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Information and comments (1)

Info:
Léard, petite seigneurie du Maine. Annonce d'une nouvelle mort, encore...

[RP] Once again...

Cerridween
[ Everyone I know goes away in the end and you could have it all my empire of dirt ]

Elle glisse le long du mur, comme une feuille morte...
Les cheveux de feu défaits dégoulinent sur ses épaules, agglomérés de sueur, comme éteints.
Sa main s'ouvre et la lame tombe sur le sol dans un bruit mat de métal fatigué.
Un filet de sang coule le long du creux de sa paume, abimés, cloqués, fendus, avant de glisser sur ses doigts et chuter en petites gouttes opaques...
Le mannequin qui se trouve devant elle est informe. Défiguré. Des coups ont fait sauté des bouts de bois qui jonchent le parquet, piétinés.
Elle a mal. Si mal qu'elle ne sent plus rien. Son épaule ne répond plus, ses jambes ne la tiennent plus debout. Ses joues sont creusées, blafardes. Sa poitrine se soulève au rythme de sa respiration, diffuse, difficile, hachée...
Elle a voulu voir. Voir si elle pouvait atténuer. Ça … encore... si elle pouvait oublier. Arrêter de souffrir. Un instant... Une minute... une seconde... Elle a essayé de tout son corps. Pendant deux longues heures sans s'arrêter. Devant une armée entière, imaginaire. De taille et d'estoc, toute la gamme de ce qu'elle connaît, toutes les bottes. Trempée jusqu'aux os, épuisée jusqu'à la moelle, elle vient de tomber...

Rien n'y a fait...

La tête roule sur le côté, contre la pierre. Son visage est séché par le sel et la sueur. Il semble avoir vieilli de dix ans, tant il est crispé, défiguré par la douleur et la peine. Elle laisse éclater un sanglot dans la froideur de la nuit alors que lentement se consument les dernières chandelles.


Chevalier, je suis désolée de devoir sortir de notre monastère pour vous apprendre la triste nouvelle...


C'était une si belle journée. Le soleil caressait les terres de Léard où le blé poussait sans encombre. Les grillons ronronnaient tranquillement. Laïs riait dans sa chambre, en faisant un pas de danse au bras de son cousin. Elle passait en revue, vêtue d'une simple chemise blanche, de ses braies noir corbeau et de ses bottes de cavalier, les derniers préparatifs en cuisine avant d'aller vers les ateliers. Elle a passé du temps à discuter avec les lavandières, participant du bout d'un sourire en coin aux caquetages sur les hommes et leurs regards qui se faisaient pressant sur les manches et les pans de robes qui remontent de plus en plus au champs, proportionnellement à la chaleur de l'été qui s'installe. Elle a engagé ses pas vers l'écurie et a passé la porte pour que ses bottes foulent les pierres de la cour. C'est là qu'elle les a vu. Tous trois. Elle a lentement perdu son sourire en ne voyant pas le leur. Les mines étaient graves sur les trois visages, l'un plus vieux que les autres. Celui du prieur. Elle est resté comme une statue, plantée au milieu de l'espace vide pendant qu'il s'approchait, les deux autres moines en retrait. Il lui a parlé doucement, presque tendrement. Elle a ouvert la bouche. Aucun son n'est sorti. Sa tête a tourné. Elle a manqué de trébucher, prise d'un grand tremblement.

Mon enfant, je...

Elle n'a plus rien entendu. Rien... Elle n'a pas entendu l'Intendante arriver dans son dos et la soutenir en appelant à l'aide. Elle n'a pas vu Laïs se décomposer sur le seuil et pleurer dans les bras de Gauwyn. Elle ne se souvient pas. Elle se rappelle s'être réveillée dans son lit à la lueur d'un demi quartier de lune. Avoir penser à un mauvais rêve. Et être tombée durement dans la réalité en voyant l'Intendante la regarder avec inquiétude et lui dire qu'elle était désolée, si désolée. Elle ne sait pas comment elle a eu la force d'écrire deux lettres. Elle ne sait plus. Elle sait juste qu'elle voulait que cela cesse...

Et la voilà, cassée sur le sol, poupée de chiffon désarticulée. Elle ne refoule plus rien. Elle saigne. Elle saigne abondamment, inondant ses joues. Elle n'aura pas tenu sa promesse. Une des plus importantes. Celle qu'elle a fait quand il est mort dans ses bras. Elle n'aura pas réussi encore une fois. Elle n'aura rien pu faire encore une fois. Et encore une fois, cela la torture, la vrille, des entrailles jusqu'à l'âme.

Je vous hais...

Le murmure s'est déjà perdu dans le silence alors qu'elle apostrophe le ciel en hurlant.

JE VOUS HAIS !

Il lui a prit. Lui. Celui qu'elle a essayé de préserver. L'ainé de la fratrie. Encore un. Père, fils... pour elle, plus de saint esprit. Elle aurait pourtant tout donné. Tout...

C'était une si belle journée...
Le soleil caressait les terres de Léard où le blé poussait sans encombre. Les grillons ronronnaient tranquillement. Laïs riait dans sa chambre, en faisant un pas de danse au bras de son cousin. Elle passait en revue, vêtue d'une simple chemise blanche, de ses braies noir corbeau et de ses bottes de cavalier, les derniers préparatifs en cuisine avant d'aller vers les ateliers.
Elle ne pourra pas recommencer...

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Karyaan
[Fleur Blanche sur Pivoine Noire...]

C'était une belle journée...
De celle qu'on aime à partager. De ces rayons de soleil qui bercent au lieu de bruler. Emprunte de ce silence solennel parce qu'on savoure les heures qui défilent. La vie reprend ses droits, après un hiver où tout sommeillait. L'été écrasant n'est pas encore là. C'est dans ces journées, bien trop rares, qu'on se rend compte que le bonheur est simple, tellement simple.

Elle était partie aux aurores, comme à son habitude. Croisant les travailleurs des blés heureux de cette journée qui s'annonce. Toujours vêtue de son immuable cape qu'elle ne quittait jamais, toujours à pieds. Elle n'avait pas encore trouvé le cheval capable de la supporter.
Et puis elle aimait caresser les arbres en chemin, les écouter chuchoter, leur parler, elle aimait se fondre dans cette nature où elle se sentait vraie, elle-même, apaisée.

C'était une belle journée...
Malgré les diverses missives reçues des quatre coins du Royaume, annonces de conflits, de prise de ville. Le monde s'entredéchire dans un immuable cycle. Même ça, n'atteindra pas son moral.
Alors, elle se mit à son bureau, et commença à travailler.
Missives envoyée aux ambassadeurs, au Conseil. MA à avertir, à protéger. Les choses furent rapidement pliées. Quand on est organisé, le travail est beaucoup moins lourd.

C'était une belle journée...
Elle se leva, prit un verre de vin et se mit à la fenêtre, appréciant le soleil encore tiède.
Penchant la tête de coté, ses yeux de brume balayant le jardin de l'ambassade qui s'offrait à elle, son attention fut attirée par un parterre de fleurs. Léger sourire, elle sortit, verre à la main, visage serein, et s'en approcha.

