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[RP fermé] Nous, on veut vendre la peau de l'Ours

Clelia
Il était tôt, le matin, quand on lui apprit la nouvelle.

Une terrible nouvelle... Une affreuse nouvelle... Chaque matin était affichée la liste des personnes , soldats ou simples voyageurs, qui étaient tombés sous les coups des armées présentes à ce moment-là en Anjou. Aucune route n'était plus sûre. Et pourtant, des soldats décidèrent un soir de prendre le chemin d'Angers pour aller protéger le château.

Malheureusement, ce fut une nuit comme celle-là que la mère de Clélia rencontra une armée royale. Seule sur le chemin, elles ne lui laissèrent pas le temps de se défendre. Désarmée, elle plia sous les trop nombreux coups qu'ils s'acharnèrent à lui porter.

In extremis, son corps fut transporté dans un lieu à la discrétion de l'Etat-major angevin.

En tant que membre du conseil, Clélia fut une des premières averties et vit le nom des blessés et des morts de la nuit précédente. Son coeur se serra quand elle lut le nom de sa mère. Elle ne voulut pas y croire, croire que la Rousse penthiévrique étaient blessée, voire morte. Morte? non, ce n'était pas possible...

Tout le monde campait dans Angers, c'était devenu l'arrière d'un champ de bataille, chaque armée guettait les mouvements des autres.

On avait couché Fifounijoli sur un lit de fortune, mais un lit quand même, en raison de son rang. Une ancienne duchesse qui tombe pour son duché, ça force l'admiration.

Avant qu'elle n'entre dans la chambre, on la prévint. Sa mère avait beaucoup souffert, souffrait encore mais avait gardé sa pleine lucidité. Néanmoins ses forces s'envolaient chaque minute un peu plus. Elle était mourante, il était trop tard. Il n'y avait plus que des prières à faire à présent.

Mais tout cela, Clélia ne l'entendit pas. Elle entra, doucement, ne voulant pas brusquer sa chère maman. Elle n'était plus que l'ombre d'elle-même depuis quelques temps mais avec des marques des coups qu'on lui avait porté, sa vision horrifia Clélia. Elle sut alors qu'elle n'aurait de cesse que de détester ces royalistes qui lui avaient pris ce qu'il lui de famille. Si, il lui restait sa soeur Ayerin, qui était elle aussi gravement blessée.

S'agenouillant au bas du lit de sa mère, quelques fines larmes vinrent mouiller ses yeux. Elle prit délicatement la main de sa mère dans la sienne, murmurant des "mamans" entrecoupés de sanglots.

A sa surprise, Fifounijoli ouvrit grand les yeux et lui demanda d'aller chercher un héraut. Ne comprenant pas, elle obéit et quitta quelques secondes la pièce. Elle revint avec du papier, un parchemin et surtout, un nom, à qui écrire.

Elle écouta, sans mot dire, juste en écrivant, ce que sa mère lui dictait.



Citation:
Cher Héraut


Je m’adresse à vous afin de faire valider mon testament que vous trouverez ci-joint sous pli.


Bien à vous

Lisa Marie de LaCroix de Bramafan Penthièvre

Dicte Fifounijoli


Le testament était soigneusement enveloppé. On pouvait y lire ceci :

Citation:




Nous,

Lisa-Marie de La Croix de Bramafan-Penthièvre dicte Fifounijoli, Comtesse de L’Isle Jourdain, Vicomtesse du Grand Lucé et, Vicomtesse de Romfort, Baronne de Beaucouzé, Dame de Russé saine de corps et d’esprit, reconnais comme seule et unique héritière de mes terres angevine ma fille Clelia. De par son engagement et son dévouement mais aussi son amour de l’Anjou depuis toute petite, je sais que le jour venu elle saura prendre les décisions qui s’imposent et faire vivre ses terres comme il se doit.

Ma jument Carmenta aussi vieille soit elle, offerte par mon bien aimé père lors de l’un de mes anniversaire, lui sera elle aussi confié, ainsi que toutes mes épées et autres armes.

Mon caillou et quelques futs de bière reviennent à mon amie Tiss enfin à la Vicomtesse de REIKRIGEN.

Le reste de mes biens matériels seront distribués selon le bon vouloir de mon père puisque ceux-ci font partis intégrantes de la fortune familiale Penthièvre.

Je pense que mon époux à la lecture de ce testament se sentira floué mais je sais aussi bien que lui qu’il n’a aucune attache pour l’Anjou autre qu’une rouquine penthivièrique qu’il a épousé pour le meilleur et parfois le pire. Quoiqu’il en soit il sait aussi que les biens matériels sans affectif n’ont jamais été quelques choses d’important pour moi et que l’amour qui nous a unis tout au long de notre vie aura été mon moteur. Et oui rouquine sentimentale au cœur tendre malgré les apparences parfois trompeuses mais peu auront eut l’occasion de le découvrir.





Le 7 Septembre de l’an 1459



Citation:
Témoin :

Nous Tiss de Reikrigen déclarons avoir prit acte du testament de la Comtesse Lisa Marie de la Croix de Bramafan Penthièvre, Saine d’esprit en ce jour du 7 septembre de l’an de grâce 1459.

Fait à Angers le 7 Septembre 1459

Tiss de Reikrigen

Vicomtesse de Blou et d’Andigné

Baronne de Coron



Dame de Boumois



De ces courriers, Clélia n'en savait rien. Elle se contenta de tout envoyer à celle qu'on lui avait indiquée, sa Grasce Ingeburge. Elle accompagna cet envoi d'un pli personnel dans lequel elle expliquait que la situation était grave, que sa mère était mourante et qu'il allait falloir faire vite.

Une fois ces courriers envoyés, elle se remit à genoux aux côtés de sa mère. Elle caressa son visage, murmurant des "maman, je t'aime" entre deux larmes. Elle ne voulait pas que sa mère la voit triste, la voit faible, s'inquiète encore une fois pour elle. Au prix d'un gros effort, elle réprima les sanglots qui débordaient de son coeur et lui posa des questions sur ce qu'il y avait dans la lettre.

