Isambre, incarné par Balthier.
[Un peu plus tard dans la matinée]
Tout était assez chaotique. La nuit emportait avec elle les derniers restes de la splendeur de la citadelle. Les ruines fumantes des remparts et des communs laissaient encore apparaître Haute-Tour décapitée, ses chairs déchiquetées dressées vers le ciel. Fière, Blanquefort gisait là, alanguie sur les cendres de ses beaux jours, assoupie entre les carcasses brunes de ses vignes brûlées.
La Duchesse, la chemise roussie par quelques flammes hardies rôdait au pied du donjon. Sa chevelure défaite ségaya au gré dune bourrasque. Appuyée contre le roc, elle observa dun il pétillant lenfer qui sapaisait.
Cela faisait si longtemps quelle navait vu cette scène dapocalypse que le souvenir peina à lui revenir. Pourtant, la tour décapitée lui était familière. Elle avait hanté ses rêves et ses fièvres bien des années auparavant. Une douleur aiguë crispa, comme en écho à ses souvenirs, la jambe malade de la Duchesse. Doucement, un soulagement immense illumina le visage maigre couvert de suie. La commissure de ses lèvres rougies se souleva en un véritable sourire.
Le pas chaotique de la Duchesse martela une ultime fois la terre battue de la cour de Blanquefort et rejoignit ce qui avait été un corps darme.
Sans un dernier regard dadieu, le visage blafard dIsambre se tourna vers la route du Nord. Au loin, déjà, une colonne de véhicule de toutes sortes emportant trésors, collections, bibliothèques, garde-robe, vaisselles et autres raretés se dandinait au rythme de la démarche chaloupée des animaux. La majorité des soldats et la mesnie étaient partis en avant-garde, mener le convoi. Ne restaient queux, les Ducs de Blanquefort, surveillant la fin de larrière garde et leurs possessions.
La Duchesse de Blanquefort avisa son époux qui était resté seul auprès de sa monture.
- Il est temps, nous ne devons plus attendre.
Quelques minutes plus tard, rompant le silence macabre, la forteresse gémit. Le vent, câlin caressait ses plaies. Au loin, deux voix chantaient:
Mon cheval se nommait Vouloir.
Je fis tremper mon équipement
dans une eau que lon appelle Pouvoir.
Mon bouclier était de Bon Espoir
- au moins pour durer longuement.
Ma lance était d'Aller à l'aventure,
fabriquée avec un savoir-faire extraordinaire,
et mon épée de Courage.
Ainsi, j'entrepris la conquête
de mes redoutés adversaires.
Je me mis en quête tout seul
selon l'usage conforme à l'honneur
des bons chevaliers décédés.
Je chevauchais deux jours entiers
avant de trouver une aventure
digne d'être mise par écrit.*
* Olivier de la Marche