C'était une belle journée...
Et l'odeur des pivoines blanches l'envahit, l'enveloppant sans pudeur. Fermant un instant les paupières, elle savoura leur salut, comme le baiser d'un amant au réveil. Tendant la main senestre, elle effleura leurs multiples pétales éclatés comme des feux d'artifices cotonneux.
Et puis un frisson de malaise...
Léger froncement de sourcil, tic nerveux mais rien de plus.

c'était une belle journée...
Rien ne pourrait l'entacher. Sourire tranquille tout en buvant une gorgée de liquide carmin.
Et puis une goutte, puis deux, rouge sang sur pivoine blanche immaculée.
Autre malaise, autre frisson.
Elle regarda son verre, légèrement fendu. Haussant un sourcil, étrange, elle ne l'avait pas remarqué. Petite caresse à sa lèvre coupée, langue qui effleure la fine blessure. Goût cuivré.
Autre frisson, autre malaise nauséeux.


Excellence... ?

Elle fit volte-face, surprise et ses yeux gris se plantèrent sur l'homme en nage qui était devant elle. Essoufflé, pâle comme la mort, elle le connaissait et son cœur se fendit, sensation de tomber dans les abîmes pour ne jamais en revenir. Elle ne pu articuler un mot. S'attendant au pire, car elle s'y attend tous les jours. Elle connait la fragilité de celle qu'elle sert.

... il faut... il faut venir... Elle est... venez...

Et le verre s'envole, éclaboussant de son liquide carmin toutes les pivoines blanches qui en deviennent noires.
Et la voilà la sorcière sortant en trombe de l'ambassade, suivant le commis de l'Intendante. Grimpant sur la croupe de son cheval qui ne moufeta étrangement pas. Enserrant les hanches du jeune homme, c'est au galop qu'ils se rendirent à Léard.
Et la tête collée à son dos, paupières fermées, se souvenant de la dernière fois qu'elle avait quitté une ambassade précipitamment. Sauf que c'était celle du Poitou et qu'elle se rendait en Bretagne. Sauf que c'était pour son père condamné au bucher et qu'elle arriva trop tard. Sauf que cette fois-ci elle ne voulait pas, non, elle ne voulait pas la perdre elle aussi. Alors elle priait à s'en faire péter l'âme pour que cette fois-ci, elle n'arrive pas trop tard. Pour que son cœur ne lâche pas. Pour que le froid ne l'envahisse pas.

C'était une bien belle journée oui, quand l'animal freina des quatre fers alors que la Brindille avait déjà sauté à terre. Bottes ferrées frappant le sol et courant à perdre haleine. Croisant le personnel blafard, endeuillé, inquiet. Elle ne leur prêta pas une seule once d'attention, il n'y avait qu'elle dans son esprit et elle couru, montant les escaliers, bousculant une femme de chambre qui manqua de débarrouler et créer un nouveau drame.
Et elle se figea dans ce couloir envahit par la pénombre. Elle haletait d'avoir tant couru mais peu importe. S'approchant de la chambre de la maitresse des lieux, elle y entra et peu importe qu'elle y soit invité ou pas.
Ça faisait déjà des mois qu'elle s'était auto-proclamée soigneuse du Chevalier et elle comptait bien imposer une nouvelle fois cette fonction là. Personne ne la toucherait, personne ne lui administrerait quoi que se soit sans son consentement sans risquer d'y perdre la vie.
L'Intendante le savait et c'est pour cela qu'elle l'avait fait appeler. C'est pour cela aussi que mise à part elle, personne n'était dans la chambre.

Elle ôta sa cape poussiéreuse, et dans un réflexe conditionné, décrocha la fiole à sa ceinture. Quelques gouttes dans ses mains, lavage rapide, odeur de lavande. S'approchant du lit, l'appréhension de ce qu'elle y trouvera lui donna une nausée qu'elle eut du mal à contenir.
Regard inquiet à l'Intendante qui la rassura. S'asseyant près du corps inerte, elle fixa le Chevalier évanoui. Celle qu'elle considérait comme sa mère d'adoption. Celle à qui elle a donné sa vie et plus encore.
Léger sourire en la sentant en vie. Main qui se pose sur ce visage marqué par le temps et les blessures. Elle replaça une mèche rousse qui barrait son front.
Il n'y avait pas grand chose à faire si ce n'est veiller. Son cœur fragile avait tenu et la sorcière s'assurera qu'il tienne encore à son réveil. Donnant à l'Intendante l'ordre de lui faire boire un verre d'eau où quelques gouttes de digitale pourpre y furent versées.
Puis la Brindille sortit. Fallait qu'elle sorte, fallait qu'elle respire, fallait qu'elle voit le ciel.

L'Intendante vint l'avertir quand le Chevalier se réveilla. Elle n'eut pour réponse qu'un bref sourire mais resta assise, au milieu de la cours du domaine. Coudes sur les genoux, regard fixé sur le parterre de pivoines noires à une dizaine de mètres d'elle. Et cette odeur de chair brulée dans la gorge. Ce malaise, cette sensation d'avoir su. Avait-elle eu des signes aussi pour ses parents ? Elle n'en a pas le souvenir.
Combien de temps elle resta là, elle n'en savait rien.
C'est un cri qui la sortit de sa torpeur. Un cri qui figea tout le domaine.

C'était une belle journée...

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"La parole est l'arme du faible, l'épée l'arme du sot, j'ai choisi d'être faible et de m'entourer de sots."
Gauwyn_de_vergy
[ Mourning Morning ]


