--Sadnezz.
L'or est le souverain des souverains.
Tapis, drapés de leur silence. Presque tout semble s'éterniser, figés qu'ils sont dans leurs expectatives coordonnées. L'oiseau qui s'est tût, curieux de ces statues aux fronts soucieux, la légère brise qui a perdu à leur pied son insolence et même la mousse sous leur foulées qui a semblé leur avancer un tapis humide et épais pour engloutir leur pas avant l'immobilité. Leurs yeux ne se cherchent pas, comme si d'une même volonté de marbre chacun montrait que ce combat partagé était le sien. Ils ne se touchent pas, se sont éloignés comme on écarterait les enfants d'un spectacle point beau à regarder. Les montures même ont été chassées, plus loin, là ou elles ne trahissent pas leur présence inopportune. Indésirables ils sont, filant arachnéen tissage mortuaire à leur manière de fourmi. Il suffit de s'attarder dans le regard de l'un d'entre eux pour y lire des desseins inattendus. Pourtant réels. Ni ordres, ni commandements ne sont portés par le vent, tout au plus les prémices d'un chant funéraire, d'un glas perdu en échos. Telles les eaux souterraines enfouies dans les profondeurs des terres de sècheresses, affleurent les désirs de chacun. Est sourcier celui sachant les libérer, les réunir, les lier, à la tentation de la crue. Les défroques passes partout, apparats de va nu pieds, camouflent à peine la férocité de leurs âme, car il s'agit de cela, boue, glaise, orgueil, et désirs intenses.
Corleone est parmi eux. Sexe faible des trois, sa colère couvant envers ce peuple suintant lâcheté, gueux et blasonnés tremblant de concert. Le royaume ronronne. Vieux matou pelé, au coin de braises d'agonies, transi d'effroi, entassant lois sur coutumes pour se prémunir d'ombres inventées par sa déliquescente imagination. Elle s'en tape l'ainée. C'est en vénale qu'elle est venue, en desiderata aussi. C'est le regard de l'autre duquel elle se nourrit, pas d'une cause, faut-il se repaitre de choses bien illusoires... Mercenaire. Pour l'écu, et la gloire. Elle a essayé bien des chemins, sculptées tant de fioritures à ses plans, esquives en appel à l'intelligence, élaboré de complexes structures, expliqué mentalement à l'infini, proposant, élaborant, suggérant, offrant l'équilibre... Mais le temps courre plus vite que les palabres.
La nuit les a vu arracher à la terre son image habituelle, placer méthodiquement barrage, troncs et pierres enchevêtrés en travers d'un itinéraire bien mystérieux, trois forcenés à la parole rare et à l'oeil fou. Pour finalement prendre racine, perdre pied. Ombres parmi les ombres. Le grisonnant d'une mèche de cheveux taquine la joue creuse de l'italienne, elle se découvre une patience qu'elle croyait perdue. Ses pensées mortifères ne sauraient parasiter le plan qui s'est dessiné dans son esprit, elles le subliment. La précieuse souveraine ne devrait plus tarder. Les rumeurs de sa venue l'ont précédée, malheur à celui dont on parlera trop. Seul mouvement d'un battement de cil, elle regarde de loin l'Irlandais. Les épais feuillages des arbres centenaires assombrissent son visage, taillé au couteau, la découpe accentuée aux épars traits lumineux qui avec difficulté se sont frayés un chemin au coeur de la forêt de Fontainebleau. L'araignée est non loin, Belladone saute d'un froissement de paupière de l'un à l'autre. Les deux hommes n'ont rien en commun, c'est égal, ou pas plus mal. leur projet les réunit, il n'en faut pas plus. Il est faux que l'égalité soit une loi de la nature. La nature n'a rien fait d'égal. Sa loi souveraine est la subordination et la dépendance.
Presque tout semble s'éterniser, figés qu'ils sont dans leurs expectatives coordonnées. L'attente...
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