Eh ben non, ils ne l'avaient pas vu le pigeon. Bien sûr que non. Nuit sans lunes, brouillard épais qui les entoure.... Nuit d'encre. Surtout que tout se passe à une heure bien tardive... Donc non, personne ne voyait rien, surtout pas un pigeon qui lui, ainsi que son maître, pouvait voir à travers cette épaisse noirceur. Surhomme et... surpigeon faut croire. Bon, le narrateur a fini, l'histoire peut continuer.
Naella écoutait, donc, l'homme vociférer. Un sourire en coin, fixé là depuis l'intervention du Vairon, la p'tite ne disait mot.... du moins pas encore. Elle s'était attardée jusqu'ici à observer ce qu'elle pouvait entrevoir de l'homme. De taille moyenne, très nerveux, brandissant - ou se cachant derrière - une épée étirée devant lui. Et c'est là qu'ils arrivèrent. Juste à temps. Ils arrachèrent à la p'tite un gloussement qui dura quelques secondes. Ces mots...
« Alors allez y, tuez moi, ça vous donnera l'occasion de voir ce que ça fait de tuer vraiment ! Parcontre, si vous me dépouillez ensuite, malheureusement vous ne trouverez pas grand chose ! »
Malheureux... t'as rien compris. On veut pas t'tuer... Quoique... C'est qu'il d'vient agaçant 'la fin... On pourrait ptêt... Nan, on veut pas t'tuer. T'es agaçant, tu nous déranges, mais nan, on veut pas t'tuer. D'toute manière, à t'regarder, t'as pas grand attributs qui nous intéresse. Et la Naella de s'approcher de l'homme, le dévisageant de haut en bas pour mieux considérer ce qu'elle avait devant elle. Pis qui a parlé d'pas aimer la ville? J'sais pas pourquoi tu nous parle d'ça? La p'tite haussa les épaules et reprit.Alors... Comme ça on doit être tombés bien bas? Bah... très honnêt'ment, j'peux pas l'dire. C'est tout c'que j'connais d'la vie. T'sais, c'pas tout l'monde qui a la vie facile. Pis... d'toute manière, j'sais pas trop... Regarde ses complices... ON sait pas trop c'est quoi ce truc-machin-muche de té.. rat.. Térapi. Tu nous l'dis?
Ah! Pis aussi, on s'pense pas "courageux", c'pas une situation d'courage ou pas c'qui s'passe là... J'sais pas trop pourquoi tu penses qu'on pense ça... On veut juste s'faire que'ques sous. Mais s'tu préfères qu'on s'en prenne à des vivants, au lieu qu'à des morts qui sont enterrés avec des biens gaspillés ou d'l'or qui pourrait être utile ailleurs.. Dis-le hein! On leur dira aux personnes qu'on brigand'ra « C'pas nous! C'est l'mec qui marche tout seul la nuit dans l'cimetière pis qui peut apparemment voir clairement à travers des nuits noires, 'vec plein d'brouillards, pis sans lunes, qui nous a dit d'le faire! »
La p'tite marqua une petite pause .. et se rappela des dernières paroles de l'homme, ce qui lui étira les lèvres en un léger sourire en coin.
Pis ... crois-moi qu'j'sais c'que c'est qu'de tuer que'qu'un, pas b'soin d'faire l'expérience sur toi c'soir.Bon... Confidences indirectes... Ses complices avaient-ils relevé? À travers le flot de paroles qu'elle éjectait de sa bouche? Pis t'sais quoi, tu nous parle d'courage, mais r'gardes-toi. TU nous brandis ton épée, 'lors qu'on est même pas armés contre toi. D'jà, pauvre p'tit, ça t'prouve qu'on n'a pas peur d'toi et aussi, c'TOI qui t'donne une impression d'courage.......
Elle n'eut pas le temps de continuer à déblatérer, comme elle n'avait pas fait depuis longtemps, qu'un AUTRE homme qui visiblement se promène seul, tard la nuit, dans un cimetière apparut et lui coupa la parole.
« Y'aurait de la baston dans l'air m'sieurs-dames ? Moi c'est Joseff. »
Bah nan, tu nous vois armés? Hey mais ... t'as une pioche ? Elle fait un pas vers lui, pour que la faible lueur de la lanterne lui révèle bel et bien une pioche sur l'épaule. Bahhh voilàà, l'cimetière doit être reconnu pour ses belles prises. J'vois pas d'autres raisons pour tant d'monde si tard la nuit.
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||Jeune fille de 15 ans, non-conforme et libertaire||