune officier prend délicatement entre ses mains le visage de l’adorable fille de Bohème …

Es-tu sûre de toi, ma princesse ? Je peux te laisser du temps, même si j’ai très envie de toi. Ca ne change rien à l’amour que je ressens pour toi …

Malika le fait taire d’un long baiser. Elle se love contre lui, ses bras l’entourent avec une force qu’il ne soupçonnait pas. Elle est le lierre, il est l’arbre. Elle est le corail, il est le rocher. Et déjà leurs corps ondulent en cadence, en vagues incessantes, en une danse lascive, en une harmonie parfaite.

Cette nuit, la merveilleuse gitane est devenue femme. Sa femme. Telle était sa volonté. Et les fantômes de son passé se sont évanouis, mis en fuite par leurs râles de plaisir et leurs gémissements d’extase infinie.

--Dona_isabella


Isabella, un joli prénom pas vrai ? Forcément, il ne peut être attribué qu’à une personne digne de le porter. Et cette personne est Isabella Gonzales d’Almirante.
Belle, issue d’une famille noble, très séduisante, puissante, méprisante, jalouse et possessive. On ne peut être plus digne, n’est-ce pas ?

Tous les hommes la désirent et elle le sait. Toutes les femmes l’envient et elle le sait. Et puis, elle n’est pas peu fière de ses fesses rondes et musclées, de ses longs cheveux bruns ondulés descendant jusqu’à sa poitrine généreuses étouffant dans son corset trop serré, de ses jambes interminables et habiles ou encore de son minois angélique composé d’yeux noirs profonds, de lèvres rouges et pulpeuses toujours prêtes à mordre, d’un nez discret et pourtant gracieux bien qu’il n’ait rien d’extraordinaire. Tout le monde l’aime et elle le sait. Elle est la première à être invitée lors des bals organisés, de réceptions importantes ou a des mariages.

Elle a tout pour elle, en passant de l’argent de ses parents à plusieurs terres en France et au Nord du Portugal. Elle a tout sauf une chose. Rodrigo.

Rien de que d’y penser, ses joues s’empourprent, elle a chaud, son vente se tord. Rodrigo. Rodrigo. Rodrigo. Rodrigo. Répéter son nom lui suffisait pour arriver à l’extase même. Rodrigo. Son Rodrigo. Un doux marin qui lui a été promis par ses vieux parents. Un ami d’enfance, un compagnon de jeux. Ils sont faits l’un pour l’autre. Elle imagine déjà le château qu’ils achèteront après leur mariage, une fois l’alliance de leurs deux familles scellée. Un immense château avec des enfants, plein d’enfants partout. Les leurs et ils en auront plein. D’ailleurs, rien que de penser à partager sa couche, c’est comme rencontrer le Tout-Puissant et le toucher. Non, encore mieux. Mieux que l’or, que ses robes, que ses bijoux… C’est mieux que tout. Mieux que la vie.

C’est marrant et pourtant c’est vrai. Cet homme la rend… comment expliquer ? Gentille, douce, romantique, délicate. Etrange pour une femme comme elle qui ne pense qu’à faire des jalouses ou à provoquer les femmes et les autres gueuses du village. Comme la dernière fois, par exemple. Elle s’était promenée au marché, habillée d’une simple robe confectionnée par ses soins, qui s’arrêtait bien au dessus des genoux. Des jambes aussi impeccables, ce n’est pas fait pour être caché ! songeait-elle en voyant ses grandes robes lourdes et chaudes dans ses placards de marbre remplis à ras bord d’un tas d’autres chiffons. Cette apparition avait provoqué un beau scandale mais ça la faisait plus rire qu’autre chose.

Toc, toc, toc…


Entrez, lance la voix fluette d’Isabella, tout en démêlant ses cheveux de son peigne d’or, assise devant sa coiffeuse et s’admirant dans le miroir.

Doña Isabella… la gouvernante, Inès, s’avance dans sa chambre la tête baissée, une lettre pour vous.

La belle regarde le papier tendu, le prend, le déplie, le lit. Elle pousse un cri de joie, pose le parchemin contre sa poitrine. Son cœur bat tellement fort qu'elle peut jurer qu'on l'entend à l'autre bout de la ville.
Elle se ressaisit, souffle un coup. Jamais, personne ne la vu affolée, débordée par ses sentiments, personne ! Ni même sa domestique, ni même ses parents. Elle est une femme ordonnée, réfléchie et dépendante de personne.


