Cymoril
Octobre 1457
[Quelques temps auparavant dans une plaine berrichonne ]
Le jeu des lames qui lavait submergée avait quelque chose de fascinant, surréaliste Sélène jouait des ombres et des brillances Dargent éclatant et de pourpre mat. Si elle avait eu une âme de poète elle aurait pu comparer ça à un de ces orages secs dété.
Magnifique et terrifiant.
Toute la beauté du massacre.
En règle.
Sans appel.
Tassée sur elle-même, blottie contre le poitrail de létalon, après que sa targe eut volé en éclats et les bras dans une désespérée tentative de protection la pluie sétait abattue, meurtrière. Elle avait bien commencé à les compter les coups quelle recevait et puis et puis avait fini par en perdre le compte. Pas son truc les maths apparemment Son dos sen souviendrait suffisamment, en lambeaux à force de rage déversée. Sa fine cotte de mailles soigneusement cachée sous sa bure lui avait sans doute épargnée blessures trop incisives, invasives, mais quand même
Quand le silence eut enfin repris sa place, quand les clameurs guerrières se turent et que les maudites frénétiques furent repues, souillées de son sang et de celui de ses compagnons, un frémissement. Un regard presque éteint et une main qui se pose encore une fois sur une encolure ô combien chérie. Une larme qui perle, est-ce à lil du cheval ou au sien ? Elle ne savait plus. Elle le voyait séteindre, son camarguais, ultime vestige dune époque révolue, ce foutu canasson qui ne comprenait que lespagnol. La faute à lAndalou qui lavait dressé pour elle, la petite forgeronne gasconne alors quelle trompait lennui en ce rôle si amusant de tavernière aux côtés dApo Marrant comme la multitude de souvenirs afflue à ce moment précis *Schlack* comme dirait lAutre un autre lien venait dêtre coupé, lâme de Bagual avait rejoint celle de son dresseur, en un ailleurs sûrement meilleur, libres Du moins elle lespérait.
Pour eux.
Et la trame de sa si courte existence qui nen finit pas de se déchirer au fil du temps, irréparable. Le fil des pensées se fait désordonné, chaotique. Forcément. Déjà quen temps normal nimporte quel individu rationnel avait du mal à la comprendre, alors là, comprenez que bon
Là, elle se demande si un certain bucheron avait coupé du bois un jour dans la forêt sombre quils avaient traversé plus tôt dans la journée, sil avait foulé cette même plaine où ils gisaient à cet instant Quil faudrait quelle pense à lui écrire, un truc du genre : "Tout va bien, je reviens bientôt " Et de fil en aiguille sa pensée dérivait, quelque part heureuse davoir missionné Hawk pour une livraison de caillou à une Sur anonyme quelque part au loin, des fois que le faucon eut été pris de lenvie de venir picorer un peu dans sa chair ensanglantée ou pire, quil eut fini comme Bagual, en cible mouvante pour archer désuvré.
Indifférentes à la bucolique scène qui venait de se dérouler, les étoiles poursuivaient leur mouvement au dessus de sa tête.
Moqueuses
Elle pourrait presque les entendre se rire delle, si petite, si fragile
Inutile et impuissante.
Dailleurs quelque part elle sait que lAnanké se joue delle, décide de sa destinée à coups de dés.
Elle pourrait céder, se laisser envahir par ce Néant qui lattend, qui lui tend les bras. Mais malgré cet inexorable sentiment dimpuissance quelle ressent, il subsiste une étincelle. Cette toute petite pointe de fierté à peine visible mais qui suffit à la maintenir en Vie. Elle leur dénie ce droit de soctroyer le plaisir de son trépas. Quand on a approché la Lumière daussi près, à en sentir le souffle sur sa peau. Lui seul en est dépositaire. Et après tout, elle a quelques promesses à tenir et non des moindres, sans compter Serment qui grandit, tapi en son sein
Mais ça cest une autre histoire. A venir. Pour lheure, dormir...
**********
Ainsi elle navait senti les mains secourables de ce paysan berrichon, qui, bravant les armées, avait chargé les corps dans sa chariote déjà lourdement encombrée de sacs de blé pour la capitale. Le réveil au surlendemain fut pour le moins, douloureux. Elle sétait contentée de se changer furtivement, chaque mouvement lui faisant mordre la lèvre jusquau sang. La cotte remisée aux côtés de son épée, les restes de sa bure jetés aux flammes dun feu de camp mourant au petit matin. Plus affaiblie que jamais, ceinture serrée pour que les braies lui tiennent, elle sétait recroquevillée, emmitouflée dans sa cape de laine, lesprit toujours plus ou moins dans la brume. La demoiselle avait compris quelle était la destination, appréciant toute lironie de la chose. Au moins, il ne viendrait à personne lidée daller la chercher là. Même pas à Lui Dailleurs ne dit-on pas que cest ce quon a sous le nez quon voit le moins ? Ou le côté anonyme des grandes cités
Paris donc.
