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[RP]Troisième à gauche après le pont... Rue des Tisserands.

Cymoril
Octobre 1457


[Quelques temps auparavant dans une plaine berrichonne…]



Le jeu des lames qui l’avait submergée avait quelque chose de fascinant, surréaliste… Sélène jouait des ombres et des brillances… D’argent éclatant et de pourpre mat. Si elle avait eu une âme de poète elle aurait pu comparer ça à un de ces orages secs d’été.
Magnifique et terrifiant.
Toute la beauté du massacre.
En règle.
Sans appel.

Tassée sur elle-même, blottie contre le poitrail de l’étalon, après que sa targe eut volé en éclats et les bras dans une désespérée tentative de protection la pluie s’était abattue, meurtrière. Elle avait bien commencé à les compter les coups qu’elle recevait et puis et puis… avait fini par en perdre le compte. Pas son truc les maths apparemment… Son dos s’en souviendrait suffisamment, en lambeaux à force de rage déversée. Sa fine cotte de mailles soigneusement cachée sous sa bure lui avait sans doute épargnée blessures trop incisives, invasives, mais quand même…

Quand le silence eut enfin repris sa place, quand les clameurs guerrières se turent et que les maudites frénétiques furent repues, souillées de son sang et de celui de ses compagnons, un frémissement. Un regard presque éteint et une main qui se pose encore une fois sur une encolure ô combien chérie. Une larme qui perle, est-ce à l’œil du cheval ou au sien ? Elle ne savait plus. Elle le voyait s’éteindre, son camarguais, ultime vestige d’une époque révolue, ce foutu canasson qui ne comprenait que l’espagnol. La faute à l’Andalou qui l’avait dressé pour elle, la petite forgeronne gasconne alors qu’elle trompait l’ennui en ce rôle si amusant de tavernière aux côtés d’Apo… Marrant comme la multitude de souvenirs afflue à ce moment précis… *Schlack* comme dirait l’Autre… un autre lien venait d’être coupé, l’âme de Bagual avait rejoint celle de son dresseur, en un ailleurs sûrement meilleur, libres… Du moins elle l’espérait.
Pour eux.

Et la trame de sa si courte existence qui n’en finit pas de se déchirer au fil du temps, irréparable. Le fil des pensées se fait désordonné, chaotique. Forcément. Déjà qu’en temps normal n’importe quel individu rationnel avait du mal à la comprendre, alors là, comprenez que bon…
Là, elle se demande si un certain bucheron avait coupé du bois un jour dans la forêt sombre qu’ils avaient traversé plus tôt dans la journée, s’il avait foulé cette même plaine où ils gisaient à cet instant… Qu’il faudrait qu’elle pense à lui écrire, un truc du genre : "Tout va bien, je reviens bientôt…" Et de fil en aiguille sa pensée dérivait, quelque part heureuse d’avoir missionné Hawk pour une livraison de caillou à une Sœur anonyme quelque part au loin, des fois que le faucon eut été pris de l’envie de venir picorer un peu dans sa chair ensanglantée ou pire, qu’il eut fini comme Bagual, en cible mouvante pour archer désœuvré.


Indifférentes à la bucolique scène qui venait de se dérouler, les étoiles poursuivaient leur mouvement au dessus de sa tête.
Moqueuses…
Elle pourrait presque les entendre se rire d’elle, si petite, si fragile…
Inutile et impuissante.
D’ailleurs quelque part elle sait que l’Ananké se joue d’elle, décide de sa destinée à coups de dés.

Elle pourrait céder, se laisser envahir par ce Néant qui l’attend, qui lui tend les bras. Mais malgré cet inexorable sentiment d’impuissance qu’elle ressent, il subsiste une étincelle. Cette toute petite pointe de fierté à peine visible mais qui suffit à la maintenir en Vie. Elle leur dénie ce droit de s’octroyer le plaisir de son trépas. Quand on a approché la Lumière d’aussi près, à en sentir le souffle sur sa peau. Lui seul en est dépositaire. Et après tout, elle a quelques promesses à tenir et non des moindres, sans compter Serment qui grandit, tapi en son sein…
Mais ça c’est une autre histoire. A venir. Pour l’heure, dormir...



