Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Retrouvailles en terre inconnue

Artheos



Qu'il avait mal aux jambes ! Qu'il avait faim ! Qu'il voulait se reposer ! Mais comment s'allonger, manger et dormir quand on ne possédait rien ? Arthéos était dans ce vagabondage triste et nostalgique. Qui était-il ? Que lui arrivait-il ? Il ne se reconnaissait plus. C'était un jeune homme frêle, aux joues creusées par la misère et aux vêtements salis par le temps. Depuis combien de temps n'avait-il pas pensé à lui ? Les tragédies qui entourèrent sa vie ces derniers mois ne lui avaient laissé aucun répit. Auparavant, il avait une bonne situation, stable et dont il ne se plaignait pas. Il n'était autre que valet dans la maison d'un des plus grands ducs de Champagne, Ghost d'Izard. Il était plus particulièrement attaché à la confidence de l'épouse, la duchesse Ana.Lise. Quel évènement manqua-t-il à ses côtés ? Il vécut la souffrance, la joie, la tristesse, le deuil, l'illégalité, le bonheur, l'absence... Il avait fui, sans mot dire, le jour où il entendit que le curé de Compiègne, qui l'avait presque élevé, était allé rendre visite à son supérieur. Dans le même temps, son professeur, qui lui avait appris à lire et à écrire, s'en était lui aussi allé rejoindre les ancêtres. Des pertes importantes pour le jeune homme qui échangeaient souvent des lettres aux deux défunts. Alors, le jour où il dut embarquer sur le navire avec ses maîtres, il renonça, tourna la tête et pleura.

Arthéos était un domestique attachant. Quelque peu naïf, certainement pas idiot. Il avait connu la haine et le mépris. Il ne reçut jamais l'amour qui lui manquait d'une mère partie trop rapidement, ni celui d'un père en fuite, ni même celui d'une femme. Il était seul. Ses vagabondages le menèrent premièrement à Orléans. Perdu, il ne connaissait personne. Où aller, que faire, qui croire ? Puis il fouilla dans ses poches et remarqua qu'un mouchoir brodé ne s'était pas échappé par les trous d'usure. Ce tissu où un A était inscrit, lui rappela aussitôt d'où il venait. C'était sa maîtresse qui le lui avait offert. C'était vers elle qu'il devait retourner, quoi qu'il advienne, la seule personne que ses pensées affichèrent à ce jour, celle qui l'avait toujours accepté tel qu'il était. Arthéos avait plaqué son nez dans le mouchoir et avait simplement senti l'odeur qui en émanait. Le parfum de la duchesse. Une idée folle lui traversa l'esprit. Peut-être qu'un pigeon pourrait la retrouver ? Dieu seul savait où elle se trouvait actuellement... Il fallait tout bonnement qu'il la retrouve et s'excuse... D'une main tremblante, il rédigea son chagrin et ses pleurs. L'oiseau voyageur s'envola dans le ciel gris et revint quelques jours plus tard à Arthéos. Incroyable. Une réponse d'Ana.Lise ! Il s'empressa de lire les mots de la duchesse. Elle lui pardonnait. Il n'en avait pas douté. De toutes les âmes du monde, la jeune femme était la plus gentille et douce.

La Normandie. C'est là-haut qu'elle se trouvait. Loin de la Champagne et de son mari dont elle voulait se séparer. Le temps s'était enfui et le couple s'était envolé. Arthéos l'avait toujours senti. Les mots qui font mal sont les mots de la fin. Il lui arrivait souvent de ressentir de la tristesse pour ceux qu'il connaissait. Il pleurait même parfois quand les gens pleuraient. Il ressentait leur douleur au plus profond de son être, comme lié au destin de chaque personne à qui il tenait. Dans un monde de chaos et de désordre, un jeune homme s'avançait, perforant les ténèbres profondes. Son sourire gravé à jamais et ses yeux dévoilant la joie de vivre, étaient éternels. C'est pour cela qu'on se souviendrait de lui. Malheureusement les mois passés avaient terni cette image. Arthéos n'était plus que l'ombre de lui-même. Submergé par des vagues noires et des vents bien trop violents.

"La Normandie ?

