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[RP] Tout vient à point à qui sait attendre. Normalement.

Landyves
Ah voilà, c’était fait, la taquine Ayena était de retour ! Le jeune homme retrouvait enfin celle qui l’avait si souvent fait rire avec ses jeux de mots et son naturel. Car croyez-le ou non, Yves préférait la compagnie des personnes, et pas seulement des femmes, qui avaient ce grain de folie qui rendait tout plus poétique et supportable.
Et donc là, en l’occurrence, le jet de la première pierre le fit autant rire que la donzelle.


Oui tout à fait, ce sera ma faute ! Mais je me défendrai en disant que tu n’avais qu’à pas suivre bêtement mes conseils, que tu n’étais ni assez candide, ni assez intérieurement blonde pour ça !

Et de rire de plus belle après lui avoir jeté un regard fier et satisfait.

C’est moche la confiance des fois quand même.

Il ferma la bouche mais n’en rit pas moins.
Cependant, et ce après quelques secondes seulement, il cessa de glousser comme une femme, bien que les paroles de son amie restaient drôles, et reprit le fil de la conversation.


Du moment qu’ils ne viennent pas trop poser leurs fientes autour de la maison ça me va ! Mais quand tu dis te balader … tu ne parles pas de te trimballer comme un sac de maïs hum ?

Il imaginait la scène : Ayena, roulée en boule et devenue aussi lourde qu’un de ces vulgaires sacs, trainée d’un bout à l’autre du parcours finissant poussiéreuse et pratiquement en lambeaux.

Nous parlons donc bien de nous promener mutuellement alors !

Car si elle était légèrement claudicante Yves savait que la jeune tartine n’était pas du genre à se faire porter, ni même à se plaindre, et encore moins à faire des caprices.

Par contre on fera ça tranquillement. Parce que le Lengadòc est un comté somme toute assez grand ! Cependant je me tiendrai peut-être éloigné de Crussol, au moins un temps que le propriétaire reprenne entièrement possession des lieux. Non pas que je ne souhaiterai pas rencontrer le baron, mais voir débarquer une aussi belle tête d’ange que la mienne chez lui, il n’apprécierait peut-être pas !

Et de rire, encore et toujours, en se recouvrant le chef avec la toque cette fois. Car oui, il était sur le départ. Ayena toute contente de recevoir des nouvelles du Baron avait sans doute envie de se retrouver seule.

Bien ! J’ai était très heureux de te revoir, et tes petits pâtés en croûte étaient exquis, mais je vais te laisser, j’ai comme l’impression que ton organisation va te prendre un temps phénoménal, et je m’en voudrai de grignoter quelques précieuses minutes !

Il sourit pleinement, aussi amusé par la pique qu’il venait, involontairement il faut bien l’avouer, de lui lancer.
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    « Si tu passes ta vie sur le canapé à bouffer des Granola®, t’es mal barré ! »
Ayena
Han, ça faisait du bien, une bonne part de franche rigolade ! Et c'est ce qu'elle appréciait chez Yves : le fait qu'elle savait pouvoir compter sur lui tant pour s'épancher que pour se changer les idées. D'ailleurs, il devrait breveter l'idée, avant qu'elle ne se démultiplie, car le bonhomme était unique en son genre, pour Ayena.

- Est-ce que j'ai l'air d'un sac de mais, hein ? Tst...

- Nous parlons donc bien de nous promener mutuellement alors !

- Bah oui, tu m'as promis une visite en long, en large et en travers...

- Par contre on fera ça tranquillement. Parce que le Lengadòc est un comté somme toute assez grand ! Cependant je me tiendrai peut-être éloigné de Crussol, au moins un temps que le propriétaire reprenne entièrement possession des lieux. Non pas que je ne souhaiterai pas rencontrer le baron, mais voir débarquer une aussi belle tête d’ange que la mienne chez lui, il n’apprécierait peut-être pas !

- Oh, il aura sans doute pas mal d'affaire à résoudre, j'aurais donc sans doute du temps libre. Donc, l'invitation tient quand même, il suffira de demander d'Alquines. Tiens, d'ailleurs, si jamais ton épouse souhaite une tenue, n'hésite pas à l'envoyer vers moi, d'accord ?


Sur ce, le départ était annoncé. Et alors que le messager Audelien s'empiffrait de façon ogresque (comme un ogre, quoi), Yves se recoiffa. Ayena eut un petit sourire, comme pour se promettre de trouver un jour un bon mot envers cette toque qui tout de même, donnait un drôle d'air à son ami.

- Moi aussi, j'ai été ravie de te revoir, et mes pâtés en croute aussi, sans aucun doute...

Haha, la bonne blague.

- Bon retour chez toi, et bonjour à toute la famille !

Elle ouvrit alors la porte qui avait une journée sacrément remplie aujourd'hui, la pauvre. D'ailleurs, pour montrer son mécontentement, elle grinça.

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>DECO pour bannières et tenues !
Héraldique
Ayena
Une fois Land Yves partit, Ayena se perdit dans la contemplation d'Audelien qui avalait plus de victuailles qu'elle n’eut pensé faisable. Elle tenta d'en apprendre plus sur la date précise du retour du Baron, elle tenta de savoir ce qui c'était passé exactement, voulant qu'on lui raconte Adrien avec précision. Seulement, le messager n'avait rien de plus à dire que ce qu'elle avait déjà appris dans la lettre. Crotte. C'était un syndrome terrible que d'être amoureuse et les manifestations physique agaçaient souvent ceux qui n'était pas dans le trip. Entendre parler d'une même personne sans cesse agaça vite l'Audelien qui se vit confier une mission qu'il accepta avec joie, car cela l'éloignerai de d'Alquines un moment.

- Trouvez moi quelqu'un qui parle la langue du coin, et la notre. Il me servira d'interprète. Promettez un salaire intéressant... Mais assurez vous qu'il maitrise bien les deux parlers. Et aller prendre un bain, dans les établissements publiques. Le voyage vous a pâlit.

En attendant, elle alla passer une robe stricte, à la mode italienne, qui lui donnerait l'assurance dont elle allait avoir besoin devant les gens d'ici. Si seulement elle n'avait pas été aussi jeune, elle aurait eu bien plus de facilité à s'imposer...
La servante fut employée à refaire les valises : c'était décidé, ce soir, d'Alquines dormirait à Crussol même. La lettre tout contre son coeur affirmait qu'elle avait le droit de le faire. Et le devoir aussi. Enfin, c'était pas dit comme ça tout à fait, euh... Mais bon.
De nouveau, toutes les affaires furent entreposées dans charrettes et carrosse. Puis, on monta vers le château. Avec la tête relevée parce qu'il fallait assumer, avec une boule au ventre, parce qu'on ne se refait pas.