Il y a de ces choses, qui nous échappent, que l’on ne maitrise pas.
Dans la vie, l’homme à un penchant naturel pour se dire, que son existence a atteint son plus bas, qu’il est impossible que la situation soit pire, ou que sa condition s’embourbe un peu plus.
Chaque esprit dispose alors de cette chance, de croire qu’il ne peut plus qu’aller de l’avant, plus que s’envoler au coté d’un autre, obtenir le répit qu’il pense mériter.
Cette chance, et un don d’optimisme offert à la condition humaine, un filament d’espoir qui permet à chacun de mettre un pied devant l’autre même dans les pires moments, ce petit battement de l’esprit qui combat le pessimisme de chacun, se battant avec la lumière comme bouclier, et la rédemption comme lame. Ce guerrier, tout le monde y croit. Mais personne n’ose soupçonner la force de la vie, qui semble bien souvent plus dirigé par le diable que par Aristote.
La vie, véritable tribunal céleste qui se fait envahir des émissaires de chacun pour se rallier à sa cause, on trouve ainsi le Cupidon d’Aristote, rapprochant chaque couple de la Lumière, ou encore L’aurore idyllique, qui réveille chaque âme le matin par sa Lumière… Mais dans ce jeu là, chaque partie joue à arme égale, et l’enfer dispose de nombreuses cartes aussi.
Cette soirée là, c’est la mort qui frappa à Léard, emmené par un homme de Dieu, corrompu de remord, condamné à livrer sentence.
Le jeune rouquin était dans cette fameuse période ascendante, ou les anges de lumière l’avait rallier à leur cause, dans les bras de sa cousine il va de soit… leurs pas s’enchainés dans la danse de leurs vies, illuminant leurs visages de sourires radieux…
Les lumières dansaient, accéléraient la cadence, sans se douter du mal qui se tramait, sans imaginer que la Mort allait frapper à la porte.
Trois coups durs frappèrent le bois de la porte, mettant un terme sec au tournis de leurs esprits…marquant un pas haletant pour s’ouvrir sur le pire.
Un valet affolé ne savait pas où donner de la tête. L’intendante hurlait à l’aide alors que les hommes de dieu se muaient en silence. La réalité était en train de creuser… Les deux âmes descendirent en courant, les deux âmes se jetèrent au travers de chaque porte, ne sachant se que réservait la situation. Etait-ce Tante ? ou Pire encore ? Etait-ce dangereux ? Pas le temps de s’en inquiéter…
Le rouquin serre fort les mains de sa cousine. Il vient de s’immobiliser, de rester planté là, face à la cour, face à ses trois hommes d’église et sa tante à terre. Il ne l’avait jamais vue dans un pareil état. ses yeux alternativement sur chaque protagoniste cherchant l’explication à cette situation…
Le regard morne des moines, l’attitude de la maitre d’arme à terre, les pleurs de l’Intendante… Oui forcément… Guilhem, son propre cousin, l’héritier légitime de la famille, décideur de leur destin, n’était plus.
Il voulut s’effondrer. Mais il restait stoïque, accueillant dans ses bras sa cousine en pleurs. Mais ses larmes à lui ne coulaient pas. Elles se cristallisaient dans les joyaux de saphir, prisonnière de leurs peines.
Ces prunelles s’avouaient alors tristes spectatrices d’un monde qui s’écroulait et de sa tante qui flanchait progressivement dans les abîmes de la souffrance. Elle était en sueur, crispée, peinée, comme il ne l’avait jamais vue. Elle n’était plus l’honneur, la capitaine, la femme de loi qu’il connaissait, non…masque et armures étaient tombés pour la toucher en plein cœur, laissant ruisseler sueurs et sang sur son corps meurtri.
La paralysie prenait possession du corps de l’anglais, alors que ses doigts se crispaient sur les épaules de Laïs et que son regard restait immobile. Il n’a jamais fait face à cette situation…si ce n’est il y a plus de 13 ans, alors qu’il n’était que bambin, trop innocent pour subir les massacres de la vie, trop jeune pour rentrer dans la grande partie de leurs esprits.
Sa tante tomba, laissant les hommes de foi stoïques et l’Intendante retenir son poids. La logique voudrait que Gauwyn aille l’assister. Mais il ne peut pas, il n’y arrive pas, son cœur souffre, de l’abandon, ouvrant à grande vanne le débit de ses – mauvais – souvenirs.
Les gardes prirent bientôt le relais, pour mener le chevalier jusqu’à sa chambre laissant la nuit s’emparer du manoir, plus que jamais dans l’obscurité.
Les deux amants avaient rejoint la chambre du rouquin, s’installant sur le lit adossés contre la tête du lit. Comme les flammes de la torche dansaient, les larmes tombaient. Gauwyn gardait ainsi sa cousine près de lui, essuyant ses larmes au fur et à mesure qu’elles coulaient, laissant le sommeil envahir la beauté qu’il essayait de protéger. Bientôt les songes de Morphée prirent possession d’elle, la laissant s’endormir dans le creux de ses bras…
Le jeune roux lui, fixait la flamme de la torche, passant sa main dans les cheveux de sa cousine de temps à autres comme pour se raccrocher à elle, elle seule qui le sortirait de ses mauvais souvenirs.
Le sommeil ne viendrait pas, il le savait. Ses yeux s’empourpraient progressivement luttant de leur mieux pour rester éveillé.
La flamme fixée, elle, se consommait, minute par minute, heure par heure et Gauwyn savait qu’un moment où l’autre elle finirait par les plonger dans l’obscurité, tout comme venait de le faire la vie.
Son esprit était lui progressivement assombri, il revoyait sa mère pleurer des semaines, en brève trame de souvenirs… il revoyait surtout les conséquences, de la mort de son père qu’il n’a que trop peu connu…comme son cousin.
Son enfance avait été bouleversée par cette disparition, entrainant leur fuite vers l’île britannique, le début d’une éducation bien différente…un changement majeur en quelque sorte.
A ce moment précis, il se demanda si le vieux continent ne lui portait pas malheur, si finalement, la mort ne lui réservait pas les pires souffrances ici. Il se demanda si il allait devoir une fois de plus fuir ce pays de cœur, il se demanda ce qu’allait devenir Laïs, sa tante ou encore Beaumont, lieu de résidence et de souvenirs…
Bientôt la froideur de la pleine lune perça les fenêtres, n’effleurant ni les songes de Laïs, ni les pupilles rouges du rouquin qui ne s’étaient toujours pas fermées. De Longues virgules noires venaient souligner les prunelles en guise de cernes. Le masque de la mort l’avait marqué au fer, hant2 la nuit durant, sans qu’il ne puisse lutter, sans qu’il ne puisse non plus abdiquer.

JE VOUS HAIS !

Cerrid ! Le cri résonna dans tout le manoir, réveillant en sursaut la belle lovée dans les bras fébriles du rouquin. Il faut qu’il aille voir, qu’il descende en enfer malgré la peur, qu’il assume son nouveau rôle, qu’il assume d’être le dernier homme vivant à porter le patronyme…
Se dégageant du lit auquel il n’offrait ni passion ni sommeil, il répond au regard inquiet de sa cousine d’un baiser sur le front…elle s’agrippe à son bras pour l’empêcher de partir mais dans l’esquisse du baiser accordé il finit par se faufiler, descendant quatre à quatre les marches menant à la salle d’arme du chevalier, se précipitant vers la porte qui faisait barrage.
Dans la panique il essaie d’ouvrir violemment la porte. Mais la poignée ne tourne pas. Elle est fermée à clé, les séparant de la pièce de Lucifer comme pour les protéger.
Mais il ne peut pas, il ne peut pas rester là, à attendre que les démons emportent sa tante, il ne peut pas risquer que quoi que ce soit arrivent encore dans la nuit non, elle n’a pas le droit. Il faut passer, passer cette mastodonte de porte quoi qu’il advienne…ses poings se resserrent, se crispent. Il pourrai essayer de crocheter la serrure, mais il n’y arriverai pas, passer par les fenêtres serait plus compliqué qu’il n’y parait. il faudrait appeler Laïs, mais non… Il ne peut pas la laisser affronter le martyr qui peut se cacher derrière cette porte, il ne peut pas la mouiller de plus de peine qu’elle n’en est déjà imprégnée. Il va falloir agir seul et de son mieux…enfoncer la porte reste la solution ultime, la seule possible aux yeux du rouquin déboussolé. Son cœur bas, plus fort qu’il ne devrait. Ses yeux vacillent entre peur et courage. Pouvait-on être brave alors que la peur nous traverse ?
Il recule de quelque pas, remonte sa chemise sur ses avant bras et ferme les yeux un instant.
Prenant de l’élan, il s’élance, fracassant son corps contre la grosse porte qui ne tremble que trop peu pour créer la moindre ouverture, une première fois…mais rien ne se passe, la douleur emporte déjà son bras. Mais qu’importe, l’important se trouve derrière, alors sois un Homme et sacrifie toi, sois utile pour une fois.
Il respire fort, recule puis s’élance à nouveau, mettant toute sa force dans l’impact, sacrifiant son bras entier dans l’espoir que le bois cède…Mais encore une fois, à peine un tremblement, la porte renforcée est trop solide et se défend avec ferveur contre l’assaillant.
Les larmes coulent, à flot depuis l’océan de peur que représentent les prunelles d’azur. Il lâche, tout, sanglote presque, relâchant les nerfs qu’il a trop longtemps retenu. Il est seul, face à un obstacle et ne peut pas abandonner, non certainement pas…
Alors il prend un peu plus d’élan, essuie tant bien que mal ses sanglots, et s’élance une troisième fois de tout son poids vers l’avant, un peu plus vite un peu plus fort. A coup sûr l’un des deux craquera..