Un vieillard d'Argentan, en Alençon, lui désigna le Nord sans en dire plus. La mine du jeune homme pouvait alerter. Ses yeux étaient étranges. Ils avaient trop vu. Ils étaient trop vieux pour un visage si jeune. Le front poussiéreux, les joues et le menton sales, à force de dormir sur les parvis des églises centenaires et pourtant si froides. Parfois, quelques personnes lui donnaient de l'argent. Arthéos l'acceptait mais dès qu'il croisait un autre mendiant, il le lui attribuait. Car dans la misère, il n'était pas le plus à plaindre malheureusement. Certaines personnes n'étaient rien, n'avaient rien. Le valet lui, malgré l'infortune passagère, il lui restait sa duchesse. Qu'il était quand même triste le valet ! Quand ses yeux humidifiés venaient à perdre une ou deux larmes innocentes et pures...

Il quitta Argentan et pénétra dans le duché de Normandie. Il attira immédiatement la police sur lui. Une jeune femme, l'air hautain et le verbe répété, l'arrêta. Elle lui permit de rester seulement vingt-quatre heures à Lisieux, après quoi il devrait retourner à Argentan. Non, il n'en était pas question. Il ne partirait pas. Magré l'avertissement du douanier quant à un procès prochain, il savait qu'il n'était pas une menace. Il n'était un danger que pour lui-même. Si on l'arrêtait, peut-être aurait-il au moins à manger et à boire en prison. Un procès, au cours duquel il serait condamné à être pendu et jamais on n'entendit son rire s'élever des prés fleuris. Le temps est assassin et emporte avec lui les rires, les sourires et les joies. Ainsi va la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d'inoubliables chagrins.

Comme déjà perdu, Arthéos entra dans la première auberge de Lisieux. Il devait retrouver sa maîtresse. Lui dire un dernier au revoir, la regarder un dernier instant avant que la terrible justice s'empare de lui. Les yeux presque clos, la patronne de la taverne s'approcha de lui et le dévisagea.

"Connaissez-vous la duchesse de Sedan ?

Une phrase éperdue, qui résonnait dans le lointain de sa mémoire. Comme prévu, la patronne hocha négativement la tête. Evidemment, en Normandie, on ne connaissait guère les nobles champenois... Combien de temps devrait-il errer dans le duché pour la retrouver ? Et s'il la manquait ? Se laisser mourir, se laisser aller, telle était parfois la décision des hommes trop las, trop affaibli pas assez courageux pour affronter la fatalité d'un destin scellé d'avance dans les étoiles immortelles et somptueuses. Qu'il était triste, le jeune valet...

_________________
Artheos



Arthéos ne resta qu'une seule journée à Bayeux, du moins était-ce prévu ainsi. Il demanda son chemin à un Normand. Il devait se rendre à Avranches, là où sa maîtresse devait se trouver. L'inconnu lui dit qu'il fallait emprunter la route du Sud Ouest. Après être monté jusqu'ici, voilà qu'il fallait redescendre ! On l'y reprendrait à suivre son instinct... Il remercia la tavernière pour l'eau qu'il consomma, à vrai dire c'était celle des chevaux, d'où la gratuité et les rires mesquins. Oh ! Qu'il n'en avait cure... Vu le visage rouge de cette femme, ces dents noires et ses rondeurs affreuses, Arthéos ne lui donnait guère plus de quelques années. Qui rirait alors ? Certainement pas lui... On ne jouait pas avec la mort, même si le défunt ne vous portait pas dans son coeur. Le trépas était toujours triste. La dernière image d'un vivant restait gravée à jamais dans l'esprit et le coeur. Le valet avait un certain don pour ces choses là ; il lui arrivait quelquefois de savoir qu'il ne reverrait plus telle ou telle personne. Il fixait alors intensément son visage, comme pour retenir pour l'éternité ses moindres traits.