Quartier marchand.
Parfait.
Elle a de quoi soffrir logis et repos pour un temps, longtemps, celui quil faudra. Quelle prendra. Prenant acte dune donnée nouvelle, pas si nouvelle que ça mais quand même si. Cest selon. Là aussi il lui faudra du temps. Celui daccepter, de composer. Et dassumer. Ca cogite, et pas quun peu. Ca compte aussi. Et ça ronchonne en réalisant combien Châtaigne lui manque. De sa faute tout ça. Cest elle qui tenait les comptes dhabitude. Du coup, depuis le Tournoi ben lavait plus vraiment fait attention à un cycle déjà si peu cyclique pour cause de nature perturbée par les maladies Juin, juillet, août, septembre, octobre Sueurs froides sur plaies à vif. Ou comment la terreur essaye de sinstaller, insidieuse
*Une chose à la fois, sinon jvais pas y arriver Dabord, trouver une maison Ensuite de quoi msoigner Le reste Après *
Etonnamment calme, en apparence du moins. Elle maîtrise de son mieux une situation des plus, non, des moins enviables. Et lorsque le paysan sarrête à lentrée des Halles où il est attendu pour sa livraison, elle le gratifie dun sourire sincère, empreint dune reconnaissance rare.
Ce quil y a de bien en ces lieux, cest que lon y trouve ce que lon cherche en un temps très court, tant que cela reste du domaine du normal, légal, enfin mavez compris. Une autochtone connaissance du paysan lui avait tout de suite parlé dune maison, non loin de là, et contre toute attente, elle lavait prise sans même discuter prix, travaux, chaînes câblées (nan jdéconne^^)
Et la voilà se trainant à grand peine, trainant son sac aussi Suivant les indications données.
Il suffit de poursuivre le long de lallée claire bordée de chaque côté par un alignement déchoppes de marché et de déboucher ensuite sur un pont qui enjambe un canal très étroit, où de rares embarcations flottent à la surface de leau noire. Un peu plus loin une voûte de pierre couverte porte lindication à demi effacée de la rue.
Lentrée de la rue était basse et ne faisait guère plus de quatre pieds de large. Elle était pavée de vieilles dalles déformées et brisées, disposées de façon quelque peu fantaisiste, parfois lune sur lautre, de sorte quà la nuit tombée lon pouvait aisément tomber en avançant dans le noir. Peu à peu, la ruelle allait sélargissant et le toit finissait par disparaitre laissant la lumière de jour se glisser le long des murs. Encore une vingtaine de pas et sur la gauche de la ruelle un escalier de vieilles marches usées montait vers une bâtisse.
Trouvé !
Cest là quelle va poser ses valises.
La maison est plus spacieuse que celle quelle avait eu à Labrit, même après les travaux dagrandissement, et larrière cour lui permettrait sans peine douvrir une nouvelle forge. Plus tard. Elle prend tout juste le temps de sassurer dun il las quil ne sagit pas dune entourloupe sur provinciale en détresse, faisant le tour du proprio, puis échangeant la lourde clef contre une bourse conséquente. Tout ce quelle veut, cest quon lui foute la paix. Etre une anonyme comme tant dautres.
Une vaste pièce commune attenante à la cuisine, une réserve, et un escalier de bois menant à létage. Grinçant à souhait Lescalier Tout comme la coursive au plancher de chêne Ouvrant chaque porte, découvrant en douceur chaque chambre tout en scrutant chaque détail, jusquà trouver ce quelle cherchait. Elle choisit donc la sienne, avec une porte communiquant avec une autre plus petite Laquelle contenant le détail qui lui convient. Une trappe discrète menant à aux combles Elle explorera ça en temps et en forme surtout. Tant de choses à faire
Pour lheure, alors quelle redescend il lui semble entendre frapper à la porte Pour la discrétion et lanonymat semblerait que ce soit un peu éventé, à moins que ce ne soit une erreur Elle ouvre donc sur un gamin dont le regard est étonnamment semblable à celui des pigeons de la jouvencelle Vide La demoiselle récupère le paquet et le courrier, lit en vitesse, esquissant un pâle sourire.
