Cevanne
Avançant avec prudence depuis la Bretagne dont le renart, son neveu et son valet Maturin avaient fui, le petit groupe égrenait les lieues.
L'Anjou avait été un passage difficile. Pourtant, il sembla au bourguignon que le passage était moins difficile qu'il ne l'avait escompté.
Ils n'avaient croisé que quelques groupes armés, ils n'avaient pas eu a traverser de champs de bataille et n'avaient presque pas été inquiétés.
Il y avait pourtant dans l'air de certaines villes les senteurs étouffantes de souffre, l'odeur de sang et de charogne qui émanait des fraiches tombes de fortune au travers des campagne changées en champs de bataille, souillées du sang des soldats.
En passant non loin d'un camp, ou les pointes des tentes tentaient presque de déchirer les nuages épais qui semblaient mettre en berne un soleil consterné le renart en éprouva quelque remord. S'il avait du combattre, chose improbable, nul doute qu'il serait déjà mort. Un sentiment profond d'inutilité l'abattit.
Dans une auberge non loin de la frontière tourangelle, Maturin obligea le cortège a faire halte. S'il en éprouvait un soulagement au regard de ses membres endoloris de courbatures et du tournis que lui provoquait les longs voyages en voiture, le renart du ronger son frein. Il comptait les jours.
Après sêtre rafraichi, il s'installa a une table pour écrire.
Citation:
A Davia Corsu de Villandry,
Chère Amie,
Je vous écris de *** près de Saumur ou nous prenons un peu de repos. Nous voila près de franchir les terres tourangelles, sains et saufs.
Traverser les terres endeuillées par la guerre m'a fait réaliser le dur quotidien qui est le votre et j'en éprouvai presque une certaine honte.
J'ose espérer que vous êtes remise et très égoïstement que vous êtes toujours au repos. Nous prévoyons d'être a Chinon dans trois jours.
Y etes vous toujours ?
Bien a vous, et que le très haut vous garde.
Severin de Volvent
Il confia le pli a Maturin et la fatigue aidant, s'endormit, fourbu._________________
Davia
Depuis peu, à peine remise de sa blessure, la jeune Corsu avait repris le chemin du combat. Ce soir là, un pigeon était arrivé et l'avait laissé sans voix.
Trois jours, trois tout petits jours et il serait là. D'un coup, un terrible noeud dans l'estomac l'avait fait se courber en deux. Mais pourquoi? Pourquoi appréhendait-elle tellement de le revoir. Elle se sentait à la fois terriblement excitée et en même temps, une peur panique la saisissait. Elle se mordilla les lèvres nerveusement. Il lui fallait réfléchir.
Assise dans sa tente, le parchemin sur les genoux, son sang battait dans ses tempes. La trêve avait été annoncée. Dans trois jours, elle pouvait être à Chavonnière, le fief de son père. La demeure était vide en l'absence du chevalier et son frère étant à Loches, elle pourrait disposer de la seigneurie à sa convenance.
Les mains moites, elle prit parchemin et plume et à la lueur de la torche écrivit rapidement quelques lignes à Circinellu, le gardien du domaine afin qu'il prépare les lieux pour son arrivée.
Citation:Salve Circinellu,
Je serai d'ici peu en notre demeure de La Chavonnière. Faites préparer ma chambre ainsi que celle de Beetista, ma nourrice, qui m'accompagnera. Vous préparerez aussi une chambrée pour l'un de mes amis que nous accueilleront avec son valet. Faites le nécessaire pour que rien ne manque.
Davia Corsu de Villandry
Elle pouvait prendre la route en toute quiétude, elle savait que le garde ferait ce qu'il faudrait. Il lui suffirait de passer par Loches prendre Beetista pour ensuite rejoindre le domaine familial.
L'autre missive qu'elle devait rédiger lui tournait les sangs. Face au vélin vierge elle hésitait.
Une migraine terrible l'assaillit, violemment. Les mains sur ses tempes, elle réfléchissait quoi écrire. Puis, douloureusement, elle rédigea.
Citation:A Séverin Anatole de Volvent.
De Davia Corsu de Villandry.
Mon très cher ami,
Je vous attends en la demeure de mon père, dans sa maison de La Chavonnière. Après Chinon, en remontant le Cher vous trouverez la vicomté de Véretz et surplombant la vallée, vous accéderez à Chavonnière.
Je me languis de pouvoir vous revoir, enfin.
Bien à vous et que le Très-Haut guide vos pas.
