Ingeburge
Aux mots de la comtesse de la Ferté-Bernard, elle se sentit stupide, non pas pour ces excuses qu'elle estimait devoir présenter et qu'elle avait fait connaître le plus sincèrement du monde, non, elle se sentit stupide car la Mainoise se réjouissait pour elle d'avoir vu l'Euphor. Durant quelques secondes, elle ne sut donc que répliquer, rendue bouche bée par cette remarque anodine qui laissait entendre qu'effectivement, il était manifeste que la visite inopinée d'Actarius lui avait été agréable et l'avait rendue heureuse et stupidement heureuse à n'en pas douter et rendue étonnée de ce constat qui aurait pu émaner d'une amie. Quelque peu troublée, mais agréablement, délicieusement, elle perdit pour une poignée de secondes sa mine prudente et distante et elle fut tentée de parler de lui, de l'évoquer, de se confier en somme, elle qui ne le pouvait, à personne du fait de sa position particulière. Ceux qui la connaissaient la jugeraient et ceux faisant parti de ses intimes ne comprendraient pas, c'était si peu... elle. Le fait que ces familiers étaient des hommes pour la plupart jouerait dans cette incompréhension et si eux, ne pouvaient l'entendre, qui le pourrait? et durant un instant, face à ce visage honnête et féminin, elle eut envie de se dévoiler. Ce serait la première fois depuis bien longtemps elle qui n'avait eu pour seule confidente sa sur aînée. Il n'y avait eu qu'elle et pour un moment, il pourrait y avoir Lys qui, ne la connaissant pas, n'émettrait peut-être pas de jugement. Ses yeux se posèrent sur la bourse qu'elle n'avait pas lâchée et qu'elle ne délaisserait pas et ses lèvres s'entr'ouvrirent, poussées par le besoin de s'exprimer.
Pudiquement, elle déclara :
C'est un homme bon.
La plénitude l'envahit en posant cette affirmation. Affirmation déjà exprimée, à lui, une fois, pour le repousser parce qu'elle ne pouvait pas.
Oui, vraiment, un homme d'une rare bonté, et qui gagne à être connu.
Et en dire plus, elle ne le pouvait pas davantage. Parler était proscrit, elle était liée par le secret; même ici, avec cette inconnue, il était imprudent de se laisser aller aux confidences. Il y avait déjà eu trop de choses dites et surtout, trop de choses montrées, là, sur le seuil de la Salle du Trône. Elle ne pouvait pas.
Dès lors, pressée par cette nécessité de ne pas en laisser échapper plus, elle se focalisa sur le reste du discours de Lys :
Je dois avouer que je commence à m'inquiéter de ce peu d'affluence, d'autant plus que le comte Michel n'a toujours pas paru. Et ce qui ne manque pas d'ailleurs de m'étonner, c'est que Sa Grandeur, puisque reconduite sur le trône mainois, avait la possibilité de ne pas convoquer à nouveau les vassaux. Pourtant, ce choix fut fait afin que cette cérémonie, je cite Sa Grandeur, participe à l'éducation de la noblesse mainoise.
Légèrement alarmée, elle demanda alors :
En est-il toujours ainsi? Où l'été explique-t-il ce peu d'empressement?
Durant son intervention, sans qu'elle s'en rendît compte, ses doigts blancs s'étaient mis à caresser doucement le velours de la bourse que lui avait offerte le vicomte du Tournel.
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Pudiquement, elle déclara :
C'est un homme bon.
La plénitude l'envahit en posant cette affirmation. Affirmation déjà exprimée, à lui, une fois, pour le repousser parce qu'elle ne pouvait pas.
Oui, vraiment, un homme d'une rare bonté, et qui gagne à être connu.
Et en dire plus, elle ne le pouvait pas davantage. Parler était proscrit, elle était liée par le secret; même ici, avec cette inconnue, il était imprudent de se laisser aller aux confidences. Il y avait déjà eu trop de choses dites et surtout, trop de choses montrées, là, sur le seuil de la Salle du Trône. Elle ne pouvait pas.
Dès lors, pressée par cette nécessité de ne pas en laisser échapper plus, elle se focalisa sur le reste du discours de Lys :
Je dois avouer que je commence à m'inquiéter de ce peu d'affluence, d'autant plus que le comte Michel n'a toujours pas paru. Et ce qui ne manque pas d'ailleurs de m'étonner, c'est que Sa Grandeur, puisque reconduite sur le trône mainois, avait la possibilité de ne pas convoquer à nouveau les vassaux. Pourtant, ce choix fut fait afin que cette cérémonie, je cite Sa Grandeur, participe à l'éducation de la noblesse mainoise.
Légèrement alarmée, elle demanda alors :
En est-il toujours ainsi? Où l'été explique-t-il ce peu d'empressement?
Durant son intervention, sans qu'elle s'en rendît compte, ses doigts blancs s'étaient mis à caresser doucement le velours de la bourse que lui avait offerte le vicomte du Tournel.
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