Elle sourit, elle qui ne voulait même pas de titre. Alors que sa petite soeur et même que son frère jumeau avaient été anoblis, elle, ne courrait pas après les titres, voulant rester libre par dessus tout. Mais il était temps de grandir et de suivre les pas de sa mère. Il allait falloir se montrer digne de l'héritage qu'elle lui laissait.

Quand Fifounijoli lui apprit ce que contenaient les lettres, elle murmura à son oreille : "Maman, donne-moi ces terres du Maine aussi, qu'elle ne soit pas perdues comme ça.. ces terres, tu les as gagnées, à la sueur de ton front et même si elles sont chez nos ennemis, ne les laisse pas perdre comme ça.. je les perdrais, moi, mais, laisse-moi le plaisir d'embêter les mainois, donne-moi le pouvoir de te venger.. "

Elle resta quelques minutes à parler de tout et de rien avec sa mère : le conseil, Colin... Toutes ces choses qu'elle aurait voulu partager avec elle... C'était un fait, jamais mère et fille n'avaient su trouver le temps de se dire les choses...

Soudain, elle sentit que quelqu'un venait d'entrer dans la pièce, elle se retourna pour saluer la personne, probablement un médicastre.
Ingeburge
La fidèle compagne de la Mort, en fait... retour en arrière.


La duchesse d'Auxerre se trouvait en Touraine, au Lavardin plus précisément, afin d'assister au grand tournoi de joutes organisé à l'occasion de la Saint-Michel et participer aux réjouissances prévues. Il n'y avait pourtant pas de quoi célébrer quoi que ce soit à ses yeux mais la pause que constitueraient les festivités tourangelles ne pourraient qu'être bienfaitrices. Elle avait voulu y croire, elle s'y était laissée prendre et au final... Ambiance morose et déprimante entre un Carmin vengeur, un Géant érigé en juge, une Tempête en deuil, une Flamboyante Maîtresse Equine quelque peu perdue et un écorcheur pourtant fidèle à lui-même. Et puis, il y avait eu lui, terrassant le reste, bouleversant tout sur son ardent passage; elle ne savait toujours qu'en penser, oscillant vers la plus vive allégresse pour retomber aussitôt dans le plus profond désespoir. Une seule issue : fuir vers la Bourgogne.

Ou pas.

La Penthièvrerie avait en fait été son refuge, qui l'eût cru? Si la Prinzessin n'en faisait qu'à sa tête la plus grande partie de son temps, il y avait quelque chose à laquelle elle se soumettait sans coup férir, ses devoirs d'officier héraldiste et ceux-ci lui intimaient de se rendre en Anjou, chez ces consanguins de Penthièvre, aussi nombreux que des vautours sur un cadavre en putréfaction. Oui, bien trop nombreux, avec des enchevêtrements partant en tous sens; examiner leur arbre généalogique était une véritable gageure héraldique, un réel défi généalogique. Seule spécialiste en embrouilles familiales et dispositions testimoniales encore debout, elle n'avait eu d'autre choix que de faire un crochet en terre hostile puisque ses services y étaient réclamés, et en urgence. Généralement, c'était toujours urgent avec les nobles et au final, jamais réellement, mais là, pour le coup, elle avait reçu des preuves du caractère pressant de la chose, la comtesse de L'Isle-Jourdain était mourante, elle ne se déplacerait pas pour rien.

Refuge donc, chez ceux qui régulièrement se piquaient de souiller la Bourgogne, refuge en ce lieu honni, considéré avec mépris. Etrangement, la sérénité était venue quand elle avait dépassé Tours et finalement franchi la frontière, à la faveur d'échange de bourses bien garnies et de tours de passe-passe. Ses premières pensées avaient été pour le Balafré, Tithieu de Penthièvre, son pénitent. Un pèlerinage s'imposait et il s'imposa; sur la route menant vers Angers, elle fit halte à Brissac, pénétra sur le domaine laissé à l'abandon, gagna la chapelle Saint-Karel et là, se rendit sur le tombeau du décadent vicomte. Dessus, elle vida une pleine bouteille de Côtes d'Auxerre, en hommage. Luxure, luxe, lucre et stupre. Elle s'assit ensuite près de la pierre tombale et elle parla à Tithieu, ce Penthos maudit, se confia à lui comme il l'aurait fait auprès d'elle et elle ne lui tut rien, à lui, le débauché dont les ossements intoxiquaient la terre et tuaient la végétation tant ils étaient imprégnés de son vice, elle lui dit ce qu'elle n'avait pu dévoiler à quiconque, elle lui murmura un prénom et un nom, ceux du Magnifique, qui à peine pensés la faisaient déjà frissonner et qui finalement chuchotés achevaient de la perdre. Il se serait moqué d'elle s'il avait pu lui répondre, il aurait posé des questions dérangeantes s'il avait été là et il aurait plaisanté son inattaquable vertu s'il lui avait fait face. Le vent fit bruire les frondaisons et elle leva ses yeux pâles vers la ramée, à l'écoute de ce murmure ironique dont elle n'avait besoin, elle savait déjà qu'il n'aurait fait que la jeter dans ces bras dont elle craignait tout à la fois la force et la douceur. Que ferait-elle de ce conseil posthume?


Non, ce ne fut pas un médicastre ou un de ces quelconques charlatans prétendant pouvoir repousser un trépas inexorable et inévitable, c'était la fidèle compagne de la Mort elle-même qui se fit introduire auprès d'une Lisa Marie en bien piteux état. Fidèle par sa vêture toute faite de noires soieries et de sombres voiles, fidèle par ce visage d'albâtre et ces yeux éteints, fidèle enfin car son travail héraldique ne trouvait sa pleine expression qu'avec les disparitions, les décès. Les compilations et les enregistrements généalogiques ne servaient que lorsque la Mort frappait, ils n'étaient opposables qu'après le passage de la Faucheuse, ils étaient le reste du temps vains travaux et interminables ouvrages, vitrine d'une honorabilité vaniteuse et d'une préséance pas toujours justifiée. La Mort et Phylogène venait, prenait acte, édictait; la Mort et d'un coup de plume et de sa matrice de sceau apposée sur une galette de cire verte, Phylogène achevait l'ouvrage mortifère en prenant ce que nul ne pouvait emporter avec lui : adieu titres et dignités car c'est dépouillé de tout que l'on est jugé.

