[au domicile de Colvert]
Colvert avait traversé la ville, courant à son logis pour y prendre des vivres et de quoi s'équiper en conséquence.
Il n'avait aucune idée de ce qui l'attendait.
La peur le tenaillait, mais son devoir l'appelait.
Jamais il n'avait connu affaire aussi ténébreuse et la folie de l'attitude D'Yseault le mettait maintenant en fâcheuse posture.
Du courage, il n'en avait pas, mais un sens du devoir le poussait à agir comme transcendé par ses galons de sergent.
La femme l'avait touché, et une haine viscérale l'opposait désormais à ce "Matis" qui représentait à ses yeux tout ce qu'il rejetait.
Le pouvoir mal consenti, l'argent comme outils de sa puissance, et les autres être humains comme des pantins, des objets de sa démoniaque emprise.
A la lueur de sa torche , Colvert prit de quoi mener une longue traque, des couvertures de laine, du pain et du lard, son coutelas , son bâton et son bouclier...
Il n'avait pas une habitude suffisante et se sentait hésitant dans ses choix haletant, se maudissant d'autant de lenteur.
De quoi se souvenait-il? Oui la direction prise par Yseault... La neige l'aiderait. Elle aura figé les pas...
La nuit et son silence qui permet d'entendre le moindre craquements.
[en direction de la Forêt]
Colvert sortit de la ville. La noirceur l'accompagnait désormais, lourde et pesant.
Il se mit en quête d'indices, de traces, du moindre détail qui pourrait lui confirmer son itinéraire.
Il mit le genou au sol, tout en animant sa torche de mouvement circulaire comme pour éclairer son environnement.
Là, devant lui des empruntes nettes. Une pointe de pied, bien espacée. Les talons ne touchent pas le sol. Elle coure. C'est elle!
Elle s'arrête, repars, se pose...
Non loin d'autres pieds viennent se mêler.
Colvert ne les avait pas remarquer.
Ce sont ceux d'un homme, des bottes semblables aux siennes.
Son pas est pesant, sa démarche hésitante. Il suit Yseault.
Colvert marche, essaye de comprendre. Et si Grocol était parti à sa poursuite lui aussi! Il n'aurait pas laissé Bilou...
Silence
Des voix... un cheval! Ma torche!
Colvert plonge sa torche dans un congère.
[ à l'approche des ravisseurs]
Courbé, il prit la direction des voix. Des hommes, Yseault...
Pitié Matis
. Toutes autres seraient ravie
. Laisse-moi partir
je ten supplie
.
Colvert était tout proche maintenant, tapit derrière un monticule de branches. Ils sont trois! Trois hommes! Avec Grocol nous pourrions faire quelques chose, la secourir, peut être les dissuader, les menacer...
Colvert sentait son pouls lui tendre sa gorge, son cur lui tapait le sternum et son souffle embrumait l'air froid. Il avait peur, affolé comme prit d'un malaise nauséeux.
Il était là seul!
Tu es sergent tu dois agir...
Personne dautre Yseault
jamais tu mentends ? Tu mappartiens maintenant
Quelquun nous attend pour nous marier aussitôt rentrer
.et ensuite, je te ferais mienne
Ne tavise plus de vouloir méchapper, sinon, mon courroux sera terrible, tu nen a quun aperçu maintenant
Celui là devait être Matis!
Tournant lentement la tête, Colvert l'entrevit entre quelques branches. Sa monture soufflante l'entourait d'un halo vaporeux, lui détachant sa silhouette du fond arboré.
Il tourna la tête de l'autre côté et aperçut ses hommes de mains...
Allez les gars, on lamène et on fout le camp de ce trou à rat !
Il fallait intervenir! Ses jambes ne le poussaient pas, ses bras restaient ballants, la peur le submergeait. Il sortit de sa besace une liqueur des plus fortes qui s'enfila dans une longue rasade. Il n'eut pas le temps de finir...
Désolé de vous déranger messire, mais je ne pense pas que cette dame veuille vous accompagner... alors je vous propose donc une chose simple qui serait de vous retirer rapidement en la laissant ici ... car votre homme qui jonche le sol pourrait mourir dans la seconde.
Syst!
Que foutait-il là! L'homme, les pas... Lui?
Colvert fut pris d'un étrange sentiment... Lui qui hésitait depuis plusieurs minutes à intervenir voyait Systemeur sortir de l'ombre et se poser là devant trois brigands de la pire espèce.
Il était emprunt d'admiration et teintait son jugement d'un doute sur l'état de lucidité de son ami de Troyes.
Mince!
Colvert n'en revenait pas quel aplomb!
Mais t'est taré ou t'a été accouché par le fondement?
Les choses tournaient vinaigre! Instinctivement Colvert s'était saisi de son bâton comme pris par le tourbillon des paroles. Il sentait l'affrontement poindre. La donne n'était plus la même! Syst, lui et si Yseault en profitait pour prendre la fuite!
Colvert se leva d'un bon, surgissant de nul part. Il se dirigeait droit vers les ravisseurs. Son sang bouillait, l'adrénaline le transcendait, ces forces était celle d'un buffle.
Droit, tout droit, bâton en avant. Personne ne le vit arriver.
Tu ferais mieux de te rendre, T'as que deux options: la fuite ou la souffrance...
Il vit l'un des jumeaux se jeter sur Systemeur. Colvert le croisa dans un mouvement synchrone.Le coup fut vif, précis. Le bruit du choc fut monstrueux. Jamais l'homme n'avait eu dans son champ de vision l'attaque surprise de Colvert. Son bâton vint lui briser le bras, lui faisant lâcher son sabre.
L'homme à genoux, se tenait le bras en l'air comme pour exhiber sa fracture, un cri venait de percer la nuit noire!
Pas le temps de réfléchir le deuxième coup vint s'abattre sur la tête du malfrat.
Il lui était fatal, assommé, gisant dans la neige face contre terre, celui là ne devait plus poser de problème.
Deux nous étions deux à présent!
Les malfrats semblaient pétrifiés. Pourtant aucune émotion ne transparaissait comme rodé à ce genre de joute. Le regard de Matis se plongea dans celui de Colvert.
La garde restait en place. Colvert vint se placer à côté de Systemeur.
Il soutenait le regard de Matis et sentit la complicité de Systemeur le gagner.
Messire Matis! Je suis Colvert Sergent de la maréchaussée de Troyes! Mettez un nom sur mon visage! J'ai déjà trop entendu parler du votre!
Tribun, sergent de la maréchaussée, membre de l'équipe des Huns de Troyes et jeune capitaine,buveur sans soif...