Afficher le menu
Information and comments (1)
<<   <   1, 2, 3, ..., 8, 9, 10, ..., 12, 13, 14   >   >>

[RP] De la roulotte à l'hacienda

--Joaquim



Le voilà bien réjouit l’hermine, le teigneux va pouvoir s’en donner à cœur joie. L’hallali approche. La meute va fondre sur ses proies.

Le sang de Joao commence à bouillir, ses pulsations cardiaques augmentent.
L’effet de l’adrénaline se fait ressentir.

Fermant les yeux, levant la tête, respirant très fort … Il s’adresse à ses compagnons…
- Vous sentez ? Vous sentez ?
C’est l’odeur du sang, l’odeur de l’animal blessé auquel on va donner le coup de grâce !


On aurait pu croire que les yeux d’Arminho étaient rouges, que la haine et la colère accumulées depuis si longtemps allaient se déverser dans toutes les pièces.

Oui, maintenant, ils la sentaient cette odeur…
Une odeur âpre qui vous prend à la gorge…
Une odeur de souffre qui remonte des enfers et qui va les submerger…
Une odeur pestilentielle qui va de nouveau les souiller…

Ils vont donner la mort !

On en serait presque à une réunion satanique ou les convives mettent à mort une créature pour se repaitre ensuite de ses chairs.

Arminho, comme à son habitude se montra digne d’un commandant en chef d’une armée en campagne. Il demanda à Sajara de repérer la ronde des hommes en arme, et d’établir l’intervalle de leurs passages.
Ensuite, ils se faufileraient vers les étages.

- Sajara, tu t’occupes de la mère !
Rodrigo et moi règlerons le cas de Diogo !


Le plan esquissé ; Joao fit un clin d’œil à son fils…
La fine équipe allait remplir sa mission.

- Surtout… mettez vous dans le crâne qu’il ne faut pas se faire repérer après notre besogne !
Pour le commun des mortels, nous ne sommes jamais venus jusqu’ici.
Seules quelques personnes seront au fait de notre expédition.
Les sous fifres n’ont rien à savoir.
Ça restera de la rumeur pure et simple.
Si les calomnies viennent entacher l’honneur de notre famille, nous pourrons nous retourner vers les autorités.

Donc pas de témoins !


Le seigneur Arminho fit un signe à Sajara pour qu’il commence à exécuter sa mission.
Puis il fouina dans la pièce… toutes ces armes à portée de main ; quelle ironie !
Il sourit en chuchotant que son assurance vie était dans sa main. La lame d’un poignard brillait dans la pénombre.
--Rodrigo



Ne pas se faire repérer … a rappelé judicieusement le patriarche. Ni avant, ni après le bain d’hémoglobine, bien-sûr. Ni avant, ni après que la tête du félon n’ait roulé à leurs pieds.

Ne pas se faire repérer, non, mais ceci risque d’être malaisé, car Joaquim et Rodrigo sont aussi reconnaissables dans la région que la majestueuse cathédrale de Porto, celle qui surveille les rives du Douro, à quelques lieues de là. Oui, chacun présent ici, dans cette hacienda, a pu croiser un jour ou l’autre le vieil ours et le jeune taureau, dans les villages avoisinants, ou dans les riches vignobles du nord, qui lézardent sous le soleil des collines arides. Oui, leurs visages sont familiers, c’est évident.

Les yeux de Rodrigo fouillent le bric-à-brac qui les entoure, et une étincelle de satisfaction illumine soudain ses prunelles. Là, posés à côté des cimeterres, des chiffons de tissu destinés à lustrer les lames. Et là, à droite d’une pile de boucliers, des cervelières de mailles, légères et peu encombrantes, dissimulant parfaitement les joues et le nez des soudards à qui elles sont réservées. C’est parfait.

Le jeune officier coiffe un de ces casques, et noue un carré d’étoffe juste sous ses narines. Le voilà méconnaissable.

Servez-vous, c’est don Diogo qui nous offre de quoi passer inaperçus ! Quel brave homme …

Le ton de sa voix laisse deviner qu’un vague sourire est apparu un instant sur ses lèvres.

Eh bien, Sajara, mon ami, la route est-elle libre ? Père, qu’attendons-nous ?

L’approche du danger le rend nerveux, impatient. Oui, il a hâte à présent d’en terminer avec ce couard de Diogo, puis de repartir, à brides abattues, retrouver sa tendre gitane et la serrer contre son cœur. Sans doute ne l’avouera t-il à personne, mais Rodrigo est heureux de ne pas avoir été désigné par son père pour éliminer la maman d’Isabella. Il n’aurait probablement pas été capable d’accomplir un tel acte. Mais, une fois de plus, Joaquim avait tout compris en répartissant les cibles. Sajara n’aura pas ce genre d’états d’âme.

--Malika

Le silence qui entoure Malika est assourdissant. Dans le noir, le froid de la crypte où elle est retenue prisonnière, le corps engourdi, son esprit s’évade.

Il s’évade vers les routes poudreuses qu’elle aime parcourir au galop avec Terra, son vieux complice, vers le soleil à qui elle aimait se montrer nue et se faire caresser par ses chauds rayons d’or. Vers la mer, vers les rivières où elle aime se laver dans les eaux froides et vives, et courir sur la plage avec son chien Igor, avant de rejoindre sa roulotte où elle trouve la paix avec Rolio, son singe si facétieux qui sait la faire rire même quand elle a l’âme triste.

Mais un bel officier a mis fin à cette vie bien orchestrée. Elle l’a suivi, croyant en lui, en son amour, en leur bonheur. Au lieu de cela, elle se retrouve dans une famille haineuse, à la merci d’une fiancée éconduite, folle et cruelle.

Mais où est-il, Rodrigo ? Pourquoi ne la cherche t-il pas, voilà des heures qu’elle est liée sur cette pierre tombale ! Elle n’a même plus la notion des heures, du jour, de la nuit. Quand donc est venue Dona Philippa ? Toutes ces questions sans réponse tournent dans sa tête.