Inès ! Prépare-moi la robe ramenée d’Ourém, je veux être la plus belle femme de tout le Portugal ! Et tu sais pourquoi ? Parce que nous allons voir mes beaux parents et mon futur mari, Rodrigo !
--Malika



Dès les premiers rayons de soleil, elle s’éveille et regarde avec tendresse le jeune officier qui se trouve à ses cotés. Il est beau dans son sommeil, les traits apaisés, détendu. Son souffle est lent et régulier, un sourire est accroché aux coins de ses lèvres, elle se penche pour y déposer un léger baiser. Elle découvre que l’amour est quelque chose de beau, et non pas cette dégradation et cette douleur ressentie auparavant. Il lui faut effacer totalement de sa mémoire et de sa chair cette nuit horrible, même si tout en elle crie vengeance. Inutile de penser à çà, alors qu’elle vit un grand moment de bonheur.

Igor vient vers eux et fait une grosse léchouille à Rodrigo, qui, dans un grognement, se tourne de l’autre côté. La couche est étroite, il est tout contre Malika, passe un bras autour de sa taille et enfouit son nez dans son cou … ils s’enlacent et s’aiment à nouveau …

La faim fait sortir les loups des bois dit-on ! Ce doit être vrai, car Rodrigo à faim, Rodrigo veut manger, n’importe quoi mais manger. De grands éclats de rire, ils se lèvent, et partagent le pain qui est resté sur la table, quelques fruits. Rolio s’est déjà servi et grignote sur sa poutre.

Bonjourrrrr vous tous, bien dorrrmi ? C’est aujourrrd’hui que nous parrtons !

Elle s’assied sur les genoux de Rodrigo. Mon coeurrrr, parrr quoi commençons nous ? Je ne prrends que quelques rrobes et un mantel bien chaud. Puis se dirigeant vers la cachette de Rolio, elle vide le contenu de toutes les bourses qu’il a si bien cachées, elle fait trois bien rebondies, deux avec les pièces d’or, une que gardera Rodrigo et l’autre qu’elle gardera. La troisième, gonflée de ducats d’argents leur servira pour le voyage. Et puis, tant qu’ils disposent de la complicité et des doigts habiles de Rolio, ils ne manqueront jamais de rien.
Les quelques pierres précieuses, elle les coud dans les ourlets de ses jupes.

Rodrigo est sorti pour panser les chevaux, les seller. Une longue route attend Terra et Tempête, à travers forêts et montagnes. Elle enfile des braies en cuir ,de bonnes bottes une chemise de laine et un gilet,retenant par un lien son opulente chevelure.
Malika sort rejoindre son amant, se jette dans ses bras, elle a le cœur un peu lourd quand même, elle a l’impression qu’une grande page de l’histoire de sa vie est en train de se tourner, elle va abandonner sa roulotte et dans quelques jours il n’en restera rien. Elle veut la brûler, mais, superstitieuse, elle abandonne vite cette idée, on ne les brûle que lorsque leur propriétaire est mort. Il vaut mieux la laisser intacte, peut-être fera t’elle le bonheur de certains ? Elle a parcouru tant de lieues qu’elle peut encore continuer. Mais vont-ils seulement revenir ici ?


--Rodrigo



Les chemins étroits et tortueux qui sillonnent la campagne se succèdent inlassablement, tous pareils. Les deux cavaliers ont gravi au pas une colline abrupte, et contemplent le large patchwork que forme la succession de vastes prairies, de forêts et de champs cultivés. Mosaïque sans cesse renouvelée, passant du brun foncé au vert tendre, avec une infinité de nuances, selon la direction du vent qui incline et agite doucement les tiges aux lourds épis barbus et les frêles herbes sauvages.

En route … long trot vers le village suivant qu’ils aperçoivent, dans le lointain. Eux aussi se ressemblent tous. Malika et Rodrigo ont l’étrange sentiment de traverser sans fin les mêmes hameaux, les mêmes places, les mêmes dédales de ruelles étriquées, encore et encore. Le martèlement rapide et cadencé des sabots de leurs chevaux sur le pavé inégal résonne un instant dans les rues tranquilles, et le bourg est déjà derrière eux. Les quelques maisonnettes agglutinées autour d’une chapelle au clocher ancestral, tendu vers les nuages comme pour les transpercer de son dard d’acier, ne sont déjà plus qu’un souvenir qui s’estompera bien vite, au fil des lieues parcourues.