Il quitta Bayeux pour Avranches. Son traditionnel baluchon apposé sur ses épaules, Arthéos partit vaillament rejoindre Ana.Lise. Le coeur léger à l'idée de bientôt la revoir. Le destin en avait vraisemblablement décidé autrement. Alors que la nuit affichait ses premières étoiles et que la Lune dévoilait ses sombres rayons à la terre, le valet aperçut du mouvement loin devant lui. Des bruits de pas singuliers, des bottes qui foulaient le sol ardemment. Qu'est-ce que cela pouvait bien être ? Il continua néanmoins son chemin. La poussière qui s'élevait au loin, se rapprochait de lui. Les torches qu'il put discerner laissaient apparaître des lances brillantes et perçantes au-dessous de têtes casquées. Ces têtes n'étaient autres que celles de soldats. Sauvé ! L'étendard de la Normandie flottait dans les airs. Quelle chance ; ils n'étaient pas des brigands. Arthéos en avait une peur bleue depuis une mésaventure avec Ana.Lise en Champagne...

La troupe cependant se stoppa, Arthéos continua. Celui qui devait être le chef cria dans le ciel : "Cinquième Corps ! En avant !" Les étoiles s'assombrirent, la Lune pleura. Deux militaires vinrent vers le domestique qui dut bien s'arrêter devant leurs mines peu réjouissantes. Visiblement sur l'alerte, ils fixèrent Arthéos, fatigués et angoissés par la guerre qu'ils menaient. Le chef à la barbe luisante fit quelques pas vers lui, dégainant sa sombre lame mortelle. Et sans un mot, il vint blesser Arthéos à l'abdomen. Quelle terrible aventure ! Souffrance interminable ! Il assène ensuite un coup de poing dans sa mâchoire. Le pauvre domestique recule mais ne s'effondre malheureusement pas. L'autre soldat est une femme, aux cheveux blonds. A son tour elle vient vers Arthéos et le touche aux jambes pour qu'il tombe. Sans un cri, le jeune homme brûle de douleur et s'agenouille devant la puissance des plus forts. Le chef revient à son tour et le transperce à la poitrine. Quatre coups terribles donnés en tout. Un poutrage en bonne et dûe forme. Le dernier fit mal et la tête du dormeur heurta le sol du chemin. L'armée avait fait sa triste besogne ; ne laisser passer personne. Quelle fatalité c'eût-été si Ana.Lise en avait fait partie !

De grosses larmes de douleur s'évacuèrent de ses yeux. Au moins, tout était fini là. Sans un mot, sans un cri. Pas même un échange avec ses agresseurs. Pas un pourquoi. De l'honneur pour celui qui n'était même pas noble. Ses perles bleues se voilèrent d'un blanc opaque. Les étoiles pleuraient sur lui, la Lune aurait voulu le prendre dans ses bras. Pour ne pas qu'il traîne sur les routes, l'armée le bouscula dans le champ voisin, laissé pour mort.

Pour des choses qu'il ne comprenait pas. Pour un Ponant dont il ne saisissait pas l'alliance, pour une Bretagne qu'il ne savait pas placer, pour une Reyne qu'il pensait sage, pour une guerre dont les belligérants lui étaient inconnus, Arthéos sombra dans l'inconscience et le pré-royaume des morts. Il voyait ce triste Passeur du Styx, mais de l'argent, il n'en avait pas... aussi resta-t-il dans l'ombre et le doute, dans le chagrin et la douleur, inconsolable.


RP ouvert à tous bien sûr, j'ai oublié de le préciser.

_________________
Nalyssandre


L'air Normand était rongé jusqu'à la moelle par des conflits. Et l'atmosphère y était pesante, assombrissant chaque jour un peu plus, les cœurs des hommes.
Cette guerre ne prendrait-elle point fin un jour ? Tout. Tout embaumait la mort. Depuis déjà longtemps les hommes étaient partis, et la cruelle guerre emporta bien des vies.
La peur n'existait plus en ces temps de guerre, du moins pas pour Nalyssandre. Bravant chaque jour les interdits, elle passait par les chemins de traverse pour connaitre la tournure que prendrait la guerre.
Mais ce jour là, elle ne rencontra ni les hirondelles qui fuyaient, ni le vent qui soufflait chaque jour un peu plus fort, ni les feuilles qui dansaient, heureuse de ne pas connaitre un nouveau triste et sombre lendemain. Non, c'était bien un homme. Un homme qui gisait au sol, demeurant pour quasi mort.
Sans plus réfléchir, Lys se précipita vers lui. Etait-il mort ?
Et celui là, encore, qui était-il ? Était-ce un breton, un normand ? Qu'importait, c'était un homme, un Homme !