Les prunelles sans vie de la généalogiste dédaignèrent la jeune fille agenouillée près du lit sur lequel reposait une femme qui pourrait expirer d'un moment à l'autre, elles se fixèrent sur cette pauvre forme et ne cillèrent pas en contemplant l'étendue des dégâts. Etait-elle touchée la Froide? S'émouvrait-elle?

— Votre Grandeur, vous m'avez fait appeler.
Non, rien ne devrait l'atteindre, elle n'était pas là pour faire montre de compassion. Il fallait faire vite et elle s'exécuta, insoucieuse de tout sauf de la mourante :
Phylogène, Maréchal d'Armes royal. Je vais parler, avant toute chose, ne dites rien, vous vous exprimerez quand il sera temps. Ménagez-vous, Votre Grandeur.
Un portefeuille de cuir fut sorti et elle poursuivit :
— J'ai reçu quelques documents, il va vous falloir les authentifier car la manière dont ils m'ont été transmis pourrait être critiquée. Il faudra donc confirmer, intelligiblement, puis signer et sceller à nouveau.

Durant quelques secondes, elle se détourna de l'Angevine et donna des ordres brefs. Pupitre, fauteuil, chandelle. Et pas demain. La Mort n'attend pas.

EDIT = Relecture
_________________
Clelia
Elle écarquilla les yeux l'espace de quelques secondes. L'apparition soudaine de cette femme toute de noir vêtue, pâle à faire peur, froide et impassible interloqua la jeune fille.

Elle n'en avait pas vu beaucoup des apparitions pareilles. Du haut de ses dix-sept années, elle n'avait pas vécu beaucoup de drames, des blessures oui, des disparitions aussi.. Mais elle n'avait jamais vu la Mort d'aussi près.

Paradoxalement, il y avait quelque chose d'apaisant dans l'attitude de cette femme. Calme, sérieuse, appliquée, implacable aussi, elle inspirait une sorte de sérénité alors même que la situation était critique.

Pas un salut pour elle, elle ne s'en offusqua pas, elle avait la tête ailleurs, elle était effrayée par tout ce qu'il allait se passer.. la mort imminente, la solitude qui allait suivre, et puis les responsabilités.

Elle la vit sortir les documents, demandant à sa mère de les reprendre.

Il ne lui fallut que quelques secondes pour envoyer une rapide missive à sa marraine, Tiss de Reikrigen, pour la prévenir de l'imminence du trépas de sa mère mais également des dernières volontés de cette dernière. Elle arriverait très probablement dès qu'elle aurait reçu ce plis.

Et, comme il fallait bien commencer, elle s'assit au bord du lit, n'osant pas lever les yeux vers la froide Phylogène. Elle aida sa mère à se relever, frissonnant à chaque murmure de douleur que cette dernière laissait échapper de temps à autre. Elle serra les dents, pas question de pleurer, l'heure était grave mais elle n'était pas au chagrin et au désespoir. Là, tout de suite, la suite de sa vie allait être bouleversée par ce qui allait être scellé.

Impassible en apparence, elle aida du mieux qu'elle le put sa mère à se tenir suffisamment droite pour pouvoir écrire, signer, parler. Elle lui tint le pupitre, elle lui tint le parchemin, elle lui tint la chandelle. En silence, encore, l'air grave.
Tiss__
Une lettre, quelques mots griffonnés à la hâte, des larmes qui sur les joues de la vicomtesse coulent... elle n'ose y croire. Et pourtant… Cette guerre, va lui enlever l’une de ses meilleures amies.
Pendant un long moment et sans mots dire Tiss reste assise auprès de sa Dame de compagnie, les bons et les mauvais moments qu’elle a passé avec son amie de toujours, les joies, les peines, tout revient à sa mémoire.
Et puis doucement elle se lève, empoigne sa cape et s’en va rejoindre sa filleule en espérant arriver avant qu’il ne soit trop tard.

Malgré la blessure pas encore guérit, malgré la douleur qui se fait ressentir, les talons claquent sur les flancs de sa jument, il le faut, elle doit être au coté de son amie… la missive de Clélia était claire, mais Tiss ne pouvait y croire.

Tout le long du chemin, sa jument au galop elle prie, non elle supplie Aristote de pas lui enlever Fifou. Arrivée sur place, elle ne prend même pas le temps d’attacher le canasson, il y a plus important qu’un cheval…

Les yeux rougis elle entre dans la pièce, son amie est là sur un lit de fortune soutenue tant bien que mal par sa fille… et cette fois Tiss se rend compte de la réalité. Une femme, une inconnue se trouve à ses cotés, les jambes flageolante, Tiss s’avance dans le plus grand des silences.

Quelques semaines plus tôt Fifou lui avait demandé de passer à Angers, sois mon témoin lui avait-elle dit. Témoigne que je suis saine d’esprit au moment ou j’écris ça… Ca… un testament, si elle avait su à ce moment là qu’à peine un mois plus tard, elle le reverrait et que Fifou dans son dernier souffle de vie devrait encore signer des papiers… Soupire qui s’échappe, elle n’ose pas avancer plus, elle ne veut pas avancer. S’approcher est synonyme d’adieu, et des adieux elle n’en veut pas. Pourtant il le faudra bien.