BAM.

La porte a tremblé, mais le bras entier a subi le choc contre son épaule qui était d’une violence trop importante pour son corps. Non seulement la porte ne cède pas, mais la douleur s’abat sur le rouquin comme une épée de Damoclès. La chemise imprégnée de sueur mêle à présent quelques pointes de sang issu de sa peau écorchée. Rien de grave, il ne risquait pas sa vie, mais son bras entier ne répondait plus qu’à la douleur…dans un cri étouffé, il s’écroule contre le mur, échouant à sa mission plus que jamais, empirant la situation déjà dramatique. Il mord sa chemise et ferme ses yeux pour contenir sa souffrance…

Foutre dieu !!

Sa cousine avait suivit, découvrant le Gauwyn amoché et absolument inefficace. Observant rapidement la plaie, elle jugea plus urgent (à raison) de crocheter la serrure, qui elle ne, faisait aucun poids face au talent de la petite. La poignée tourne, et s’ouvre sur la pièce dont les lumières dansent. Cerrid est allongée sur le sol, la main ensanglanter… Laïs reste là, face à l’encanblure de la porte, alors que Gauwyn se redresse pour affronter la scène digne d’un sacrifice humain.
Le roux finit par rejoindre sa cousine, mettant à mal son épaule au vu de l’urgence de la situation… Il cherche d’abord à faire fuir Laïs, lui demande d’aller chercher de l’aide, mais il sait qu’elle ne bougera pas. Après tout elle est comme ça et ne s’obéit qu’à elle.
Lui s’avance lentement de la pièce s’approchant de la capitaine brisée, encore éveillée…il ne dit mot, son regard chargé de larme…Et finit par s’accroupir à ses cotés. Il n’a aucune idée de comment panser sa blessure. Il suppose juste qu’il faut la maintenir éveillée de son mieux, qu’il faut redoubler de vigilance et prier pour que les soins arrivent vite…
Il marmonne dans sa barbe, reste là à ses cotés et finit par lui saisir sa main valide, pour la serrer de son mieux…se pencher à ses cotés et lui chuchoter quelques mots malgré la peur, les premiers qui percutèrent son esprit, les plus probants, voilà tout ce qu’il sait faire pour le moment.


« Tante…on a besoin de vous…on va arranger vos plaie…vous nous êtes indispensable.. »

Son regard se perd, ses membres tremblent tout en maintenant au mieux sa tante contre ses genoux, priant le ciel que l’aide vienne au plus vite.
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Cerridween
[ There's a beast and I let it run, now it's running my way ]

Elle prend la main qui l'agrippe et elle l'attire doucement vers elle. Les cheveux du jeune homme viennent se poser sur son épaule. Elle respire plus calmement, déjà. Les mots résonnent... comme un rappel à l'ordre. Elle est la seule qui leur reste, là, maintenant.

Tante…on a besoin de vous…


De l'autre main, elle fait un signe des doigts vers sa fille, qui s'avance à petits pas avant de se glisser sous l'épaule invalide. Ils sont là tous les trois. Il n'y a que le silence qui règne pour l'instant. Ses doigts passent et repassent doucement sur l'avant bras de Laïs, les yeux fermés. Némésis se tapit dans un coin, rassasiée...
Murmure...


Je sais...


Elle sait. Elle sait bien trop ce que cette mort implique. La douleur, elle, est personnelle. Ils ne savent pas, eux deux, blottis contre elle, pourquoi elle s'est déversée avec autant de violence. Elle avait promis, elle a failli. Un de plus et un de trop. Comme toujours. Ils ne peuvent pas le comprendre, elle le sait. Tout dans leurs yeux doit leur sembler disproportionné et effrayant. Ce n'est que l'expression d'une rage contre la vie, la mort, Dieu et le Destin.

Ce n'est que le début... le début seulement. Le corps, vidé, a laissé la place à la raison. Il était le chef de la mesnie. Ce n'est pas rien, mais ce n'est pas tout... pas de testament. Rien. Les terres reviendront à la couronne. Et elle qui n'a pas prononcé de serments, elle va devoir partir. Avec eux. Laisser le fruit du travail de tous ici. Laisser les souvenirs de l'herbularius. Vider cette salle de tout ce qu'elle continent. Vendre les meubles. Vendre les semences. Laisser le contremaitre se charger de faire que les récoltes arrivent à point. Et partir... Laisser Beaumont. Laisser Beaumont. La chapelle... le corps de son frère... tout une histoire... toute sa vie... celle d'avant.

La mâchoire se serre et elle déglutit lentement. Il va falloir leur dire... les mots lui râpent la gorge.

Il va falloir partir... nous ne sommes depuis ce soir plus chez nous ici...

Un long silence s'ensuit. Ils sont là tous les trois, sur le parquet de cette salle d'arme atypique. Dans l'obscurité qui devient de plus en plus opaque... et qui semble être ironiquement, leur seul horizon à venir.

Demain... il va falloir commencer à chercher... une maison... ensuite vendre tout ce qui pourra l'être.

La main de Laïs se serre dans la sienne. Elle répond doucement. Elle voudrait leur dire des paroles rassurantes. Leur dire qu'on vient à bout de tout. Mais elle est si fatiguée ce soir de voir encore sa vie qui s'écroule. Si fatiguée... Elle se dégage lentement. Gauwyn fait un geste pour l'aider, qu'elle repousse doucement.

Ça ira...

Elle s'appuie un instant contre le mur.

Allez dormir... vous en aurez besoin...

Elle sort de la salle comme une funambule. Elle croise la vieille intendante qui se tord les mains.

La paix...

Elle la regarde en essayant de se tenir droite et en cachant que chacun de ses muscles est en train de se rappeler à son bon souvenir, comme autant d'aiguille qui lui vrillent la chair.

Faites venir Karyaan... je sais qu'elle doit roder dans un coin... j'ai besoin d'elle. Demain à la première heure, j'ai besoin de voir le contremaitre et vous même. Au plus tôt...

Les bottes trainent dans l'escalier et elle regagne sa chambre dont elle pousse la porte. Sur la table sa main pose machinalement tout ce dont la Brindille aura besoin. Fioles, bandes, bout de lin... elle s'affale sur le fauteuil, pose sa main sur la table et attend les pas qui viendront de l'escalier.
Les yeux fermés.

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Karyaan
Silence...

C'est au cri qu'elle se rendit compte que le soir était tombé. Elle avait bloqué des heures, figée à regarder les pivoines noires, à sentir ce vent, ce silence jamais complet, ces murmures constants, lancinants, presque hypnotiques. Berceuse sordide d'une journée qui fut belle et qui s'était enlaidit par un drame.
Encore un...
Et le temps s'étirait, comme un mauvais amant qui s'échine, charognard, s'agrippant à tout pour prendre, encore et encore. Même si ça fait mal, même si ça déchire, même si... tout est déjà vide.