Ses bras enlacèrent le blessé. Ses paroles se voulaient douces et rassurantes. Et pourtant, elle ne savait ce qu'il allait advenir :


- Messire ... messire, vous êtes gravement blessé ... Tenez bon, je ... je, je vais tenter de vous ...

Nalyssandre, ne trouvait pas les mots justes. Jamais, elle n'avait du faire face à de telles situations. Son air était grave, et ses yeux humides.
Rien ne devait transparaitre, il s'en sortirai, oui il s'en sortirai ...


- Je vais allez chercher de l'aide ... Ne vous laissez pas aller, je vous en prie ...


Sans plus tarder, elle jeta un coup d'oeil de chaque côté, puis déposa délicatement son châle sur le corps quasi inanimé de l'homme et parti sans plus attendre chercher quelques secours.

_________________
Artheos



Inanimé, Arthéos sentait à peine le froid et l'humidité de la rosée. La rosée, le jour ne devait plus être loin. Verrait-il encore une fois le Soleil ? Pauvre petit valet. Il adorait tant la vie que celle-ci s'est amusée avec lui, lui jouant les tours les plus perfides au monde. Mais Arthéos n'en voulait à personne. Non. Il avait eu une vie courte, certes, mais une vie plutôt remplie. Oh ! Qu'il aurait aimé encore vivre, rien qu'un petit peu ! Entendre à nouveau les oiseaux chanter au-dessus de sa fenêtre à Chaumont, écouter encore les joies de Sigebert et ses rires résonner dans les couloirs. Revoir Bathilde, la cuisinière au grand coeur qui faisait semblant de ne pas l'aimer. Connaître le bonheur et plus jamais la peur... C'était étrange comme les pensées vagabondaient quand son âme hésitait entre la chaleur du Paradis et la cruauté du monde des hommes.

Il ne parvenait plus à sentir ses membres. L'instinct de survie avait disparu. Pourtant, il trouva quelques forces pour se hisser au pied de la pente qui menait à la route. Il se cachait. Quelle pudeur ! Comme les oiseaux, comme les animaux blessés, comme les grands héros, Arthéos ne voulait pas qu'on le voit mourir. Confortablement installé, il patientait, en pleurant. C'était triste, c'était ainsi. Grâce à la faible clarté des rayons de la Lune, il put discerner ses deux plaies au ventre et son sang qui s'écoulait lentement des blessures. Lui qui s'évanouissait au moindre mal sanguinolant de ceux qu'ils connaissaient, parvenait à supporter cette vision morbide.

Quelques secondes, minutes - ou heures ? Le temps était trop incertain quand on agonisait - plus tard, une silhouette s'afficha à ses yeux. Arthéos était terrorisé. Les militaires revenaient finir le travail mal exécuté. Quelle cruauté ! Quelle barbarie... Le jeune homme discernait mal l'ombre qui se dessinait devant lui. Il força néanmoins et plissa les yeux. Non ce n'était pas un soldat. Aucun cliquetis d'armure, aucune épée brillante. C'était une silhouette fine avec des cheveux volant subtilement dans les airs. Etait-ce possible que ce soit une ange venu le chercher ? Les jeux étaient faits, et elle emmenait son âme vers de plus hautes ou de plus basses joies.

Arthéos sentit qu'on le touchait. Agenouillé près de lui, l'ange parlait agréablement et d'un ton qui rassurait le domestique. La mort douce, c'était plus facile et moins douloureux. Il n'avait jamais su que cela se passait ainsi... peut-être parce que justement, personne ne revenait du royaume des défunts pour en témoigner ! La silhouette l'enlaçait. C'était un contact agréable. Messire ? Même les anges ne connaissaient pas sa situation. Il n'était guère chevalier, mais à l'instant présent, peu lui importait. Il avait du mal à clarifier ses mots qui semblaient entrecoupés par une émôtion peu commune. Tenir bon ? Tenter quoi ? Chercher de l'aide ? Ne pas se laisser aller ? Se pouvait-il qu'il ait trouvé du secours ? Ce n'était pas une créature envoyée par Dieu ; c'était en fait une femme qui venait lui porter de l'aide. Cet acte insensé redonna de l'espoir au désespéré. Il n'était pas tout seul.

