C'était à souligner dans tout ce fatras englué: Bardas était en forme. Ca avait commencé à lui manquer, la bonne humeur. Il ne savait pas pourquoi elle lui était retombée dessus, mais il n'allait pas s'en plaindre. Être d'une telle humeur malgré la douleur qui l'entourait, c'était soit un miracle, soit de l'inconscience. Bardas croyait aux miracles et se sentait pleinement conscient.
C'est donc avec une grande volonté qu'il parcourut la gargote. Il passa la journée à glaner ici et là des informations sur ce qu'il avait pu manquer. Il n'avait entendu que des bruits, jusque là, des grosses lignes vaguement tracées. Ou plutôt, il n'avait pas eu le courage de tendre l'oreille. Mais ça, il ne fallait pas le dire à voix haute.
Et maintenant qu'il écoutait, il regretta presque un instant. "Ce George-Aristote cherche à faire valoir notre réputation de tête de mule, ou bien quoi ?" soupira-t-il pour lui-même avant que le sire s'en fut allé.
Sitôt après reprirent les échanges, Dieu merci ! Même si c'étaient toujours les mêmes, de part et d'autre.
Une dame presque effrayante avec son seul il valide qu'il avait entendu se présenter sans faire attention clama les mêmes paroles qu'il entendait depuis si longtemps. Il pouvait même en deviner la réponse. Ca parlerait de félonie, de loi royale, de juste correction. La routine habituelle quoi, ouais !
"Excusez-moi, m'dame, ça me fait presque mal de le dire, mais vous pouvez conchier tout ce que vous voudrez, ça ne changera rien. Pas tant que le Ponant n'aura pas passé un coup de balais par ici, sur quoi il est risqué de trop compter malgré toutes les bonnes nouvelles qu'on peut entendre. Et la poussière, ça a tendance à revenir sitôt le balai parti.
Et en attendant des jours meilleurs, c'est presque une question de devoir que d'améliorer la vie de chacun. Le Berry n'est plus l'arrière du front Ponantais. Il est devenu son avant. Alors pourquoi devrait-il se saigner et refuser ce que la situation peut lui apporter pour couper lhémorragie ? Il n'y a pas de déshonneur là-dedans, juste du bon sens.
Ah, j'oublie de me présenter. Pour les discussions, un nom est toujours pratique. Bardas pour moi, Saint-Aignanais et USBiste. Et d'ailleurs, rapport à USB, il y a une chose que je peine à comprendre dans ce que vous dites, m'dame Angelyque. Comment peut-on soutenir un concurrent ? Car nous sommes bien concurrents, vous et nous maintenant. Et même si ça n'implique pas forcement de s'étriper, ça veut quand même dire que l'on ne sera pas main dans la main.
En fait, je vais même être plus clair. Si USB a votre soutien, quel intérêt peut-il y avoir à voter pour vous plutôt que pour nous ? C'est quand même le fin mot de cette histoire.
Parce qu'il y a une raison évidente à préférer voter USB pour un Berrichon: nous sommes nous aussi Berrichons. Ce n'est pas rien du tout. Même si on prévoit d'apaiser les choses avec nos voisins - "vous" donc - voter pour nous, ça reste sur le papier "Le Berry aux Berrichons", si je peux parler ainsi. Tandis que de votre côté, ça ressemble à "Le Berry à la régence".
Qu'on ait le même but, redresser le duché dans la paix, j'en suis très heureux. Mais alors je ne vois vraiment pas quel intérêt il y a à faire une liste concurrente si on est à ce point d'accord. Si ce n'est affirmer que vous, les conquérants, souhaitez rester ici et éventuellement plus longtemps qu'il le faudra."
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