Une paupière souvre, puis la deuxième, doucement Joao séveille. La journée passée au lit a été salvatrice. Entre réalité et imaginaire, les images et les sons se sont succédés ; difficile de faire la part du réel dans un demi-sommeil.
La somnolence mélange tout ; lirréel devient notre propre univers.
Notre inconscient submerge notre conscience.
Les désirs, les envies, les phobies, les regrets, les projets senchevêtrent pour créer leur propre histoire, ils prennent possession de notre esprit.
Cette réalité alternative devient une deuxième vie ; aussi légitime que la première, elle prend corps et le ressenti est aussi fort que notre vie quotidienne. Le subterfuge du cerveau est puissant et nous nous laissons emporter par son flux continu dimages, de sonorités, de reliefs et de douleurs
Joaquim lentement se défait de ces rêves et cauchemars qui ont habité son esprit.
Il émerge.
Les paupières se sont ouvertes et Joao sest éveillé !
Le volcan reprend ses effusions de lave, ses volutes de fumées, ses crachats de poussières.
Une santé de fer lhabite
Un appétit dogre le pousse à aller aux cuisines. Avec la faim qui le tenaille, il se sent prêt à avaler un sanglier tout entier.
Dun pas nonchalant, il contemple les pierres de son château.
Il croise un de ses domestiques qui sincline et salue son seigneur, ce dernier est surpris de voire le maître lui rendre son bonjour dun air guilleret.
Au détour dun long corridor, il aperçoit le régisseur de son domaine tout acquis à la cause dArminho. Celui-ci, aussi vieux que son seigneur, avait du servir sous ses ordres pendant ses campagnes de mercenaire, mais nul ne connaissait son passé. Personne naurait songé à lui poser la moindre question.
Il accompagnait Joaquim à son retour sur ses terres.
Sous la protection dArminho, aucun des habitants du château naurait mis en cause la fidélité de ce serviteur aussi malin que costaud. Haut comme un peuplier, fort comme un chêne, ce fidèle des fidèles obéissait à son maitre et lui était dévolu.
Aussitôt la conversation sengagea entre les deux hommes
Le géant lui appris que son fils était de retour
quil était accompagné dune magnifique jeune femme
que son fils avait lair dêtre très épris de cette beauté dorée
il lui expliqua comment elle fut accueillie par lassistance féminine
il répéta toute la scène avec gestes et imitations
Au fur et à mesure du récit et sans trop savoir pourquoi la colère montait en Arminho
Tout dabord elle fut dirigée contre son fils, elle effaçait la joie de son retour
puis sa colère se détourna de son enfant pour se diriger contre Isabella et dona Philippa
une multitude de sentiments, de questions lassaillaient
Comment son fils avait-il pu trahir sa confiance et ramener une soubrette
il avait trahit ses parents, sa promise
Puis son incompréhension seffaça et il se fit protecteur
Comment pouvait-on sen prendre à son fils
Quest ce cette mégère et cette pimbêche avaient fait
Humilié son fils en public, expulsée la jeune dulcinée de Rodrigo
Joao sétait promis de faire le bonheur de son fils, ce serait son ultime cadeau
Même si son fils navait pas respecté ses plans et dieu sait quil détestait quon remette en cause ses projets. Il se rappela la promesse quil sétait faite : le bonheur de son fils
Comme son fils, Joaquim a sillonné les routes, bourlingué. Il connaît la valeur des rencontres que lon peut faire sur les chemins et au fil des aventures. Cest dans de telles circonstances que lon reconnait la valeur des hommes et des femmes que lon côtoie.
Si Rodrigo sest amouraché de cette jeune donzelle, alors cest que son choix est le meilleur.
Les réflexions de Joao défilent à une vitesse folle, elles se contredisent, se croisent, se confirment.
A la fin, il voit clair, il se rangera du côté de son fils
Il appela son régisseur à la peau mate
- Alif (ami)
saistu ou est allée cette « beauté dorée » ?
- Elle est partie en direction de la ville.
- Bien, je te charge te la retrouver et de me la ramener. Bien sur dans la discrétion la plus complète.
VA ! Le gigantesque maure sexécute, son maître ordonne, il obéit.
Ce qui les unit ne date pas dhier : les combats, les massacres, les geôles, la faim, les maladies, la gloire, les butins
Ils ont connu tout ça dans leur jeunesse commune.
Avant de courir laventure, il servait un tout autre personnage, là bas en Andalousie, un sage, un poète. Pourtant il navait pas hésité à lui dérober quelques biens avant de senfuir. Il lui restait un gout amer de cet acte.
Depuis son enfance tout le monde lappelait Kahdim, un nom quil avait voulu effacer
Qui pourrait vouloir porter le nom de Khadim (serviteur)
Non il partirait vers le nord, vers les richesses, il se ferait un nom. Peut être deviendrait-il pirate ou chef de bande, le plus grand des bandits
Enfin de compte, il croisa sur la route de la gloire Joaquim, qui le prit sous son aile, lui, le maure gaussé de tous
Sous la protection de Joaquim, il reçut le nom de Sajara (arbre)
Sa masse imposante, son physique aura finalement choisi son nom. Il en était fier. Sajara le fort, le puissant
Sa compagnie était rassurante dans les batailles. Arminho et Sajara était devenu un binôme invincible.
Puis de fil en aiguille les deux hommes étaient devenus inséparables, Sajara sétait promis de servir le seigneur portugais jusquà la mort.
Sajara déambulait dans les rues et ruelles de la ville, posant questions, ratissant le moindre coin, noubliant aucune taverne, ni auberge. Las de ne rien trouver, il décida de soctroyer un moment de détente, il prit la direction du Hammam. Son amie Fatima, le recevrait avec plaisir. Ils deviseront dans leur langue. Le maure lui récitera les poèmes de son ancien maître. Tout cela lui avait mis leau à la bouche
Il frappa à la porte de bois sculptée, une vieille femme vint ouvrir, et lui adressa un grand sourire.
Les deux complices traversèrent un jardin ombragé, passèrent devant une écurie jouxtant le hammam. La vieille femme le fit asseoir sous un olivier, lui apporta quelques pâtisseries parfumées à la fleur doranger et un thé à la menthe.
- Comment te portes-tu mon amie ? lança Sajara.
- Très bien
Sajara bu son thé à la menthe et soupira.
- Que se passe t-il ? senquit Fatima.
- Je narrive pas à remplir ma mission. Cest peut être la plus importante, la plus noble. Il leva la tête vers le ciel.
Et je suis en train déchouer. Sans brusquer le vieux régisseur, Fatima, lui demanda de tout lui raconter