Aimbaud, incarné par Blanche_
Discuter vraiment ? Oh oui, asseyons-nous à une table et bavardons en croquant des biscuits ? Tu m'as achevé, tu m'as fait vomir de malheur et de honte, tu m'as émietté le coeur en petits confettis jetés dans la gadoue, et maintenant on discute ? À mi chemin entre l'abattement et l'amertume, Aimbaud de Josselinière se redresse très lentement à la force des bras dans son grand lit en pagaille. L'espèce de marteau qui lui frappe la boîte crânienne entache sévèrement son humeur... Il gratifie l'épaule de Blanche d'un regard sombre en dessous.
Un peu emportée ?... Vous m'avez hurlé regretter que je sois venu.
- Beaucoup emportée. Raah. Mon vocabulaire me fait défaut.
Un petit silence passe au galop, ainsi qu'un courant d'air échappé de la fenêtre.
Blanche... Si vous ne souhaitez pas que je m'attarde ici, vous...
- Et si j'le souhaite, je l'exige. Je veux que vous restiez, Corbigny.
Rah mais ne soyez pas revêche, comme ça... Vous n'avez rien à exiger, je veux bien exécuter le moindre de vos souhaits.
Elle, dépitée, répond brusquement, pendant que lui soupire en massant son front douloureux.
- Vous n'êtes pas un pantin ! Vous pourriez avoir un avis, des exigences !
Pardon de vouloir vous accommoder.
- Bon ! C'est un fait que je suis exigeante, et vous conciliant. Mais il y a un coté angevin en vous, non ?
Elle le jauge, de sa mine la plus vexée et agaçante, ce qui le fait réagir comme un cheval frappé par un éperon. Il ouvre les mains, exaspéré.
Non mais, mais de quoi vous me parlez là ?! Qu'est-ce que vous me voulez à la fin ? Je n'entends rien à vos caprices.
Soupir, petit soupir breton.
- Je dis simplement, que vous me seriez tout aussi agréable, en me soumettant certaines de vos exigences.
Fort bien. Voici mon exigence, laissez-moi seul pour l'heure. Je n'ai pas la tête à vos querelles...
Silence, petit silence breton.
- Ça n'est pas à proprement parler une querelle. Une discussion houleuse.
Un traversin est envoyé balader à travers la pièce avec colère.
Elles me gavent vos discussions houleuses ! La paix, ma dame. La paix si vous en êtes capable !
- J'me tais si vous l'exigez, mais je ne vais pas perdre une seconde de vous quand elles sont si rares !
Elle croise les bras, petite guerrière hautaine qui croit pouvoir dresser n'importe quelle bête sauvage avec un susucre et beaucoup de volonté. Lui digère un instant de silence, respirant avec énervement, avant de retomber la tête.
Je dois me mieux vêtir. Sortez.
Bouche rose un instant béate, trois petits bonds et la porte claque à en faire péter la serrure. Soupirant et tentant de se rasséréner, Aimbaud somnole encore quelques temps. Puis, vêtu de frais et après s'être plongé la tête dans une bassine d'eau froide, il mene Lugh aux dehors du château, prenant soin de dire à un garde avec un air blasé :
Je reviens. Inutile qu'on fasse sonner l'alarme à toute la garnison.
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