Soudain, le bruit grinçant de la trappe qui s’ouvre la fait émerger de ses rêveries. Qui vient ?

Haaaa ! Cette odeur écœurante d’œillet, ce parfum entêtant, c’est celui d’Isabella.
Que vient-elle faire, la tuer ? Savourer l’instant de la voir ainsi livrée pieds et poings liés à sa vindicte, vient-elle la torturer ? Juste pour le plaisir de le faire !
Malika ouvre les yeux, dans la pénombre elle aperçoit la silhouette de la portugaise, qui lui lance un joyeux « le bonsoir » Inutile de bouger, elle détourne la tête.

Tu pourrais répondre, c’est la moindre des politesse… Quelle gourde, comment veut-elle que je réponde ?…
Tu as faim ? Ooh oui, je le vois sur ton visage. Pauvre petite, je t'aurais presque dit que tu ne mérites pas tout ce malheur, cette souffrance. Mais le problème, c'est que tu MÉRITES tout ça. Et heureusement, moi et ma très chère belle-mère t'épargnons bien des tortures. S'il n'y avait pas eu ce marchand, ce harem, s'il n'y avait pas eu c..

Oui, malgré la situation où elle se trouve, Malika a faim, mais elle s’attendait à tout venant de la jeune châtelaine.
Est-elle sauvée de la mort uniquement pour être vendue à un marchand de chair ? C’est toujours du temps de gagné, se dit-elle.

D’un geste brusque, la jeune femme arrache le bâillon qui clôt la bouche de Malika, qui prend un grand bol d’air. Isabella se penche vers elle, ses yeux sombres lancent des éclairs, elle essaye de lire dans le regard de Malika . Elle espère sans doute y voir de la détresse, du chagrin et de la peur, mais c’est un regard de haine froide que les yeux clairs et transparents de la gitane jettent sur elle.

Isabella lui ordonne d’ouvrir la bouche, elle prend le pichet de terre cuite qu’elle avait déposé sur la tombe, et verse entre les lèvres de la gitane un liquide aigre où flottent des légumes avariés que les habitants d’une porcherie refuseraient d’avaler.

Se moquant éperdument des conséquences, Malika bloque le liquide infect dans sa bouche et recrache au visage penché sur elle le brouet infâme. A nouveau, pour la deuxième fois, les légumes recouvrent la robe de velours et le visage fardé de sa rivale.
Malika la regarde, froide et narquoise, dégoulinante de soupe, des légumes épars sur son corsage, et se met à rire en voyant le visage blafard et maculé d’Isabella.

Kö :üsse ! Büveszet ! ( Le diable t’emporte ! Sorcière ! )

--Dona_isabella


On entend un grand fracas dans la crypte sous l'église. Le pichet de terre qui était censé contenir le repas du soir de la captive s'écrase sur le sol froid. Mais ce n'est pas le plus important...

La soupe aux légumes a comme une odeur de moisi, de pourri. Et c'est ce que sent Isabella, elle en a même plein le nez, sa robe, son visage qu'elle a mis tant de temps a poudrer ce matin même. Elle n'a pas beaucoup l'occasion de sentir de telles senteurs, si ce n'est pas pour dire jamais. Elle a toujours été baignée dans des essences florales depuis sa plus tendre enfance, son nez était très affûté et habitué aux arômes exquis et exotiques. Pourtant, cette fois, ce parfum de ragoût qui a tourné aussi délicat et léger soit-il, ne lui donne qu'une envie : vomir.
Car oui, dès que des odeurs sont trop fortes ou trop brusques, son nez ne sait plus quoi faire ni ou se mettre, où se cacher et comment se dégager de ce brouillard écœurant. Et, on ne peut pas dire que ce remue ménage est sans conséquences, car c'est bien son estomac qui en fait les frais.
Elle est à deux doigts de vomir, la bourgeoise. Ou plutôt à une main, celle qu'elle pose devant sa bouche.

Et soudain, elle explose. Un cri retentit dans la crypte. Perçant, aigu, à vous en déchirer les oreilles. Avec des gestes frôlant l'hystérie, elle s'essuie le visage, les légumes tombés sur son corsage, crache cette substance immangeable qu'elle à failli avaler tellement son hurlement était fort. Pourquoi s'est-elle encore fait avoir ? Elle, Isabella Gonzales d'Almirante est gentille avec une personne qui ne l'a même pas mérité, sa gentillesse, et voilà comment elle agit en échange?!


MEGERE !! crache t-elle sur Malika. CATIN ! PUTERELLE ! C'EST COMME ÇA QUE TES VIEUX PARENTS GITANS T'ONT APPRIS A REMERCIER CEUX QUI S'OCCUPENT DE TOI, TE DONNENT LE GITE ET LE COUVERT ?!

Isabella est en colère, vraiment. Un nuage de colère plane au dessus d'elle, il y a aussi de la colère dans ses yeux, dans son ventre, à l'intérieur de ses mains serrées en poing, sous ses ongles, dans l'air qu'elle expire de ses narines comme un taureau excité par la couleur rouge. Elle est la colère, la folie, la rage, le rouge, mais aussi le désir, le sacrifice. Elle est prête à tout pour Rodrigo. Prête à tuer.

Elle marche lentement, autour de la tombe. Elle ressent la satisfaction de la gitane, à vrai dire elle n'avait pas entendu son rire, tellement elle était préoccupée par son état. Ses doigts craquent sous la forte pression qu'elle leur fait subir en les serrant en poing. Elle a envie mais non. Les ordres de sa belle mère sont clairs : ne pas toucher à Malika.

Puis, poussée par une envie quelconque, elle se met à déchirer les vêtements de la blondasse, jusqu'à ce qu'elle se retrouve nue face à elle, sous les liens qui l'attachent à la tombe. Elle remet également son bâillon, ses mots incompréhensibles et son accent détestable lui montent à la tête au plus haut point.