Elle ne se sentait pas à sa place. Elle ne l'était pas.
Ils pleuraient ensemble là-haut. Unis dans leur deuil d'un des leurs.
Alors elle reste là, assise dans cette cours, où les gens s'affairent, cherchant à oublier pour quelques heures que tout a basculé. Cherchant à garder ce semblant d'habitude pour avoir l'impression qu'ils n'ont rien perdu. Eux aussi ils sont une famille en quelque sorte. Liés par ce domaine qui les emplois depuis tant d'années pour certains.
Et de ces gens là, elle ne faisait pas partie non plus.

Ils pleurent, tous à leur niveau, cette perte, ce deuil, ce manque, ce changement de vie qui les fera basculer d'une manière ou d'une autre.
Elle n'arrive pas à pleurer. Ses yeux sont rivés sur les pivoines noires avec ce froid et ce vide qui étaient devenus sa seule logique. Elle s'en accommode, même si parfois c'est lourd.
Un jour peut-être...
Ce froid sera moins dense.

La nuit était tombée et malgré elle, malgré tout, son attention fut immédiatement captée par la lune. Elle ne sait combien de temps elle resta ainsi, debout, ses yeux de brume ancrés sur l'astre presque plein. Elle fut tirée de son hypnotisme par l'Intendante qui sortit en trombe dans la cours, haletante, manquant de se vautrer après avoir butée contre un banc de pierre sur son chemin.
Elle n'eut pas besoin d'ouvrir la bouche, que la Brindille était déjà en train de courir à toute vitesse vers les appartements du Chevalier. Laissant plantée là, l'Intendante qui malgré tout avait ouvert la bouche mais n'avait pu dire mot. Bloquant alors dans une moue carpienne des plus risibles, malgré la situation.

C'est quatre à quatre qu'elle monta les escaliers et déboula dans la chambre. Se figeant, elle renvoya sans ménagement un commis inquiet de la voir se précipiter ainsi.
Elle referma la porte à clé derrière elle et s'avança. Remarquant ce qui était disposé sur le bureau elle ne put s'empêcher de sourire tout en s'approchant de celle à qui elle a donné sa vie. S'accroupissant à sa hauteur, elle posa délicatement sa main sur le genou du Chevalier.
En silence, elle attendit qu'elle ouvre les yeux et lui sourit simplement.
En silence, elle se décala et commença à défaire ses bottes.
En silence, elle les retira le plus délicatement possible.
Elle n'a jamais été autant Dame de Compagnie qu'à cet instant. Sauf que ce n'est pas d'une robe qu'elle part celle qu'elle sert. Ce n'est pas des cheveux soyeux qu'elle brosse. C'est tout le poids d'une vie qu'elle tente d'apaiser, de soulager, pour au moins quelques instants, quelques minutes.
Puis elle se releva et se rendit dans la salle d'eau personnelle de la maitresse des lieux. Mis de l'eau à chauffer pour permettre à un bain de se faire.
Revenant dans la chambre, elle rejoignit la Pivoine tout en décrochant la fiole de sa ceinture et se lavant les mains du liquide à l'odeur de lavande. Prenant au passage sa lourde besace qu'elle posa près du bureau.
S'agenouillant, elle sortit plusieurs fioles et petits sacs de cuir aux odeurs diverses, ainsi que des petits pots de terres cuites.
Se relevant, elle alla servir un verre de vin où elle versa quelques gouttes d'un liquide translucide. Touillant elle s'approcha Cerridween et lui tendit.

En silence, elle se mit à préparer dans un pot de terre, un mélange d'huiles et d'herbes, tout en faisant des allés retour vers la salle d'eau pour remplir le bain. Mais jamais, jamais elle ne quittait le Chevalier du regard, lui souriant parfois, rassurante, calme et silencieuse.
Et le vide était toujours là, ce froid indescriptible mais tellement présent, presque palpable.
Alors elle se perd dans la préparation d'autre chose, tout en murmurant des phrases inaudibles, effleurant parfois le médaillon qu'elle porte sous ses vêtements.
Elle murmure et fait des gestes, tant et tant de fois répétés, appris depuis sa plus tendre enfance. D'aucun dirait sorcellerie, et ils auraient raison, même si tout était basé sur la connaissance du corps, des herbes et de leur pouvoir de guérison.
C'est en s'affairant qu'elle priait ses Dieux, la sorcière. Qu'elle récitait en silence des prières dans une langue inconnue. Et ce n'est d'ailleurs pas avec une cuillère qu'elle touillait ses mixtures mais à la pointe d'une dague au manche en bois d'amourette gravé de symboles particuliers.

Elle n'était jamais allée aussi loin en sa présence. Cerridween savait, mais entre savoir et voir parfois il y a un monde. Mais là, elle s'en cognait la Brindille, et la Pivoine certainement aussi. La seule chose qu'elle avait en tête était de la soulager de ces maux.
Un peu de digitale pourpre dans le verre de vin, pour calmer ce cœur aux élans abruptes qui pourraient être fatals.
A présent, elle allait lui faire prendre un bain, qu'elle le veuille ou non.
S'approchant d'elle, toujours muette, elle défit la protection de cuir qui lui maintient l'épaule droite. Puis, elle l'aida à se lever et à se diriger vers ce bain à moitié rempli d'eau.
Et c'est habillée que la Pivoine se laissa glisser dans le bain, portée par la puissance de l'eau, les muscles semblent de suite moins soumis à la souffrance. Elle l'aida à s'assoir et retira son haut.
La sorcière versa alors dans l'eau du bain, l'un des mélanges qu'elle avait fait au préalable. Explosion de senteurs diverses et variées. Lavande, marjolaine, sauge, camomille. Le but n'était évidemment pas de laver, mais bien de soulager, calmer, relaxer. Détendre ces muscles de ce corps trop sollicité.
Elle prit une éponge végétale et la plongea dans le bain, puis fit couler un mélange de miel et d'huile dessus. Délicatement elle la posa sur sa nuque et la fit glisser lentement sur ses épaules, puis revint à sa nuque, pour de nouveau retourner jusqu'à la pointe des épaules.

Et le silence était roi, seuls les clapotis de l'eau avaient ce droit de le briser.
La Brindille se leva et prit une serviette, aida le Chevalier et la posa sur ses épaules pour la couvrir. Elle fit en sorte qu'elle s'assoit sur son lit. S'agenouillant, elle s'attela à nettoyer la paume de sa main. Toujours en silence, exécutant des gestes immuables, presque solennels. Doucement, elle banda la main de la pivoine avec un bout de lin puis l'incita à s'allonger sur le ventre.
Prenant le récipient en terre cuite, rempli de moitié de mélange d'huile, de poudre, et liquides diverses, la sorcière s'assit sur le lit près de l'épuisée.
Dans un mutisme presque religieux, elle lui massa la nuque les épaules, les bras et tout le dos. Et elle ne s'arrêta que lorsque Cerridween dormait à point fermés.
Elle la couvrit alors tout en se relevant.
S'asseyant à son tour sur le fauteuil, elle soupira épuisée, vidée. Elle avait tout fait pour donner un maximum d'énergie, par ses mains, sa voix, ses prières.
On croit ou non à ce genre de puissance, peu importe, le résultat était là.
Vidée mais sereine, ou presque...