Mais le contact s'effaça bientôt. Se pouvait-il qu'il ait rêvé ? La jeune femme déposa sur lui un châle qu'il visionnait difficilement. Puis elle se retira. Ce blessé était le sien et comme une louve attentionée, elle l'avait réservé en déposant quelque chose qui lui appartenait. Ne traîne pas, âme déouvée ! Ne traîne pas, car l'aube était un trop bel instant pour passer de l'autre côté du miroir.

_________________
Nalyssandre


Ses yeux se reportèrent une nouvelle fois sur lui, désormais auréolé d'un douce lumière dorée. C'était l'aurore qui illuminait l'étranger, d'un doux soleil qui venait tout juste de pointer le bout de son nez, éclairant le sommeil du monde et apportait les rêves énervés du matin.
Rien n'existait, que le silence. Ces deux âmes pesaient dans le silence, comme l'or et l'argent pesaient dans l'eau pure. Le regard de Lys se voulait doux, consolateur, et rempli de hardiesse, mais il n'en était rien.
Sans plus attendre, elle se résolut à quitter l'homme, et se mit à courir. Il n'y avait pas une minute à perdre. Il ne fallait pas se laisser submerger par les émotions. La belle se devait d'agir, et vite.
Le temps était un ennemi implacable contre lequel toute lutte était vouée à l'échec. Et les minutes, lui semblait des heures. Toujours personne à l'horizon.

Personne, il n'y avait plus personne, à part quelques brigands. Certains avaient trouvé bon de déserter la Normandie le temps de la guerre, tous des lâches. Et puis, il y avait les autres ... ceux qui combattaient au front.
L'heure matinale n’arrangeait rien. Une épais voile grisâtre, pareil à un crachin de cheminée, apparaissait au loin, derrière une épaisse broussaille. L'espoir envahit Lys, et la revigora. Elle n'était plus seule.
Nalyssandre ne s'était pas trompée, il y avait derrière les taillis, un petit groupe d'homme. Des Bretons, des Normands qu'importait ? Son coeur tambourinait si fort, que l'on aurait pu l'entendre jusqu'où le monde se jetait.
Elle aurait voulu être la flamme de vie qui surgit d'un sursaut. Sans plus attendre, les hommes se mirent en route devancé par Nalyssandre. Ces hommes ci, n'avaient pas hésité une seule seconde, étaient-ils Bretons, Normands ?
Ses pupilles retrouvaient de nouveau celles de l'homme. Il vivait ... mais pour combien de temps encore ? Il fallait l'emmener chez elle à Bayeux, sans plus attendre.
Nalyssandre s'agenouilla vers lui, l'enlaçant de nouveau et approcha son visage du sien pour qu'il puisse entendre ce qu'elle allait lui dire.

- Bel étranger ... n'ayez peur, ces hommes vont vous amener chez moi ... Je ... je ...

Non, il ne fallait fallait pas parler de ces choses. Et sans un mot de plus, la belle se retira. Et les hommes soulevèrent sans aucun mal l'homme avant d'écouter les indications de Lys.

_________________
Artheos


L'aube. A l'heure où la campagne blanchit. Qu'il était doux de mourir lors d'un si beau paysage. Les couleurs orange et rouge enchantaient le coeur les yeux du malheureux Arthéos. Il ne ressentait plus la douleur. Plus rien. Il ne savait même plus ce qui lui arrivait. Pourtant, celle qui était venue le voir, revint à lui. Elle posa ses mains sur son visage et lui chuchota des mots de réconfort. Puis aussitôt, le valet fut soulevé. Qui le portait ? Où l'emmenait-on ? C'étaient de simples hommes. Oh ! Il n'était pas bien lourd le Arthéos. A deux, on pouvait aisément le porter. Il se demanda un instant si ce n'était pas le dernier voyage. L'atroce et cruel cortège de la mort qui le propulsait au Paradis. A priori, il n'en était rien. La douleur était toujours présente et ce voile trouble le berçait toujours entre deux mondes. La frontière était mince et l'âme du jeune homme oscillait entre vie et mort, ne sachant pas quelle solution était la meilleure. Souffrir encore un peu pour vivre ensuite ? Ou mourir immédiatement afin que la sublime douleur s'estompe ?