J'espère que ton prince charmant viendra bientôt te chercher. Non pas Rodrigo mais le marchand d'esclaves ! A moins que tu ne crèves ici de faim, de soif, de froid. Un des trois. Ou les trois. Ne t'attends plus à rien de notre part, tu as refusé de manger, tant pis pour toi. Tout en parlant, elle trouve une cruche, sûrement celle qu'avait utilisé doña Philippa ce matin. A peine le temps de la prendre que, l'eau froide qui s'y trouvait est renversée sur le petit corps menu et bronzé de la tzigane qui se couvre immédiatement de frissons, mais sans en verser une goutte sur son visage.

Et elle la regarde, là, gisant sur sa pierre tombale. Et d'un seul coup, elle se sent impuissante, Isabella. Méprisée. Maîtrisée. Non pas qu'elle baisse les bras, non, c'est juste une sorte de fatigue. Et un martèlement dans sa tête. Et ses jambes deviennent flageolantes. Un dernier coup d'œil à la gitane, puis elle remonte, sans bruit, sort de l'église, pâle et le regard vide.

La brune ouvre la porte de l'hacienda, et, alors qu'elle fait un pas à l'intérieur, elle tourne de l'oeil. La belle poupée de cire s'affale par terre, crade, puante, et peut être un poil démoralisée et dépassée par les évènements.
--Dona_philippa



Plutôt satisfaite, la maîtresse de l’hacienda. Un vent favorable fait évoluer ses projets dans la bonne direction. La gitane est sous clef, Omar est averti. Le jour J approche. Bien. Une douce chaleur l’envahit. Le petit verre de Porto blanc qu’elle tient entre les doigts n’y est sans doute pas étranger.

Cependant, une inquiétude rétrospective s’insinue lentement en elle. Oui, était-ce bien raisonnable de donner l’occasion à Isabella de descendre seule à la crypte, près de leur prisonnière ? Sa protégée, et future bru, a le sang chaud. C’est une forte tête qui n’apprécie pas qu’on lui marche sur les pieds. Et l’orgueilleuse gitane a le don de l’exaspérer et de la faire sortir de ses gonds. La situation risque donc de s’envenimer une fois de plus, alors que la plus grande discrétion est indispensable. Malika a beau être totalement à leur merci, elle n’a pas sa langue en poche. Non, cette petite arrogante n’a sans doute pas une vision très claire de la précarité de sa situation. Une simple remarque acerbe ou moqueuse de cette jeune écervelée peut faire exploser Isabella, et la pousser à commettre l’irréparable.

Ce serait regrettable. Dona Philippa ne désire absolument pas être privée d’une vengeance délectable. Et d’ailleurs, comment se débrouilleraient-elles avec un cadavre sur les bras ?

Non, c’est décidé, c’est irrévocable, Malika finira ses jours dans un harem, et cette perspective réjouit au plus haut degré la propriétaire de l’hacienda. Douce revanche. La fière gitane n’y sera plus qu’un jouet entre les mains d’un sultan féroce et redoutable, un jouet dont il usera et abusera selon sa volonté et ses caprices les plus pervers.

Vision exquise de cette jeune catin blonde geignant et suppliant sous les coups de boutoir de son nouveau maître. Tu voulais un homme, petite gourde, tu seras servie. Mais pas comme tu l’espérais. Tu seras esclave. Tu seras domptée dans ton esprit et dans ta chair. Tu ne seras plus rien. Ta chienne de vie ne sera plus qu’un long calvaire. C’est le prix à payer pour t’être dressée face à moi.

Bon. Avant toute chose, se rendre compte de visu de ce qui se passe sous la chapelle. Dona Philippa quitte rapidement son élégant boudoir et prend l’escalier qui mène au rez-de-chaussée. Soudain, des voix inquiètes, des silhouettes affairées attirent son attention. Quelle est la cause de cet attroupement dans l’entrée ? Dieu du ciel, mais c’est Isabella qui est allongée là ! Que se passe t-il ? Quelques servantes s’agglutinent autour de la jeune femme en caquetant bêtement. Les idiotes ! Dona Philippa presse le pas puis s’agenouille au chevet de sa presque-bru, repoussant sèchement toutes les pies bavardes qui l’entourent. Pas de blessure visible, non. C’est un simple évanouissement. Elle tapote légèrement les joues d’Isabella, qui retrouvent peu à peu quelques couleurs. Son regard vitreux redevient plus clair. Tout va bien. Dona Philippa, rassurée, jette un œil noir sur les servantes.

Eh bien, aidez-moi, au lieu de discutailler ainsi et de rester figées comme des potiches ! Allons l’allonger dans sa chambre et laissons la se reposer un peu !

Soutenue par quelques bras secourables, Isabella est menée vers le premier étage, puis portée sur son lit. Dona Philippa lui essuie délicatement le front, renvoyant les soubrettes à leurs occupations afin d’interroger la jeune femme.

--Sajara


Sajara se tourna vers l’héritier, le voilà bien gaillard le jeunot se dit-il.
Un rictus vint ponctuer sa réflexion. Nous voilà une fine équipe et la relève est prête à en découdre ; cela augure encore de beaux jours et de beaux coups.

Sajara ne se fit pas prier, lui aussi tient à se déguiser, le vieux Arminho préconise la prudence et la discrétion… Mais lui, Sajara fils du soleil est aussi remarquable qu’un sapin de noël en plein été…
Et nul doute que c’est son étoile placée au sommet qui brillera le plus fort.

Alors, lui aussi s’empresse de couvrir son visage, son crâne étant couvert nulle peur de ce côté.
Puis s’étant masqué, il se tourne vers le vieux guerrier, suivra t-il le conseil de son rejeton.
Va-t-il accepter ?


Le maure se concentre à nouveau, il entrouvre la porte. L’ombre d’une sentinelle s’éloigne.
Il s’agenouille et compte.

Plusieurs minutes après, ayant pris soin de refermer la porte ; il fait son rapport.
Il a décelé une faille dans la sécurité des lieux.

Avec une bonne entente et le même décompte, ils pouvent passer tous les trois à intervalle régulier.

Le premier à s’élancer sera Sajara, puis Rodrigo, et enfin Joao.