**********


Ainsi elle n’avait senti les mains secourables de ce paysan berrichon, qui, bravant les armées, avait chargé les corps dans sa chariote déjà lourdement encombrée de sacs de blé pour la capitale. Le réveil au surlendemain fut… pour le moins, douloureux. Elle s’était contentée de se changer furtivement, chaque mouvement lui faisant mordre la lèvre jusqu’au sang. La cotte remisée aux côtés de son épée, les restes de sa bure jetés aux flammes d’un feu de camp mourant au petit matin. Plus affaiblie que jamais, ceinture serrée pour que les braies lui tiennent, elle s’était recroquevillée, emmitouflée dans sa cape de laine, l’esprit toujours plus ou moins dans la brume. La demoiselle avait compris quelle était la destination, appréciant toute l’ironie de la chose. Au moins, il ne viendrait à personne l’idée d’aller la chercher là. Même pas à Lui… D’ailleurs ne dit-on pas que c’est ce qu’on a sous le nez qu’on voit le moins ? Ou le côté anonyme des grandes cités…


Paris donc.

Quartier marchand.

Parfait.


Elle a de quoi s’offrir logis et repos pour un temps, longtemps, celui qu’il faudra. Qu’elle prendra. Prenant acte d’une donnée nouvelle, pas si nouvelle que ça mais quand même si. C’est selon. Là aussi il lui faudra du temps. Celui d’accepter, de composer. Et d’assumer. Ca cogite, et pas qu’un peu. Ca compte aussi. Et ça ronchonne en réalisant combien Châtaigne lui manque. De sa faute tout ça. C’est elle qui tenait les comptes d’habitude. Du coup, depuis le Tournoi… ben l’avait plus vraiment fait attention à un cycle déjà si peu cyclique pour cause de nature perturbée par les maladies… Juin, juillet, août, septembre, octobre…Sueurs froides sur plaies à vif. Ou comment la terreur essaye de s’installer, insidieuse…


*Une chose à la fois, sinon j’vais pas y arriver… D’abord, trouver une maison… Ensuite de quoi m’soigner… Le reste… Après…*


Etonnamment calme, en apparence du moins. Elle maîtrise de son mieux une situation des plus, non, des moins enviables. Et lorsque le paysan s’arrête à l’entrée des Halles où il est attendu pour sa livraison, elle le gratifie d’un sourire sincère, empreint d’une reconnaissance rare.

Ce qu’il y a de bien en ces lieux, c’est que l’on y trouve ce que l’on cherche en un temps très court, tant que cela reste du domaine du normal, légal, enfin m’avez compris. Une autochtone connaissance du paysan lui avait tout de suite parlé d’une maison, non loin de là, et contre toute attente, elle l’avait prise sans même discuter prix, travaux, chaînes câblées…(nan j’déconne^^)
Et la voilà se trainant à grand peine, trainant son sac aussi… Suivant les indications données.

Il suffit de poursuivre le long de l’allée claire bordée de chaque côté par un alignement d’échoppes de marché et de déboucher ensuite sur un pont qui enjambe un canal très étroit, où de rares embarcations flottent à la surface de l’eau noire. Un peu plus loin une voûte de pierre couverte porte l’indication à demi effacée de la rue.

L’entrée de la rue était basse et ne faisait guère plus de quatre pieds de large. Elle était pavée de vieilles dalles déformées et brisées, disposées de façon quelque peu fantaisiste, parfois l’une sur l’autre, de sorte qu’à la nuit tombée l’on pouvait aisément tomber en avançant dans le noir. Peu à peu, la ruelle allait s’élargissant et le toit finissait par disparaitre laissant la lumière de jour se glisser le long des murs. Encore une vingtaine de pas et sur la gauche de la ruelle un escalier de vieilles marches usées montait vers une bâtisse.

Trouvé !
C’est là qu’elle va poser ses valises.

La maison est plus spacieuse que celle qu’elle avait eu à Labrit, même après les travaux d’agrandissement, et l’arrière cour lui permettrait sans peine d’ouvrir une nouvelle forge. Plus tard. Elle prend tout juste le temps de s’assurer d’un œil las qu’il ne s’agit pas d’une entourloupe sur provinciale en détresse, faisant le tour du proprio, puis échangeant la lourde clef contre une bourse conséquente. Tout ce qu’elle veut, c’est qu’on lui foute la paix. Etre une anonyme comme tant d’autres.

