--Espineux
En ce cinquante troisième jour du règne de Natale-le-Muet, achalandage électoral se poursuivit. Colleurs d'affiches, pigeons savants, crieurs de programme parcouraient le Comté, frappant à chaque maison, cherchant à s'attacher chaque vote. Espineux, chroniqueur, reçut pas moins de cinq pigeons, dont deux portant message identique, qu'il accommoda de raisins marinés et de citrons confits.
Espineux, chroniqueur, s'en fut d'un pas allègre détailler programmes et promesses, comme le jour passé.
Troisième visite fut pour VOUS, liste comportant nombre conséquent de soldats, justifiant long paragraphe de sous-détails intestins du fonctionnement supposé idéal de l'armée toulousaine. Programme était fort longuet, regorgeant de détails précisionnesques, de pattes de mouches, de renvois à la ligne, suffisant pour occuper deux pleines mandatures avec des conseillers nourris au bon grain lors des festins comtaux. Chose était allécheante, mais manque de modestie était patent. Liste prétendait relever le Comté, combler vides immémoriaux, rescusiter fonctions moribondes, consulter tout un chacun, et mener à bien moults projets novateurs.Fut dit que chevilles enflées procuraient travail journalier aux savetiers.
Dernière visite fut pour Avenidor, liste menée par le Bon Comte Natale-le-Muet, homme qui s'était acharné corps et âme pendant toute la durée de sa mandature à osciller entre immobilisme et chaos. Stand était fort gracieusement présenté. Discours alléchant, consistant à promettre choses déjà promises afin que promesses ne fussent point oubliées et perdurassent. Fut noté fort ingénieuse idée que la Chancellerie devinse indépendante du Conseil Comtal. Ainsi alliances seraient faites et défaites, paix signées et guerres déclarées sans que ni le Comte ni les Conseillers élus ne vinsent y mettre leurs pieds sales et leur nez morveux. Chancelier deviendrait alors maître à vie du Comté, recevant serments, allégeances, festins grandioses et pierres précieuses.