Le trio acquiesçe… et se met en position.
--Joaquim


Ah oui pas bête le petit !
Se camoufler !
Ba… pourquoi pas !
Mais, même si on nous voit, ce sera la dernière vision du malheureux. Pas de témoin !

- D’accord, je me couvre le visage également.
Mais je le répète : pas de témoin !
Vous m’égorgez le quidam qui nous aperçoit !


Sajara ayant fait un rapport sur les sentinelles et l’espace qu’ils laissent entre leur passage, Arminho prend la parole :

- Très bien, il suffit de compter !

Le vieux portugais s’accroupi à côté de son compagnon d’arme et lui murmure :
- Tu seras le premier !
Je suivrai et Rodrigo me rejoindra.


- Après c’est chacun sa mission, si tout se passe bien on se retrouve ici, et on taille la route avant le lever du jour.

Une petite tape sur l’épaule du maure, et les protagonistes se mettent en place.
--Sajara


Sajara prit une grande respiration. Le visage impassible, aucun trait, aucune ride ne trahissant la moindre de ses pensées, l’homme à l a carrure imposante se presse contre la porte, l’entrouvre…passe la tête…et se précipite dans le couloir…
Il s’enfonce dans le premier passage sur sa gauche…
Hors de vue de ses camarades, il emprunte un escalier qui débouche sur un long corridor.

Le maure se plaque contre le mur.
Deux voies se dévoilent, celle de gauche est pour lui, l’autre est pour Arminho et Rodrigo. Il marche espérant ne croiser personne. Même si au fond, tuer une personne de plus ou de moins ne lui fait ni chaud ni froid.

Il continue à avancer, incarnant la mort d’une femme. Mais le sacrifice de cette dernière représente la paix. La paix pour une région, pour une famille. Il représente aussi la justice, la forme n’est pas glorieuse, cependant on ne demande pas la beauté ou la grâce quand on réclame justice.
La justice est souvent utilisée ou réclamée avec vengeance et courroux.

Voilà un autre corridor, une série de portes se trouve devant lui.
La troisième est la bonne.
Cette pièce qui est la chambre de la châtelaine, va devenir aussi sa salle d’exécution.
Sous sa longue cape, la main de Sajara, se crispe sur un poignard.
Coincé sous sa ceinture de cuir ornée de motifs et d’écriture arabiques, l’arme sort de son étui.
A pas de loup, le puissant homme de main, se plante devant la porte.
Il laisse écouler un moment juste le temps de reprendre sa respiration, de laisser le rythme cardiaque redescendre, d’écouter le moindre son provenant de la chambre.

Ce visage sans expression semble pourtant se fermer…

L’adrénaline est à son maximum …

Il ouvre délicatement la porte, pour ne pas laisser entrer la lumière du couloir procurée par quelques torches à moitié éteintes.
Il se précipite dans la pièce et referme furtivement la porte.

Le voila introduit…
En alerte, Il entend la vielle maitresse ronfler.
Il s’approche de cette respiration trahissant une présence dans le noir. Les rais de la lune éclairent légèrement le visage de sa victime.
Il se place conformément à ses intentions, se penche sur elle, puis aussi vif qu’un éclair, met sa main sur bouche et d’un coup net lui tranche la gorge.
Il appuie de toutes ses forces sur la bouche pour empêcher les cris.
Mais plutôt qu’un appel au secours la dame du château cherche plutôt à respirer, elle est déjà en train de se vider de son sang et d’étouffer.
En quelques secondes, les yeux qu’elle avait ouvert précipitamment se vident de toute vie… déjà le regard vitreux a pris la place de la stupéfaction, et de la douleur qui s’étaient lues à ce réveil inattendu.

Sajara desserre son étreinte, il contemple quelques secondes le cadavre…

Sans remord, il s’assure de son ouvrage.
Aucun doute la maitresse des lieux est bien morte.
La laissant baigner dans son sang, il se retire en silence.
--Rodrigo




C’est l’instant. Le châtiment est en route, inexorablement. La sentence est prononcée. La mort. Bourreaux, à vous de jouer.

Les silhouettes furtives de Sajara et de Joaquim se sont estompées dans le couloir silencieux, vers la gauche. Hop ! Rodrigo jaillit à son tour de la cachette, comme un diable hors de sa boîte. Il s’élance, courbé vers l’avant. Et aussitôt, il devient mur de pierre, il devient boiserie, il devient rideau, il devient tentures. Il est caméléon. Il fait partie intégrante du décor de l’hacienda.

L’escalier … Le couloir de droite … Toutes voiles dehors …

Le jeune officier reconnaît de multiples détails tout le long de sa progression rapide dans ce riche environnement, qui, quinze ans plus tôt, constituait un de ses terrains de jeu préférés. Cela accentue sa confiance. Tout va bien se passer. Encore quelques dizaines de mètres. Voilà. Mais où se cache son père ? Il était convenu entre eux qu’il l’attendrait près des appartements de Diogo ! Là ! Le voilà. Il est tapis derrière une armure de chevalier, équipée d’un large bouclier posé sur le sol, et qui semble contrôler les accès vers cet étage. Joaquim est presque invisible, malgré sa carrure impressionnante. Un couche-tard traversant ce couloir sombre ne l’aurait pas remarqué. Rodrigo le rejoint derrière cet écran propice. Un poignard a surgi entre les doigts du jeune homme.

La chambre, c’est cette porte, là … murmure t-il à l’oreille du patriarche, un soupçon d’inquiétude dans la voix. Son cœur bat la chamade, une poussée d’adrénaline lui vrille soudain l’estomac. Mais sa main ne tremblera pas face au danger. L’enjeu est trop important.

On y va, père ? Qui passe en premier ?

--Omar_ben_chaffar




Dans la ville voisine.


Non, en définitive, rien ne presse vraiment. Et le vieux marchand d’esclaves pourrait se dorer la couenne au soleil, en sirotant un ou deux verres de ce rosé portugais frais et léger, à la robe lumineuse, produit sur les coteaux escarpés de sa terre adoptive, sans que personne ne songe à lui adresser le moindre reproche.