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Fifounijoli
[ Saumur ]

Les combats duraient depuis des jours et des nuits, Fifou, bien qu’absente du devant de la scène politique angevine depuis de longs mois, était toujours présente lorsqu’il s’agissait de défendre son duché.
L’Anjou d’antan n’était plus il est vrai, mais, elle n’avait su se résigner pour autant à ne pas prendre les armes une fois encore, pour ses terres qui l’avaient fait vibrer, rêver, pleurer et qui l’avait vu grandir.

Elle y avait rencontré celui qui deviendrait d’abord son père de cœur et qui l’accompagnerai tout au long de sa vie sachant toujours trouver le mot juste ou la manière de faire alors qu’elle se sentait seule au monde. Pas besoin de long discours entre eux, souvent un simple regard ou une accolade dont pour une fois elle avait le secret et voilà que tout allait mieux. Lui donnant un nom, une identité, une famille, une envie de construire et de gravir les marches les unes après les autres peut importe les obstacles. Ce numéro pas comme les autres, était malgré ce qu’il disait adorable et elle avait su voir en lui ce que personne d’autre ne voyait.

La nostalgie avait envahie le cœur de la rouquine, une certaine vague à l’âme malgré la promesse fait à sa fille Clelia et à son époux de continuer à se battre pour retrouver le gout de vivre après toutes les épreuves de la vie. D’abord la disparition de son fils Aurélien, avec des non dits, et tout ce que sa relation incomprise avait pu apporter de conflit au sein de son couple et de sa famille.
Quoiqu’ il en soit fidèle à elle-même, et peu importe ce qu’on en pense on ne renonce pas à un enfant.
Fifou avait toujours été droite, et juste et ne renonçait pas à certaine chose ou valeurs en quoi elle croyait même si elle se retrouvait seule contre tous et il en était de même pour un enfant peut importe ce qu’il est, ce qu’il fait, ce qu’il pense.

La perte de Mali avait été un puit sans fond, inconsolable malgré tout l’amour des siens, se retirant peu à peu de la vie politique, créant un fossé trop large entre les amants et époux Bramafan. Laissant la place à l’incompréhension plutôt qu’à la reconstruction. La rancœur, avaient élu domicile un temps au domaine, puis le silence, la peine la solitude, malgré l’amour inéluctable et toujours présent entre eux.
Mariage d’amour voilà ce qu’avait toujours voulu Fifou, son père l’avait laissé libre de ses choix, et tout comme en politique la rouquine n’avait rien à regretter.

Baronne de Langourla titre oh combien important pour elle sentimentalement même si plus tard elle avait dû y renoncer pour de multiples raisons, ses terres étaient dans son cœur son deuxième chez elle. Ses amis d’antan le savaient. Peu connaissait Fifou sous cette identité, secrète elle l’avait toujours été.
Son oncle feu Gomoz, ses amis, oncles et autres grands noms d’Anjou comme Tydual, Beuch, Meroot ou même Kaikai avait été ses mentors avant qu’elle ne s’installe contre l’avis de tous dans le Maine seule pour faire ses armes et prouver qu’elle était capable.
Ce qu’elle fut puisque élue comtesse et au conseil mainois durant plusieurs années, comme CAC. Le Maine quoiqu’on en dise n’avait jamais connu de période plus florissante économiquement.
C’est durant ce laps de temps qu’elle croisa le regard de son ours pour les premières fois, et les rencontres se multiplieront durant les années à venir jusqu’à ce qu’elle l’épouse pour le pire mais surtout pour le meilleur.

Beaucoup n’auront jamais compris cette union mais elle fut pour Fifou un choix sans regrets et son amour fut sans faille malgré les nombreuses épreuves de la vie. Bonheur aussi avec la venue de ses jumeaux Anthony et Clelia, ainsi que Mali par la suite.
Nombreux enfants, neveux, nièces, petits enfants, avec les bonheurs et malheurs que cela comportent mais Fifou avait un grand cœur et chacun y avait sa place peu importe ce qu’il croyait.
C’est alors qu’elle décida de quitter ce comté la tête haute et fière de ce qu’elle avait accomplie laissant les uns et les autres discuter comme ils l’entendaient ce qui l’a fit sourire.
Installer en Anjou, elle s’investie dans l’armée, puis au conseil puisque la politique était sa vie. L’économie évidement puis comme duchesse, chambellan, puis de guerre en guerre elle était toujours là, enjouée, motivée, puis l’Anjou changea petit à petit pas que la relève n’était pas prête oh non mais la rancune des uns face à l’amertume des autres, mélangés à la méchanceté de l’un, pimenté de l’arrogance de l’autre, ajouté à la bêtise et l’égoïsme de plusieurs on fini par avoir raison de beaucoup.

Ne renonçant pas complètement pour autant, c’est ainsi que chemin faisant, tout doucement, jour après jours, elle allait au château, croisant de plus en plus de visages inconnus, mais saluant chacun d’eux, se tenant informé du quotidien, croisant les différents bailli afin de proposer ses services, ou foulant les bancs de université afin de parfaire ses connaissances. Sait on jamais cela pourrait être utile un jour aimait elle à penser parfois.

Espérant que cette guerre ne foule pas le sol angevin mais l’utopie fut de courte durée et bientôt le quotidien ne fut plus que combat, pleurs, cris, révoltes, froids, désespoir, survie, faim, et les jours passèrent, puis les semaines et la rouquine malgré les années menait l’épée d’une main de maitre.

Puis la fatigue, le nombre d’assaillants, mais, et voilà qu’elle fut touché oh rien de grave tout juste une petite éraflure, une journée de repos et voilà qu’elle serait de nouveau sur pied. Son bouclier avait su l’a protégée mais ses gueux lui avait enlevée son épée.

Mais à son retour le néant, l’armée du capitaine Coldtracker était dissout il avait été gravement blessé lors du dernier combat les pertes avaient été énormes et Fifou sur avis de la « duchesse » en place et du commandant devait rejoindre la capitale afin de combler les rangs affaiblis de l’armée. Après avoir demander à maintes reprises si elle pouvait prendre la route, et malgré que certains diront on avait prévenu des dangers .... la duchesse écouta sans rechigner les ordres, lasse de toujours discuter depuis bien longtemps maintenant et surtout blasée de tous ses règlements de comptes à deux sous, malgré qu’elle est prévenue qu’elle n’était plus armée puisque affaiblie quelques jours avant lors d’un combat elle pris la route.