Mène-moi à lui
Lordre est simple, et la porte tirée derrière elle. Avec dans lidée de trouver une taverne sur le retour histoire de trouver quelque personne discrète désireuse de partager les frais dentretien de la baraque En plus de son supposé garde du corps
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[Quelques temps auparavant dans une plaine berrichonne ]
Le jeu des lames qui lavait submergée avait quelque chose de fascinant, surréaliste Sélène jouait des ombres et des brillances Dargent éclatant et de pourpre mat. Si elle avait eu une âme de poète elle aurait pu comparer ça à un de ces orages secs dété.
Magnifique et terrifiant.
Toute la beauté du massacre.
En règle.
Sans appel.
Tassée sur elle-même, blottie contre le poitrail de létalon, après que sa targe eut volé en éclats et les bras dans une désespérée tentative de protection la pluie sétait abattue, meurtrière. Elle avait bien commencé à les compter les coups quelle recevait et puis et puis avait fini par en perdre le compte. Pas son truc les maths apparemment Son dos sen souviendrait suffisamment, en lambeaux à force de rage déversée. Sa fine cotte de mailles soigneusement cachée sous sa bure lui avait sans doute épargnée blessures trop incisives, invasives, mais quand même
Quand le silence eut enfin repris sa place, quand les clameurs guerrières se turent et que les maudites frénétiques furent repues, souillées de son sang et de celui de ses compagnons, un frémissement. Un regard presque éteint et une main qui se pose encore une fois sur une encolure ô combien chérie. Une larme qui perle, est-ce à lil du cheval ou au sien ? Elle ne savait plus. Elle le voyait séteindre, son camarguais, ultime vestige dune époque révolue, ce foutu canasson qui ne comprenait que lespagnol. La faute à lAndalou qui lavait dressé pour elle, la petite forgeronne gasconne alors quelle trompait lennui en ce rôle si amusant de tavernière aux côtés dApo Marrant comme la multitude de souvenirs afflue à ce moment précis *Schlack* comme dirait lAutre un autre lien venait dêtre coupé, lâme de Bagual avait rejoint celle de son dresseur, en un ailleurs sûrement meilleur, libres Du moins elle lespérait.
Pour eux.
Et la trame de sa si courte existence qui nen finit pas de se déchirer au fil du temps, irréparable. Le fil des pensées se fait désordonné, chaotique. Forcément. Déjà quen temps normal nimporte quel individu rationnel avait du mal à la comprendre, alors là, comprenez que bon
Là, elle se demande si un certain bucheron avait coupé du bois un jour dans la forêt sombre quils avaient traversé plus tôt dans la journée, sil avait foulé cette même plaine où ils gisaient à cet instant Quil faudrait quelle pense à lui écrire, un truc du genre : "Tout va bien, je reviens bientôt " Et de fil en aiguille sa pensée dérivait, quelque part heureuse davoir missionné Hawk pour une livraison de caillou à une Sur anonyme quelque part au loin, des fois que le faucon eut été pris de lenvie de venir picorer un peu dans sa chair ensanglantée ou pire, quil eut fini comme Bagual, en cible mouvante pour archer désuvré.
Indifférentes à la bucolique scène qui venait de se dérouler, les étoiles poursuivaient leur mouvement au dessus de sa tête.
Moqueuses
Elle pourrait presque les entendre se rire delle, si petite, si fragile
Inutile et impuissante.
Dailleurs quelque part elle sait que lAnanké se joue delle, décide de sa destinée à coups de dés.
Elle pourrait céder, se laisser envahir par ce Néant qui lattend, qui lui tend les bras. Mais malgré cet inexorable sentiment dimpuissance quelle ressent, il subsiste une étincelle. Cette toute petite pointe de fierté à peine visible mais qui suffit à la maintenir en Vie. Elle leur dénie ce droit de soctroyer le plaisir de son trépas. Quand on a approché la Lumière daussi près, à en sentir le souffle sur sa peau. Lui seul en est dépositaire. Et après tout, elle a quelques promesses à tenir et non des moindres, sans compter Serment qui grandit, tapi en son sein
Mais ça cest une autre histoire. A venir. Pour lheure, dormir...
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Ainsi elle navait senti les mains secourables de ce paysan berrichon, qui, bravant les armées, avait chargé les corps dans sa chariote déjà lourdement encombrée de sacs de blé pour la capitale. Le réveil au surlendemain fut pour le moins, douloureux. Elle sétait contentée de se changer furtivement, chaque mouvement lui faisant mordre la lèvre jusquau sang. La cotte remisée aux côtés de son épée, les restes de sa bure jetés aux flammes dun feu de camp mourant au petit matin. Plus affaiblie que jamais, ceinture serrée pour que les braies lui tiennent, elle sétait recroquevillée, emmitouflée dans sa cape de laine, lesprit toujours plus ou moins dans la brume. La demoiselle avait compris quelle était la destination, appréciant toute lironie de la chose. Au moins, il ne viendrait à personne lidée daller la chercher là. Même pas à Lui Dailleurs ne dit-on pas que cest ce quon a sous le nez quon voit le moins ? Ou le côté anonyme des grandes cités
Paris donc.
