Beren
« QUAND TE REVERRAIIIIII-JEEEEE, PAYYYYS MERRVEILLEUUUUUX ! »*, voilà ce quune Lady complètement ivre morte beuglait à tue-tête dans les rues pavées, une bouteille à moitié vide à ma main. A moitié vide ? A moitié pleine, oui, je veux ! Non mais, une bouteille à moitié pleine ou remplie, ça laissait toujours cinquante pour cent de bonheur en perspective. Si, si. Bon, sauf pour ce pauvre Beren, malheureux jeune bourgeois originaire de Franche Comté, qui laccompagnait. Jadis trop grand, trop maigre, aux doigts trop osseux, sa seizième année et le rythme soutenu des voyages avaient un peu aguerri sa silhouette, mais il restait précieux, et davantage préoccupé par la propreté de ses lunettes et la bonne réussite de ses expériences scientifiques que de quoi que ce soit dautre. A part peut-être, là, tout de suite, de se faire repérer au milieu de ce coupe-gorge quétait la Cour des Miracles, alors que la seule personne qui savait manier une arme dans le couple quils formaient alors, était totalement hors service : elle naurait pas même pu soutenir le pommeau de son épée.
Une main passée sous lavant-bras de Lady pour la maintenir sur ses deux pieds, Beren donnait limpression dun maître promené par le molosse quil est lui-même censé diriger. Il ballotait au gré des envies pédestres de la Miel, qui, si elle croyait danser, titubait. Agrippé à elle, il tentait tant bien que mal de la faire enfin taire :
- Dame Ladyphoenix, je vous en prie, chuuut. Reprenez-vous, de grâce, nous, je
Il frissonna, les yeux fous dobserver tour à tour de gauche et de droite, malade dimaginer une ombre se déformer en une silhouette menaçante sur un mur faiblement éclairé dun candélabre que telle ou telle gagneuse aurait placé sur le rebord de sa fenêtre pour signifier quelle était disponible, et reprit précipitamment, la main sur la bouche de la jeune femme, comme elle entamait un fanfaronnant « MANON LA GUEUSE A BIENTOT SEIZE ANS, POMPE-MO .HHHHHMMMMHHHMMMM »
- Voyons, Dame, vous ne pouvez pas tonitruer de la sorte ! Si on nous entendait, si on nous repérait ! Nous sommes en danger !
Elle se dégagea dans un grognement mi-ours, mi-beurré, et maugréa « saleté de main ! », avant de se tourner vers lui, et de poser la main sur sa joue. « Poser », peut-être pas. Disons quelle plaça sa main aussi délicatement que quelquun qui a grandement participé à vider les fûts dune taverne avec quelques autres le pouvait. La tête de Beren bascula violemment sur le côté, comme elle entamait un mielleux :
- Roooooh, bah alooors, on sinquièèète ! Ten fais pas, pis appelle-moi Miedy, B..B toi, là. Jte signale que je me sens farpai..sarpai.. Au mieux, quoi. Pis jai une épée, rgââââârde !
Le jeune garçon bondit presque pour retenir le bras de la jeune femme pour interrompre le prime geste quelle avait esquissé jusquau fourreau placé à sa ceinture, en bredouillant :
- NON ! Non, non, non, pitié. Euh chantez, finalement, hein, on va chanter, ce sera mieux. Tâchons simplement de nous atteler à découvrir ce merveilleux concept quest la discrétion. Vous savez, on pourrait presque inventer un proverbe chacun son tour, pour jouer. Je commence ! « un ton plus bas, et on survivra ».
Il rit nerveusement, un sourire figé sur ses lèvres, le regard poursuivant son ping pong gauche droite, tandis que Lady le regardait, médusée :
- Jai pas compris. Tu es confus, toi, le petit, hein. Jpréfère quon chante. Tu connais une chanson bien, toi ?
Beren résista à lenvie de se frapper le front de lune de ses paumes, dans un souci avant tout pratique, ses deux mains occupées à maintenir Lady debout pour lune, à la maintenir désarmée de lautre. Cest lorsque sa compagne entreprit dexploser dun rire gras pour une raison particulièrement inconnue du jeune homme que celui-ci eut une idée ingénieuse, selon lui. Chanter doucement aurait le double avantage de la faire cesser de lui répéter « tu vas chanter, hein, hein, dis, dis ? », et de lencourager à être autrement plus discrète. Il hocha la tête, et commença, en souriant :
- Voici le mois de mai où les feuilles volent au vent voici le mois de mai **
Lady sétait arrêtée, et le fixait, comme son corps se balançait davant en arrière, lindex fixé sur lui. Elle lui rentra le doigt dans la clavicule à chaque syllabe, le faisant peu à peu grimacer de douleur :
- Grand Dieu, tes nul en chansons, toi ! Tu veux pas non plus quon entame le credo tous en chur ?! Tu connais pas une chanson plus moins Une vraie chanson, quoi ?