Mais non. Omar est un perfectionniste. Il se sentirait coupable de flemmarder dans la cour, les yeux rivés sur les collines environnantes. Non. Il hait l’imprévu, il redoute ce grain de sable qui pourrait dérégler le bel agencement de ses expéditions. Il ne sera pas pris au dépourvu.

En mer, il est le roi. Le capitaine qu’il rétribue grassement est un vieux forban féroce et cruel, mais il est d’une fidélité à toute épreuve, et il le restera aussi longtemps que les traversées vers les côtes africaines seront pour lui synonymes de bourses remplies d’écus étincelants. Non, en mer, Omar n’a rien à redouter. L’étape la plus délicate, c’est tout ce qui précède l’embarquement. En effet, une tentative d’évasion d’un de ses prisonniers, secouru par sa famille ou ses amis, est toujours à craindre, de même que la bagarre qui en résulterait inévitablement. Cependant, par la grâce de celui qui régit tout, là-haut, de telles péripéties ne se sont jamais produites durant ses « livraisons ».

Cette fois, d’ailleurs, le danger est minime. Qui risquerait de se faire trancher la gorge pour les beaux yeux d’une catin ? Dans la région, les filles de joie sont aussi nombreuses que les mouettes qui survolent le port en quête d’un bout de poisson à se mettre sous le bec. Il y en a pour tous les goûts, à condition de ne pas se montrer trop exigeant sur l’hygiène et l’élégance du spécimen, bien-sûr. Une de plus, une de moins, aucune importance ...

Omar déplie devant lui de nouvelles cartes détaillées de la région, ainsi qu’un parchemin plus rare, où sont tracés, de manière assez approximative, les contours du nord de l’Afrique. Son œil expérimenté accomplit déjà le voyage. Déjà, ils jettent l’ancre sur une plage déserte, aux portes du Sahara. Un sourire apparaît sur sa face cuivrée, ridée comme une vieille pomme. Bientôt dimanche, bientôt ce rendez-vous attendu avec impatience. La ribaude lui sera livrée, ainsi qu’une somme rondelette pour couvrir ses faux frais.

Il se lève brusquement, se penche à la fenêtre, et hèle un de ses hommes de confiance. Il le charge de quelques vérifications essentielles, notamment de contrôler une première fois l’emplacement de la rencontre avec les représentants de cette riche famille qui fait appel à ses services, mais aussi d’avertir ce brave capitaine de l’imminence du départ. La procédure classique, rien de plus …

--Joaquim




Joaquim s’avança vers son fils, lui fit un clin d’œil, et comme s’il faisait fi de toutes ses recommandations, entra dans la chambre en poussant la grande porte de chêne.
Il fit signe à Rodrigo de rentrer et désigna du doigt l’endroit où il devait rester.

Positionné près de l’entrée, il serait à même de protéger son père contre toute intrusion.

Joao se dirigea prestement vers la couche de Diogo.
Celui-ci dormait du sommeil du juste, n’entendant rien, « sûr de la sureté » de son antre.
Le vieux briscard s’immisça dans le lit de son ennemi, s’allongea à ses côtés, se tourna vers lui, et le gifla.
Stupéfait, Don Diogo, se redressa, semblant prendre une inspiration pour appeler à l’aide, Arminho lui fracassa la mâchoire d’un puissant et terrible coup de poing…
Diogo releva la tête se tenant la bouche des deux mains, un râle rauque s’échappait de sa blessure. Bavant et pissant le sang, le pitoyable personnage se tortillait, souillant la literie qui prenait des couleurs vermillons.
Ne pouvant appeler qui que ce soit à sa rescousse, ou s’échapper de sa chambre, Diogo regarda Joaquim s’asseoir sur le bord du lit.

Don Diogo semblait paniqué, suppliant Rodrigo du regard.

Arminho se releva et flanqua deux grands coups de poing à son « hôte ».
Ce dernier se coucha instantanément sous la violence de ce nouvel assaut.

Joao semblait se réjouir de cet hallali, il se repaissait de voir son ennemi se vider.

Le voir impuissant, ajoutait à sa satisfaction.
Impuissant physiquement devant Joao, il l’avait toujours été.

- Alors Diogo, mon ami, je suis venu t’offrir la meilleure fin que tu puisses avoir…
Tu n’as toujours été qu’une défection, incapable de diriger ta vie, tes terres ou tes gens… te laissant aller au gré des évènements, sans jamais avoir su saisir ta chance… subissant la vie…
Tu as été passif durant toute ton existence… Et les rares fois où tu as eu les couilles de prendre une décision, elle était mauvaise… tu vas mourir comme tu as vécu, seul dans la pénombre sans lever le petit doigt, sans que personne ne se soucie de toi, comme un étron…


Difficilement Don diogo s’était relevé, debout au milieu de la pièce, il geignait…

- Tu n’as toujours été qu’une morve… renchérit Joao.

En faisant des ronds autour de lui, Arminho, regardait de façon concupiscente ce seigneur à l’agonie.
- Pourtant je vais te laisser une chance…

Il tendit à son adversaire une dague trouvée dans la salle d’arme…
Le bras tendu vers Diogo, Joao attendait qu’il la prenne.
Les yeux remplis d’effroi, Diogo prit timidement l’arme blanche, et d’un geste désespéré l’enfonça dans le flanc de Joaquim.
Sous l’effet de la douleur, le vieux seigneur, désarma son adversaire en frappa de toutes ses forces sur ce bras vengeur. Une tâche de sang apparut le long de son flanc droit. Il regarda sa blessure un court instant et se jeta sur Diogo encore surprit de sa subite et courte rebellion.
Dans un accès de fureur, Arminho frappa son ennemi héréditaire…
Son ennemi à terre, il s’agenouilla… à califourchon sur le pauvre hère, il se mit à frapper, frapper, frapper…
Les coups pleuvaient… l’avalanche ne s’arrêtait plus…
Le visage de Joaquim ruisselait du sang de Diogo. Déjà une flaque grandissait au pied de ce qui devait être maintenant un cadavre. Les poings du vieux loup ne cessaient de s’élever et de s’abattre sur le crâne en bouillie de sa victime.