Elle resta un long moment immobile dans ce fauteuil où siégeait quelques heures auparavant la Pivoine. Le piaillement des oiseaux clamèrent le début de la matinée et elle reporta son attention sur le lit.
Inspirant profondément, elle rangea sa besace, s'assurant que le Chevalier dormait toujours, elle réajusta le drap sur elle, puis sortit de la chambre.
Croisant quelques commis inquiets et l'Intendante qu'elle rassura d'un bref sourire. Toujours silencieuse, visiblement épuisée.
Son sac glissa de son épaule quand elle arriva dans la cours. Fermant les yeux, savourant ces rayons tièdes de soleil glissant sur son visage diaphane.
Abandonnant là son bien le plus précieux, elle quitta le domaine pour rejoindre sa colline, ses arbres et tenter, peut-être, de se ressourcer auprès d'eux.

C'est l'Intendante qui ramassa la lourde besace, regardant la frêle jeune fille quitter la cours.
Oui c'était une belle journée hier. Et aujourd'hui, le temps semble encore au beau.
Et pourtant...

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"La parole est l'arme du faible, l'épée l'arme du sot, j'ai choisi d'être faible et de m'entourer de sots."
Cerridween
[De profondis.]

Les émeraudes fixent la croix de bois où est inscrit le nom, simplement.
Guilhem de Vergy.
Tout est calme, si calme. Le soleil est sûr le déclin. Les oiseaux chantent leur dernière composition de la journée, pendant que les psaumes se dévident.

De profundis clamavi ad te, Domine,
Domine, exaudi vocem meam.
Fiant aures tuæ intendentes
In vocem deprecationis meæ...


Elle reste les yeux dans le vide. Debout, mains croisées.
La terre glisse sur le bois du cercueil par petites pelletées.
Près d'elle, Laïs et Gauwyn. Non loin toujours, Karyaan qui veille.
Autour le silence troublé simplement, par le bruit du fer qui glisse pour faire son office et le chant des moines, sans fioriture autre que leurs voix qui s'élèvent.

Il sera donc là, le dernier de ses fils.
Dans ce monastère reculé, simple.
Il sera donc là, le dernier de ses fils.
Dans le calme d'un monde hors du siècle et de ses heurts. Ce que le jeune homme avait cherché, ce qu'elle avait ignoré. Elle hait le rire du Destin... elle le hait.

Elle n'avait pas pu ouvrir la bouche.
L'abbé l'avait pourtant regardé avec insistance, même si la bienveillance régnait sur ses yeux gris.
Elle n'avait pas pu ouvrir la bouche.
Elle aurait fini au bûcher.

Elle n'a pu regarder autour d'elle.
Ses yeux restent, comme fixés par des clous sur la tombe.
Elle sent des présences.
Hiératique, dans son mantel noir, elle n'a pas pu se retourner.

Aux cœurs de nos détresses,
Celui qui aime a déjà franchit la mort,
Le Très Haut nous accueille
Donne leurs le repos,
Donne lui le repos.


Laïs a fait un pas sur le côté.
Elle lui prend doucement le bras et pose sa tête sur son épaule.
Gauwyn vient enrouler son bras autour d'elle.
La Pivoine ferme les yeux.

Les larmes coulent en silence, en finissant leur course dans une cicatrice et un doublet de jais.
Entre les deux, entre deux mondes.
Ils sont viscéralement soudés, dans leurs différences. Par ce nom qu'ils portent tous, à leur manière.
Ils ne sont plus que quatre rescapés, dont trois à assister au naufrage.

Les lèvres se posent alternativement sur les deux joues qui la soutiennent.
Elle reste les yeux dans le vide. Debout, mains croisées.
La terre glisse sur le bois du cercueil par petites pelletées.
Autour le silence troublé simplement, par le bruit du fer qui glisse pour faire son office.
Et en elle, reste un trou béant, qui lui ne se rebouchera jamais.

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Lysesl


Parti de La Ferté-Bernard, un pigeon vint se poser près du petit groupe, une missive nouée à la patte.
Cette missive, envoyée à Cerridween de Vergy, s'adressait également aux membres de la famille de Vergy.


Citation:
À vous, Cerrydween de Vergy, ainsi qu'à toute votre famille,

J'ai appris avec stupeur le décès de Guilhem.

Ma famille et moi-même tenons à vous offrir nos plus sincères condoléances et vous souhaitons bien du courage pour traverser cette nouvelle épreuve que la vie vous envoie.
Guilhem était mon suzerain, mais il était surtout devenu un ami au fil du temps. Bien qu'il fut moins présent ces derniers temps, j'attendais et j'espérais son retour dans une vie plus active.

Si vous aviez besoin de quoi que ce soit, si je puis faire quelque chose pour vous aider à traverser cette épreuve, n'hésitez pas à demander. Ma peine est grande, aussi je n'ose imaginer l'étendue de la votre.

Mes pensées vont vers vous et les votres. Puisse-t-elles vous apporter un brin de courage, si petit soit-il.

Sincèrement,






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Guillaume_de_Jeneffe, incarné par Cerridween
La lettre avait été brève, comme il convenait. La nouvelle qu'elle contenait se suffisait à elle-même. Inutile de longues phrases quand la réalité était aussi abrupte. Guilhem était mort et la détresse du chevalier suintait par l'encre de ses quelques lignes. Sa décision avait été prise rapidement, pour peu que l'on puisse dire qu'un temps s'était écoulé entre la réception de la missive et le départ du Flamand pour le Nord. Sa fille ne devait arriver que plus tard et il ne désirait pas la mêler à cela. Le comte de Beaumont n'avait jamais, semble-t-il, eut les faveurs de son cœur et sa disparition devait libérer la baronne de Lorgies plus que de l'affliger. Qui plus est, connaissant la Rousse, ou commençant à la connaître, Guillaume pensait qu'elle ne désirerait pas une cérémonie à la mode parisienne, avec une assistance présente plus par convenance que par réelle empathie.

Ayant abandonné les insignes de ses charges à la garde de ses valets restés à Vendôme, il s'était joint à une caravane faisant route vers le Maine pour rejoindre Léard. De là, interrogeant quelques paysans, il avait appris le lieu de la cérémonie et la façon de s'y rendre. Une abbaye, presque anonyme, où les moines semblaient ne pas particulièrement goûter l'agitation. Le calme après la tempête, en somme. Tellement Vergy, au final.

C'est un chevalier avec un léger sourire, dessiné non par la joie mais par les retrouvailles d'un caractère connu et apprécié, qui fit son entrée dans la salle funéraire. Sourire qui s'évapora rapidement pour ne plus laisser qu'un visage fermé sommant un ensemble noir, raffiné mais pas trop. Pas question d'acheter des nippes, mais hors de propos de paraître ici comme il le ferait à la cour, soucieux d'être parmi les plus élégants. Ici, il pouvait, exceptionnellement, être sans paraître.

Le service s'était écoulé, connu et reconnu par un chevalier déjà bien accoutumé à entendre l'Eglise déplorer les décès et assurer qu'ils n'étaient qu'une étape. Il n'en doutait pas, mais avait souvent du mal à accepter que certains soient enlevés à l'affection de ceux qui restaient, ou pour mieux dire qui leur survivaient. Il était arrivé peu après le début, sans provoquer de mouvement parmi la Pivoine et les deux personnes qui l'entouraient. Se contentant de prier et de répondre à l'officiant du bout des lèvres, il n'avait pas cherché à se signaler, même si le bruit de deux bottes de voyage n'avaient pu être entièrement ignoré.