Davia
La migraine ne la quittait pas. Il était étrange comme lorsqu'elle pensait à Séverin où lorsqu'elle devait lui écrire, la douleur la saisissait à nouveau, à l'improviste. Elle s'allongea sur sa couche, confiant les missives à un courrier. Le repos lui ferait du bien, même si elle ne devait dormir que d'un oeil. [Trois jours plus tard, Logis de La Chavonnière] Il faisait un grand soleil automnal, la campagne rougeoyait et la jeune blanche était ravie. Chavonnière avait été ouverte et la demeure, bien qu'ayant besoin d'une activité plus fréquente pour rayonner de mille feux, sentait bon le propre. Beetista s'était attelée à la cuisine et préparait un bon souper. Circi avait fait un grand feu dans la cheminée. Les journées à venir s'annonçaient plaisantes, avant le grand froid de l'hiver. Le Seigneur de Chavonnière pouvait revenir sur ses terres, mais avant cela, l'aînée des Corsu avait un ami à recevoir.
Vêtue d'une belle houppelande rouge foncée, elle avait noué ses cheveux en une tresse serrée, agrémentée d'un ruban de velours rouge. Sobre, sans bijou ni colifichet, elle portait sur elle l'austérité corse mêlée à la volupté tourangelle. La jeune fille regardait le feu se consumer dans la grande cheminée du salon. La fin d'après-midi annonçait une nuit froide, mais la pelisse qu'elle portait la protégeait du froid.
Viendrait-il? Serait-il là ce soir là?
Son front se plissa lorsqu'elle pensa que Charles eut pu être présent, auprès d'elle, pour recevoir le Volvent. Mais leur relation n'était pas officielle, elle-même ne savait pas vraiment comment en informer son père. Charles n'était-il pas un vieil ami de son père? Et puis comment qualifier leur relation? Il n'était pas son fiancé, pas son compagnon et son amant... ça elle se gardait bien de le clamer sur le toit, cela aurait frôlé le paroxysme de l'indécence. Alors? Comment en parler? Peut-être au gré des confidences, après une soirée amicale, se confiant à son ami, elle pourrait lui avouer sa relation coupable avec l'hospitalier. Lui, ne serait pas du genre à vouloir souiller sa réputation.
Migraine. Encore??? Elle grimaça, s'appuyant un peu plus sur le linteau de la cheminée. Pourquoi ces maux de tête se multipliaient-ils? Pourquoi se coupait-elle les cheveux en quatre pour savoir comment expliquer à un ami qu'elle avait un amant et qu'elle ne savait pas comment, ni même si elle devait officialiser la relation.
Elle frissonna, un courant d'air frais la faisait grelotter. Elle resserra sa pelisse sur ses épaules et se retourna vivement avec l'impression étrange qu'elle n'était pas seule dans la grande pièce.
Pourtant, elle avait beau scruter les coins d'ombre, il n'y avait personne. Elle se frictionna les bras et regarda à nouveau le feu dans l'âtre. Elle se sentait dans un état étrange, et dans ses tempes, la migraine s'accentuait. La tourangelle s'approcha d'un guéridon et se servit une rasade d'une bouteille de chinonais, là, ça allait mieux. Bientôt il serait là, bientôt..._________________
Gabriel_de_volvent
Beaucoup de temps avait passé depuis le tragique "accident" qui avait couté la vie a ses parents. Gabriel avait dans un premier temps refusé l'evidence. Ses parents allaient forcement revenir! mais quand son oncle arriva au couvent, l'enfant comprit de suite que ce n'etait pas un cauchemard, que cette douleur ne s'en irait pas.
Quand il regardait son oncle, il voyait la blondeur de son pere et les yeux de sa mère. Douleur qui fait du bien, dur de s'expliquer ce sentiment.
La mélancolie de son oncle avait déteint sur lui mais pas totalement. Maturin, était le soleil qui adoucit l'hiver. Oui, gabriel avait besoin de ces deux hommes et les avait aimé dès qu'il les avait vu au couvent.
Quand il regardait son oncle et se perdait dans le bleu acier du Renard, le renardeau se sentait comprit et quand il etait dans les bras de maturin, il retrouvait la chaleur dont a tant besoin un enfant blessé.
Après la Champagne, il avait été amené en Bretagne ou il avait suivit les enseignements de son oncle, mais il continuait de s'entrainer comme il le faisait avec sa mère, avec son baton.
A present, ils etaient en route pour retrouver sa tante Della. Il s'en rappelait comme quelqu'un de gentil .Mais ils allaient faire une halte chez une amie de son oncle. Le renardeau avait bien remarqué l'etat de son oncle mais ne se l'expliquait pas.Il n'avait pipé mot durant le trajet, regardant la route en essayant de ne pas penser.
(Logis de La Chavonnière)
Arrivé devant le chateau, le regard du Renardeau ne savait ou se poser. Quelle architecture!
Bientot la maitresse de la maison apparue. Elle fit grand effet sur gabriel. ce qu'elle etait belle dans sa robe rouge!
Il s'inclina timidement derriere son oncle et resta silencieux à la regarder de ses yeux bleux aciers