Chamberry , en lHostel de Luzerne , en ce jour de saint Henri .
à la Marquise des Alpes ,
Sa Majesté Hersende de Brotel
Votre Majesté ,
Je lis Esope , ses fables animales me rappellent que lhomme à la bête en tout point est bien égal. Même si je nose être un nouvel Esope , je vous envoie quelques réflexions , issues de mes pensées tournées vers vous et vos gardiens , vos gardes devrais-je dire !
Lorsque lanimal , pourchassé par la fureur de lhomme , voit la mort approcher , ses réactions diffèrent :
la biche , aux abois , pleure quand vient lheure fatale . mais ses pleurs nont pas deffet sur les curs durs et minéraux de ses pourchassants . Ses larmes sont moins fertiles que le sang qui sécoulera de son flanc , percé par la dague brillante .
Le scorpion , lui , à lapproche de la fin , préfère sinjecter son propre venin , plutôt que de finir sous la botte étrangère qui lui brisera les reins .
Quant à la lionne , cette reine , ses crocs et ses griffes suseront , retardant peut être de quelques instants , le moment où la lance vulgaire arrêtera en y pénétrant , son cur vaillant .
Lautruche en enfouissant sa tête dans le sable , montre son derrière , faisant rire le chasseur , qui à la vue du croupion , se dépêche de len~
.prisonner .
Que tout cela est vain
.
Alors , dame , croyez moi , soyez comme ces aigles , qui du haut de leurs cieux limpides contemplent amusés ces minuscules êtres qui sagitent et hurlent en lançant leurs traits , qui leur retombent dessus , tandis que le fier rapace , libéré de lattraction dés-astre , plane sereinement , étoile parmi les consternations .
Et comme je sais que vous appréciez mes citations , jajouterai , Majesté :
« Il vaut mieux jeûner avec les aigles , que de picorer avec les poulets «
Votre toujours dévoué ,