Quartier marchand.
Parfait.
Elle a de quoi soffrir logis et repos pour un temps, longtemps, celui quil faudra. Quelle prendra. Prenant acte dune donnée nouvelle, pas si nouvelle que ça mais quand même si. Cest selon. Là aussi il lui faudra du temps. Celui daccepter, de composer. Et dassumer. Ca cogite, et pas quun peu. Ca compte aussi. Et ça ronchonne en réalisant combien Châtaigne lui manque. De sa faute tout ça. Cest elle qui tenait les comptes dhabitude. Du coup, depuis le Tournoi ben lavait plus vraiment fait attention à un cycle déjà si peu cyclique pour cause de nature perturbée par les maladies Juin, juillet, août, septembre, octobre Sueurs froides sur plaies à vif. Ou comment la terreur essaye de sinstaller, insidieuse
*Une chose à la fois, sinon jvais pas y arriver Dabord, trouver une maison Ensuite de quoi msoigner Le reste Après *
Etonnamment calme, en apparence du moins. Elle maîtrise de son mieux une situation des plus, non, des moins enviables. Et lorsque le paysan sarrête à lentrée des Halles où il est attendu pour sa livraison, elle le gratifie dun sourire sincère, empreint dune reconnaissance rare.
Ce quil y a de bien en ces lieux, cest que lon y trouve ce que lon cherche en un temps très court, tant que cela reste du domaine du normal, légal, enfin mavez compris. Une autochtone connaissance du paysan lui avait tout de suite parlé dune maison, non loin de là, et contre toute attente, elle lavait prise sans même discuter prix, travaux, chaînes câblées (nan jdéconne^^)
Et la voilà se trainant à grand peine, trainant son sac aussi Suivant les indications données.
Il suffit de poursuivre le long de lallée claire bordée de chaque côté par un alignement déchoppes de marché et de déboucher ensuite sur un pont qui enjambe un canal très étroit, où de rares embarcations flottent à la surface de leau noire. Un peu plus loin une voûte de pierre couverte porte lindication à demi effacée de la rue.
Lentrée de la rue était basse et ne faisait guère plus de quatre pieds de large. Elle était pavée de vieilles dalles déformées et brisées, disposées de façon quelque peu fantaisiste, parfois lune sur lautre, de sorte quà la nuit tombée lon pouvait aisément tomber en avançant dans le noir. Peu à peu, la ruelle allait sélargissant et le toit finissait par disparaitre laissant la lumière de jour se glisser le long des murs. Encore une vingtaine de pas et sur la gauche de la ruelle un escalier de vieilles marches usées montait vers une bâtisse.
Trouvé !
Cest là quelle va poser ses valises.
La maison est plus spacieuse que celle quelle avait eu à Labrit, même après les travaux dagrandissement, et larrière cour lui permettrait sans peine douvrir une nouvelle forge. Plus tard. Elle prend tout juste le temps de sassurer dun il las quil ne sagit pas dune entourloupe sur provinciale en détresse, faisant le tour du proprio, puis échangeant la lourde clef contre une bourse conséquente. Tout ce quelle veut, cest quon lui foute la paix. Etre une anonyme comme tant dautres.
Une vaste pièce commune attenante à la cuisine, une réserve, et un escalier de bois menant à létage. Grinçant à souhait Lescalier Tout comme la coursive au plancher de chêne Ouvrant chaque porte, découvrant en douceur chaque chambre tout en scrutant chaque détail, jusquà trouver ce quelle cherchait. Elle choisit donc la sienne, avec une porte communiquant avec une autre plus petite Laquelle contenant le détail qui lui convient. Une trappe discrète menant à aux combles Elle explorera ça en temps et en forme surtout. Tant de choses à faire
Pour lheure, alors quelle redescend il lui semble entendre frapper à la porte Pour la discrétion et lanonymat semblerait que ce soit un peu éventé, à moins que ce ne soit une erreur Elle ouvre donc sur un gamin dont le regard est étonnamment semblable à celui des pigeons de la jouvencelle Vide La demoiselle récupère le paquet et le courrier, lit en vitesse, esquissant un pâle sourire.
Mène-moi à lui
Lordre est simple, et la porte tirée derrière elle. Avec dans lidée de trouver une taverne sur le retour histoire de trouver quelque personne discrète désireuse de partager les frais dentretien de la baraque En plus de son supposé garde du corps
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