Guillaume_de_jeneffe
Trop d'ans il a Guillaume.
Trop d'ans plus que remplis déjà. Débordant de guerres, d'aventures, de coups de mains, de sièges, de politique, de séductions, de tout ce qui use un homme jusqu'à la moelle et le rend incapable de sortir hors de l'ornière ainsi tracée.
À apprendre comment survivre dans un monde de fer et de bois, de cours et de lits.
Le chevalier. Celui qui a pris Angers couvert par les archers flamands, le dos couvert par la masse du chevalier de Vergy. Du vieux chevalier. De Raphaël. Qu'il n'appelait quasiment que Kratos. Celui qui a organisé une défense de la Flandre grâce aux courriers qu'il envoyait depuis Fougères-la-Mainoise. Celui qui, pendant des années sans nombre, a combattu l'Infidèle au milieu des petites principautés balkaniques. Celui qui est revenu pour sa famille et pour la guerre.
Ça endurcirait n'importe qui y aurait survécu. Ce qui fut. Plus de larmes devant la mort, sauf celle de son épouse, chérie voire vénérée. Plus de surprise devant les turpitudes de l'homme. Plus de crainte devant les lignes de piquiers félons. Plus de sentiments ou presque plus. La tête lui tourne encore, parfois, mais plus comme avant. Plus comme lorsqu'il confessait son amour à la maîtresse d'un comte brigand ou qu'il se morigénait d'imaginer, éventuellement, séduire l'épouse du vicomte d'Isles.
Et pourtant, la désarmée, l'innocente, la babillante Maud trouvait le moyen de lui arracher un sourire réel tandis qu'elle se débattait entre plastronnade et confession.
Il se tait donc, la laisse parler, croyant deviner que c'est de cela qu'elle avait besoin. Dire tout son saoul à un inconnu, se libérer de poids qui jouaient sur sa conscience comme les pendants d'un couillard. Il écoute. Et apprend, beaucoup. Confirme des hypothèses, aussi. Dans l'obscurité vers laquelle les mènent leurs pas, Guillaume hoche la tête. Il était certainement venu dans ce bouge pour tout autre chose mais au final le bénéfice faisait plus que compenser la déception première.
Mais au fur et à mesure de ses paroles, alors qu'elle navigue toujours accrochée à son bras comme à un rempart, il doit de plus en plus tendre de l'oreille. Car le ton baisse, comme pour entrer dans la confidence. Et pour finalement poser LA question.
En effet, ils s'étaient éloignés de là où broutait toujours comme si de rien n'était, le Frison du Flamand. Inconsciemment, certainement, le chevalier avait laissé faire, trop occupé par ce qu'il pouvait découvrir de cette pucelle pour se dire que ce n'était peut-être pas une bonne idée d'aller par là. Aussi, à sa dernière interrogation, il s'arrête net.
- Belle enfant. Ce n'est pas, ce me semble, là où se trouve ma monture. Mais permettez qu'en gage d'amitié, je vous remercie de ce que vous m'avez appris.
Et, sans plus de manière, il l'attira à lui et l'embrassa. On peut être courtois, on n'en reste pas moins un homme, dedieu!
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Trop d'ans plus que remplis déjà. Débordant de guerres, d'aventures, de coups de mains, de sièges, de politique, de séductions, de tout ce qui use un homme jusqu'à la moelle et le rend incapable de sortir hors de l'ornière ainsi tracée.
À apprendre comment survivre dans un monde de fer et de bois, de cours et de lits.
Le chevalier. Celui qui a pris Angers couvert par les archers flamands, le dos couvert par la masse du chevalier de Vergy. Du vieux chevalier. De Raphaël. Qu'il n'appelait quasiment que Kratos. Celui qui a organisé une défense de la Flandre grâce aux courriers qu'il envoyait depuis Fougères-la-Mainoise. Celui qui, pendant des années sans nombre, a combattu l'Infidèle au milieu des petites principautés balkaniques. Celui qui est revenu pour sa famille et pour la guerre.
Ça endurcirait n'importe qui y aurait survécu. Ce qui fut. Plus de larmes devant la mort, sauf celle de son épouse, chérie voire vénérée. Plus de surprise devant les turpitudes de l'homme. Plus de crainte devant les lignes de piquiers félons. Plus de sentiments ou presque plus. La tête lui tourne encore, parfois, mais plus comme avant. Plus comme lorsqu'il confessait son amour à la maîtresse d'un comte brigand ou qu'il se morigénait d'imaginer, éventuellement, séduire l'épouse du vicomte d'Isles.
Et pourtant, la désarmée, l'innocente, la babillante Maud trouvait le moyen de lui arracher un sourire réel tandis qu'elle se débattait entre plastronnade et confession.
Il se tait donc, la laisse parler, croyant deviner que c'est de cela qu'elle avait besoin. Dire tout son saoul à un inconnu, se libérer de poids qui jouaient sur sa conscience comme les pendants d'un couillard. Il écoute. Et apprend, beaucoup. Confirme des hypothèses, aussi. Dans l'obscurité vers laquelle les mènent leurs pas, Guillaume hoche la tête. Il était certainement venu dans ce bouge pour tout autre chose mais au final le bénéfice faisait plus que compenser la déception première.
Mais au fur et à mesure de ses paroles, alors qu'elle navigue toujours accrochée à son bras comme à un rempart, il doit de plus en plus tendre de l'oreille. Car le ton baisse, comme pour entrer dans la confidence. Et pour finalement poser LA question.
En effet, ils s'étaient éloignés de là où broutait toujours comme si de rien n'était, le Frison du Flamand. Inconsciemment, certainement, le chevalier avait laissé faire, trop occupé par ce qu'il pouvait découvrir de cette pucelle pour se dire que ce n'était peut-être pas une bonne idée d'aller par là. Aussi, à sa dernière interrogation, il s'arrête net.
- Belle enfant. Ce n'est pas, ce me semble, là où se trouve ma monture. Mais permettez qu'en gage d'amitié, je vous remercie de ce que vous m'avez appris.
Et, sans plus de manière, il l'attira à lui et l'embrassa. On peut être courtois, on n'en reste pas moins un homme, dedieu!
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