C'était désormais à l'ensevelissement que l'on procédait. Bientôt le cercueil serait dissimulé à la vue de tous, avant de redevenir poussière, et son prisonnier avec lui. Le chevalier s'avança donc, la main crispée sur un parchemin froissé. Main qu'il ne déserra qu'arrivé à la verticale du gouffre.


- Puisse ce parchemin vierge de Marchiennes rejoindre celui qui aurait dû en devenir le maître, si l'Histoire ne s'écrivait que dans la joie. Mais ce n'est pas là notre vie. Non, ce ne le sera jamais. Nous vivrons toujours dans la souffrance. Amen

Il avait murmuré plus que dit ces paroles, mû par un réflexe de bienséance. Ce n'était pas aujourd'hui qu'il pourrait parler librement à une famille déchirée par les morts tragiques. Même si on pouvait, à bon droit, se demander laquelle ne l'était pas. Il fit ensuite un pas en arrière, refusant de se tenir à la hauteur des Quintefeuilles. Désormais, on avait dû identifié l'invité plus ou moins imprévu, mais il n'en demanderait pas plus.
Cerridween
*La brunette, elle s'tient là les yeux rivés sur l'trou qui se remplit.
C'est impressionnant, ce vide... ça fait même peur. C'est la première fois qu'elle entend ces prières là, qu'elle sent une fin, qu'elle voit un corps mort. Ça fait mal d'un certain côté. C'est ce cousin là, celui qui lui apparaissait comme un chevalier blanc de légendes qu'on raconte aux mouflets au coin du feu, qui l'a sauvé. Qui l'a entrainée dans ce jeu qui n'en était pas vraiment un, elle s'en est bien rendu compte plus tard. Mais c'est surtout effrayant... effrayant d'vide et de rien. Les silhouettes encapuchonnées qui chantent lui font penser à des fantômes et y a rien de rassurant dans du latin chanté en quarte et quinte juste. Y a rien de rassurant dans cette espèce de pénombre étrange, cette atmosphère qu'elle pourrait taillader au couteau. Et y a rien de rassurant, quand elle tourne sa caboche, avec ses cheveux de jais dénoués.

Ce qui fout la trouille aussi, vraiment, au point que ça lui retourne les tripes, c'est sa mère... elle se tient là, les yeux verts éteints, qui semblent r'garder dans un horizon impalpable. Elle n'a rien dit, pas décollé d'un pouce, pas desserré les lèvres. On dirait une statue... la brunette s'est rapprochée, mal à l'aise et le coeur serré de voir le désespoir qui collait à la peau de son chevalier de mère. Elle a rien dit.... elle sait que ça sert à rien... elle a tellement l'habitude de ne pas l'entendre parler... les missions, les secrets du Royaume, elle les presse depuis qu'elle est de nouveau avec elle. Elle a pris l'habitude de les voir passer dans ses yeux verts, comme des traits d'flèches ou des ombres sans les nommer. Là pas b'soin d'être devin... mais elle sent, comme une coupe pleine, une fureur latente qui s'est toujours pas endormie, mais pas vraiment réveillée. Comme quand Daronne fulminait, en silence, les bras croisés, avant une avoinée salée. Alors elle s'approche doucement et vient poser sa caboche mal coiffée sur son épaule. Ses doigts caressent doucement le bras qu'ils enserrent. Elle sent un sanglot secouer doucement la statue qu'elle essaie de faire redev'nir humaine... elle soupire et puis elle sourit doucement... elle regarde Gauwyn qui fait de même avec un air reconnaissant....

La cérémonie se finit lentement. Elle trépigne la morveuse... vite... qu'on en finisse... l'odeur et la sensation de la mort ont assez duré. Une silhouette s'approche. Un homme d'un âge certain, vêtu de noir. La tête inspecte le visage marqué par le temps, suspicieux. Dans le jeu de son enfance, c'étaient les méchants les hommes en noir, ceux qui voulaient l'enlever.


Puisse ce parchemin vierge de Marchiennes rejoindre celui qui aurait dû en devenir le maître, si l'Histoire ne s'écrivait que dans la joie. Mais ce n'est pas là notre vie. Non, ce ne le sera jamais. Nous vivrons toujours dans la souffrance. Amen.

Si elle a pas compris le début de la phrase, la brunette, la fin lui fait grincer les dents. Elle se retourne un peu violemment et pousse le messire qui recule de toute la force de ses menottes.

Vous croyez vraiment qu'c'est ce qu'on a besoin d'entendre, là maintenant ??
*

La phrase a été à peine murmurée, d'une voix sifflante, comme un chat qui feule.


LAÏS ! La paix...


La brunette s'arrête, regardant alternativement sa mère et l'inconnu...

La Pivoine, elle, vient de sortir de sa torpeur. Lentement comme on sort d'un mauvais rêve. Les émeraudes encore suintantes d'eau, le visage blême, elle s'avance vers Guillaume. Presque rassurée, reconnaissante, dans ce monastère vide. Cet enterrement lui rappelle, dans un souvenir douloureux, la découverte d'une croix anonyme en Anjou. Il n'y avait personne pour comprendre cette peine, déchirante. Il est là... peu importe ses paroles... Laïs ne peut pas l'envisager du haut de ses quinze printemps. Qu'il connait les marques au fer rouge qu'on porte comme un fardeau jusqu'à ce que mort les efface.

Merci d'être là, chevalier.... venez sortons...

Elle prend le bras du Grand Ecuyer et ne dit rien jusqu'à la sortie du monastère, Laïs et Gauwyn sur leurs talons, chuchotant une certain incompréhension... arrivée à leurs montures, elle inspire longuement.

Je ne m'attendais pas à vous voir... on vous disait souffrant... j'espère que vous allez mieux....

Se retournant elle toise les deux jeunots, qui se tiennent légèrement en arrière.

Je dois vous présenter, Grand Ecuyer, deux personnes... la petite sauvageonne qui vous a manqué de respect est Laïs ma fille, et à ses côtés, le jeune homme que vous voyez est Gauwyn de Vergy, mon neveu, ancien capitaine du Maine.

Elle se retourne de nouveau vers Guillaume, *laissant une Laïs pantoise et rougissante qui baisse la tête, pour voir si par l'plus grand des hasard en regardant ses pieds, elle pourrait pas disparaitre sous terre* et lui dit à voix basse.

Il va de soi que je m'excuse pour son comportement.... et j'espère que cela ne vous empêchera pas de venir à Léard vous reposer et partager notre table... tant que nous y sommes encore, profitez en...

La voix se veut posée. Elle trahit une grande fatigue, comme les yeux qui le regardent, les épaules tassées... la Pivoine, un radeau, encore vivant, au milieu d'une nouvelle tempête.

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* Parties ajoutées avec l'aimable participation de LJD Laïs.
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Karyaan
Mort j'appelle...