Puis Arminho releva la tête, la furie cessa.
Il se tourna vers Rodrigo ; Sajara se tenait à ses côtés…

- C’est fait !

Il se redressa, flanqua un grand coup de pied au cadavre et tourna talons. Il regarda à nouveau sa blessure… une égratignure pensa t-il.

- On rentre !


Les escaliers furent avalés dans la discrétion la plus absolue ; la cour du château fut traversée promptement ; les chevaux récupérés, l’espion de sa majesté salué, et le chemin du retour effectué.

L’aube pointait à leur arrivée…
--Rodrigo




Ainsi s’achève la vie inutile d’un pleutre. Dans un bain de sang, par une mort violente et méprisable. Ses supplications désespérées, bien que muettes, n’ont éveillé aucune pitié chez ses bourreaux. Rien qu’une dose de dédain supplémentaire. Non, la mansuétude et le pardon n’existent pas dans ce milieu. Trop de haine, trop de rancunes tenaces, trop d’intérêts divergents. Le sort de Diogo était réglé depuis belle lurette, avec l’assentiment silencieux et la bienveillante protection du roi, ce qui ne gâche rien.

Et les trois ombres s’évanouissent, sans tambour ni trompette, sans manifester leur joie, aussi discrètement qu’elles étaient apparues entre les murs de l’hacienda. Un seul témoin à ce double assassinat, l’envoyé de sa majesté. Aucune crainte à avoir de ce côté, il sera muet comme une tombe afin de ne pas provoquer le courroux de son suzerain.

Du coin de l’œil, Rodrigo épie le visage de son père, qui chevauche à ses côtés. La tache de sang sur sa tunique sombre s’est étendue, mais Arminho reste imperturbable. Son faciès est de marbre. S’il souffre, il ne le montrera pas. Pourtant, même si le vieil ours jouit d’une peau aussi dure que la plus solide des carapaces animales, et dispose d’une résistance diabolique, son fils ressent une inquiétude toute légitime vis à vis de cette blessure dont il ignore la gravité. Malgré lui, une interrogation l’envahit et le trouble. Le patriarche n’a t-il pas commis une erreur en tendant imprudemment un poignard à son rival ? Ce geste de défi n’était-il pas inconsidéré, et empreint d’une arrogance excessive ? Se poser la question, c’est aussi y répondre. Mais soit ! Rodrigo sait très bien comment fonctionne son père. Puisqu’il ne se plaint pas, puisqu’il ne bronche pas, il vaut mieux éluder la question, afin de ne pas écorcher sa fierté. D’ailleurs, en cas de nécessité, Rodolfo, leur ami et médecin, leur est tout dévoué, et Rodrigo l’avertira sans tarder.

Leur retour coïncide avec le lever du jour. Une vive impatience a gagné le jeune officier. Un prénom résonne dans sa tête. Malika. Il va enfin pouvoir la serrer dans ses bras, et lui expliquer en détail leur escapade nocturne, décidée de manière si soudaine qu’il n’a pu la prévenir que par trois mots griffonnés en hâte sur un bout de parchemin.

Les trois hommes se séparent en haut de l’escalier, et Rodrigo se précipite vers sa chambre, le cœur battant. Il pousse vivement la porte. Personne ! Le lit n’est pas défait, mais son message a disparu.

Tu es là, amour ? … murmure t-il en se glissant dans les autres pièces. Il renouvelle la question en pénétrant ensuite dans la chambre voisine, celle de Malika. Mais là, de nouveau, personne. Une sourde angoisse le saisit à la gorge. Il ne comprend pas. Que se passe t-il ? C’est l’aube, et sa gitane devrait être là à l’attendre ou à se préparer. Son chuchotement se mue en cri. Son angoisse se mue en affolement. Malika ? Malika ? Pitoyable litanie. Il se lance dans les couloirs de l’hacienda, se met à fouiller partout. Où est-elle ? Il faut qu’on l’aide à la retrouver ! Rien d’autre ne compte !

--Dona_isabella


La jeune bourgeoise se trouvait maintenant dans sa chambre, bien au fond de son lit, avec doña Philippa à son chevet. Celle-ci l'avait changé à la hâte, pris un torchon et débarbouillé son visage qui, depuis un petit moment, était dépourvu de couleurs, peigné ses cheveux avec une tendresse presque maternelle, tandis que la "malade" reprenait ses esprits. Ou essayait. Ou faisait semblant. Personne n'en saura jamais rien. Elle est tellement douée pour la comédie que plus rien n'est surprenant de sa part.

Sa protectrice tente en vain de lui arracher quelques réponses tout en lui épongeant le front. Pourquoi tu étais sale? qu'est ce qu'il s'est passé? quelque chose ne va pas? Rodrigo te manque? tu n'es pas malade j'espère ? tu as bien mangé ce matin? ce n'est pas l'autre blondasse qui a fait ça quand même ? ... et la brune lui répond par un énième hochement de tête. Aucune envie de s'attarder là-dessus. Alors elle fait un de ses sourires hautement travaillés et perfectionnés pendant des années devant un miroir, un sourire mignon, doucet, angélique, qui peut bien dire "ne vous inquiétez pas pour moi, je vais bien" comme "laissez moi tranquille, j'en ai marre de vos questions, encore une et je vous fait bouffer votre torchon!", au choix -ou même les deux- et rétorque d'une petite voix "merci". Bref, une comédienne, j'vous l'ai bien dit !
La vieille femme hausse les épaules, et quitte le boudoir de la donzelle, ne se faisant pas prier plus longtemps.

Le temps passe et la portugaise ne bouge pas, ne bronche pas, le regard fixé sur le plafond. Elle pense. Un peu trop, à vrai dire, comme d'habitude. Dans sa tête, la situation est analysée, réanalysée dans tous les coins et recoins, de face, de dos, de côté.
Trop de choses étranges dans cette baraque. La venue de la gitane, son accent bizarre, peut être même sa sorcellerie. Le changement d'avis de Rodrigo vis à vis de leur mariage. Son amour pour Malika. Et puis la disparition soudaine d'Inès.
Y a un truc qui tourne pas rond. Y a du complot dans l'air, et dans les deux camps, si ça se trouve les deux bourgeoises n'ont pas tout bien calculé ? Non non, pas possible. Leur duo vaut bien des armées royales, des centaines de grosses têtes savantes. Et surtout, une infinité de brigands, malfaiteurs et comploteurs réunis.

