--Rodolfo
En voyant Sajara arrivait dans son antre, Rodolfo sut tout de suite que son ami Joao le faisait demander.
Sajara transmis son message.
Bien embêté si Rodolfo refusait « linvitation », il restait planté devant le médecin-apothicaire-sorcier, enfin il ne savait plus trop quoi. Rodolfo restait un mystère pour beaucoup.
Indépendant, nayant de compte à rendre à personne, il était le seul ami denfance de Joaquim.
Cela lui faisait plaisir dêtre demandé par son ami.
Bien sur quil irait, bien sur quil lui rendrait service, bien sur quil répondrait à ses requêtes
Joaquim était son seul ami le seul en qui il avait confiance le seul qui pouvait lui demandait nimporte quoi
Depuis quils étaient jeunes, ces deux-là, cétait à la vie, à la mort. Rien ne pouvait briser leur amitié.
Ils étaient deux âmes en peine perdues dans la noirceur du monde.
Deux marginaux qui ne comptaient que sur eux même.
Lamitié qui les animait était indescriptible et de sombres secrets les liaient lun à lautre.
Bien sur que Rodolfo répondrait à lappel de son ami.
Rodolfo fit un imperceptible signe de tête au maure. Ce dernier tourna talon pour aller rejoindre son maître.
Le savant, méticuleusement rangea sa tanière, sorte de maisonnée construite à lorée du bois. Le bout de terrain qui sétendait devant sa chaumière ressemblait à une clairière truffée de plantes diverses ; semées sans doute par lhabitant de ce lieu.
Lhumble demeure se fondait dans cette partie étrange de la forêt. Nul naurait su dire si cet endroit avait était façonné par le curieux locataire, ou si il avait élu domicile ici même à cause de la configuration des lieux.
On dit quà une période, létrange personnage avait pris compagne mais rien nest moins sur
Tout ce que les anciens du château et des villages voisins pouvaient dire de lui cest :
« Ce jeune vaurien était le fils du forgeron du château, et le jeune seigneur, une tête brûlée celui-là, aussi brute que tête de mule, courait le pays en tout sens en sa compagnie. Ces deux insensés étaient inséparables et se retrouvaient toujours dans les plus mauvais coups. Rien ne leur faisait peur : les rixes, les rapines, le troussage des filles, les fugues, les disparitions Nul ne savait ce quils mijotaient quand ils disparaissaient
Il a des pouvoirs diaboliques disaient les parents Si on navait pas su que son père était le forgeron, on aurait soupçonné sa mère davoir partagée sa couche avec le cornu. Mais non ce nest pas possible, il ressemble comme deux goutes à son père et sa mère était trop bigote Tellement bigote quelle rejoignit son créateur avant lheure, la pauvre enfant
Les mains de ce sorcier pouvaient guérir comme les rebouteux !
Il faisait des remèdes comme les apothicaires !
Il faisait des décoctions comme les herboristes !
Il soignait comme les médecins !
Il marmonnait des imprécations, ou alors chantait des psaumes comme les curés, comme les sorcières sur quil doit parler aux esprits, aux morts
Nous, gens du peuple sommes ignares mais il y a des choses que lon sent »
Bref tout et nimporte quoi circulait autour du mystérieux Rodolfo proche du peuple mais craint craint des nobles mais proche de leurs bourses
Il navait que faire de ces ragots ou craintes, sen amusait même énormément Ny a-t-il pas plus amusant que la bêtise des gens. Mieux vaut sen amuser avant quelle ne devienne dangereuse.
Après la convalescence de son ami, Rodolfo avait rejoint son bout de forêt, continuant sans cesse à préparer ses onguents, ses cataplasmes ; à améliorer ses baumes, ses mélanges, ses formules Les paysans des alentours avaient appris à respecter ce médecin qui leur offrait ses conseils et ses soins en échange de nourriture ou de menus services. Cela lui suffisait Par ailleurs, il nhésitait pas à ponctionner les bourses des riches bourgeois ou nobliaux des villes et villages environnants.
Tout ceci sajoutait à la rente que lui versait Arminho, son ami. Aprement discutée et disputée! Lun voulant assurer son ami contre la misère, lautre refusant toute forme daide et de dépendance. Il avait était décidé que cela nengageait en rien les deux amis. A tout moment, lun pouvait arrêter de verser la somme, ou lautre la refuser et déménager. Mais ni lun ni lautre navait dénoncé cet accord.
Ce faisant, le sorcier comme il était surnommé, avait son indépendance et son franc parler. Ce qui déplaisait fortement à Dame Philippa et aux nobles. Ces derniers avaient plusieurs fois essayé décarter, déliminer ce rival gênant, mais cétait très vite heurté au seigneur de la région. Décidemment cette engeance du diable était intouchable.
Plus que dangereux et libre, il alliait lintelligence à la connaissance.
Connaissance que lui avait transmis les plus grands médecins et savants de son époque, et ce grâce aux relations de Joao.
Tant de pouvoirs et de connaissances dans les mains et lesprit dun homme du peuple, cest jugé très dangereux pour les aristocrates. On avait donc proposé plusieurs fois au sorcier de lanoblir.
Refus catégorique à chaque tentative.
Nonobstant, notre apothicaire avait tissé un réseau de relations dans tout le royaume et bien au de-là des Pyrénées. Réputé par ses dons de guérison et ses conseils avisés, beaucoup le consultait Conseils quil savait faire payer très cher.
Lhomme aux cheveux blancs mais qui paraissait sans âge se préparait donc à rendre visite à son ami Joaquim.