Mort, j'appelle de ta rigueur...
Et l'ombre reste là, mue dans le silence de ceux qui n'ont rien à faire ici. Intrus de toute une vie. Pièce rajoutée, rapportée par nécessité.
Elle veille, en retrait, isolée de tout et pourtant prise dans la tourmente des événements qui bousculent et changent les avenirs.
Dans l'ombre, loin, assez loin pour qu'on ne la remarque pas mais assez près pour qu'Elle sache qu'elle est là au cas où.
Enveloppée dans son lourd linceul noir, pan de cape qui la couvre de la tête aux pieds. Visage masqué aux trois quarts, seules ses lèvres distinguées. Besace immuable et bâton dans la main.
Statue qui semble figée dans le temps et l'espace. Elle est là, sans être.
Ombre de celle qu'elle sert. Une ombre n'existe que lorsqu'elle est utile. Elle le sait et là...

S'il est mort, force est que dévie...
Tourbillon qui s'impose.
Dérive et enivre presque dans la symbiose de ces ressentis qui unissent.
Une famille n'est jamais tant liée qu'au bord d'une fosse, les yeux rivés à un cercueil.
Une famille...
La sienne s'est évanouie aux pieds de deux buchers, en pluie de cendre, flocons d'une neige qui se fera éternelle. Goût de viande, goût de sang, goût de rage.
Et ces yeux de brume rivés aux onyx de sa mère qui la fixe, s'ancrant à sa fille unique dans un ultime courage d'être fière de ce qu'elle est et a toujours été.
Et ce vide, ce froid qui depuis ne la quitte plus, recouverte de cette neige impure que le vent ne pourra jamais balayer.
Et ce manque, ce regret, de ne pas avoir été là pour lui. De ne pas avoir été sa force, son ancrage, pour supporter cette fatalité qui accable les siens.
Dans l'ombre, la lourde capuche masquant le silence d'une larme qui glisse sur peau diaphane.
Dans l'ombre, les phalanges blanchissant d'une main serrant un bâton trop grand.
Dans l'ombre, les souvenirs se percutent et se bousculent
Dans l'ombre...

Deux étions et n'avions qu'un cœur...
Bruit de bottes de voyage sur pavé usé. Ombre qui subrepticement se meut. Juste pour suivre le déplacement de cet autre qui s'avance comme en terrain conquit.
Elle le regarde, cette ombre qui reste à sa place, alors qu'il pénètre dans cette sphère sans gêne ni pudeur.
Et le vide se fait gouffre quand l’inexistence se fait moqueuse et se rit de tout. Indifférence qui nappe une vie et la rend stérile.
Trop loin pour entendre ce qui fut murmuré, trop loin pour comprendre l'offense de l'héritière, trop loin pour saisir pourquoi tout se calme.
Mais les yeux couleur de pluie se rivent sur la maigre assemblée qui sort en cortège cadencé de douleur et de peine bien trop lourde à porter.
Et ils passent, enveloppés dans leur union de ceux qui se reconnaissent entre eux.
Yeux qui se ferment, ombre qui se fait invisible et s'éteint.

...ou que je vive sans vie...
Elle attendra là qu'ils s'en aillent, retournant à leur existence vaille que vaille.
Elle attendra là, yeux fermés, se fondant à ce qui n'a plus vraiment d'importance.
Et quand ils partiront, elle relèvera doucement le visage et regardera la nef de cette chapelle où tant d'âmes sont ensevelies.
Vivre sans vie, à travers la leur pour se donner un semblant de répit, un semblant d'envie. Un semblant de raison d'être... peut-être...

Si tu ne me tiens en langueur...

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"La parole est l'arme du faible, l'épée l'arme du sot, j'ai choisi d'être faible et de m'entourer de sots."
Guillaume_de_jeneffe
Il avait à peine eu le temps de se reculer que déjà une petite voix, qui se donnait de la contenance par son intonation, venait l'interroger. L'accuser, bien plutôt, comme s'il n'avait rien à faire ici et comme si surtout il disait ce qui devait être tu. Peut-être en effet eut-il été préférable qu'il se taise, voire qu'il reste éloigné de l'abbaye. Il allait pour répondre quand une voix qui ailleurs se faisait tyrannique s'éleva, moins forte mais tout aussi autoritaire. Le chevalier de Vergy revenait au monde. Était-ce grâce à lui ou à cause de lui ? Le chevalier n'eut guère l'occasion d'y songer car déjà la bâtarde reprenait les rênes de la conversation.

Ce fut donc sur elle qu'il détourna son attention. Sur elle qui s'était montrée à lui comme elle avait rarement dû se dévoiler devant d'autres lorsque, à Ryes, il était revenu sur les terres de son passé. Les mots sont simples, lâchés au compte-gouttes, comme si elle regrettait de parler en ces lieux, comme si elle regrettait de parler, simplement. Elle l'invite d'ailleurs à quitter le saint lieu. Tout est déjà fini. Le comte de Beaumont a rejoint la terre et la poussière, emmenant avec lui ses titres qui feront retour aux différentes couronnes suzeraines. Guillaume savait l'absence de testament, il l'avait apprise en Saint-Antoine. Il savait ce que cela voulait dire. Les Vergy privés de terre mainoise. Contraints à se satisfaire d'un simple hôtel urbain. Pitié à ses yeux pour les parents d'un des plus grands comtes que cette province ait connue.

Il ne peut penser plus longtemps, car déjà il suit la Pivoine. Il sent sa chaleur contre son corps ou plutôt le froid qui émane d'elle et qui n'est guère rassurant. Ils sont maintenant dehors et le vent frais vient le cueillir, provoquant un rapide frisson au creux de la nuque du chevalier.


- Souffrant ou pas, je serais venu, chevalier. Mais cela va mieux, effectivement, ce qui m'a permis de me priver d'une litière et d'une armée de valets, plutôt déplacés en ces circonstances. Je ne pouvais être absent. Pas pour cela.

Il se retourne alors, invité qu'il y est par sa cavalière du jour. Pour enfin refaire face à son comité d'accueil. Le regard descend alors sur les courtes pattes et se pose sur chacun d'eux, successivement. Il les jauge, sans se cacher, comme un oncle qui reviendrait dans sa famille. Le chevalier veut savoir qui entoure et qui soutient l'ancienne dame de Léard. Sa fille et son neveu, jeunes encore mais qui visiblement n'ont pas décidé de se laisser marcher sur les poulaines. Tant mieux sourit-il intérieurement.

« Elle est tout excusée. En ces circonstances, le cœur est à fleur de peau et il aurait convenu que je m'en rappelle, même s'il n'y avait nulle malice dans mes paroles ».

Peut-être l'entendrait-elle, celle qui cherchait à être ailleurs, ou plutôt à se faire oublier de ceux qui l'entouraient. Il salua ensuite le roux neveu d'un bref hochement de la tête, certain qu'il aurait, plus tard, l'occasion de plus tard prendre langue avec le nouvel homme d'armes de la parentèle. Mais c'est avec le chef de famille, ou du moins celle qu'il voit comme tel, qu'il consacre toute son attention. La Pivoine dissimule moins que d'habitude. Moins qu'en taverne, moins qu'en la salle du Haut Conseil de Ryes, moins que partout en somme. C'est donc sur le ton de la confidence murmurée qu'il lui répond, alors qu'elle s'ouvre à lui comme à un vieil ami, et qu'il lui adresse un regard qu'il veut réconfortant.

« Cerridween, je ne vous laisserais pas rentrer ainsi en Léard pour tout l'or du monde, ni même pour le manteau d'hermine. Je vous accompagnerai là ou ailleurs, si ma présence vous est agréable et vous aide en ces moments affreux ».
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