Arthéos semblait avoir tranché. Ses yeux fixèrent une dernière fois le bout de soleil qui marquait l'aube. Son coeur fut chaviré par d'éternels sentiments, par d'inombrables souvenirs et d'inoubliables chagrins. Qui l'aurait cru ? Le valet décédé par les armes ! Lui qui détestait tant la guerre la violence et les épées ! Il finissait, trahi par sa peur. Il aurait pu, il aurait dû, mourir de vieillesse. Il eut alors un soubresaut apeurant et sa vie fut projetée en avant. Arthéos se voyait en train de se faire marier par un vieux curé, à son bras une femme charmante. Puis il vit la naissance de son premier enfant, qu'il portait dans ses mains maladroites. Une autre image le montra, lui, sa femme et ses trois enfants en train de se promener dans un forêt dont il ignorait tout jusqu'au nom. Et la dernière vision enfin était la fin. Il était vieux et ridé. Ses cheveux noirs avaient laissé place à une pâle blancheur. Ses yeux étaient fatigués et s'en allaient progressivement. Couché dans son lit, sa femme assistait à son départ, main dans la main, assise sur le rebord. Les derniers mots du vieillard furent : "Merci, merci pour tout. Tout le monde est à l'abri ?" La vieille dame le rassura par l'affirmative. Toute sa vie se résumait là : penser aux autres, penser à la sécurité des siens. Quand le vieil Arthéos fut rassuré, il dit simplement : "Bien, alors il est temps. Merci." Puis ses yeux ne reflètèrent plus rien, sauf le vide, le néant et la mort.

Les visions disparurent. Pourquoi n'avait-il pas eu le droit à cette vie de bonheur et de joie ? Tout n'avait été que souffrances, depuis toujours. Des dernières larmes de déception, de peur et de regret s'échappèrent de ses yeux avant qu'ils ne se ferment, plongeant Arthéos dans la clarté obscure de l'inconscience.

Gauche ou droite ? Le vrai chemin était l'un d'entre eux. D'un côté, il voyait sa mère, sa tendre mère au sourire éternel. Elle l'attendait, mais sa présence n'existait pas. Elle était fantôme, prophète en sa patrie. Pourtant ! Qu'il avait envie de la serrer dans ses bras ! Il avait trop manqué de l'amour d'une mère, et cela se ressentait chaque jour. Mais avant de s'élancer vers elle, Arthéos regarda le second côté. Un monde de couleur, de joie et toutes les personnes qu'il chérissait étaient réunies. Sa duchesse, son fils, cette étrangère qui l'avait sauvé et d'autres ombres encore méconnues. Il hésita. Le monde des défunts lui joua un autre tour : son professeur et son curé apparurent aux côtés de sa mère. Cela mit la puce à l'oreille du jeune homme. Quelque chose cherchait à l'attirer du mauvais côté. A contre coeur, il jeta un dernier regard à ses êtres chers disparus, et s'engouffra vers le royaume des vivants.

Il ouvrit les yeux. Il était couché dans un lit, dans une jolie chambre. Ses yeux papillonèrent plusieurs instants pour s'habituer à la lumière ambiante. Il put ensuite s'apercevoir qu'il était dans des draps propres. Il tenta de s'asseoir mais la douleur l'en empêcha radicalement. Il n'osait pas regarder ses blessures. Sa mâchoire lui faisait mal. Doucement, il souleva les couvertures et s'aperçut qu'il était pansé. Qui l'avait soigné ? Où était-il ? Depuis combien était-il là ? Il était presque apeuré. Ses yeux s'humidifièrent. Il était dépendant de quelqu'un. Il avait une dette éternelle envers une personne, celle qui l'avait trouvé. Où était-elle ? Ne sachant quoi faire, il patienta, tout simplement en pensant aux derniers évènements. Allait-il survivre au moins ? Il avait besoin qu'on le rassure... S'était-on attendu à sa survie ?

La porte de la chambre s'ouvrit alors.

_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)