Une vaste pièce commune attenante à la cuisine, une réserve, et un escalier de bois menant à l’étage. Grinçant à souhait…L’escalier…Tout comme la coursive au plancher de chêne…Ouvrant chaque porte, découvrant en douceur chaque chambre tout en scrutant chaque détail, jusqu’à trouver ce qu’elle cherchait. Elle choisit donc la sienne, avec une porte communiquant avec une autre plus petite… Laquelle contenant le détail qui lui convient. Une trappe discrète menant à aux combles… Elle explorera ça en temps…et en forme surtout. Tant de choses à faire…

Pour l’heure, alors qu’elle redescend il lui semble entendre frapper à la porte…Pour la discrétion et l’anonymat semblerait que ce soit un peu éventé, à moins que ce ne soit une erreur…Elle ouvre donc sur un gamin dont le regard est étonnamment semblable à celui des pigeons de la jouvencelle…Vide… La demoiselle récupère le paquet et le courrier, lit en vitesse, esquissant un pâle sourire.



Mène-moi à lui…

L’ordre est simple, et la porte tirée derrière elle. Avec dans l’idée de trouver une taverne sur le retour histoire de trouver quelque personne discrète désireuse de partager les frais d’entretien de la baraque… En plus de son supposé garde du corps…
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Cymoril
[Une éternité plus tard… le même jour.]


Arrivées.

Elle avait presque fini par désespérer de rentrer en cette demeure dont elle avait pris possession à peine quelques heures plus tôt.
Evidemment il avait fallu faire un détour par le marché couvert. Pensez donc à cette heure tardive trouver un étal de boucher à peu près convenable… ne fut pas une mince affaire et nous ferons l'impasse sur moult détails de marchandage dont elle se serait volontiers passée. Harlem, en dépit de sa migraine, se montrait peu coopérative avec les commerçants, trouvant le défaut pour recaler une pièce de viande, ou celui potentiellement acceptable pour en faire diminuer le prix de façon conséquente. Ou bien était aussi irritable et chipoteuse à cause de sa migraine allez savoir. Toujours est-il qu’elles avaient pièce de viande de belle qualité, ainsi que quelques menus morceaux pour la joue meurtrie de la plus jeune.

Ainsi donc, après toutes ces péripéties, et par un chemin autre que celui emprunté la première fois que la charrette s’arrêta à la petite porte de l’arrière cour. Unique endroit susceptible d’accueillir la charrette qui à n’en point douter ne montait certainement pas les escaliers.
Une Fourmi saute de la charrette.

Bon, d’accord. Elle se laisse lamentablement glisser, tentant de s’éviter quelques douleurs supplémentaires, avant d’ouvrir la porte et lançant à Harlem :


Bon.
C’est pas que, mais si tu dois décharger, dételer et tout le tintouin… A ta place j’attendrai la fin de l’averse.


Avant de s’engouffrer dans la cour, à petits pas, bah oui, manquerait plus qu’elle se vautre dans une flaque, et d’enchainer avec la porte de la cuisine. Qu’elle a réussi à trouver du premier coup. Parce qu’ouvrir la réserve, ou autre dépendance, bah elle aurait pas eu l’air d’être chez elle, donc forcément… Enfin. Laissons là ces considérations qui ne préoccupent de toute façon que la pauvre cervelle embrumée de la demoiselle en question et passons au reste de l’action.

A l’intérieur, une lampe à huile s’éclaire, suivie d’une autre, et enfin l’impression d’être à l’abri. Tranquille. Enfin, pour ce que ça vaut. Elle a comme l’impression quand même que la soirée n’est pas terminée et qu’elle risque d’avoir besoin elle aussi d’un truc pour la migraine et autres céphalées avant d’arriver à se glisser dans un lit.


Et tu restes combien de temps sur Paris ?

Autant le savoir avant d’entamer la visite guidée.
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--Harlem..s
Arrivées...

A bon port, quelques achats enfuis, sous cape on en rit, bourse à la valeur ajoutée en facéties d'économies... Harlem définitivement acquise aux chiffres et à la Raison, en pied de nez illogiques. Puisque la vie est un jeu, jouons même les cartes interdites. Rions d'être condamnés à mourir à quoi bon sursoir toujours à l'échéance, priant le sursis ? Comme des mendiants quémandant une poignées d'encores. Méprisables personnages.Harlem a une approche radicale.

Peu importe l'heure. La maudite. Pourvu que se soit intense.

Oui cette jeune personne de seize années est d'un cynisme absolu. D'un fatalisme insolent poussant même le vice à défier l'hypothètique. Juste pour voir.