Audelien l'attendait, avec un zouave à l'air offusqué qui s'avéra ne pas vouloir révéler son nom. Ouai, merci Audelien, t'es l'meilleur...


- Faites savoir que nous souhaitons nous entretenir avec l'Intendant des lieux. Nous avons des ordres à lui donner.

Un cailloux dans la mare... Envol des canards.
C'est une femme plus vieille qu'Ayena (logique, me direz vous) qui vint donc dans la cour comprendre ce qu'on lui voulait et ce que signifiait tout ce raffut.


- Traduisez, voulez vous, lança t-elle à l'inconnu. Nous venons de recevoir une lettre du Baron annonçant son retour dans les jours prochains. Il me demande de... Préparer le château pour l'occasion. Et d'y prendre mes quartiers.

Elle sortit alors la lettre et la proposa à la femme ou à son traducteur qui ne savaient lire ni l'un ni l'autre. Seul le sceau fut reconnu. C'était déjà ça...

- Vous avez des cuisines ? Alors que l'on fasse cuire les pâtés. Que l'on sorte les jambon, les saucisses sèches, aussi. Préparez des tartes aux fromages et faites venir les meilleurs vins. Il faut que tout soit prêt pour demain, puisque nous ne savons pas exactement quand il sera là.

Hey ! Les poings serré, Ayena prenait de l'assurance, en absence de toute voix s'opposant à la sienne.

- Audelien, aller informer le chef de la garde qu'il faudra allumer de grands feux visibles de loin dans la nuit et qu'il faudra sortir tous les oriflammes. Emporter avec vous quelques hommes, et aller chasser du gibier que nous pourrons faire rôtir. Prenez le commandement de tout cela, il faut que tout se passe au mieux. Si vous avez des hommes qui ne veulent pas vous suivre envoyez les moi, je saurai les convaincre...

Se tournant vers l'Intendante, elle demanda, toujours traduite pas le bonhomme bizarre :

- Je voudrais une chambre, au dessus des cuisines ou dans les environs. Je pourrais ainsi tout surveiller...

Et remplir une promesse faites il y a longtemps, ajouta t-elle mentalement.

- Il faudra aérer toutes les pièces, nettoyer les cheminées, faire briller les fers. Vous changerez les paillasses, fleurirez les pièces.

Un silence. Tout le monde semble abattu par l'ampleur de la tâche et la détermination de la jeune femme de 17 ans. Enfin, la femme se décoince : elle laisse échapper un rictus, un petite rire. Le traducteur fait son office :

- Il n'y a plus assez de servantes et de valets, au château. Le Baron est partit depuis plus d'un an, et il n'y avait plus assez dans les caisses pour employer autant de monde... Et elle demande si vous êtes la nouvelle Baronne.

Pour le coup, Ayena rougit. Beaucoup. Mais alors qu'elle va perdre son aplomb, elle pense à Adrien. Il mérite de rentrer chez lui et d'y être accueillit comme si de rien. Il apprendra bien assez vite les soucis qui ont traits à ses terres.

- Allez au village, j'ai de quoi payer des femmes de chambres, des valets. Prenez des gens de confiance. S'il n'y a plus assez dans les cuisines, je vous donnerai aussi assez d'argent pour remplir les réserves.

Une pause.

- Et non, je ne suis pas la Baronne. Je suis une amie chère au Baron. C'est tout. Ha. Et je me nomme d'Alquines.

Elle n'a pas besoin d'en savoir plus.

- Au travail !

Et tout le monde s'y mit. Ouf.
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Héraldique
Adriendesage
[Deux semaines plus tard]

Une aube d'argent au col d'Ayes

Les versants Ouest du massif montagneux de Crussol étaient faits de feu, dès que l'on était avancé dans l'automne. Couvertes de chênaies denses, les pentes de ces douces montagnes donnaient à l'oeil la vision d'un immense âtre flamboyant. Les cimes des jeunes chênes s'animaient au vent parmi leurs centenaires aînés, et faisaient au foyer de ce brasier immense, des flammes rougeoyantes. Dans les vallées, les pelouses qui bordaient ces riches forêts faisaient chaque matin, après une nuit de gelée, des tapis de cendre blanche que les rayons du soleil venaient balayer doucement, laissant ça et là sous des branches un peu trop étendues, quelques traces blafardes du froid nocturne.
A ces heures très matinales, les geais et corneilles prenaient bruyemment la place des chouettes et des hiboux dans les forêts. Biches et faons savouraient dans ces derniers instants de paix, les fraîches herbes encore trempées et que le soleil avait dégelées.

Ainsi par une de ces fraîches matinées, dans ce tableau d'une nature à la fois paisible et flamboyante, un cavalier poussait son cheval à grande allure au col d'Ayes, faisant crier au passage bruyants corvidés dont les cris résonnaient jusque dans la vallée. Ce cavalier, dont nous décrirons l'allure plus tard, c'était Adrien Desage, qui rentrait sur ses terres après une année de guerre aux confins du royaume de France. Il était entré sur le sol languedociens quatre jours auparavant, par Le Causse du Larzac. Sans halte et en grande hâte, il avait traversé les cols déchirés des Cévènnes, ces éperons rocheux qui l'avaient vu naître et grandir, pour filer à travers la vallée de l'Hérault, puis rejoindre le Rhône et en remonter la verdoyante vallée.
La veille, il avait passé la nuit à La Voulte, où il avait pu constater l'absence de sa fille et de son époux, et la bonne tenue du logis seigneurial malgré leur absence. Là, on lui avait fourni gracieusement un palefroi de grande valeur, car les écuries de La Voulte avaient hérité, comme celles de Crussol, de la grande affection des Desage pour l'art de la selle.
Ainsi avait-il reprit la route dès les premiers signes du jour. Il avait laissé à un bon maître forgeron voultain son heaume, cabossé à nombre de points, ainsi que son armure de plaques, percée au flan droit.
Ainsi portait-il une simple veste au cuir épais et tanné, et nouée au cou, une écharpe noire dont le tissu fin reluisait aux rayons du soleil. Il portait au côté son épée, sa bonne épée dont la lame jamais en une année de combats n'avait défaillit.
Peu après avoir passé le col d'Ayes, il freina sa monture et fît halte à Toulaud. Le village était désert. Tout comme à Saint Georges, les cheminées fumaient, mais le bourg dormait encore. Le puit était au centre du village et il y avait, à son côté, une cloche assez grosse qui était fixée à une grande perche. Le baron tira énergiquement sur la corde et fit sonner la cloche à grand bruit. Bientôt, on sortit des chaumières, des fermes et des maisons bourgeoises. De ces dernières il y en avait fort peu: Toulaud en comptait quatre et elles étaient à des négociants en vin, richesse de la baronnie. Rapidement, des têtes ébouriffées sortirent des chaumières. Certains étaient armés de bâtons. A la vue de celui qui, perché sur le dos de son cheval, mettait en branle tout le village, tous écarquillèrent les yeux. Le maître de l'une des quatre familles bourgeoises de Toulaud s'avança. Le père Forsac était le plus riche négociant du bourg et en était par là le chef du village. Cet homme de forte stature, au menton carré et à la barbe grisonnante, était respecté par tous par delà même Toulaud. Il s'avança, et posa un genou au sol, devant le baron qui était resté à cheval:


