A peine le temps d'apprécier le repas , que Clarri était partie , laissant dans le chalet un fumet de poisson et de nombreuses bouteilles vides , ainsi qu'une vague odeur fromagère , mais en y réfléchissant tristan se dit que cette odeur venait de ses bottes ....
Tristan avait fait longue sieste ...il s'éveilla , s'étira , détendit ses abattis en long enlarge et en travers . Acôté , sa femmme et sa soeur bavassaient , comme peuvent le faire toutes les femmes , de tous temps , en tout lieu , sans cesser .
Il s'approcha et écouta :
Citation:
J'éviterais les conflits à condition que l'on ne vous fasse pas de mal, si l'on vous laisse en paix alors oui j'en resterais envers les autres au " je vous aime bien ", loin du " je te hais " qui toujours le menace. Je ne m'opposerai à personne si personne ne s'oppose à vous. J'approuve, j'accepte ; pour que tout glisse et que rien n'accroche.
La moustache se redressa comme les poils d'un chat en colère . L'oeil devint perçant , le poing se serra tandis que les joues s'empourpraient . il bondit dans la pièce :
- Ah , ça , que vous apprend-on ma soeur ? Voulez vous entrer chez les nonnes ou servir de servante à quelque puissant ? Depuis quand les Masselet baissent-ils la tête ? Depuis quand nos genoux sont tâchés à force de plier au sol ? Depuis quand notre ventre touche terre ?
Il n'est pas d'usage , lorsqu'on porte notre nom de dire je t'aime à ceux qui nous ennuient , mais de leur dire "tu m'ennuies coquin !"
Il n'est pas d'usage , non plus , d'approuver ou d'accepter ce qui nous gratte , mais de dire NON , et de s'opposer , la plume au vent , le verbe haut et la main sur la garde de l'épée .
Rien ne glisse sur nous , nous sommes roc , écorce brute ...
Regardez donc, Coccy , voyez mes mains : Je ne porte pas de gants ! je les ai tous jetés au visage de ceux que je méprise . Je n'en achète jamais assez qu'il m'en reste !
Tristan s'interrompit , pui se mit à aller et venir , pensif , inquiet ...
Voulez vous être de ces nobles potiches que l'on sort dans les salons ou les jours d'allégeance ? De ces courtisanes , qui , attachées au service d'un vieux barbon , guettent sur le visage de leur protecteur , le signe morbide qui leur donnera enfin leur héritage ? Qui leur prennent la main , pour être la première à percevoir le pouls filant et rapide qui les mène au tombeau ?
Voulez vous être de ces serpents qui ne savent que baisser la tête , onduler et s'enrouler , se trouver quatre quartiers de noblesse pour parader , avoir écu doré et couronne brillante , pour donner couleur à leur personne qui n'est que grisaille ?
Allons ma soeur , mettez vous en chemise , et sortons ... je vais vous apprendre à manier le bâton , cela vous sera plus utile que ces leçons , qui assouplissent le corps jusqu'à le rendre aussi mou que de la glaise ...
Mordiou , quand on se nomme masselet , on a les cervicales soudées , et des raideurs dans le salut : le dos plie mal et le genou est raide !