Ils longent à présent un ruisseau peu profond qui se faufile entre rochers et herbes folles, puis dépassent une nuée de mioches qui s’ébattent joyeusement dans le courant. Ils vont attraper la mort, ces gamins, mais le rivage est accueillant, et une halte est tentante pour permettre aux montures et aux cavaliers de souffler un peu. Ainsi qu’au brave Igor qui les suit vaillamment, en jappant de temps en temps.

Les deux chevaux trottinent encore un peu, puis descendent lentement vers le ruisseau, côte à côte. Ils posent avec précaution leurs pattes antérieures dans le lit de cailloux bordant la rivière, et s’abreuvent longuement. Souriant à l’avance, Rodrigo se saisit délicatement de la taille de Malika et dépose sa douce gitane, en amazone, sur la croupe de Tempête. Prisonnière de ses bras, la belle lui adresse un regard malicieux. Elle n’est plus surprise par les étreintes spontanées de son beau Portugais. Tendrement, leurs lèvres s’épousent, s’entrouvrent, s’offrent en un baiser interminable. Une main coquine s’égare sous la chemise de la jeune beauté blonde, et capture ses rondeurs parfaites.

Mais soudain le cheval s’ébroue, piétine, rappelant aux amants enlacés la précarité de leur position. Rodrigo soulève en riant le corps souple de sa compagne et la replace sur sa selle.

Voilà, retour à l’envoyeur avant qu’on se rompe le cou, trésor. Nous trottons encore une heure ou deux, ensuite nous chercherons une auberge …

--Ines



Inès est depuis longtemps au service de la famille Gonzales d’Almirante. Elle a fait sauter sur ses genoux une légion de bambins éveillés et rieurs, elle a soigné, elle a veillé, elle a consolé. Elle a changé les couches de deux générations de marmots de cette riche famille, dont le domaine s’étend jusqu’à la frontière galicienne, verdoyant et couvert de vignes, et baigné par les eaux tumultueuses du Minho.

A présent, la progéniture a pris son envol, les rejetons se sont dispersés comme une volée de moineaux, cousins et petits-cousins se sont installés dans tous les recoins du royaume, de Porto à Albufeira. Seule dona Isabella n’a pas quitté le nid, le cocon familial. Mais plus pour longtemps, sans doute, car elle est désormais promise au fils de riches voisins.

Dona Isabella est une enfant gâtée, privilégiée. D’humeur changeante, elle peut se montrer charmante, mais c’est assez rare, il faut bien l’avouer. Elle est plutôt orgueilleuse et capricieuse, mais sa beauté lui ouvre les portes des dynasties les plus puissantes et fortunées de la contrée. Elle fait battre bien des cœurs, mais elle a repoussé les avances d’une cohorte de prétendants malheureux, car elle est follement éprise du fils de Joachim Joao Do Setubal do Minho, dit Arminho, le beau Rodrigo, lequel serait, aux dernières nouvelles, en convalescence à Paris après une blessure due à un coup d’épée déloyal.

Malgré le caractère difficile de la jeune fille, Inès lui est très attachée, le lui prouve régulièrement tout en veillant à lui manifester le respect dû à sa condition.

La lettre à peine lue, l’héritière des Gonzales d’Almirante exprime bruyamment son contentement. Le courrier provient de dona Philippa, la maman de son futur mari. Quelques mots simplement, mais une invitation à séjourner quelques jours dans leur propriété. Rodrigo est de retour, certainement ! Aussitôt c’est le branle-bas de combat, l’agitation la plus débridée. Inès ceci, Inès cela … Les robes, les valises, les bijoux, la trousse à maquillage … C’est un jour de fête pour la fille de don Diogo ! Les bagages s’amoncèlent dans le boudoir donnant sur les jardins. Pas une minute à perdre. Une petite question perturbe cependant Inès, malgré l’excitation des préparatifs.

Dona Isabella, avez-vous déjà décidé si je vous accompagne dans cette visite ? Dois-je boucler ma malle également ? Et vos parents, les avez-vous prévenus ? Sont-ils du voyage ?

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