Erwelyn
Elle, c'était Sad qu'elle venait voir. Le plus grand lien qui s'était créé avec sa famille, celle qu'elle nommait le côté obscur de la force, c'était elle, sa tante. Régicide. Belladone qui l'avait trouvée, qui l'avait cueillie en Touraine pour lui faire découvrir ce qui coulait en son sang. Ce soir là, après une après-midi de sieste, la Corleone s'était réveillée au sein du Louvre et dans le silence de sa chambrée, bizarrement, ce fut vers sa tante que ses pensées s'envolèrent. Ses mains se posèrent sur son ventre où le léger renflement commençait à se voir, se sentir. Savoir qu'un petit être grandissait en elle la ramenait vers ses liens familiaux, cette partie d'elle qu'elle ne côtoyait que peu depuis des années. Quelque fois, la vicomtesse songeait à sa mère, à l'enfance qu'elle avait eu, et cela faisait émerger nombre de questions. Et si Floraine n'avait pas quitté le cocon familial, que serait-il advenu d'Erwelyn ? Aurait-elle suivi les pas de Sadnezz, aurait-elle grandi à ses côtés à la mort de sa mère ? Aurait-elle appris à voler, à piller, à... tuer ? Elle ne le saurait jamais. Aujourd'hui, son monde était fait de noblesse, de dorures, de blasons, de caducées, de fils Roy. Impossible de revenir en arrière. Mais une chose était sûre, Sad resterait toujours sa tante, même là-bas, dans sa tombe de la Cour des miracles. D'ailleurs... les couvertures furent repoussées avec force et la vicomtesse se mit droite sur ses jambes. Ses prunelles caressèrent sa robe, puis tombèrent sur une malle. A l'intérieur, toujours se trouvait, comme un lien vers son passé, sa vieille paire de braies, la première qu'elle avait pu s'acheter arrivée en Maine.
S'agenouillant devant le coffre, elle en ouvrit le lourd couvercle en bois. Elle plongea à l'intérieur, fouillant, soulevant nombre de tissus, balançant au-dessus de sa tête hennin, gants et autre frous-frous pour enfin tomber sur ce qu'elle cherchait. Braies et chemises sombres, élimées, fatiguées par le temps. Son visage s'enfouit dans le tissu, respirant à plein poumon l'odeur de ces vieux vêtements, plein de souvenirs. D'abord les braies, une jambe après l'autre, puis la chemise, boutonnée, les mains un peu tremblantes. Jamais elle n'était allée dire au revoir à Sadnezz, mais elle sentait qu'il était temps, que c'était le moment. Sa paire de bottes enfilée, ses cheveux attachés en une longue tresse, c'est une lourde cape qui vint rejoindre ses frêles épaules. Baissant les yeux, elle sourit devant son image. Un retour aux sources. Elle allait sortir quand une idée leffleura. La Cour des Miracles, ce n'était pas le Louvre, inconscient était celui qui s'y baladait sans arme. Quelques années en arrière, sortir avec une dague sur elle n'aurait pas changé grand chose. Au pire, elle se serait coupée avec. Mais depuis quelque temps, et car souvent les levées de ban l'avaient amenée à combattre sur les champs de bataille, Lynette s'était formée à l'art de la guerre. Espérant fortement ne pas avoir à s'en servir, elle l'attacha à sa ceinture et rabattit sa cape par-dessus. C'est sous les regards étonnés des huissiers et des petites gens du Louvre que la reine mère sortit de l'immense bâtiment.
A pied, la Corleone arpenta les ruelles parisiennes, se faisant indiquer le chemin par des regards suspicieux. Son petit cur battait de plus en plus fort au fur et à mesure de son avancée. Et lorsqu'enfin elle pénètra dans le fameux quartier, ses lèvres se pincèrent, son regard fixa un point, sans jamais croiser celui des personnes qui pouvaient passer à ses côtés. Son but : le cimetière de la Cour des Miracles. Droite, gauche, les petites ruelles furent traversées et le soir nettement tombé quand Lynette arriva à destination. Rechercher la gargouille, c'est tout ce qu'elle savait de la tombe de sa tante. Il lui fallut plusieurs aller-retour pour enfin la trouver, elle qui gisait sous ses pieds. Lidée lui serra le bide.
J'aurais préféré que tu crèves pas, tu sais ?
Bizarre comme les gens pouvaient se mettre à parler aux morts, et Lynette n'échappait pas à la règle. Ses genoux arrivèrent à terre, trainant dans la boue qui samoncelait dans le cimetière en ce mois de janvier pluvieux. Sa main gantée, celle qui avait perdu deux doigts, abîmée, striée de cicatrice alla se poser sur la gargouille posée là.
Chuis enceinte tata...
Un petit Corleone.
J'aurais aimé qu'il te connaisse, même si...
Même si t'as tué une reine, songea-t-elle, comme si le fait d'énoncer ces mots tout haut pouvait changer quelque chose au fait que le meurtre avait bien eu lieu.