Un clin dil maladroit et très appuyé, et Lady de venir glisser le bout de son index sur sa joue, avec tout autant de douceur que précédemment. La légère griffure le fait grimacer, et il lâche entre ses dents, chevrotant :
- Un jour la ptite Huguette Mon Dieu, si Natasha nous voyait, elle serait dépitée.
Cette phrase a le mérite déveiller le regard de la Miel, qui resserre ses mains sur ses avant-bras.
- OOOh, ma Platine, elle est où, ma Platine ? OuuuUUUUuuuuh- ouuuuhhhouuh, PlataaashAAAaaaAAA !
Oui, quelquun qui a bu nest pas forcément très lucide ; Lady est perchée, et dans un état pareil, elle mélange les noms ; Platine et Natasha formaient donc « Platasha » à cet instant précis. Mais déjà, sans avant que Beren le réalise, la jeune femme se trouvait près dune taverne, ou dune maison close - peut-être plutôt une maison close quautre chose dailleurs, au vu du public qui sy trouvait -, quelle titubait toujours, sa bouteille bien en main, à demander à tous sils navaient pas vu Natinsha, Platiash enfin, la plus sculpturale des blondes du royaume. Beren accourut à son côté et tira sur son bras, prétextant tandis quil lentraînait plus loin, dans un petit rire nerveux :
- Cest ma sur, excusez-la, elle est folle.
Insurrection de la Miel à ces mots, et il fallu toute la force du jeune Fiole pour la retenir, alors quelle se muait en femme insurgée chacun comprendra le drame dune telle position.
- Chui pas folle du tout ! Cest juste que elle soupira, et sassit sur une caisse laissée à traîner là toi, tu peux pas comprendre. Natasha, elle je ndevrais pas te parler delle.
Non, non, non, je ne ten parlerai pas ! Je je te dirai ma vie dans son nu le plus blême dans les matins pâlis où plus rien ne protège. Je te dirai mes cris jusquaux plus imbéciles, je te livrerai tout jusquau bout de mes cils. Tous mes gestes promis ! Tout ce que je pense, de mes coups de colère à mes coups de romance, en toute complaisance, en toute impudeur : compte rendu fidèle de toutes mes heures ! Javouerai tout ! Les trucs interdits, les méthodes Je te dirai les clefs, te livrerai les codes ! Les secrets inconnus à lire entre les lignes, les talismans perdus, les chiffres Et les signes ! Mes arrières pensées avec inconscience, mes goûts et mes dégoûts et Et tous les coups de chance. Oh, même sans intérêt, même un peu faciles ! Mes fantasmes enterrés, mes idées les plus viles
Mais non, Beren, je ndevrais pas te parler delle ! Elle est à côté de moi, même si je mréveille, elle a sûrement un truc pour connaître mon sommeil Je suis là où elle veut que me guident mes Et là où elle veut aller ben on va par là !***
Mortifié, Beren la regardait divaguer, sexalter en parlant de Natasha. Cest vrai quelle était divine, et malgré leur relation tendue, ces deux-là semblaient bien saimer au fond. Le seul fait que le jeune Fiole était encore en vie en était la preuve irréfutable ; Natasha aurait pu lui briser les os dune seule main. Mais si le jeune homme adorait la Platine, il nen était pas moins en danger, et Lady avec, en ce moment-même. La blonde sémuroise, bien loin de ces préoccupations, beuglait déjà « feemmmme, feeeeemme, uneuuuh feeeeemme avec toiiii »****, racontant en long, en large et en travers comment Natasha seule savait exacerber ses sens.
Quand Beren parvint enfin à la faire taire, comme la jeune femme sétait adossée au mur derrière elle, à moitié assoupie, il aurait tout donné pour quelle séveille instantanément, sobre, le bras sûr. Une ombre était passée, il en était certain. Lui, lobservateur, le scientifique, le pragmatique, navait pas rêvé. Ce nétait pas un jeu de lumière, quelquun était passé. Silencieuse, féline, lombre sétait mue, lespace dun très bref instant.
Invisible maintenant, sa présence semblait pourtant palpable. Frissonnant sous la peur, Beren jeta un regard à son amie ivre : elle était hors course. Il décida de sasseoir à côté delle, passa son bras trop long et trop frêle autour de ses épaules et lui appuya doucement la joue contre lui. Dans le même temps, il avait sorti la dague que sa tante Sara lui avait offerte à son seizième anniversaire. Elle navait jusque là guère servi quà ouvrir du courrier Mais sil le fallait, par loyauté, elle protègerait Lady, au moins en intention, ce soir. Euh est-ce quon peut atteindre une ombre ?