Rouquine Penthivièrique ou pas lorsque l’on croise seule sans arme une ruée de royalistes pour rejoindre une capitale angevine en pleine guerre sur ordre de ses supérieurs et malgré toute la foi que l’on a en Aristote et en l’Anjou peut en sorte indemne. Les coups pleuvaient de part et d’autres, un puis deux, puis trois, quatre soldats lui tombèrent dessus jusqu’à ce qu’elle cesse de compter et ne réussisse plus à voir devant elle autre chose que du sang, se protégeant du mieux qu’elle pouvait avec son unique bouclier et un bâton ramasser à même le sol. Ses yeux rougis, ses doigts ensanglantés Fifou se bâtit comme elle le pû ses doigts ensanglantés, ses cheveux ternes et emmêlés faisaient d’elle une pouilleuse mais une pouilleuse noble de cœur jusqu’à la fin. Personne n’aurait reconnue la duchesse mais avec hargne elle combattit jusqu’au dernier souffle s’effondrant sur le sol ensanglanté et inconsciente la tête bourdonnant incapable de prononcer le moindre mot se demandant si c’était ça le fameux chemin qu’on empruntait pour rejoindre Aristote.

Tout se bousculait à présent dans son esprit, ses enfants, son mariage, ses amis, des visages lointains mais qui avaient été important pour elle durant sa vie, Tatoo, Gmat, son amie de toujours Tiss, sa petite Reyne d’Anjou qu’elle n’avait pas revue depuis des siècles, ou à sa tante Kilia, son père si vieux, que tout le monde pensait sans arrêt voir rejoindre Aristote et pourtant il était encore là pour son plus grand bonheur, tant d’autre encore … avant de perdre vraiment connaissance … (pour combien de temps elle ne le sait pas !!! )

C’est affaiblie et inconsciente qu’elle avait été transportée à l’abri des combats qui avaient repris de plus belle dans la capitale et dans les rues de Saumur continuant de faire des ravages.

Sa fille Clelia alors procureur d’Anjou avait été prévenu dès l’aube de ce qu’il lui était arrivée. Bien que très très affaiblie et pas belle à voir, au son de sa voix elle ouvrit les yeux, et un petit sourire essaya de se dessiner sur son visage meurtri.
Essayant en vain de se redresser elle ouvrit ses grands yeux bleus qui avaient perdus toutes leurs lueurs et lui demanda d’aller au plus vite chercher un héraut.


Dépêches toi !!!!

Puis murmurant, le souffle court,
Je t’aime ma Clelia, souviens toi de ceci quoi qu’il arrive et j’aime ton père peut importe ce que tu pense de lui. Fais le venir au plus vite aussi je t’en prie.

Rassemblant ses forces et ses esprits, Fifou n’avait à présent qu’une obsession ses terres, elle aurait du écouter son ours qui lui disait depuis des années de s’occuper de son testament.
Elle avait pris les choses en mains il y a peu de temps mais voilà en Anjou rien ne se faisait facilement et pas un seul héraut présent pour répondre à ses questions, ni pour enregistrer ses parchemins, ni même pour faire la fameuse cérémonie d’anoblissement qu’elle avait voulu pour que Clelia devienne enfin sa vassale.
Et maintenant son temps était compter elle le savait. Elle avait bien griffonnée toutes ses volontés sur un parchemin mais aussi naïve soit elle, il y en aurait toujours pour s’y opposer et elle avait déjà connu pareille situation bien souvent même si elle refusait de croire que cela puisse arriver dans sa propre famille.

Alors qu’elle reprenait peu à peu conscience, effleurant son médaillon symbole de sa vie de couple et de famille, Clelia entra à nouveau dans la pièce, avec un visage inconnu se présentant comme maréchal d’arme. Faible mais ayant toute sa tête, elle savait parfaitement ce pourquoi les deux femmes étaient là.
S’appuyant sur le pupitre, prenant la plume dans sa main du mieux qu’elle le pu, puisant une force on ne sait où évitant le regard de sa fille encore trop jeune pour endurer pareille souffrance, elle murmura tout en écrivant quelques lignes.


Je vous prends pour témoin Dame Phylogène

et commença à écrire soutenue par Clelia, d’une main tremblante et faible sachant l’importance de cet acte. Certes l’écriture n’était plus aussi jolie que par le passé mais le contenu comptait plus que la forme en ce jour.

Le parchemin était clair et lisible.


Fifou cessa d’écrire mais continua d’une voix lente et murmura Charles n’est pas attaché à ses terres plus que moi et de toute façon il sait aussi bien que moi que je devrais y renoncer bientôt étant donné mon attachement pour l’Anjou et la situation politique actuelle angevine vis-à-vis du Domaine Royal et de la Reyne. Quoiqu’il en soit les liens du cœurs, les souvenirs et notre histoire commune sont bien plus important et resteront dans nos mémoires de façon indestructible bien plus que des terres j’en suis convaincue. Ses petits commentaires auraient pu faire sourires en d’autres circonstances et on reconnaissait bien la rouquine, déterminée et sachant ce qu’elle veut même au seuil de la mort.


Donne-moi mon sceau s’il te plait Clelia, que je puisse une dernière fois valider tout ceci. Avant que j’oublie, si tu as besoin, tu trouveras dans le tiroir de mon petit secrétaire de ma chambre à Angers tous les papiers relatifs à mes terres, ainsi que les divers certificats
mariage et acte de baptême que tu pourrais avoir besoin par la suite.