L'obscurité prend place dans la pièce. Vient alors la nuit. Isabella n'a toujours pas bougé, juste ses paupières se sont baissées et son souffle s'est régularisé.
Les tourments, bien qu'apaisés, ne sont pas disparus. Après la pluie vient le beau temps ? C'est ce que le dicton raconte. Moi je pencherais plus un soleil bien trop chaud pour la saison, accompagné d'orages violents, et bien d'autres perturbations atmosphériques...

_____________

La jolie brune s'étire, jette un regard par la fenêtre. Le jour n'est pas encore levé. Les souvenirs d'hier lui reviennent peu à peu, le malaise aussi, mais qu'elle parvient toutefois à maîtriser. Elle se demande combien de temps elle a dormi... une éternité. Les jours passés dans l'hacienda sont une éternité. Les jours sans le marin sont une éternité.
Ensuite, le rituel habituel: toilette de chat, habillage, coiffage, parfumage.
Dans son miroir reflètent les premiers rayons de soleil...
Et dans les couloirs résonnent les premiers pas. Et aussi les cris.

Affolée, Isabella se lève de sa coiffeuse, en faisant même tomber son tabouret. Cette voix. Sa voix. Elle ouvre la porte, et court, court aussi vite que ses jambes le peuvent, ses jupons dans chaque main. Bien évidemment -elle aurait du s'en douter-, ses pas la mènent à la chambre de Rodrigo (et Malika). Dans une pulsion incontrôlable, elle se jette à son cou, le serrant de toute ses forces entre ses bras. Bien sûr, c'est une étreinte purement fraternelle. Excuse toute faite au cas où il la questionne, ou la regarde avec étonnement. Mais ce n'est pas le cas, les traits de son marin sont tirés, ses yeux cernés. De sa bouche s'échappe un seul mot, un seul cri, un seul nom. Malika.


Rodrigo... nous t'attendions... on s'inquiétait tu sais ! visiblement, il s'en contrefiche. Plan b. Malika? Malika n'est pas là? Peut être qu'elle est descendue en bas? Ne t'énerve pas comme ça, Rodrigo. Je ne pense pas que ta mère sera contente de te retrouver dans tous tes états. Déjà qu'elle ne t'a pas beaucoup vu, mais si en plus tu es en colère... allez viens, on va chercher ton amie.

Ce dernier mot lui arrache la bouche, mais pourtant son sourire ne la quitte pas. Elle l'attrape par le bras et descend en sa compagnie au rez-de-chaussé. Là, elle aperçoit le patriarche, accompagné d'autres hommes. Non, elle n'a pas le temps d'apercevoir le sang qui inonde sa chemise, ni leurs couteaux tâchés de rouge. A eux aussi, elle adresse un sourire, d'ailleurs plus dans le vide qu'à eux, mais on ne dira rien. Si seulement cette pauvre idiote savait qu'ils venaient de tuer ses parents et sa gouvernante. Si seulement ! Mais ce n'est pas le cas, alors elle ouvre la porte d'entrée, et Rodrigo la rejoint, ayant déjà fait le tour des pièces, les pupilles en alerte, à la recherche d'une tête blonde. Toi aussi, pauvre idiot, si seulement tu savais que ta douce et tendre était attachée à une tombe, nue, bâillonnée, dans l'humidité. Si seulement !

Sous le soleil levant à l'horizon, le marin et la poupée courent dans le jardin immense de l'hacienda. L'un crie son désespoir à travers le prénom de sa bien aimée, l'autre crie l'hypocrisie et la haine à travers le prénom de son ennemie jurée. A deux, ils sont pire que les coqs qui chantent à l'aube pour réveiller le village. Ils passent derrière les buissons, des fois que la gitane se serait perdue en se promenant près des rosiers ou autres fleurs, puis viennent aux écuries.
Là, un chien -auquel Isabella ne fait pas vraiment attention-, se met à aboyer. Sur une barrière de bois, y a un singe -auquel Isabella ne fait pas vraiment attention- caché dans l'obscurité, dont seuls les deux yeux brillent et observent avec une certaine animosité animale le couple. La donzelle ne remarque pas le trouble qui se lit sur le visage de Rodrigo, toujours en train de tirer sur son bras pour continuer leurs recherches en direction des petits bâtiments à l'arrière du domaine...
--Rodrigo




La fatigue de la longue chevauchée nocturne ? Envolée. Toute cette tension accumulée en lui au moment de l’exécution sauvage de Diogo ? Il ne l’oubliera pas, mais tout ça passe désormais au second plan. A présent, Rodrigo renverserait les plus hautes montagnes pour retrouver sa bien-aimée. Il court partout, il vole, traînant derrière lui Isabella, mais celle-ci l’aide t-elle réellement ? La disparition de Malika, sa rivale inattendue, doit plutôt la soulager, non ? Et si elle … ?

Non, c’est difficilement imaginable. Néanmoins, il se retourne sur la brune, et lui jette d’un ton sévère : Tu n’es au courant de rien ? Tu me le dirais, n’est ce pas ? Mais sans attendre la réponse, qu’il est certain de connaître, il poursuit ses recherches au pas de course.

Dans l’écurie, il constate avec effarement que le box qui abritait Terra, le cheval de sa belle, est désespérément vide. Dieu du ciel! Ce n’est pas possible ! Ils s’aiment tant, elle n’a pas pu s’en aller comme ça, sans le prévenir. Bien-sûr il y a ce climat d’hostilité autour d’elle, mais Malika est de taille à l’affronter. Non, ce n’est pas possible. Sa gitane est explosive, elle réagit parfois de façon précipitée, mais il ne peut croire en un départ si brutal.