- Post écrit à quatre mains.
- * Tonitrué à la Michel Blanc dans les Bronzés, of course.
- ** Oui, oui, vous ne rêvez pas... Nana Mouskouri.
- *** Remaniement très grossier de "Je ne vous parlerai pas d'elle", JJG.
- **** Challenge "placement d'une chanson de Nicole Croisille" : ok.
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Une main passée sous lavant-bras de Lady pour la maintenir sur ses deux pieds, Beren donnait limpression dun maître promené par le molosse quil est lui-même censé diriger. Il ballotait au gré des envies pédestres de la Miel, qui, si elle croyait danser, titubait. Agrippé à elle, il tentait tant bien que mal de la faire enfin taire :
- Dame Ladyphoenix, je vous en prie, chuuut. Reprenez-vous, de grâce, nous, je
Il frissonna, les yeux fous dobserver tour à tour de gauche et de droite, malade dimaginer une ombre se déformer en une silhouette menaçante sur un mur faiblement éclairé dun candélabre que telle ou telle gagneuse aurait placé sur le rebord de sa fenêtre pour signifier quelle était disponible, et reprit précipitamment, la main sur la bouche de la jeune femme, comme elle entamait un fanfaronnant « MANON LA GUEUSE A BIENTOT SEIZE ANS, POMPE-MO .HHHHHMMMMHHHMMMM »
- Voyons, Dame, vous ne pouvez pas tonitruer de la sorte ! Si on nous entendait, si on nous repérait ! Nous sommes en danger !
Elle se dégagea dans un grognement mi-ours, mi-beurré, et maugréa « saleté de main ! », avant de se tourner vers lui, et de poser la main sur sa joue. « Poser », peut-être pas. Disons quelle plaça sa main aussi délicatement que quelquun qui a grandement participé à vider les fûts dune taverne avec quelques autres le pouvait. La tête de Beren bascula violemment sur le côté, comme elle entamait un mielleux :
- Roooooh, bah alooors, on sinquièèète ! Ten fais pas, pis appelle-moi Miedy, B..B toi, là. Jte signale que je me sens farpai..sarpai.. Au mieux, quoi. Pis jai une épée, rgââââârde !
Le jeune garçon bondit presque pour retenir le bras de la jeune femme pour interrompre le prime geste quelle avait esquissé jusquau fourreau placé à sa ceinture, en bredouillant :
- NON ! Non, non, non, pitié. Euh chantez, finalement, hein, on va chanter, ce sera mieux. Tâchons simplement de nous atteler à découvrir ce merveilleux concept quest la discrétion. Vous savez, on pourrait presque inventer un proverbe chacun son tour, pour jouer. Je commence ! « un ton plus bas, et on survivra ».
Il rit nerveusement, un sourire figé sur ses lèvres, le regard poursuivant son ping pong gauche droite, tandis que Lady le regardait, médusée :
- Jai pas compris. Tu es confus, toi, le petit, hein. Jpréfère quon chante. Tu connais une chanson bien, toi ?
Beren résista à lenvie de se frapper le front de lune de ses paumes, dans un souci avant tout pratique, ses deux mains occupées à maintenir Lady debout pour lune, à la maintenir désarmée de lautre. Cest lorsque sa compagne entreprit dexploser dun rire gras pour une raison particulièrement inconnue du jeune homme que celui-ci eut une idée ingénieuse, selon lui. Chanter doucement aurait le double avantage de la faire cesser de lui répéter « tu vas chanter, hein, hein, dis, dis ? », et de lencourager à être autrement plus discrète. Il hocha la tête, et commença, en souriant :
- Voici le mois de mai où les feuilles volent au vent voici le mois de mai **
Lady sétait arrêtée, et le fixait, comme son corps se balançait davant en arrière, lindex fixé sur lui. Elle lui rentra le doigt dans la clavicule à chaque syllabe, le faisant peu à peu grimacer de douleur :
- Grand Dieu, tes nul en chansons, toi ! Tu veux pas non plus quon entame le credo tous en chur ?! Tu connais pas une chanson plus moins Une vraie chanson, quoi ?
Un clin dil maladroit et très appuyé, et Lady de venir glisser le bout de son index sur sa joue, avec tout autant de douceur que précédemment. La légère griffure le fait grimacer, et il lâche entre ses dents, chevrotant :
- Un jour la ptite Huguette Mon Dieu, si Natasha nous voyait, elle serait dépitée.