Levant à peine la main elle prit la cire et le petit sceau vert qu’elle laissa se poser sur le parchemin. Un léger sourire de satisfaction que l’on ne pu sans doute apercevoir se dessina sur son visage meurtri mais peut importe elle se sentait le cœur léger à présent et son devoir enfin accompli. Elle demanda qu’on l’aide à s’allonger de nouveau, regardant vers la porte espérant voir la silhouette de son ours apparaitre avant de pouvoir s’éteindre paisiblement … la douleur n’était plus, son corps souiller par les coups d’épées reçu devenait un lointain souvenir, s’allongeant, ses paupières se fermèrent et c’est ainsi que le destin d’une duchesse angevine s’acheva !!!!!
Ingeburge
Il est des mouvements que l'on ne peut retenir, il est des impulsions que l'on ne peut contrôler, il est des élans que l'on ne peut maîtriser et bien qu'elle fût, depuis de longs et interminables mois, en guerre contre Rome, allant jusqu'à ne plus paraître aux moindres séances du Sacré Collège des Cardinaux, de l'Assemblée Episcopale de France ou du Concile Episcopal du Saint-Empire, allant jusqu'à se débarrasser une à une de ses charges, allant jusqu'à envisager de commettre des actes qui l'excluraient de la communauté des fidèles aristotéliciens, allant jusqu'à menacer Aaron de Nagan d'apostasier, elle ne pouvait faire comme si elle n'avait jamais été une servante du Très-Haut, et une zélée, allant jusqu'à sacrifier sa vie de femme. Cette renonciation-là, il faut bien l'avouer, ne lui avait guère coûté, l'avait-elle jamais vraiment été, femme, malgré cette enveloppe de chair qui la plaçait dans la catégorie femelle? Et elle ne lui coûtait toujours pas, sa volonté de s'affranchir de Rome étant ailleurs et bien plus ancienne que les événements vernaux qui étaient venus bousculer ses certitudes de femme. La foi était intacte, grandie même, maintenant qu'elle commençait à se débarrasser des oripeaux romains. Archevêque de Lyon, elle ne l'était plus, elle avait rendu sa charge épiscopale, rageant de n'être toujours pas remplacée; cardinal, elle ne le serait plus quand elle serait débarrassée de son sacerdoce; ne resteraient plus que son statut de prêtresse, ses vœux qui lui étaient devenus insupportables du fait de la déception nourrie à l'égard de ses frères. Mais, même si elle n'avait pas été appelée pour cela, elle était toujours celle qui avait avait été ordonnée à Cologne, elle était toujours le peu docile Cardinal-Archevêque de Lyon et elle serait marquée à jamais. Alors, lentement, elle se déganta et posa sa main droite nue sur le haut de la tête de la comtesse qui expirait.

— Ô Seigneur, Toi qui es notre commencement, notre vie et notre fin, accueille Ton enfant qui souhaite se présenter à Toi.
Montre-lui la voie, Seigneur et guide-là jusqu'à Toi.
Dieu, Toi dont la miséricorde est grande, accueille Lisa Marie dans Ton royaume d’éternité.
Saint Archanges, Christos, Aristote, bénissez Lisa Marie et sa famille, accueillez la première et soutenez la seconde.
Amen.


Elle se tut, quelques secondes, partant à la recherche de la fiole d'eau bénite qui ne la quittait jamais. Le flacon fut trouvé, débouché et elle en aspergea l'Angevine de quelques gouttes.
—Reçois cette eau, souvenir de ton baptême, cette eau par laquelle tu as été purifiée et par alquelle le Très-Haut a fait de toi Son enfant. Va, avance vers Sa paix. Amen.

S'agenouillant enfin, elle invoqua Raphaëlle, pour que l'Archange de la conviction soutienne ceux qui venaient de perdre une personne leur étant chère. Ingeburge n'était pas affectée par ce décès causée par une guerre qu'elle estimait nécessaire, plus que jamais, mais elle serait la voix des présents, incapables de parler car submergés par la douleur. Elle parlerait pour eux :
— Ô Dieu !
Toi en Qui je crois,
Toi qui guide mes pas,
Donne-moi la force de professer la grandeur de Ton Nom
Ainsi que l'amour et l'adoration que j'Y porte.
Envoie-moi Ton Archange, Raphaëlle, pour qu'elle chemine à mes côtés,
Que je ne sois plus seule face à l'ennemi de ma foi et de ma conviction.
Que mes actes obéissent à mon cœur et que même ma main gauche suive les commandements de ma droite.
Que mon cœur Te craigne
Et que j'annonce Ton Saint Nom.
Dieu, daigne lever Ta main, que Raphaëlle descende et me vienne en aide.
Ainsi soit-il.


Les questions matérielles pourraient bien attendre quelques minutes. Elles seraient réglées, et diligemment, la généalogiste avait pu constater que tout était en ordre avant que la Penthièvre ne rendît son dernier soupir. Ce ne serait qu'une formalité... contrairement au reste.
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Clelia
Pas un mot, elle n'avait prononcé le moindre mot pendant que se déroulait sous ses yeux cette étrange cérémonie, ces échanges de papiers scellés. Un rien dubitative, elle ne pouvait quitter sa mère des yeux. Sur son visage, une grimace se dessinait, en écho à celles que sa mère faisait dès qu'elle devait faire un effort. La mère et la fille avaient toujours eu une relation particulière, pas vraiment fusionnelle mais quand l'une souffrait, l'autre aussi, immanquablement.

On frappa à la porte, discrètement. On entra et on lui remit une missive, l'invitant à aller au conseil. Le château était menacé et elle avait la lourde tâche de devoir le vider, s'occuper des transferts des marchandises, trouver des solutions introuvables, se pencher sur les comptes.

Non, ce n'était pas le moment. Elle oublia quelques minutes cette missive.