"- Seigneur, Toulaud salue votre retour. Loué soit le Très-Haut, il est temps que vous rentriez. Le château s'agite, une dame s'y est installé, et a prit..."

Adrien interrompit le marchand d'un signe de la main et s'exclama:

"- Merci Forsac, je loue ton hommage et celui des fermiers de Toulaud. Je sais qui se trouve à Crussol et elle a ma bénédiction. Maintenant que vous m'avez vu, hardi au travail. J'ai vu des bêtes à la pâture. Ne rentre-t-on plus les moutons et les brebis? L'hiver arrive mordious, voilà longtemps que votre bétail devrait être à l'étable pour la nuit. "

"- Mais seigneur, le blé cette an..."

"- Pas de contestation à cette heure. Demain, au midi, vous viendrez à Crussol, Forsac, porter avec tous les autres chefs de villages, les doléances. En attendant, remplissez vos bergeries."

Le négociant s'inclina, exhorta les villageois à la tâche, puis confia à son fils cadet, qui à quinze printemps avait déjà la stature de son père, le soin d'accompagner le baron jusqu'à Crussol.


Un midi rouge sur La Villette

Accompagné du cadet Forsac, Adrien Desage avait, après Toulaud, rassemblé les villageois à Guilherand, puis à Saint-Peray. Après que convocation fût donnée à chaque chef de village, il tourna son palefroi vers l'éperon rocheux qui surplombait Saint-Peray. Là, enfin, se dressait devant lui la falaise de Crussol et à son sommet, le donjon du logis seigneurial.
Malgré tous les embelissements qu'avait voulu et fait réaliser Adrien Desage, la forteresse de Crussol restait massive, martiale et impressionante. Ceinte par environ 229 lieues* de muraille, qui elle-même s'élevait selon les endroits à plus de 17 coudées**, le chateau était imprenable. Son enceinte était double et était gardée à l'entrée par un chatelet de garde précédé d'une barbacane. La muraille était percée d'archères et de chemins de rondes.
A l'intérieur de l'enceinte, La Villette était une vraie agglomération, composée d'une centaine de maisons, avec son église, son marché. Point culminant sur la vallée du Rhône, Crussol était un refuge pour tous les villages environnant de la vallée.
Nul autre endroit n'aurait mieux convenu à un homme comme Adrien Desage. La vie à Crussol était rude, simple et soumise aux caprices de la nature dont toute la montagne en transpirait la puissance.
Tout à cette contemplation, le baron avait à cet instant dans les yeux, un feu insasiable, bûlant d'une passion dévorante que l'ancien général avait pour cette terre. Cet Amour puissant pour son domaine transcendait tous les habitants du fief d'Adrien Desage. Le jeune fils du négociant de Toulaud, était fasciné par l'attitude du baron, et il lui semblait voir un frère d'Alexandre***, un Périclès, ou quelque autre des rares héros grecs dont il lui avait été donné de connaître les légendes.
Du reste, jeunesse est impressionnable et tous connaissaient la vie de leur seigneur, et savaient quels évènements violents l'avaient tenu éloigné du Languedoc pendant une année, ce qui ajoutait, dans l'esprit rêveur du jeune garçon, à l'image héroïque qu'il s'était forgé du baron de Crussol. Il lui était donc impossible de penser qu'il avait devant lui un homme, avec son lot de défauts et de faiblesses que peut porter le genre humain.

Adrien, tout à sa contemplation, s'exclama:


"-Allez, Forsac le jeune, allez devant moi, annoncer mon retour!"

Et tandis que le garçonnet talonnait sa mule, Adrien serrait dans son poing un mouchoir sanglant...


notes et références:
* environ 800 mètres
** environ 8 mètres
*** Alexandre le Grand

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--Audelien



Il était messager à l'origine. Son boulot, c'était de prendre un message, de chevaucher, de transmettre, de prendre la réponse, et de revenir. Il savait pas vraiment prendre en charge d'autres missions. Il avait pas le doigté, par exemple, pour recruter des interprètes qui en plus avaient le sourire, pour aller chasser et revenir avec du gibier ou enfin pour donner des ordres à des gardes qui avaient la "brute attitude".
Mais bon. Audelien, il est obéissant. Et quand il fait les yeux noirs, il arrive à être convaincant. Sauf avec les sangliers, mais c'est une autre affaire...
Les premiers jours, le train train se mit doucement en route. Les employés du chastel virent leurs rangs grossirent, subissant sous l'amusement général, des entretiens corsés avec une Ayena intransigeante. Mais on comprit rapidement qu'elle ne rigolait pas. Et finalement, on la découvrit généreuse lorsque le travail était accomplit, aussi l'ambiance s'allégea aidé en cela par des promesses de salaires acceptables.
Si l'extérieur de l'énorme bâtisse ne se modifiait pas en apparence (on exceptait à cela le nombre de protagonistes y évoluant), l'intérieur, lui, fit peau neuve. Audelien avait pu constater chaque soir l'évolution puisqu'il était convié au traditionnel bol de bouillon que prenait la Damoiselle le soir, alors qu'on l'informait de l'avancée des préparatifs.
La deuxième semaine d'attente fut plus monotone : l'attente, qu'on avait annoncée de quelques jours, commençait à s'allonger. Seules les cuisines continuaient à s'évertuer à saler les viandes qui avait été chassées, à en laisser d'autre de côté pour les rôtisseries, à faire les pâtés, les saucisses et les conserves, à sécher quelques morceaux de choix, à en confire d'autres.