Ainsi elle aborde les lendemains coeur léger et serein, nez en l'air. Faisant des affaires pour se donner les moyens dans ce monde où tout se crée du labeur. Pour l'heure elle se gele, grelotte tout ce que sa tenue pleure de rigoles goutantes. Mais la charette a fini par entrer dans cette sorte de grange mitoyenne. Et de la mule elle s'occupe en premier, utile à préserver. Elle passe une dernière poignée de paille sèche sur la robe d'une monture sans doute plus chanceuse qu'une autre.

T'y comprends quelque chose toi ?

Un grain de voix félé, qui s'est brisé un jour quelque part, peut être sur le Premier cri toute étonnée d'être née. Horrifiée d'avoir échouée ici bas qui sait ? Une intonation naturellement basse sans doute parceque ce qu'elle a à dire mérite d'y préter oreille. Ou pas. C'est selon.

La mule ne répond pas déjà occupée à son diner. Harlem soupire et avec la satisfaction de l'accompli rejoint donc la cuisine, poussant une sorte de malle qui semble voir fait le tour du monde. La sienne. Celle qu'elle avait déposé là...L'explication se passe de commentaires et tout détail serait franchement ostentatoires. Refermant porte, mise à barre, lourde comme jamais, la cape rejoint un dossier de chaise et ne serait la décence ou chez elle qu'elle enleverait bien tout. M'enfin elle n'est pas chez elle.

Air un peu géné.

Ben en fait quelques temps quand même...Demain j'ouvre une taverne. Avec l'associé
Je te dois dix écus au fait..



Harlem regarde la malle avec un petit sourire contrit.

Je savais pas trop où aller alors...Je t'ai suivi depuis les portes de Paris et enfin voilà...Après le Théatre j'ai eu de la chance mais j'avais un peu prévu de venir ici. Juste pour cette nuit hein ? Enfin si je te dérange pas trop.

Dehors il flotte toujours autant.

Atchoum!

Harlem s'assoit " floc" et dépose sur la table petit pot, once en sachet et dix écus.

Pas cher.

Elle admire cet objet si joliment peint.
Gelée mais contente.
La tête dans un étau mais un toit au dessus.
Un peu perdue...Des mois sur les grands chemins...
Dis madame la Fourmi comment ça marche une maison ?
Harlem baille retrouvant le geste de se frotter les yeux fatigués après une trop longue veille.


C'est grand chez toi.

Comprenez : Est ce qu'il y a de la place pour moi ?
Cymoril
Certains gestes acquis par une sorte d’habitude, comme de relancer le feu en cuisine et de mettre de l’eau à chauffer en attendant le repas. Avant de glisser un regard amusé sur la malle usée. Sans émettre le moindre commentaire sur une fermeture de porte qu’elle ne comprend pas. Un jour il faudra qu’elle explique cette sensation d’enfermement qu’elle ressent quand les barres sont posées, comme si l’on voulait refermer la cage et jeter la clé… Elle s’ébroue et tord la longue tresse qui rassemble sa chevelure, ramenant une mèche collée sur la joue derrière l'oreille, tout en se demandant si les pansements auront survécu à l’averse.

Ah ? Une taverne… J’comprends… Un commerce assez rentable pour peu que les repas soient corrects et les prix pas trop rédhibitoires…

Un sourire lui échappe, qu’elle aimerait réprimer pourtant. Histoire de passer pour la grande pour une fois.


A tes souhaits…
Et t’inquiètes pas trop, comme tu l’dis, la maison est grande…
Tiens, si on te trouvait une chambre, que tu puisses te changer pendant que l’eau chauffe pour la tisane…


Un pas las mais décidé qui s’emboite hors de la cuisine pour traverser la grande pièce du bas. Encore quasiment vierge de tout ameublement ou décoration… Ce qui lui convient assez bien d’ailleurs, son côté spartiate sans doute. Se dirigeant vers l’escalier, lampe à la main.


Les chambres sont en haut…

Oué, on s’en serait douté. Les marches sont avalées, à petits pas, jusqu’en haut. Et au couloir. Et aux dites chambres… première porte qu’elle ouvre, laissant Harlem jeter un œil, avant de passer à la suivante. Même sort.