Le temps s'arrêta et tout ce qui n'était pas cette pièce disparut dans son esprit. Cette vision de sa mère, à moitié mourante, ne luttant même plus pour rester en vie, devait rester à jamais gravée dans sa mémoire. Avec elle s'évanouissait le dernier cocon affectif qu'elle avait. Avec son père, les choses étaient arrivées à un tel point de non retour qu'il était inenvisageable d'imaginer qu'ils puissent se reparler un jour. Il restait les Penthièvre, et c'était déjà beaucoup. On l'estimait à présent, elle avait réussi à faire sa place au sein de cette famille, mais cela serait-il suffisant à ses yeux?

Pour l'heure, elle observait les gestes de la généalogiste qui se changeait sous ses yeux en femme d'église. Avec une assurance, un calme et une maîtrise qui indiquaient qu'elle avait du faire cela souvent, elle rendait les derniers hommages à Fifounijoli.

Etrangement, alors qu'elle n'avait jamais été penchée sur tout ce qui était religieux, elle éprouva une sensation si particulière, c'était indiciblement beau. En ce moment si dur, cela apportait une sorte d'apaisement. Spectatrice, elle se taisait toujours, laissant la jeune femme parler à voix haute. Et puis, imperceptiblement, elle ferma les yeux, comme pour intérioriser davantage les paroles qu'elle entendait. Elle les répétait, en elle-même, pour elle-même, pour ne pas perdre une seule seconde des derniers mots que l'on allait adresser à sa mère.

Quand elle rouvrit les yeux, des larmes en jaillirent. Au sentiment de quiétude qu'elle avait ressenti quelques minutes plus tôt avait succédé un profond chagrin qui allait mettre beaucoup de temps à se tarir.


Ainsi soit-il.

Comme une évidence, elle avait repris les paroles de la généalogiste, fermant les yeux une dernière fois. Chaque mot avait été pesé.

Du revers de la main, elle essuya les quelques larmes qui continuaient de couler. Une profonde inspiration et il fallait bien faire ce que sa mère lui avait demandé.

Elle prit un parchemin, à envoyer à son père


Citation:
A Charles de la Croix de Bramafan,
De la part de Clélia de Penthièvre,

Messire,

votre femme Fifounijoli est actuellement mourante et a été transportée en urgence dans un quartier de l'état-major angevin. Elle est tombée sous les coups des royalistes. Tiss est auprès d'elle et elle vient de recevoir les derniers sacrements. Elle demande à vous voir. Chaque seconde compte.

Qu'Aristote vous garde.


Et alors qu'elle terminait d'écrire cette missive, on vint la chercher. Cette fois-ci, la missive était autrement plus insistante, il n'y avait pas beaucoup de temps avant l'arrivée des royalistes, il y avait beaucoup de travail et elle venait d'être nommée Commissaire au commerce. Les ordres étaient clairs.

Elle regarda sa mère. L'idée passa en elle de laisser tomber ce duché qui avait fini par tuer sa mère mais aussitôt, elle se ravisa. Il n'était pas question de démissionner, sa mère ne l'aurait jamais fait, sa mère ne l'aurait jamais permis. Fifounijoli s'était battue jusqu'à la mort pour ce duché, ce n'était pas pour que sa fille l'abandonne à ce moment crucial. Un gros soupir franchit ses lèvres.

Elle alla saluer la jeune femme qui était aux côtés de sa mère.


Je vous remercie.. Dites-moi juste.. si vous avez besoin.. d'autre chose.. On me demande au duché.. je suis.. conseillère.. je reviendrai.. je n'en ai pas pour longtemps...

Son visage baigné de larmes ne montrait que trop bien la réticence qu'elle avait à partir à un moment comme celui-là et les remords qui la taraudaient déjà.

On vint annoncer le Comte de l'Isle Jourdain.

Clélia vint auprès de sa mère, murmura un "je t'aime maman, je ferai tout pour que tu sois fière de moi.. dans mon verre comme dans mon coeur, l'Anjou apporte le bonheur.. l'Anjou au coeur...". Elle déposa un doux baiser sur son front, se signa et se dirigea vers la porte.

Se retournant, elle adressa un salut de la tête à la généalogiste, envoya un dernier regard plein de tristesse et de pitié vers sa mère allongée à présent et sortit de la pièce.

Elle partit en trombes en direction de la salle du Conseil, essuyant du revers de la main les larmes qui coulaient, le long de ses joues, de nouveau.
Strakastre
Il n'était certainement pas de bon aloi de se mettre en travers du chemin du patriarche de la Maison de la Croix de Bramafan en cet instant, et ce, même lorsqu'il s'agissait de pénétrer dans l'état-major angevin. Les gardes avaient vu fondre sur eux un équipage au galop qui n'avait même pas ralenti lorsqu'ils avaient tenter de s'interposer. Il semblait que les « intrus » connaissaient les lieux, tout au moins l'un d'entre eux, car ils mirent pied à terre rapidement devant un bâtiment bien ciblé, et le premier y pénétra sans même ralentir.

Et cette entrée mouvementée n'était que le prélude à une revue en règle des couloirs au rythme effréné et ponctué du fracas des portes ouvertes à la volée, à la recherche de cette pièce où il la retrouverait... et pourtant aucun cri, aucun appel désespéré à la cantonade, juste un homme progressant méthodiquement, l'avenant parfaitement hostile contre quiconque tenterait d'y faire barrage. Tout juste savait-il son arrière-garde aussi proche que possible. Mais même s'il avait fallu avancer seul, rien en ce bas monde n'aurait pu le ralentir. En cet instant précis, le temps n'était pas encore aux interrogations ou aux inquiétudes... mais juste au besoin impératif de savoir...

Il avait à peine lu les quelques mots que sa fille lui avait fait parvenir... mais en avait parfaitement compris l'urgence dramatique. Elle avait sans doute renié depuis des lustres son géniteur, de son propre chef, et pour des raisons tellement personnelles qu'elles en étaient encore obscures à ses yeux. Mais intérieurement, Charles lui était reconnaissant de sa démarche, fusse-t-elle commandée, ou pas. Petite étincelle qui lui avait rappelé à quel point, lui, il l'aimait toujours, aussi indifférente et froide qu'elle pouvait l'être envers lui... Il est des sentiments qui ne se commandent pas, ni ne commanderont jamais, même à la faveur de girouettes affectives. C'était ainsi chez l'Ours : il aimait sans aucune forme de considération, de dénigrement ni d'exclusion. Une fois que son coeur était ouvert, il ne se refermait jamais.