Toujours suivi comme son ombre par Isabella, Rodrigo fouille minutieusement toute l’écurie, et là, soudain, il aperçoit Rolio et Igor, les animaux familiers de Malika, qui l’accompagnent partout depuis des mois, voire des années. Ca devrait le rassurer, elle ne peut s’être éloignée, elle n’a pas pu abandonner son chien et son chimpanzé ! Mais, au contraire, c’est une incompréhension totale qui l’envahit brutalement. Ces deux constatations sont contradictoires. Que faut-il en déduire ? Cette situation le dépasse, c’est tellement bizarre. Non, ne pas se laisser abattre … Ne pas se laisser désarçonner par ces événements mystérieux ! Il y a bien une explication !

Le jeune officier sort de l’écurie avec la brune sur les talons. Ses yeux inquiets fixent les murs des bâtiments qui constituent les annexes et sont regroupés à l’arrière. Mais est-ce encore utile d’explorer tous les recoins de l’hacienda ? Allez, courage ! Trouve une idée de génie, Rodrigo, sinon tu ne t’en sortiras pas. Du nerf, que diable !

Igor ! Ce nom jaillit soudain d’entre ses lèvres ! Igor, le chien fidèle, l’ami … Rodrigo revient sur ses pas, et appelle l’animal qui le rejoint aussitôt. Igor avec son flair exceptionnel, c’est peut-être le salut. L’espoir renaît …

Cherche … Aide nous … Cherche Malika …

Le chien le contemple. Rodrigo insiste. Il répète la phrase plusieurs fois, et tout-à-coup Igor s’élance dans le sentier menant tout droit à la chapelle. Serait-ce une piste ? Déjà ? Le jeune homme se rappelle soudain que c’est aux abords de ce petit édifice religieux qu’il a quitté sa bien-aimée, la veille, avant l’expédition punitive. Sans trop se bercer d’illusions, il presse le pas pour suivre le vieux chien de berger, précédant toujours Isabella. Il pousse la porte, et l’animal et la jeune fille pénètrent lentement à sa suite, entre les larges piliers de pierre bordant la nef centrale.

--Dona_isabella


Igor !

Isabella sent le bras du marin la tirer en arrière, brutalement. Elle se retourne en maugréant et découvre un chien, qu'elle ne connait pas et qui ne lui dit rien. Non, vraiment, les bestiaux ne sont pas sa préoccupation dans la vie, tout juste si elle arrive à se rappeler du nom de sa monture -et encore, seulement les fois où elle monte à cheval-. Pourtant, dans les pupilles de Rodrigo, une lueur d'espoir apparait, une lueur que la portugaise n'arrive pas à cerner. Ses lèvres s'obstinent à répéter "cherche Malika, cherche".

C'est le remue ménage, dans le cerveau de la brune. Ses méninges se retournent, tentent de décrypter l'étrange scène qui se passe devant ses yeux. Se peut-il que la gitane soit venue avec un chien ? Elle essaie de se souvenir la première fois qu'elle l'a vue, à côté de Rodrigo, avec ses cuissardes rouges ridicules. A vrai dire, ce tableau l'avait tellement abasourdi que les légers détails en arrière plan lui avaient totalement échappé.
Oh non, quelle sotte Isabella ! s'il est bien à elle, alors il va la tr...

Pas le temps de réagir, voilà que le cabot se met à courir en direction de la chapelle. Rodrigo s'élance à sa poursuite, tandis que la bourgeoise attrape de nouveau ses jupons dans ses mains et se presse pour le rejoindre. Peut être que le chien se trompe, il va descendre un peu plus bas dans le jardin... mais non, tout espoir s'envole lorsqu'il se lève sur ses pattes arrières et pose celles de devant sur la porte de l'église, y enfonçant ses griffes.


Non non non non non... ! murmure presque inaudible mais qui exprime la colère inévitable que la jeune femme éprouve à cet instant envers le petit mammifère, pourtant ami fidèle de l'homme - à c'qu'on dit!-. Si seulement elle l'avait su plus tôt, elle aurait tout de suite ordonné à la cuisinière de l'hacienda de le servir pour le diner... Oh, regret, regret... non, pas de temps à perdre pour toi.

Ils pénètrent dans le lieu sacré, qui en quelques jours servait à beaucoup de choses. A tout sauf à des pratiques religieuses. Isabella frissonne, espérant secrètement que le chien reparte dans une direction opposée à chacune de ses enjambées... celui-ci fait le tour, passant par les bas côtés, puis près des bancs, le museau en action. Jusqu'à ce qu'il pose ses pattes sur un tapis en face des chœurs, LE tapis cachant la trappe qui mène à la crypte. La brune ne respire plus, son regard est rivé sur Rodrigo.
Diversion Isabella, DIVERSION !


Rodrigo !! Le flair de ton ami animal n'est pas bien efficace... il agit plutôt à l'odeur des carcasses et de la bonne nourriture. Nous avions récupéré ce tapis des cuisines... il faut croire que le parfum ne disparait pas si facilement. C'est bien... continue... dans la crédibilité...
Continuons nos recherches, nous perdons notre temps ici, d'autant plus que venir dans un endroit sacré dans de telles circonstances n'est pas très... hum, consenti. J'ai bien dit crédibilité... Allez, je te dis. Je suis certaine que Malika se trouve dans un endroit sûr, mais peut être à t-elle eu besoin de souffler un peu, elle doit être dépaysée ici. Peut être qu'elle a décidé de partir définitivement... et n'a pas voulu te prévenir de peur de revenir sur sa décision...Elle se rapproche de lui et pose une main sur son épaule, avec une tendresse infinie. Ton cœur est bon, Rodrigo. Mais il faut savoir en prendre soin et ne pas le donner à n'importe qui... les dernières paroles et les derniers mensonges sont émis dans la chapelle. Paroles qui résonnent. Fort, très fort. Jusqu'à la crypte...

Elle ouvre la porte de la chapelle, invitant le marin à sortir.
See the RP information <<   <   1, 2, 3, ..., 8, 9, 10, ..., 12, 13, 14   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)