Voilà…
Ces deux là sont libres, prends celle que tu veux… Installes-toi et redescends quand… bah quand tu veux en fait…


Troisième chambre, où elle s’engouffre pour se changer.
Fouillant dans son barda pas encore vidé pour y trouver du linge sec. Avant de jeter dans un coin ses vêtements trempés, un drôle d’air en regardant la chemise prêté par l’apothicaire… Braies propres et sèches enfilées, une vieille chemise passée avec difficulté par-dessus les bandages. Serrés. Et à peine humides…
Cheminée rallumée et un air qui commence à se réchauffer plus loin, c’est pieds nus qu’elle ressort de sa chambre. Avant de redescendre, un détour à la dernière porte dont elle s’assure la fermeture d’un tour de clé. En poche.


Direction la cuisine.

Et si ce qu’elle pressent est juste, autant se mettre au repas sans attendre.
Gestes simples et mécaniques, depuis longtemps inusités et en même temps si peu familiers. La Fourmi est encore gauche par moment à cet exercice, même si elle s’était longuement entraînée pour satisfaire les besoins d’un estomac qui n’était pas le sien.
La pièce de bœuf est rapidement débitée en dés puis jetée en chaudron afin d’y revenir en grésillant. Un oignon émincé vient rapidement la rejoindre, provocant quelques reniflements au passage. Quelques touillages de cuillère, et le contenu d’une vieille bouteille de cidre dénichée miraculeusement vient humidifier le tout. La brunette rend grâce à la cuisinière précédente qui a laissé nombre bocaux… Un départ précipité sans nul doute… Des marrons… qui n’attendaient que de déclarer leur flamme à cette viande… Quelques herbes aromatiques, quelques épices… Et un fumet délicat qui tend à se répandre… Une dernière touche, de champignons, et que la fête commence… Enfin la cuisson.

L’eau a fini de bouillir, et a rempli deux tasses sur la table. Une pincée de tisane lancienne dans chacune…
Une tête qui repasse la porte et lance en direction de l’escalier d’une voix claire :


Harlem ?
Tout va bien ?

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Cymoril
Parce que rien n’arrête la course du Soleil…ni les cauchemars...


Deux mois depuis le fâcheux croisement en Berry. Deux mois environ qu’elle se terrait là. Entre une convalescence qui l’avait empêchée d’aller à son gré et un mal grandissant qui la forçait à réévaluer tout ce qui constituait son existence. Enfin disons que ça lui était source de grande perturbation.

Les journées s’étaient écoulées avec une lenteur effrayante, comme si le monde lui-même avait voulu la punir pour quelque raison obscure. Entre études monotones et projets à l’abandon, une silhouette maigre, à un détail près, hantait les lieux. Si le jour elle arrivait encore à donner le change et faire illusion, ses nuits avaient vu le retour des cauchemars. Si au début ils étaient peuplés de bruits et images de batailles ensanglantés, ils avaient pris au fil du temps un aspect moins guerrier, plus intimiste. Emplis de petits phrases soufflées par l’auguste Mnêmosunê, plus sadique que jamais.

Chaque aube la laissant dans un état de questionnement irraisonné plus profond que le précédent. Alambiqué, tortueux. Un genre de Nirvana à l’envers. Alors que dans un demi sommeil, ou bien était-ce une forme de sommeil éveillé, elle se torturait malgré elle des méninges déjà passablement atteints.

"Ma fourmi !" qu’il disait… c’est lui qui lui avait attribué ce sobriquet ridicule… Pourquoi d’abord ?… C’est moche et tout p’tit une fourmi… Commune… par centaines, par millions… Misérable insecte sans intérêt, dont la maigre carapace peut céder au moindre coup pour peut qu’il soit porté là où il fallait… une fourmi, ça ne réfléchit pas, ça se contente de suivre bêtement les ordres… perdue dans la masse… Renvoyée à une condition de pas grand-chose valant encore moins…
Et la raison tentait de refaire surface, soufflant que c’était idiot, que s’il avait pensé ça, il serait pas son compagnon depuis…

Enfin, entre raison et folie la frontière est si mince dans cet esprit fourmiesque. D’ailleurs si elle se planque là, c’est aussi à cause de lui. De quoi aurait-elle l’air s’il la trouvait ? D’une fille quelconque, bêtement engrossée, comme une vulgaire paysanne…

"Rien n’achète l’estime de soi"… Grinçant souvenir qui revenait, confortant le malaise profond, se mêlant à d’autres phrases, dont le poison insidieux n’en finissait de la ronger, "Toujours n’existe pas"… allant croissant avec le temps, revenue à la seule vérité qu’elle se connaissait… Inutile et impuissante, luttant avec ses armes, de plus en plus faibles… Se rajoutait ensuite la voix d’une Sœur au travers de quelques lignes griffonnées, "En vie… mais reste loin d’moi"… Comme elle la comprenait… comme elle les comprenait.

