Gnia
["Un bon résistant n'est ni mort ni en prison. Pour résister, il faut être libre."]*
[Ambiance musicale]
La transhumance saint-justienne avait été achevée et rondement menée. Prudence élémentaire couplée à un esprit porté sur le pessimisme avaient poussé la Saint Just à déménager à la cloche de bois de l'Alabrena, avec veaux, vaches, cochons, cave à vin et mesnie.
Et on n'y gagnait guère au change.
Mis à part un enivrant sentiment de liberté.
L'essentiel en somme.
L'on avait investi une fermette isolée dans une clairière de la profonde forêt montalbanaise, unique possession des paysans qui s'occupaient habituellement du bétail possédé par la Comtesse. Heureusement que les effectifs de la mesnie avaient considérablement baissé ces derniers temps, sinon il aurait fallu encore plus se serrer entre les tonnelets de vins bourguignons et l'arbalète à tour qu'Agnès n'avait pu se résoudre à abandonner à l'ennemi.
Ainsi donc, l'on aurait pu imaginer spectacle de désolation et déchéance pour la fière Comtesse. Mais il n'en était rien.
Déjà, l'unique pièce de la fermette lui était dévolue, tandis que le reste des habitants de ce petit fief de la résistance montalbanaise se serraient dans la remise à foin, séparés par un unique plancher du bétail qui s'abritait dans l'étable au dessous. Ce n'étaient même pas les plus à plaindre. La chaleur des bêtes valait mieux qu'un âtre dédié à la bectance qui fournissait une âcre fumée envahissant toute la pièce dès qu'on l'allumait.
D'aucuns auraient dit à la guerre comme à la guerre.
Et valait encore mieux être Saint Just façon viande fumée que Saint Just façon barbecue.
Question de cuisson.
Et d'odeur.
Pour l'heure, elle trépignait, sachant que la mauvaise chute qu'elle avait fait durant le dernier assaut des armées de Guyenne sur Montauban l'Insoumise la condamnait à prendre du repos.
Mais déjà, des bas fonds, des campagnes, de la forêt et du maquis s'élevaient les voix de ceux qui refusaient de se laisser museler.
Silencieux mais actifs.
L'émergence d'une résistance, unie dans son rêve, refusant de ployer l'échine devant un protecteur qui entendait se faire respecter par la force.
Ou comment parvenir à rassembler, malgré les antagonismes, qu'ils soient de Foi, de rangs ou personnels, une ville contre un occupant.
Déjà, pallier au plus pressé, à la nécessité.
La bouffe.
Et l'organisation rapide d'un marché parallèle.
Montauban avait largement de quoi soutenir un siège et une politique de terre brûlée.
Les ventres affamés développent des ressources inattendues et des compétences inespérées.
Puis déjà fleurissaient ça et là les placards, espèce éphémère et pourtant persistante au froid, premier signe que sous la terre courait un réseau souterrain à la vigueur insoupçonnée, au nombre inconnu et possédant une rare capacité à se multiplier.
Viendraient ensuite, suivant le cours d'une logique implacable, les opérations de sabotage.
Préoccupation qui tournait dans l'esprit retors d'Agnès tandis qu'elle surveillait le premier chargement de carcasses de cochons qui avait trouvé preneur. La carriole chargée s'éloigna, menée par un vieillard sans âge qui houspillait sa mule vers le point de rendez-vous.
Les victoires les plus importantes sont également les plus insignifiantes.
*[HRP : dédicace à mon père. Les mots sont de lui.]
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[Ambiance musicale]
La transhumance saint-justienne avait été achevée et rondement menée. Prudence élémentaire couplée à un esprit porté sur le pessimisme avaient poussé la Saint Just à déménager à la cloche de bois de l'Alabrena, avec veaux, vaches, cochons, cave à vin et mesnie.
Et on n'y gagnait guère au change.
Mis à part un enivrant sentiment de liberté.
L'essentiel en somme.
L'on avait investi une fermette isolée dans une clairière de la profonde forêt montalbanaise, unique possession des paysans qui s'occupaient habituellement du bétail possédé par la Comtesse. Heureusement que les effectifs de la mesnie avaient considérablement baissé ces derniers temps, sinon il aurait fallu encore plus se serrer entre les tonnelets de vins bourguignons et l'arbalète à tour qu'Agnès n'avait pu se résoudre à abandonner à l'ennemi.
Ainsi donc, l'on aurait pu imaginer spectacle de désolation et déchéance pour la fière Comtesse. Mais il n'en était rien.
Déjà, l'unique pièce de la fermette lui était dévolue, tandis que le reste des habitants de ce petit fief de la résistance montalbanaise se serraient dans la remise à foin, séparés par un unique plancher du bétail qui s'abritait dans l'étable au dessous. Ce n'étaient même pas les plus à plaindre. La chaleur des bêtes valait mieux qu'un âtre dédié à la bectance qui fournissait une âcre fumée envahissant toute la pièce dès qu'on l'allumait.
D'aucuns auraient dit à la guerre comme à la guerre.
Et valait encore mieux être Saint Just façon viande fumée que Saint Just façon barbecue.
Question de cuisson.
Et d'odeur.
Pour l'heure, elle trépignait, sachant que la mauvaise chute qu'elle avait fait durant le dernier assaut des armées de Guyenne sur Montauban l'Insoumise la condamnait à prendre du repos.
Mais déjà, des bas fonds, des campagnes, de la forêt et du maquis s'élevaient les voix de ceux qui refusaient de se laisser museler.
Silencieux mais actifs.
L'émergence d'une résistance, unie dans son rêve, refusant de ployer l'échine devant un protecteur qui entendait se faire respecter par la force.
Ou comment parvenir à rassembler, malgré les antagonismes, qu'ils soient de Foi, de rangs ou personnels, une ville contre un occupant.
Déjà, pallier au plus pressé, à la nécessité.
La bouffe.
Et l'organisation rapide d'un marché parallèle.
Montauban avait largement de quoi soutenir un siège et une politique de terre brûlée.
Les ventres affamés développent des ressources inattendues et des compétences inespérées.
Puis déjà fleurissaient ça et là les placards, espèce éphémère et pourtant persistante au froid, premier signe que sous la terre courait un réseau souterrain à la vigueur insoupçonnée, au nombre inconnu et possédant une rare capacité à se multiplier.
Viendraient ensuite, suivant le cours d'une logique implacable, les opérations de sabotage.
Préoccupation qui tournait dans l'esprit retors d'Agnès tandis qu'elle surveillait le premier chargement de carcasses de cochons qui avait trouvé preneur. La carriole chargée s'éloigna, menée par un vieillard sans âge qui houspillait sa mule vers le point de rendez-vous.
Les victoires les plus importantes sont également les plus insignifiantes.
*[HRP : dédicace à mon père. Les mots sont de lui.]
RP ouvert à tous les "maquisards", qu'ils soient en contact avec mon perso ou pas.
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