Enfin, on n'eut plus rien d'autre à faire que d'attendre. Alors Ayena se fit enseigner quelques rudiments de la langue, explosant de rire assez souvent en constatant qu'elle n'avait pas l'accent du tout. Audelien assistait à ses leçons, estimant que cela pourrait lui être utile aussi. Mais il restait muet, persuadé qu'en cas de besoin, ça sortirait naturellement.



[Jour J]

Le matin, une grosses commande de vin était arrivée et avait comblé, grâce à la force des bras des employés, les caves pratiquement vide. Un peu de bière aussi, avait été acheminé là : c'est qu'Ayena en prenait au petit déjeuner et qu'elle n'aimait pas en manquer.
Audelien, comme chaque jour, alla donc prendre ses ordre auprès de la Demoiselle :


- Hum.

Elle lui confia alors qu'elle commençait à s'inquiéter : si le Baron n'arrivait pas rapidement, elle devrait se résoudre à vendre quelques tapisseries pour garder le personnel engagé. C'est qu'elle donnait au chastel l'allure d'un domaine seigneurial, sans en avoir les avantages : qui avait levé les impôts depuis une année entière ? Où étaient passées les usufruits du Baron ? Cela ne la regardait pas et elle s'était bien gardé d'en parler à quelqu'un d'autre qu'à Audelien,mais vivre sur les réserves de d'Alquines ne promettait pas de grands jours.

L'homme s'en alla en direction des cuisines où il chipa un peu de fromage. Puis, se laissant vivre, il se fit porter sur le chemin de ronde, appréciant la vue imprenable en compagnie de quelques garde avec qui il s'était lié. Son oeil gris se fixa soudain sur un mouvement inhabituel qui rompait l'harmonie du paysage. Un homme, sur un mule... Invectivant la bête à grand coups de cuisses et de possibles jurons.


- Hum... ?

On attendit qu'il arrive et qu'il descende de sa monture. Curieux, Audelien et ses amis massifs à l'hibou brodé sur la poitrine étaient eux aussi descendus du chemin de ronde.

Grand sourire de l'attention qu'on lui portait, le jeune Forsac se redressa et dit :


- Il arrive !

La nouvelle fit boule de neige. Les gardes remontèrent bien vite pour tenter d'apercevoir le Baron. Audelien, fidèle messager, entreprit de trouver la Demoiselle pour lui annoncer lui même. Qu'il fasse son travail, pour un fois...
Ayena
Et la Demoiselle, les pieds propres dans des chausses sales n'était ailleurs... Qu'aux écuries. Imaginez le tableau : dans une tenue soignée, les cheveux relevés en deux macarons partiellement cachés sous une coiffe légère, parfumé de violette, d'Alquines était en train de caresser de ses mains blanches et délicates une jument énorme. Énorme parce que grosse et non loin de la mise bas. Énorme parce que sa condition lui avait valu un espace conséquent aménagé aussi douillettement que faire se pouvait.
La jeune femme profitait souvent de l'approche de la mi-journée, où les écuries se vidaient d'âmes humaines, pour venir se souler d'odeurs et de relations silencieuses avec les bêtes. Une en particulier, cette jument donc, l'avait attirée. Sans doute parce que l'animale avait besoin d'un peu d'attention, de réconfort et de présence et qu'Ayena était assez seule pour avoir le temps d'en procurer à l'intéressée.
Chaque jour depuis deux semaines la Demoiselle venait donc voire sa nouvelle amie, lui parler, la brosser, la caresser. Puis, elle s'asseyait sur un tonneau renversé et profitait simplement de l'instant.
Seulement, ce jour, la jument était agitée. Elle piaffait, se faisait douce et tout à coup refusait les caresses et repoussait Ayena de coups de museaux secs.


- Quoi ? Je t'ai fâchée ? Qu'est-ce qui se passe ? Tu n'as pas eu ta double ration ce matin ?

La jeune femme allait par conséquent faire demi tour pour retrouver le monde des Hommes, vexée, lorsque son oeil azur perçut un frisson parcourant le corps de la jument qui venait d'avoir une contraction.

- Il arrive ?

- Hum, fit derrière elle un Audelien qui, comme la tortue, était arrivé à point.


La jeune femme, dans un sursaut terrible, se retourna vivement.

- Elle va pouliner ! Vite, fais venir quelqu'un !

Puis, constatant que l'homme avait un air inhabituel, elle demanda, cassante et ne comprenant pas qu'on n'obéisse pas alors que son amie la jument allait vivre d’atroces souffrances.

- Quoi ? Mais par bleu...

Sa voix se perdit. Elle venait de comprendre.

- Il arrive ?

Elle ouvrit grand les yeux, torturée entre deux comportements. Non, trois : 1) Rester avec la jument; 2) Courir à la rencontre du Baron; 3) Fuir. Comprenez que lorsque les évènements s'enchainent trop vite, on perd parfois les pédales. D'un côté elle assimilait ce qu'elle même avait vécu à ce qu'allait vivre l'animale et de l'autre, son espoir le plus vif allait aboutir, à savoir,LE revoir.
Elle hésite deux secondes, à peine. Mais ce sont deux secondes terribles pour son petit esprit torturé. Alors, elle recule, caresse la jument, lui souffle quelques mots et se retourne vers Audelien.


- Emmène moi.