Tu me manques quand même, et t'aurais eu tellement de choses à lui raconter.
Elle garda le silence encore longtemps avant de se relever, des fourmis plein les pattes. Il lui faudrait traverser à nouveau la Cour alors même que l'heure se faisait tardive et que les rues se transformaient de plus en plus en coupe-gorge. Sortant du cimetière, elle reprit sa marche, la main prête à saisir la garde de sa dague, si jamais on lui tombait dessus.
Et justement, face à elle, une ombre s'approcha et son cur se mit à battre la chamade. L'espace d'un instant, c'est le fantôme de sa tante qu'elle crut apercevoir, mais son minois secoué la sortit de sa torpeur. Non, c'était une silhouette humaine, pas un fantôme. Et au lieu de filer sans demander son reste, la Corleone resta plantée là, sans bouger.
[Ouvert à qui veut !]
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S'agenouillant devant le coffre, elle en ouvrit le lourd couvercle en bois. Elle plongea à l'intérieur, fouillant, soulevant nombre de tissus, balançant au-dessus de sa tête hennin, gants et autre frous-frous pour enfin tomber sur ce qu'elle cherchait. Braies et chemises sombres, élimées, fatiguées par le temps. Son visage s'enfouit dans le tissu, respirant à plein poumon l'odeur de ces vieux vêtements, plein de souvenirs. D'abord les braies, une jambe après l'autre, puis la chemise, boutonnée, les mains un peu tremblantes. Jamais elle n'était allée dire au revoir à Sadnezz, mais elle sentait qu'il était temps, que c'était le moment. Sa paire de bottes enfilée, ses cheveux attachés en une longue tresse, c'est une lourde cape qui vint rejoindre ses frêles épaules. Baissant les yeux, elle sourit devant son image. Un retour aux sources. Elle allait sortir quand une idée leffleura. La Cour des Miracles, ce n'était pas le Louvre, inconscient était celui qui s'y baladait sans arme. Quelques années en arrière, sortir avec une dague sur elle n'aurait pas changé grand chose. Au pire, elle se serait coupée avec. Mais depuis quelque temps, et car souvent les levées de ban l'avaient amenée à combattre sur les champs de bataille, Lynette s'était formée à l'art de la guerre. Espérant fortement ne pas avoir à s'en servir, elle l'attacha à sa ceinture et rabattit sa cape par-dessus. C'est sous les regards étonnés des huissiers et des petites gens du Louvre que la reine mère sortit de l'immense bâtiment.
A pied, la Corleone arpenta les ruelles parisiennes, se faisant indiquer le chemin par des regards suspicieux. Son petit cur battait de plus en plus fort au fur et à mesure de son avancée. Et lorsqu'enfin elle pénètra dans le fameux quartier, ses lèvres se pincèrent, son regard fixa un point, sans jamais croiser celui des personnes qui pouvaient passer à ses côtés. Son but : le cimetière de la Cour des Miracles. Droite, gauche, les petites ruelles furent traversées et le soir nettement tombé quand Lynette arriva à destination. Rechercher la gargouille, c'est tout ce qu'elle savait de la tombe de sa tante. Il lui fallut plusieurs aller-retour pour enfin la trouver, elle qui gisait sous ses pieds. Lidée lui serra le bide.
J'aurais préféré que tu crèves pas, tu sais ?
Bizarre comme les gens pouvaient se mettre à parler aux morts, et Lynette n'échappait pas à la règle. Ses genoux arrivèrent à terre, trainant dans la boue qui samoncelait dans le cimetière en ce mois de janvier pluvieux. Sa main gantée, celle qui avait perdu deux doigts, abîmée, striée de cicatrice alla se poser sur la gargouille posée là.
Chuis enceinte tata...
Un petit Corleone.
J'aurais aimé qu'il te connaisse, même si...
Même si t'as tué une reine, songea-t-elle, comme si le fait d'énoncer ces mots tout haut pouvait changer quelque chose au fait que le meurtre avait bien eu lieu.
Tu me manques quand même, et t'aurais eu tellement de choses à lui raconter.
Elle garda le silence encore longtemps avant de se relever, des fourmis plein les pattes. Il lui faudrait traverser à nouveau la Cour alors même que l'heure se faisait tardive et que les rues se transformaient de plus en plus en coupe-gorge. Sortant du cimetière, elle reprit sa marche, la main prête à saisir la garde de sa dague, si jamais on lui tombait dessus.
Et justement, face à elle, une ombre s'approcha et son cur se mit à battre la chamade. L'espace d'un instant, c'est le fantôme de sa tante qu'elle crut apercevoir, mais son minois secoué la sortit de sa torpeur. Non, c'était une silhouette humaine, pas un fantôme. Et au lieu de filer sans demander son reste, la Corleone resta plantée là, sans bouger.
[Ouvert à qui veut !]
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