--Fiston_garlu
Taille de bon géant, sept pieds et quelques phalanges de pouce, le quintal bien mouillé, voire deux, s'il a mangé, Garlu toise le monde de haut, et de toutes ses dents, qu'il a impeccables. Manquerait plus qu'elles tombent, tiens ! Pas question de se mettre à la soupe.
Sur les basques de la Mère, il entre ...
- BAM !!
... en laissant la marque de son front imprimée sur le chambranle de la porte.
- MANGER MAINTENANT MÔMÂ ?
Pas de réponse mais un "glllrrrrgggllloouiiii" ventresque et implorant pour qu'enfin provende soit trouvée.
Le géant s'immobilise dans le hall. Regard perdu et main au front.
- AÏE !
--Fiston_garlu
La brève rencontre avec le chambranle ( maintenant ébréché ) aussitôt oubliée, le Garlu montre les dents.
Plus que d'ordinaire.
Là haut une porte s'ouvre, se referme.
- SENT BON! M'MAN ! MANGER EN HAUT ?
Il n'a pas besoin de coutelas lui, ses pognes larges comme des pelles à boulange sont assez fortes pour écraser, arracher, "pulper" comme il aime à dire, utilisant l'un des cinquante mots de son riche lexique.
Mains en avant, il entreprend de gravir les marches qui gémissent sous son pas. Il bave déjà.
Le tavernier qui jusqu'à présent avait essayé de regarder les deux nouveaux venus sans trop rien laisser paraître, sent l'inquiétude monter quand le gros garçon se dirige vers les escaliers. Il fait signe à son commis qui se trouve à l'étage, les bras chargés de courtepointes, de l'intercepter en même temps qu'il donne de la voix .
- HOLA MON GARS ! Tu vas où comme ça ?
Pendant que le commis déboule, le goliath hésite sur les marches, un pied en l'air, l'espace d'une pensée.... ce qui est considérable en ce qui le concerne. Il toise l'homme qui se dresse sur le palier, plusieurs marches au dessus et pourtant à hauteur d'yeux.
- HOLA ? UN VENU ? POUIGE ? TOI DONNES MANGER LA MERE ? MOI TROUVE SEUL ...
Le Garlu va pour reprendre son ascension lente comme une agonie de pestiféré quand un son gai de petite flûte attire son ouïe fine.
- Piiiii! Piiiii! Piiii! fait un serin heureux de se faire remarquer.
- PIIIIIII? QUOI C'EST? MUSIQUE? JOOOLI.
- Piiiiii! Piiiiii! fait le serin qui se rengorge sous le regard glauque du géant.
- POURQUOI LA BOITE ?
Garlu saisit la petite cage entre ses immenses battoirs. Le serin commence à trouver cette proximité désagréable.
- Piiiiuuuuuuuuu!
- CA DOUX. .. MOI TOUCHE dit Garlu en ouvrant le loquet. Un instant plus tard, le serin est blotti dans la main démesurée, petite tête jaune dépassant à peine.
- CA CHAUD... CA BON.
- Piiiuu..Gloup fait l'oiselet en disparaissant derrière une double rangée de dents alignées comme des pierres tombales.
- MMMHHH !... CHA BON.....
--Fiston_garlu
Tout à l'aplatissage des plumes sous la langue, le Garlu ferme les yeux. Première viande depuis.... depuis... bah les nombres n'ont jamais été son fort. En tout cas il a l'appétit sérieusement mis en alerte maintenant.
QU'EST CE TU CROQUES TOI ?!
La Voix ! Celle de la Mère qui est capable de trancher pour asseoir son autorité. Penaud, le Géant retire d'un index maladroit le serin mâchouillé, le montre au regard vitreux de la Mère. Eclair fugace, vite éteint, la proie n'étant pas à la hauteur de ses espoirs de ripailles. Le fiston redescend deux marches. S'arrête et lève la tête. Des gloussements de femme ondulent dans l'étage, appel voilé à l'assouvissement de chauds appétits. Le Garlu n'est pas savant mais d'expérience il sait que beaucoup de lieux sur cette terre sont à la fois chauds et humides. Ceux-là sont ses favoris.
- EN HAUT... SENT BON... TENDRE ! MOI VOIR ! dit le colosse en se retournant vers le patron encore sous le choc.
Le Garlu, question appétit, ne craint personne.