Et tout en courant derrière l'homme elle s’époussette tant bien que mal, tentant de ne pas prendre garde à son rythme cardiaque qui s'affole.
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Héraldique
Adriendesage
Peu après le cadet Forsac, Adrien poussa son palefroi sur la pente. Douce d'abord, elle était abrupte ensuite. Contrairement au bas de la montagne, largement feuillu, les hauteurs étaient le domaine des sèches pelouses et de la végétation rase. Quelques troupeaux paissaient les dernières feuilles vertes parmi les buissons d'aubépines roussis par l'automne. Crussol n'avait pas échappé aux largesses des bergers, qui avaient certainement profité de l'absence du baron pour pousser trop longtemps la pâture. A quelques pas du chatelet, où les gardes en faction s'étaient rangé en ordre impeccable. Adrien noua l'étendard de sinople à l'hibou d'or à sa lance et mis son cheval au pas.
Au chatelet, les gardes s'étaient mis en bon ordre et à l'intérieur de l'enceinte, une clameur s'élevait. Le baron sentait battre cette rumeur dans sa poitrine, de plus en plus puissament, à mesure qu'il progressait vers la herse. Il y avait plusieurs sortes de joies qui éreintaient son coeur à cet instant. Le bonheur de revoir ces murs, ces landes, ce ciel, la vallée du Rhône qui s'étendait à vue sous la falaise... Il y avait la joie de retrouver ces gens, à qui il s'était dévoué et qui le lui avaient tant rendu. La joie de revoir ces murs, dont il ressentait chaque pierre. Et enfin une autre joie, plus oppressante en ce qu'elle avait d'inconnu, de fébrilité. Une joie qui rendait le coeur trébuchant, incertain. Une joie qui tenait à ce mouchoir, qu'il tenait encore au milieu du poing.

Les gardes s'inclinèrent lorsqu'il passa sous la herse. Adrien affichait un sourire bienveillant. S'il était vêtu rudement, de cuir épais, sa mise était propre depuis sa hâlte à La Voulte. Il portait la barbe courte, sa chevelure épaisse était bien en ordre. Il avait ainsi l'allure que lui connaissaient les gens de Crussol: Rigueur et simplicité, qui le rendaient pareil à cet montagne.
Tout était émerveillement. L'homme qui rentre au pays si longtemps éloigné, y voit tout et tout lui paraît enchanté. Même le rat crevé sur lequel vient de glisser son cheval... Rat crevé???


"- Mordious, qu'est-ce donc que cette pesterie?!"

Trois gardes se pressèrent désormais devant le baron, tant pour lui dégager le passage de la foule que pour éviter un éventuel nouveau désagrément...
Bientôt, il entra dans le bourg de La Villette où les rues étaient en effervescence. Ses yeux parcouraient les visages. Il retrouvait là, l'un des quatre forgerons de la ville, ici la femme du meunier, là des vignerons de Saint Peray, par là le tavernier de l'auberge de la Grande Rue... Mais il ne distinguait pas encore le visage cherché.
Alors qu'il sortait presque du bourg, il distinga le haut d'une coiffe, avec deux macarons. Une coiffure qu'il attendait. Le sourire s'écarta sur son visage et ... retomba, car il reconnu la grosse boulangère, la mère Bouleyrand...


" -Par tous les saints, la voilà coquette? Le père Bouleyrand a-t-il eu misère?" s'empressa-t-il de demander à celui des gardes qui de lui était le plus proche.
Bientôt, il fût de nouveau sur la pente rocheuse, et talona son destrier pour s'approcher du chateau...

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Ayena
C'est qu'elle est longue la pente. Trop. Le Très Haut a dû bien s'amuser en créant cette partie du Royaume. Un petit amusement, une plaisanterie à lui même, sans doute. Ou alors il avait une âme de cinéaste en pensant à Crussol et a voulu instaurer du suspens.

- Faudrait dire à quelqu'un des écuries d'aller voir, quand même..., lance t-elle un peu dans le vide, tant son attention est centrée vers l'endroit où Adrien doit apparaitre.


Ayena est donc parmi les gens du château, attroupés là comme des curieux. Aura t-il changé ? Que dira t-il ? Ils ne savent même pas ce qu'ils attendent, mais ils veulent voir de leur propre yeux leur Baron. La Demoiselle, mêlée à cette foule, à le souffle court. Et s'il ne la reconnaissait pas ? Et puis, que lui dira t-elle ? Et lui, trouvera t-il les mots pour la saluer ? Enfin, que vont-ils bien pouvoir se raconter ? "Alors, c'était bien la guerre ? Ouai, moi je me suis amusée à rénover ton château, fais pas gaffe, ya des fleurs partout..."
La jeune femme doute. D'elle même, du Baron, de leur retrouvailles. Et puis, peut être a t-elle mis la charrue avant les bœufs en s'installant ici. C'est presque indécent et pour le moins irrespectueux des us.
Les maintes moites qu'elle tente vainement de sécher sur le tissu de sa robe tremblent un peu. Sur sa tempe, une veine bat la mesure, de façon désordonnée. Ayena ne sait plus comment elle doit se comporter, elle est perdue, persuadée de tout, de rien, mais en tout cas pas de l'essentiel. Finalement, Audelien prend les choses en main et la pousse un peu sur le devant, bousculant qui se trouve sur leur chemin. Elle se laisse faire un peu pétrifiée, comme une petite fille qui ne comprends pas les ordres qu'on lui a donné et qui se laisse faire comme une marionnette. "Souris", lui souffle sa conscience. Elle sourit.

Dans ses yeux bleus, l'indécision règne en maitresse, gardant en réserve la peur, l'impatience, et tout plein d'autres choses dont l'énumération lasserait notre lecteur assidu.

Voici le moment attendu : il arrive. Pour le coup, Ayena a totalement oublié le poulain et n' a plus d'yeux que pour le cavalier, précédé d'une bannière où un hibou daigne sur la Demoiselle un regard morne et plat.
Elle reste figée, attendant... Attendant elle ne sait quoi. Quelque chose. Et dans son dos, elle croise les doigt de sa main gauche.

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Héraldique
Adriendesage
La glorieuse et longue marche s'acheva donc devant la porte du donjon - qui n'en avait plus d'aspect que sa silhouette massive - où Adrien trouva massés tous ses gens. Il ne remarqua pas immédiatement que nombre d'entre eux lui étaient inconnus, car il n'avait d'yeux que pour la jeune femme qui se trouvait devant eux. Des bouleversements qu'avait subi sa Maison pendant sa longue absence, il n'en avait pas la moindre idée. Il s'était attendu aux largesses de ses paysans, qui avaient profité trop longtemps des pâtures. Il s'attendait à trouver ses greniers dégarnis, peut-être ses coffres en partie vidés. Mais à ce que la plus grosse partie de ses valets aient déserté le chateau, cela il ne l'avait pas imaginé.
Le baron affichait cependant un sourire serein. Ce qu'il avait vu à Guilherand, chez les fermiers de Saint Georges, au petit bourg de Toulaud, chez lez vignerons de Saint Peray, à La Villette, c'était des villages peuplés et biens vivants. Il ne lui avait manqué dans cette tournée que le château de Charmes, où il escomptait emmener son invitée. Il espérait, à ce propos, qu'elle n'y avait pas encore mis les pieds. De fait, il ignorait depuis combien de temps exactement Ayena était arrivée à Crussol. Il ignorait tout des activités qu'elle avait pu mener dans son château, sur ses terres. Et sa plus grande crainte était qu'elle n'en avait pas été séduite.