Ce ne fut qu'après quelques minutes, qui semblèrent bien davantage, que la énième porte s'ouvrit devant quelques personnes regroupées. Instant de flottement où le regard de Charles se posa presque immédiatement sur celle qu'il était venu chercher en ces lieux. Longue et forte expiration, comme si soudain, la pierre alentours se mettait à s'effondrer d'un coup...

Pas un mot... Juste un regard qui glissa de la colère explosive, de la rage contre ses pires démons, vers une lente et imperceptible désespérance... La fatalité venait de prendre l'un des seuls visages que Charles n'aurait jamais voulu croiser ainsi. Le choc fut si instantané qu'il se passa de longues secondes avant qu'il ne sorte de sa tétanie et n'esquisse le premier pas vers elle...

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Ingeburge
Combien de temps demeura-t-elle ainsi, agenouillée sur le sol froid? Le temps n'avait plus, pour le moment, d'importance et elle eût pu rester dans cette posture des heures durant. Elle était juste là, à genoux, reliée à la Terre nourricière alors que toutes ses pensées et ses prières montaient vers le Ciel. Ses lèvres incarnadines psalmodiaient, sans s'interrompre, dans un chuchotement ténu et les cantiques, les supplications, muets désormais, n'en avaient pas moins de vigueur que les invocations successives qu'elle avait lancées quand elle avait pu percevoir que la comtesse s'éteignait. Son regard pâle, lui, était accroché à un quelconque point au-devant d'elle, au-dessus de la couche de la morte, et il revêtait une fixité étrange, annonciatrice de l'extase. Elle était, à sa manière, en train de s'élever aussi et plus rien, autour d'elle, n'avait d'importance. Les mouvements autour d'elle, les phrases énoncées, elle ne percevait pas grand chose, n'écoutait rien. Ce que lui dit Clelia, elle le l'entendit pas, pas plus qu'elle remarqua qu'elle s'approchait du lit et ce fut la conscience de son espace pénétré, elle qui ne supportait pas que l'on fût dans son environnement proche, qui la fit vaciller. Sa bouche resta entrouverte, durant quelques secondes, le temps que la jeune fille fasse ses adieux à sa mère et quand, l'adolescente finit par se retirer, Ingeburge reprit sa litanie murmurée, juste là où elle s'était interrompue.

L'extase ne vint pas, elle n'eut pas le temps de fondre sur la femme en noir agenouillée et s'emparer d'elle tout à fait. Il y avait eu du bruit, un de ces bruits lointains mais qui enfle, inexorable, à mesure qu'il s'approche. La porte fut ouverte avec fracas et la duchesse d'Auxerre sursauta, perturbée dans sa récitation et son recueillement et surprise aussi de ces manières. La lueur mystique habitant son regard s'éteignit et le regard redevint mort, indifférent, ordinaire. Sans se retourner et chercher à comprendre, elle se releva, lentement, époussetant machinalement la poussière qui aurait pu souiller le taffetas de sa houppelande sombre et avec le même soin maniaque, elle réajusta la huve de mollequin voilant sa tête. L'adoratrice du Très-Haut avait cédé la place à la Froide et cette dernière, enfin, fit face au bruyant visiteur.

Bruyant? Après son arrivée fracassante, l'homme faisait montre d'un calme confondant. Il ne disait rien, se mouvait à peine, irrésistiblement attiré par la pauvre forme allongée sur son lit de mort. Son observation générale se précisa et elle se prit à examiner, sans discourtoisie, sans impudicité, le visage de l'inconnu. Un léger frisson la prit quand elle put y lire la violence des émotions s'étant emparées de celui-ci et elle sortit de sa réserve glacée pour céder la place. Dans un bruissement soyeux et sinistre, elle effectua quelques pas de côté, son regard éteint toujours rivé sur le comte.

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Strakastre
Il ne voyait plus qu'elle... vision terrifiante d'un être cher qui s'éteint. Le coeur de Charles se tordit d'une douleur aussi intense qu'un coup de masse fracassant le crâne. A cet instant, le monde lui était devenu irréel, presque absent... Lorsque son corps consentit enfin à le faire mouvoir, quelques pas plus avant, sa main vint alors instinctivement prendre celle, inerte, de Lisa-Marie. Il frissonna un peu plus de désespoir lorsqu'il la sentit froide, comme la mort, la serrant alors de toute l'envergure de la sienne comme pour lui insuffler sa propre chaleur.

Les yeux de Charles se mirent à cligner de plus en plus rapidement, un voile humide l'envahissant, signe que la carapace de l'Ours, pourtant hermétique à bien des épreuves, venait de se rompre de toutes parts. Sa respiration prit une cadence qui tentait d'endiguer ce chagrin montant, ne pouvant empêcher les larmes couler désormais sur ses joues. Il n'avait prononcé encore aucun mot, ni aucun son... Seule sa respiration paraissait encore un maigre indice de son désespoir et de sa souffrance. Beaucoup d'images se mirent à défiler... les premières... les plus douloureuses... les disputes... la rupture... l'absence... le manque... la mort d'une fille aimée... la résignation... et son lot d'éternels pourquoi... alors que suivirent ensuite d'autres images... les incessantes visites au bureau de la Connétablie, la séduction... cette nuit au clair de lune... la séparation... puis les retrouvailles... les épousailles... les longues nuits d'amour... les cris d'enfants...

Elles s'estompèrent alors pour ne faire place qu'à un corps éteint... et il s'effondra à genoux, terrassé par la souffrance de sa perte... Ne retenant désormais plus rien, sa main passa le long de la taille de Lisa-Marie, et il serra le tissu de sa robe aussi fort que son autre main serrait la sienne.

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