L’esprit, le peu de bon sens qu’il lui reste, s’insurge, lui hurle qu’elle se trompe comme toujours… que non… mais même si elle tente de se raccrocher à d’autres mots, à autre chose que les mots, même ce qui devrait la réconforter ne fait que lui apporter d’autres tourments… "Fatale et dangereuse"… Fourmi femme fatale et dangereuse… et la torture reprenait de plus belle, cherchant à comprendre ce qu’il avait pu vouloir dire… Et le ciel sait à quel point elle peut être imaginative.

Ainsi ses courtes nuits lui apportaient-elles moins de repos qu’elles n’auraient du, et la laissaient au petit jour en sueur, tremblante alors que Serment croissait, indifférent et pour cause. Les jours eux... Paisibles... Silhouette soigneusement dissimulée sous une bure de pénitente, tenant contre vents et marées cette promesse idiote ne succomber aux paradis artificiels... A portée pourtant... Si proches, si tentants...

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Cymoril
Et les jours s’égrènent, froids, gris et pluvieux sur la capitale.


Sa colocataire vaque à ses occupations, discrète. Laissant champ libre à la fourmi. Faut-il être un peu secoué…^^

Cette dernière a continué d’organiser son existence, faisant rapatrier de sa dernière adresse l’ensemble de ses biens. Elle les avait trimballé depuis la Gascogne ces fichus meubles, pas pour les laisser pourrir en Franche Comté dans un garde meuble à deux deniers… Le lit avait enfin trouvé sa place et elle ne pouvait s’empêcher de passer une main caressante sur la table à chaque fois qu’elle passait à côté.
Une fois cela fait, elle du bien se rendre à l’évidence… Les études avançaient bien… mais il lui fallait plus. Aussi se décida-t-elle à enfin aménager cette forge, certes plus petite que l’ancienne, à moins de pousser les murs et là, ben le voisinage serait p’têt pas tout à fait d’accord, mais passons.

Sa vie parisienne prenait forme, bien qu’elle n’y participa guère dans la mesure où elle ne mettait quasiment pas le nez dehors. Pourtant, ce matin là, elle se lança. Façon de parler, elle va pas se balancer du haut des escaliers de la ruelle, ça ferait désordre en cette période festive, et puis mal aussi… Cape chaude soigneusement rabattue sur sa bure, la petite silhouette sort enfin de la maison pour affronter le monde… (ça c’est pour donner un air de suspense dramatique à la chose^^)

Là s’étend le marché, lieu attirant où se mélangent les voix, les bruits, les odeurs et les couleurs en un mouvement plein de vie.
Marchands orientaux qui apportaient du mobilier splendide et des objets ouvragés à destination des plus riches du royaume, et présentaient aussi verreries miroitantes, pierres précieuses, parures finement travaillées et des tapis si merveilleusement tissés qu’ils semblaient avoir été fait par magie.
D’autres présentaient de la soie, du coton, des œuvres calligraphiques et picturales de grande beauté. Plus loin un étal proposait des bibelots anciens venus de pays dont les noms empruntaient au légendaire.
Elle dépasse un marchand qui fait la sieste dans sa charrette, certainement satisfait de ses ventes ou alors pas tout à fait remis d’une soirée trop arrosée, allongé sur une couche de paille dont son âne mange quelques brins. Sourire effacé au croisement de quelques matrones, paniers aux bras, elles examinent les étals, disputent les prix ; là un capucin barbu fait son choix tandis qu’à côté des hommes discutent à peine dérangés par une bande de galopins traversant la foule des badauds en courant.

Vivant.

Et elle se sent en total décalage avec ce monde qui bouge, fragile… Souffrant de ce bain de foule, accablée par le tumulte de voix. La sortie est somme toute assez peu concluante, la demoiselle s’étant contentée d’acheter quelques denrées, et de repérer les échoppes des menuisiers…Pour plus tard.
Retour à la case départ. La maison.