Adrien posa sur la jeune femme un regard doux. Son palefroi renacla: l'animal était jeune et s'était énervé pendant la traversée houleuse de La Villette. Le baron tendit sa lance à l'un des trois gardes qui l'avaient suivit, puis sauta au sol. C'était un mouvement cavalier, mais irréfléchit, car sa blessure au flanc le faisait encore souffrir, et le pommeau de son épée lui avait heurté les côtes dans la réception. Il retînt à grand courage une grimace de douleur, qui aurait fait vilaine impression.
Alors, après qu'il eu repris entière consistance, affichant toujours ce sourire paisible et assuré, il s'avança et tendit le poing, et dans le creu de son gant de cuir, il y avait ce mouchoir qu'Ayena lui avait confié au début de l'été.


"Ma demoiselle, je suis heureux de vous revoir sauve et ici, dans cet endroit qui m'est si cher. J'espère que l'on vous a fait bon accueil et par avance, je vous remercie d'avoir veillé sur ce qui est à moi. De mon côté, j'ai veillé sur ce qui était à vous - il jetta un regard navré au mouchoir qu'il tenait et qui était maculé de sang - mais je ne saurai malheureusement pas vous le rendre aujourd'hui dans l'état dans lequel vous me l'aviez confié... Me pardonnez-vous?"
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Ayena
Une partie de la tension qu'elle avait accumulée s'évapora en même temps que le Baron posa sur elle son regard chaud. Chaud dans le sens qu'elle aurait pu s'y perdre des heures parce qu'il signifiait qu'elle était la bienvenue, et plus encore, qu'elle avait été attendue et espérée. C'était assez pour Ayena. Elle n'avait plus besoin d'autre chose que de la seule présence de celui vers qui elle avait tourné ses pensées depuis tellement de temps. En un sens, elle se sentit libérée. Plus légère.
Aussi, un sourire plus naturel, moins crispé, vint éclairer son jeune visage.

Il sauta à terre avec la massivité propre à son rang. De la présence, de la puissance. A côté, elle était bien fragile, bien peu courageuse. Mais ce rôle lui allait bien : elle n'avait pas pour le moment d'ambition guerrière et acceptait volontiers que les hommes prennent le relais avec tout le talent qui était leur. Chacun sa place.
L'homme pour qui elle avait tous ses yeux avança et tendit dans sa direction son poing, celui qu'elle savait renfermer le mouchoir qui avait été la preuve de leurs promesses respectives. C'est alors que sa voix prit consistance et le sourire que la jeune femme affichait déjà se transforma en véritable manifestation de joie. Ha, cette voix ! Elle l'avait si souvent écoutée dans ses rêves... Et elle se révélait encore plus renversante en vrai.

- Me pardonnez-vous ?

Elle leva un sourcil, un peu taquine.

- Je ne vous pardonne que parce que vous avez eu l'obligeance de revenir en vie. Sinon, croyez bien que je me serais fâchée...

D'une main, elle prit le poignet du Baron alors que de l'autre, elle refermait la main qui montrait le mouchoir ensanglanté.

- Gardez cela comme un souvenir. J'en broderai d'autres...

Elle sous-entendait donc que s'il l'acceptait, elle lui donnerait de nouveau ses armes. Oh, c'était plus symbolique qu'autre chose, mais elle souhaitait sincèrement qu'il comprenne l'allusion : s'il le demandait, elle passerait sa vie à le couvrir de mouchoir blancs parés des armes d'Alquines. Mais parce qu'elle venait de lui demander s'il acceptait encore qu'elle reste un peu, beaucoup, toujours, et que cette proposition était honteuse, elle rougit véritablement.

- En attendant...

Elle baissa la tête, rassembla ses esprits et parla en occitan, souhaitant lui faire la surprise, elle aussi pleine de signification.

- Bon retour chez vous, Baron.

La phrase avait été répétée et répétée encore lorsque des quelques cours qu'elle avait pris. En cela, elle voulait montrer qu'elle ferait son possible pour s'intégrer à cette culture pour laquelle il vivait littéralement. Et, elle voulait l’impressionner aussi. Ses yeux pétillèrent.
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Héraldique
Adriendesage
La barbe fendue par un sourire d'enfant, les yeux hilares, Adrien bu l'accent maladroit de la jeune femme. Jusqu'alors, il l'avait trouvée ravissante, en tout point ce qu'elle était dans son souvenir.
Cet occitan écorché la fit splendide, merveilleuse. Il fût surpris par son propre émoi. Le baron n'avait jamais été un homme à femme. Après avoir connu l'Amour deux fois, il n'imaginait pas connaître à nouveau cette chaleur. Adrien n'était pas fils de noble, mais l'était devenu par force d'abnégation et de dévouement. Aussi n'avait-il pas été élevé dans les traditionnels mariages arrangés, mais avec les doux rêves chevaleresques de l'Amour courtois tel qu'il avait pu l'entendre dans les histoires des troubadours.

Il inspira profondément et inclina le front.


"Mercè, la meuna donaisèla" , lui répondit-il, aussi chantant qu'une fauvette au premiers jours de l'été.

Et il dénoua le lacet qui serrait sa chemise de cuir pour y glisser l'étoffe, à la place qui avait été sienne pendant les trois derniers mois.
Il lui fallait se contrôler, car pour peu, il se serait mis à danser. L'effervescence qui bouillait sur Crussol commençait à le gagner. En effet, il lui tardait d'amener son palefroi à ses écuries. Ah, ses écuries! Qu'elles étaient en travaux avant son départ, étaient-elles terminées?
Et de retrouver son logis, dont les fenêtres donnaient une vue imprenable sur toute la vallée du Rhône, de parcourir la galerie qu'il avait fait élever et dans laquelle il n'avait eu le temps de constituer la collection de peintures qu'il avait rêvée...

Alors, pressé, il tendit son bras à Ayena et l'invita à entrer dans la cour du château.


