.amael.
Vous êtes simplement un grand fou mon beau Seigneur!
Prendre ainsi la route, même si bien sellé,
Même dans l'ombre des fourrés, qu'on dit maudits!
Alors qu'ils vous attendent les hommes en armes!
A cent contre un, et Pour quoi? Pour une femme!
Silence, Guérin! Sais tu de qui tu parles!
Elle est sans conteste le soleil de la vie!
Lo Coms de Tolosa... euh l'ex coms, ou encore le coms des tolosans peut être? Bref! Ce Fol qui osait poursuivre un idéal... Etait un peu à vif ces derniers temps, surtout si on voulait l'empêcher d'accomplir son souhait le plus ardent.
Ils s'étaient réunis, lui et sa troupe de braves s' amenuisant au fur et à mesure que le mensonge facile opérait sa percée dans les coeurs même les plus nobles, quel gâchis! ... Au bord de la Garonne en campagne toulousaine, reclus tels des fuyards... Mais n'était ce pas ce qu'ils étaient devenus? Le peuple était trompé, l'Eglise était toujours puissante, oui, suffisamment pour entretenir l'illusion d'un grand mensonge collectif.
Elle était belle l'Eglise, lui avait pu la côtoyer de près ces derniers mois.
Duflan savait. Le pauvre Duflan. Il avait eu le choix et avait voulu savoir. Quelle déception pour tout le monde! Le Coms aussi savait. Et tous les membres du consehl, malgré ce qu'ils en disent.
Oc mes amis, mes chers frères, ce soir je prends la route du Sud. Il n'y a plus rien que l'on puisse faire et je m'en remets à Dieu. Vous autres, partez au Nord par la Guyenne, nous nous retrouverons dans quinze jorns à B***** si Dieu le veut. Si je suis en retard ne m'attendez point. Vous pourrez contacter dona N***** de ma part, elle s'est alliée à nostre noble cause et vous aidera à poursuivre le combat.
Pour ma part... Eh bien je serai fixé sur les intentions de mon cher frère... Folie certes! Mais j'ai foi en le Très Haut et c'est peut être ma grande force.
Allons mes amis! Partez maintenant tant qu'il est encore temps! N'attendez point que les battues vous pourchassent, ces chiens auront tout le loisir de vous faire rechercher dans le royaume par la suite, ne leur donnez pas le plaisir de vous prendre!
Adieùsiatz mes frères, Dieù vous protège!
Il leur lança un dernier regard espiègle et enfourcha sa monture.
Partant par les bois tant redoutés, l'ancien bûcheron voyagea dans le calme et la fraicheur des feuilles et fleurs printanières. Il poussait sa monture, il lui fallait faire vite, arriver avant l'aube, avant qu'Elle s'éveille...
Au bout de quelques heures il arriva en vue de la ville qu'il avait tant chéri. Le feu de camps l'avertit d'un campement établi par l'armée devant la porte Nord. Iurek! Tu es là, quelque part... Si proche... Tu ne dors pas, c'est impossible que tu dormes en pareilles circonstances. A ta place je ne me sentirais pas mieux. Voyons voir si tu as quadrillé la zone en bon capitani...
Il s'enfonça un peu plus dans la forêt pour esquiver le campement et les remparts par l'Est sans croiser âme qui vive, puis sortit des fourrés sur la route de Foix.
Amael s'approcha à lents pas de la Porte de la ciutat, sur sa monture, encapuchonné sur son armure légère. Il entendait les ronflements d'un garde chargé de plus en plus près.
Halte là, qui va là à cette heure? Savez vous que nos frontières sont fermées!
La voix avait retenti telle un couperet juste dans son dos tout près de lui.
Messire passez devant moi et vous verrez le visage d'un gradé qui apporte des nouvelles de la situation au Sud pour l'armée Gara los nostres Crocs! J'ai d'ailleurs un Laissez Passer permanent de la part du Capitani! Je compte bien sûr sur vostre discrét...
Le garde était à présent sur le flanc du Comte lorsqu'il reçut un grand revers de gant maillé sur la tempe et tomba au sol.
Et zute! un homme à terre!
Amael le chargea sur son cheval et l'emmena à l'orée du bois où il entreprit de le ligoter et le bâillonner avant de reprendre sa route vers le Banastie.
Il entra dans l'étable et mit son cheval au box, puis passa prudemment dans la réserve, depuis laquelle il monta les escaliers qui menaient aux chambres au dessus de l'étable.
Doucement il poussa la porte de chêne... Un feu terminait de se consumer dans les crépitements hésitants des dernières braises.
Elle était là étendue sur son lit, les yeux clos et ses joues roses encore marquées par le sel des larmes. Il effleura ses lèvres un court instant, le temps de sentir son souffle chaud chatouiller agréablement ses joues.
Un court instant magique. Il déposa dans le creux de sa main une petite médaille et un mot.
Ne perds jamais espoir ô ma tendre mie, un beau jorn il faudra me la rendre si tu veux bien tojorn me marier.
Je t'aime à tout jamais.
Ton Amael
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