Cette phrase a le mérite déveiller le regard de la Miel, qui resserre ses mains sur ses avant-bras.
- OOOh, ma Platine, elle est où, ma Platine ? OuuuUUUUuuuuh- ouuuuhhhouuh, PlataaashAAAaaaAAA !
Oui, quelquun qui a bu nest pas forcément très lucide ; Lady est perchée, et dans un état pareil, elle mélange les noms ; Platine et Natasha formaient donc « Platasha » à cet instant précis. Mais déjà, sans avant que Beren le réalise, la jeune femme se trouvait près dune taverne, ou dune maison close - peut-être plutôt une maison close quautre chose dailleurs, au vu du public qui sy trouvait -, quelle titubait toujours, sa bouteille bien en main, à demander à tous sils navaient pas vu Natinsha, Platiash enfin, la plus sculpturale des blondes du royaume. Beren accourut à son côté et tira sur son bras, prétextant tandis quil lentraînait plus loin, dans un petit rire nerveux :
- Cest ma sur, excusez-la, elle est folle.
Insurrection de la Miel à ces mots, et il fallu toute la force du jeune Fiole pour la retenir, alors quelle se muait en femme insurgée chacun comprendra le drame dune telle position.
- Chui pas folle du tout ! Cest juste que elle soupira, et sassit sur une caisse laissée à traîner là toi, tu peux pas comprendre. Natasha, elle je ndevrais pas te parler delle.
Non, non, non, je ne ten parlerai pas ! Je je te dirai ma vie dans son nu le plus blême dans les matins pâlis où plus rien ne protège. Je te dirai mes cris jusquaux plus imbéciles, je te livrerai tout jusquau bout de mes cils. Tous mes gestes promis ! Tout ce que je pense, de mes coups de colère à mes coups de romance, en toute complaisance, en toute impudeur : compte rendu fidèle de toutes mes heures ! Javouerai tout ! Les trucs interdits, les méthodes Je te dirai les clefs, te livrerai les codes ! Les secrets inconnus à lire entre les lignes, les talismans perdus, les chiffres Et les signes ! Mes arrières pensées avec inconscience, mes goûts et mes dégoûts et Et tous les coups de chance. Oh, même sans intérêt, même un peu faciles ! Mes fantasmes enterrés, mes idées les plus viles
Mais non, Beren, je ndevrais pas te parler delle ! Elle est à côté de moi, même si je mréveille, elle a sûrement un truc pour connaître mon sommeil Je suis là où elle veut que me guident mes Et là où elle veut aller ben on va par là !***
Mortifié, Beren la regardait divaguer, sexalter en parlant de Natasha. Cest vrai quelle était divine, et malgré leur relation tendue, ces deux-là semblaient bien saimer au fond. Le seul fait que le jeune Fiole était encore en vie en était la preuve irréfutable ; Natasha aurait pu lui briser les os dune seule main. Mais si le jeune homme adorait la Platine, il nen était pas moins en danger, et Lady avec, en ce moment-même. La blonde sémuroise, bien loin de ces préoccupations, beuglait déjà « feemmmme, feeeeemme, uneuuuh feeeeemme avec toiiii »****, racontant en long, en large et en travers comment Natasha seule savait exacerber ses sens.
Quand Beren parvint enfin à la faire taire, comme la jeune femme sétait adossée au mur derrière elle, à moitié assoupie, il aurait tout donné pour quelle séveille instantanément, sobre, le bras sûr. Une ombre était passée, il en était certain. Lui, lobservateur, le scientifique, le pragmatique, navait pas rêvé. Ce nétait pas un jeu de lumière, quelquun était passé. Silencieuse, féline, lombre sétait mue, lespace dun très bref instant.
Invisible maintenant, sa présence semblait pourtant palpable. Frissonnant sous la peur, Beren jeta un regard à son amie ivre : elle était hors course. Il décida de sasseoir à côté delle, passa son bras trop long et trop frêle autour de ses épaules et lui appuya doucement la joue contre lui. Dans le même temps, il avait sorti la dague que sa tante Sara lui avait offerte à son seizième anniversaire. Elle navait jusque là guère servi quà ouvrir du courrier Mais sil le fallait, par loyauté, elle protègerait Lady, au moins en intention, ce soir. Euh est-ce quon peut atteindre une ombre ?
- Post écrit à quatre mains.
- * Tonitrué à la Michel Blanc dans les Bronzés, of course.
- ** Oui, oui, vous ne rêvez pas... Nana Mouskouri.
- *** Remaniement très grossier de "Je ne vous parlerai pas d'elle", JJG.
- **** Challenge "placement d'une chanson de Nicole Croisille" : ok.
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