"Oui, je retrouve mon pays, qui m'a tant manqué. Un terre qui est aussi la votre, tant que vous voudrez bien user de mon hospitalité." dit-il en passant la lourde porte, qu'un page tentait tant bien que mal de retenir, car la grosse corde qui devait la tenir ouverte avait été enlevée dans la bousculade... Bien entendu, Adrien, en miroir d'Ayena, nourrissait l'espoir qu'elle souhaite prolonger son séjour assez longtemps pour qu'elle puisse s'apprivoiser aux lieux ainsi qu'à lui même. C'était d'ailleurs plus de lui qu'il avait crainte, car persuadé qu'il était que sa falaise était la plus merveilleuse du monde, il ne pouvait croire qu'Ayena n'en avait pas été impressionnée.

Dans la cour, poules et canards eux-mêmes se mêlaient à la frénésie ambiante. Le baron laissa la bride de son palefroi à un garde, l'enjoignant à emmener le cheval aux écuries et à le faire bouchonner convenablement. Lorsqu'ils allaient monter les premières marches, il s'exclama, en serrant de sa main libre, celle d'Ayena contre son avant-bras:

"Par tous les saints, je suis comme un enfant devant ses premières chausses! J'aurai tant de choses à vous confier, tant d'autres à vous demander! Montons vite voulez-vous, nous serons mieux au grand salon! On nous fera porter du vin! Du bon vin d'ici mordious! Et nous nous assoirons dans ces fauteuils italiens, ah les fauteuils! Un an sur une selle de cheval, j'ai tant rêvé de ces fauteuils!"

Ils entrèrent et là, il rit:

"Ma foy, suis-je un jour parti?! Je crois que ce château n'a jamais été aussi coquet! Dans mon souvenir, les lavandes et les thyms de la fin de l'été vieillissaient au mur jusqu'aux premières neiges! Il me semble que vous avez merveilleusement oeuvré." dit-il en lui adressant enfin un doux sourire qui font qu'un prétendant se déclare en faisant mine de ne rien avancer.
Il était beaucoup trop tôt pour prononcer quelques voeux ou déclarer passion, mais celle-ci lui était aussi trop pressante pour qu'il puisse se garder d'échapper un tel sourire.

Ils gravirent l'escalier et bientôt arrivèrent au salon...

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Ayena
Pari gagné. Si elle avait su que sa piètre tentative de parler la langue du Sud aurait été si bien accueillie un jour, elle serait venue naitre sur les terres où on la parlait, pour la faire sienne dès le premier jour. Malheureusement, ce genre de chose ne se décide pas. Il lui faudrait donc rattraper bien vite le temps perdu. Quoique, le temps, auprès du Baron, passerait bien vite.
Ravie comme jamais, Ayena pris le bras tendu et s'engagea avec Adrien dans la cour du château, buvant ses paroles.


- Je ne suis point une hôte encombrante, mais j'espère que ma présence ne vous semblera pas trop vite embarrassante.

C'est un jeu l'amour. C'est se découvrir à moitié, c'est avouer à demi mots, c'est demander à l'autre s'il est aussi amoureux, mais sans employer aucun de ces mots là. C'est enfin, pousser l'autre à se déclarer le premier.
Le temps du rose au joue, des papillons dans l'estomac, des sourires qui veulent en dire beaucoup et des yeux qui racontent tout, sans ne rien dire à haute et intelligible voix. Devant l'enthousiasme du Baron, Ayena su que lui aussi conaissait cette étrange sensation qui rend heureux au contact de l'autre. Mais si pour lui ce n'était pas une découverte que de se confronter à ses sentiments, pour elle s'en était une, qui la déstabilisait franchement.

Suivant Adrien aussi rapidement que le lui permettait sa jambe folle, elle rêvait déjà aux heures qu'ils allaient passer à s'écouter l'un l'autre. Alors, lorsqu'il s'arrêta en découvrant le salon et qu'il exprima sa surprise et le fait qu'Ayena avait été une vraie fée du logis, elle s'enorgueillit et se détendit enfin : ce qu'elle avait fait depuis deux semaines n'était pas passé inaperçu, ouf !

- Merci ! Je voulais que l'endroit vous semble accueillant après une si longue absence...

Elle évita son regard en souriant elle aussi, et ses joues prirent une teinte rosée du contentement d'avoir réussi à l'impressionner.

Il entrèrent alors dans le fameux salon où les deux fauteuils promis étaient bien là. L'assise un peu usée avait été couverte de coussins de plume qui promettaient un confort bien agréable. Une petite table, assez grande pour accueillir un en-cas et quelques verres recevait aussi une couronne de fleurs: cette dernière, dans les tons violets et jaunes, avait été fraichement faite du matin et les marguerites d'automne donnait un côté coloré bien agréable à la pièce, en plus de leur odeur caractéristique.


Comme on avait entendu le Baron parler de vin, un domestique fit son apparition, munit de deux verres en argent et d'une bouteille qu'il posa sur la table avant de jeter un regard vers Ayena, femme qui lui donnait ses ordres depuis deux semaines, jeune recruté qu'il était.

- Avez vous faim, Baron ? Nous avons fait entrer de délicieux fromages ces derniers jours, en plus de toutes les charcuteries fraichement fumées pour votre retour...

Elle dit ceci en prenant place sur un des fauteuils, jetant un regard vers le serviteur qui venait d'être informé de ce qu'il devrait apporté si la réponse d'Adrien était affirmative.
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"Du fromage? Je n'en ai pas mangé depuis la Normandie... Ces bougres de Normands font un fromage qui vous tuerait une douzaine de rats au premier coup de narine! Mais tiens, celui des brebis d'ici me va! Et de la charcuterie sur quelques grosses tranches de pain, voilà qui sera merveille! Allez donc nous chercher tout cela mon brave!" lança-t-il au serviteur qui les avait accompagné.

"C'est curieux, continua-t-il en s'asseyant, il y a passablement de nouvelles têtes dans ce château. J'étais capable de nommer tous mes gens et voilà que certains me sont inconnus..."