Première étape, la cuisine.
Curieusement, cette occupation qui la rebutait est devenue une routine rassurante, et pendant que les pigeonneaux au gingembre achèvent de cuire, elle sirote un vin chaud, se laissant gagner par les bienfaits de la boisson, les épices… Restant songeuse un moment, puis se levant d’un bond, comme prise d’un élan soudain. D’un pas rapide elle regagne sa chambre, jetant sur un coffre sa cape, avant de farfouiller dans un autre pour un extraire l’objet convoité. Ou plutôt la panoplie complète de la petite forgeronne. Des mois qu’elle n’a plus fait ça. Sa dernière épée forgée est là, dans ce coffre, attendant son destinataire, du sur mesure. Tablier de cuir passé, gants en main, elle retraverse la maison d’un pas décidé, avale les quelques mètres de l’arrière cour.

Un sourire inspiré aux lèvres. Elle ne s’était pas contentée de ramener ses meubles, toutes ses réserves de bois et de minerai l’avaient suivie. Le feu est lancé, le soufflet s’active, la tâche est longue, fatigante, mais elle a toujours aimé ça. Rajoutant bûche après bûche, alimentant le fourneau, attendant que les braises soient suffisantes. Il fait si chaud, elle est si bien…
Fixant le cœur dansant des flammes, se laissant happer par la magie de la fournaise tourbillonnante, fascinée comme depuis la première fois où elle avait travaillé dans une forge, au point d’en oublier soucis et pensées du quotidien.
Le mouvement incessant la plongeait dans un état second, léthargique. Hypnotisée, émotions, sons et images se succédaient, s’entrechoquaient, sans rapport, sans cohérence, flottant au dessus des flammes, l’appelant, aux frontières du conscient…
Le feu crépitait et une gerbe d’étincelles en jaillit, alors qu’elle s’en était rapprochée, dangereusement, sans même s’en rendre compte. Le regard fixe sur les braises palpitantes. Une bourrasque s’insinue, gémissante dans le conduit, ravivant de plus belle le feu et faisant rejaillir une crinière de flammes sinueuses qui s’étirent et lèchent les parois de pierre…

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Cymoril
[Ca brûle, ça fait mal et ça commence à fissurer sévère…]


Les premières étincelles se heurtent au cuir du tablier et à celui des gants, rebondissent et meurent avant même d’avoir atteint le sol. Y a-t-elle seulement prêté attention ? Sa farouche détermination et sa combativité semblaient l’avoir déserté, laissant place à une expression rêveuse.
Les flammèches continuaient de lancer leurs bras vers elle, tentacules incandescentes et magnifiques. Les divinités du feu semblaient les guider… Héphaïstos voulait-il la punir de l’avoir si peu honoré depuis la Gascogne ? Ou bien était-ce Hestia qui voulait la renvoyer au loin, la jugeant tellement inapte ?

De la morsure du feu sur son bras alors que sa chemise s’enflamme ou bien de la violente douleur qu’elle ressent dans le bas ventre, on ne saura jamais vraiment ce qui la sort de sa léthargie. L’espace d’une seconde elle reste encore fascinée, admirative de cette torche flamboyante qu’est son avant bras droit… avant de réaliser et de le plonger dans le seau d’eau posé tout à côté.

Elle s’assied dans un coin, interdite… Si elle n’est même plus capable d’exercer… Mâchoires serrées et larmes de rage qui s’échappent un instant, avant qu’elle ne se lève et ne jette le contenu du seau sur les flammes… et n’envoie le seau voltiger à l’autre bout de la pièce et de quitter la forge pour regagner la maison. Alors qu’elle traverse la cour, elle marmonne, serine à voix basse, le timbre éteint… "Décidemment ma pauvre fille, tu n’es plus bonne à rien… Plus bonne à rien… à rien de rien…"

Arrivée dans la cuisine, les gants atterrissent sur la table d’un geste las, bientôt rejoints par le tablier. Un œil aux pigeonneaux dont le fumet léger embaume la pièce, et le feu est éteint là aussi. Un autre coup violent déforme son ventre, et instinctivement alors qu’elle grimace autant de surprise que de douleur sa main se porte sur la pointe qui ressort au toucher. Pied ? Coude ? Peu importe. Il suffit à la faire asseoir et lui faire dire à voix basse : "Calme-toi Fourmilion, c’est pas l’heure… En même temps, vu le rapport ventre-taille, faudrait pas que tu fasses des heures sup hein… déjà que j’dois manœuvrer pour arriver à me sortir du lit… " Ouaip, même qu’elle a l’air carrément ridicule la pauvrette, un peu comme une tortue retournée sur la carapace et qui brasse l’air avec ses p’tites papates…

