--Ludivine.
Elle avait relevé la tête, plus sous l'injonction que sous le désir, et ses yeux gris délavés avaient plongé dans ceux de Mahaut. Un sourire timide tenta déclairer son visage mais cétait bien loin encore d'un éclat de rire brillant. Quand à la remercier, elle ne put, aucun mot ne franchissant ses lèvres.
Lou se détourna et, avec hésitation, fit ses premiers pas dans ce qui allait devenir son nouveau chez-elle, même si pour le moment son esprit nétait qu'un vide immense dans lequel rebondissait le doute.
Courtisanes libres ! Elle ne savait pas exactement ce quétait une courtisane, elle imaginait une ribaude aimée de ses clients qui la couvraient de cadeaux. Mais la liberté .....Ah ! La liberté ! Elle savait ce que ça voulait dire, même si elle n'y avait jamais gouté, elle savait ce que ça représentait que dêtre libre de choisir. En aurait-elle l'occasion ?
Elle releva alors fièrement la tête, se sachant seule, et dirigea ses pas vers la cuisine. Elle coupa une tranche de pain, trouva même un peu de fromage dans une panière et son regard tomba sur une bouteille de vin. Pouvait-elle en boire ? Que dirait Mahaut ? Tu es libre d'essayer, ne dirait-elle pas cela ?
S'en versant un verre, elle prit le temps de déguster, fermant les yeux par moment, se rassurant qu'aucun coup ne tomberait plus jamais, que son ventre ne crierait plus famine plusieurs jours durant, qu'elle ne risquait plus de perdre sa vie.....
D'un réflexe, elle se gratta le bras et un sourire se dessina sur ses lèvres. Elle fouilla quelques instants dans la pièce, tiroirs, portes, tous les placards y passèrent jusqu'à ce qu'elle trouve : ciseaux, aiguille, fil !
Elle ôta sa robe pour se retrouver nue et, d'un geste habile et assuré, se mit à découdre la robe trop épaisse qui lui mangeait la peau. Adieu les manches ! Adieu le grand col blanc ! Adieu la longueur qui couvrait les pieds ! S'en suivit l'agrandissement du décolleté qui descendait à la limite de sa poitrine qui, pour la première fois, ressemblait à celle d'une jeune femme. Puis la collerette blanche fut découpée et retaillée en deux petites manches qui agrémentèrent les épaules. Enfin la robe fut tout simplement réduite à mi-mollet et légèrement fendue sur les cotes pour donner une démarche plus osée. La taille fut reprise et cintrée pour le petit gabarit de Lou.
Elle la renfila et sourit en imaginant ce que cela pouvait donner. Hummm ! Il devait bien y avoir un miroir quelque part dans cet endroit. Avant de sortir de la cuisine, elle se versât un autre verre de vin et le bu sans ciller.
Létage offrait des chambres qui lui parurent luxueuses par rapport à tout ce qu'elle avait vu jusque là et, il y avait un miroir sur pied ! Elle se dandina un instant devant, surprise de découvrir que Ludivine nétait plus une enfant. Mais lorsqu'elle releva ses cheveux sur sa tête, elle comprit que Lou nétait pas encore tout à fait une femme, et que létape qui lui restait à franchir serait la plus difficile.
Une grimace dans le miroir, elle relâcha ses cheveux et descendit les escaliers en courant, pour sarrêter net devant Mahaut, qui se demandait surement ce qu'elle faisait. Lou sentit le rouge lui monter aux joues, elle n'avait demandé aucune permission pour quoi que soit et peut-être qu'elle avait fauté. Elle murmura dans un souffle.
Que pensez-vous de ma robe, dame Mahaut ?