Le baron tâta les coussins, puis s'enfonça dans le fauteuil avec un soupir d'aise. Il se releva bien vite, car son épée le gênait. Il déboucla son ceinturon et alla poser sa lame contre l'appui de l'énorme cheminée, puis retourna s'asseoir.
Déjà, on apportait déjà victuailles et vins.
Pendant qu'ils mangeaient, Ayena lui expliqua comment elle avait repeuplé le château, afin de préparer son retour. Adrien acquiesca, mais pris le soin d'ajouter enfin:


"Vous avez bien fait. Demain, je prendrai le temps de rencontrer chacun de ces nouveaux venus. Il m'est inconcevable de ne pas connaître mes gens. Uc, mon fidèle intendant de notre hotel à Montpellier, sera là dans trois jours. Il m'aidera à mettre de l'ordre dans les greniers et les coffres du château. "

Adrien fixa, songeur, la couronne de fleur qui avait été déposée sur la table... Quelle était sa signification? Bien sûr, il en avait quelque idée, mais que sont certitudes lorsque se posent les questions de l'Amour? Et si les certitudes ne sont plus, que sont alors les incertitudes? C'est là qu'Audace trouve sa place:

"Dans deux jours, je voudrai vous emmener à Charmes. Nous passerons par Saint Peray et Toulaud. Êtes-vous sortie un peu pendant votre séjour?"[/img]
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Ayena
Et parce qu'elle n'a pas parlé depuis longtemps à quelqu'un, la timidité des retrouvailles la quitte peu à peu. Elle sourit, explique que les domestiques du château ont déserté le lieu durant l'absence du Baron, qu'elle a du employé de nouveaux gens. Oh, mais elle leur a expliqué où était leur place, grâce à un homme qui a traduit ses paroles. Elle laisse entendre qu'elle n'a pas touché aux biens du château et qu'elle a puisé dans sa propre cassette pour payer le petit monde.

Quoi qu'il en soit, elle prend plaisir au spectacle du Baron. Elle apprécie les regard enjoués qu'il porte autour de lui, la satisfaction qu'il a à retrouver les produits du coin : elle a servit le vin dans les verres qui n'attendaient que cela et tranche à présent du gros jambon en parts généreuses.


- Non, Baron. Je suis arrivée à la Villette directement, et lorsque j'ai reçu votre dernier pli, je suis montée ici, d'où je n'ai plus bougé.

Elle porte un morceau de charcuterie à sa bouche, en apprécie le gout salé. Pour le petit voyage, elle réfléchit, et se souvient qu'elle avait mis sur pied un plan d’aumône pour le retour du Seigneur sur ses terres. Oh, pas grand chose, juste de quoi faire de ce jour un fête, même chez les démunis. Elle poursuit donc :

- Je pensais que nous aurions pu passer un dimanche ici, je voulais faire distribuer du pain aux plus pauvre à l'occasion d'une messe dominicale. Mais bien sûr, je serai donc heureuse que vous me fassiez visiter un peu les alentours. Je gage que connaitre les environs ne pourra que m'être utile !

Petit sourire, qui se moque d'elle même. Sans doute en effet serait-il préférable de connaitre du Languedoc autre chose que Montpellier et Crussol. C'était tout de même assez limité.

- Charmes, Saint Peray et Toulaud sont sur vos terres ? Racontez moi ce qu'il y a à y voir...
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Adriendesage
La distribution de pain lui paru être une bonne idée, d'autant plus qu'Adrien avait convié à lui les chefs de villages et celui des moines de Saint Peray. Un hochement de tête enjoué ponctua la dernière question d'Ayena.

"Ce qu'il y a à y voir?"

C'était une exclamation plus qu'une interrogation. Un éclat d'enthousiasme, une flamme soudaine, chaude et vive. Adrien s'était levé de son fauteuil et s'approcha d'une fenêtre, presque transi par le spectacle qui s'offrait à lui. Il y avait là, sous le château, le Rhône, impétueux, et juste derrière lui, Valence, grande porte du Lyonnais-Dauphiné. C'était là, juste sous la falaise, avant le fleuve, que le village de Saint-Peray s'était construit.

"Sant Pèire d'Ai... Qu'y a-t-il à y voir? Nos vignes, qui sont comme la houle de la montagne, aussi denses, aussi véloces qu'une belle vague. Elles sont sur de belles collines, que le Soleil d'Oc chauffe l'été, de toute sa force. Dans le village, il y a avec les vignerons, les moines du prieuré de Sant Pèire* qui est surveillé de loin, à l'extrêmité de la montagne, par l'abbaye de Saint-Estève. Tous ces moines nous vendent du vin, l'un des meilleurs de toute la vallée. Mordious, je veux qu'il soit bon, si c'est chez moi qu'on le fait!"

Les mains fermement posées sur le large parapet en pierre de la fenêtre, le baron avait les yeux rivés sur le paysage qui s'étendait sous lui. Il continua, fasciné:

"A Toulaud, quand on a passé la haute tour de Guet, on respire la terre, le fourrage et la cendre. Les cheminées des potiers fument encore, tant que le froid n'a pas encore tout gelé dans la vallée, et que la terre est encore bonne à modeler. Tenez, lorsque nous aurons assez mangé, je vous montrerai, nous avons ici au château quelques belles pièces, de beaux vases qu'ont fait nos artisans. Les étables devraient être pleines, mais je crois que nous devrons nous en assurer nous-mêmes..."

Puis, il se retourna et affichait en retournant vers Ayena, un sourire irradiant.

"Et enfin, lorsque l'on descend aux confins de notre domaine, à la frontière des terres des barons de La Voulte, qui sont à ma fille et à son époux, nous voilà sur la colline pierreuse de Charmes. Là, se dresse un château autrement plus chaleureux que cette vaste forteresse sur laquelle je vous ai convié. Le château de Charmes est fortifié, lui aussi. Mais il y a autour de belles sources d'eau, dont nous manquons tant ici. Il est dans la vallée, à l'abris du vent, qui nous gifle tant la face, ici à Crussol. Les forêts alentours sont denses et riches, quand ici, nous devons cavaler à flanc de roche pour tâcher de prendre quelques lapereaux. Je pense que Charmes vous plaira, Ayena. Moi aussi, j'aime y être. Mais malgré tout, il y a cette façon de roche abrubte qui est en moi. Je suis né dans les montagnes Cévennoles, là où Actarius a fiefs. Et j'ai, ici perché sur cette falaise, l'impression d'être le hibou qui surveille toute cette vallée. Quelque chose de mon enfance, quelque chose qui me tient sur ce sommet. Et puis, il y a dans cette façon rude et simple, toute ma vie de soldat..."

Il y avait dans le discours du baron quelque chose qui laissait transpirer, sans qu'il en ait eu conscience, le dessein qu'il nourrissait. Ce "nous", ce "notre", qui induisait quelque partage, dont lui-même n'avait pas encore fixé réellement les contours.
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