Erel était... détaché. Il s'était détaché du monde, complètement vide et sans pensée aucune, juste se préserver de la douleur. Du choc dans ce néant salvateur, où la douleur de l'âme et du corps semble disparaître, où l'illusion devient réalité...
Perdre Agnès, cela l'aurait tué, et elle avait frôlé la mort, il en était sûr... Mais ce dont il était certain aussi, c'est ce que tout ce qui se passait voulait dire.
Mais cela était trop dur, trop dur à assumer, trop dur à s'avouer.
Pourquoi eux? Pourquoi elle? Pourquoi, lui...? Cet enfant qui aurait dû naître d'ici quelques mois, et qui finalement, n'aura sans doute jamais vraiment vécu.
Non... Non... Oublier cette pensée funeste, morbide, qui lui donner des frissons... Non...
-NON!
Cette fois-ci, ce n'était plus dans sa tête qu'il s'exprimait, mais à voix haute. Sans un mot, le visage livide, les mains crispées et le visage empli de larmes, il sortit.
Le jeune Seigneur s'enfuit, partit, dehors, dans le froid... Où? Il ne savait pas.
Cela faisait-il de simples minutes ou des heures qu'il errait dans les rues du village, près des chaumières de Verneuil? Le Dénéré ne le savait point. Lorsqu'il revint, tout était noir, aucune lumière, aucun son. Juste le... silence et le noir. Erel découvrit son aimée endormie dans son lit, les draps et les couvertures remontées jusqu'à son menton.
Il ôta ses bottes, et s'allongea près d'elle, tout habillé. Un doux passage de ses doigts sur le visage de la jeune Vicomtesse lui indiqua un chemin encore humide qui s'était tracé. Elle avait pleuré... elle avait perdu son enfant, leur enfant, et lui l'avait abandonné, tel un pleutre, pour fuir sa propre douleur.
Le coeur serré, il blottit son visage sur sa nuque, son souffle brûlant et à l'odeur de tristesse se brisant dans la chevelure emmêlée de son amour.
[Deux semaines environ après tous ces évènements]
Voilà, tout était fin près. Dans quelques minutes, la Sainct-Just serait là.
Lorsqu'elle arrivera, elle découvrira toutes les préparations d'Erel.
Tout d'abord, elle découvrira au bas de la porte d'entrée une fleur de lys blanche légèrement bleu pâle - fleur préférée du jeune et ténébreux Seigneur - étroitement liée par une fine cordelette où des fils dorées s'imbriquent élégamment en tourbillon, à une branche de lilas blanc dont la senteur faisait rêver - fleur préférée de la belle Vicomtesse-.
Ensuite, elle découvrira de l'autre côté de la porte, toujours au sol, une rose où des nuances de rose s'entremêlent clairement avec le rouge de la fleur.
S'ensuivra ensuite un long chemin parsemé de pétales de roses blancs, roses et rouges, qui la mènera jusque devant la porte de sa chambre.
Accrochée à ladite porte, un poème aux vers ainsi déclinés:
Citation:~ Du Lilas & du Lys, l'union de la Rose ~
Toi qui a su me montré le chemin de l'Amour,
Toi qui a su me séduire pour Toujours,
Aujourd'hui le Lys se sent prêt,
À pour toujours s'engager,
À aimer le Lilas pour l'Eternité.
L'Union en une Rose à tout Jamais,
Toi, Moi, Nous, nous Aimer.
Mon Amour, ma Vie, mon Souffle... Veux-tu m'épouser?
La respiration du Dénéré s'accéléra. Les bruits de pas venaient de s'arrêter derrière la porte un court instant. Sans réfléchir, il refit machinalement ce qu'il avait maintes fois préparées dans sa tête, et posa donc un genou à terre, paume tendue où dans son creux une bague d'argent et d'or pur incrustée d'une petite améthyste attendait, tandis que le visage du jeune homme dont le coeur battait à tout rompre, se tournait vers le visage de son aimée qui apparaissait alors qu'elle ouvrait la porte.
La réponse, quelle serait sa réponse...?_________________