Un picotement vif lui rappelle que son bras de chemise n’est plus que ruine. Décidemment, si elle n’avait déjà un surnom, on pourrait l’appeler la maudite des chemises… Sa main gauche quitte la rotondité qu’elle caressait pour décoller les restes de tissu calciné de son avant bras. Hum… la brûlure n’est que superficielle, enfin… dépend des endroits mais rien de trop méchant apparemment. Elle soupire, lasse, vraiment lasse. Et poissarde…

La poisse… Cette brume grise qui la poursuit depuis quelques temps. Depuis qu’elle est sans nouvelles de lui. Contre elle, elle ne peut rien faire, on ne lutte pas avec la malchance. On l’accepte comme une donnée pouvant déterminer l’issue du combat. Une façon d’apprécier encore plus quand cela tourne en notre faveur. Mais tous les combats étaient perdus depuis si longtemps…

Un élancement, avant qu’elle ne se remette à gamberger, salvatrice souffrance qui lui rappelle qu’elle est en vie, même si elle n’est pas très en phase avec le reste du monde ces derniers temps et la force à se secouer un peu. Et à jouer les petites apothicaires, autant que les études servent… Eléments à mélanger, de ceux que l’on trouve en cuisine pour les soins rapides. Et sous le pilon commencent à rendre leur essence lavande et arquebuse, un peu d’huile d’olive, parce que dans la maison on ne lésine pas et sans en faire étalage on s’offre quand même ce qu’il y a de meilleur, et bientôt une espèce de pâte est produite. De la pointe d’un couteau elle entaille le bas de sa chemise, autant recycler, et y découpe une longue bande de lin. La mixture pâteuse s’étale alors sur l’avant bras, maintenue en place par l’enrubannement. Un bras de fourmi momie, un inédit !^^

Et adiù la prudence, elle réchauffe le vin aux épices, et s’en ressert un gobelet. Reprise de la pose assise bien sage, évite de penser, t’as pas faim toi, broaf… tout en sirotant son verre.

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Cymoril
Combien de temps s’écoule ainsi ? Secondes, minutes, des heures peut-être ? Elle a perdu toute notion de durée… Le fumet s’est dissipé et l’air s’est refroidi dans la pièce depuis qu’elle est assise là. Du bout du doigt elle suit les lignes sinueuses d’un nœud sur le bois de la table, absente, esprit poussé dans ses derniers retranchements, aux frontières de la bascule. Tant de choses évoquées par une simple table…

Prenant appui sur le plateau de bois, elle se lève, le mouvement est lent, lourd de lassitude. Laissant la place vide et regagnant la chambre dans un silence sépulcral, épaules basses. Ses vêtements échouent là où elle les laisse tomber sans un regard et c’est une mécanique qui se saisit d’une chemise propre et s’en revêt avant de se glisser sous les draps.
Mais Morphée n’est qu’un infâme tourmenteur qui lui façonne des nuits plus pénibles que jamais.

Des façades de granit poli bleu pâle, une enfilade interminable de rues de maisons décrépites pleines d’enfants enjoués et braillards, et une ruelle tortueuse qui grimpait. En bout, une petite place, pavée de grès, un orme et un puits en son milieu.
Un garçon portant un masque d’animal hirsute et basané et qui marchait comme s’il avait eu aux pieds les sabots du dieu Pan s’avance en sautillant vers elle, semble la regarder un instant puis repart en éclatant d’un rire sardonique.

Tout redevient noir. D’un froid abyssal… Et cette voix qui la fait frissonner jusque dans son sommeil, résonnant dans sa tête, chaque mot faisant mouche "Sorcière...Va donc trouver baquet fumant et bûcheron à mettre dedans.Tu lui accorderas à peine plus que ce que tu m'as accordé, Ô fidèle et vertueuse épouse..." Poison insidieux continue de faire son chemin, gagnant chaque jour un peu plus de terrain. Une autre, venue d’un ailleurs plus lointain, portée par les vents assassins piquait encore plus à vif, instillant à son tour "A ton lit défait ne valaient pas un clou, ni la valeur ajoutée..Ô problème"

Et l’esprit se rapproche un peu plus du bord du précipice de sa propre folie, cognant en tous sens… la main se pose sur le ventre dans le sommeil, et l’âme en tourment ressent les palpitations et les ondulations de cet être qui l’habite… et si et si… Et s’il avait toujours su, bien avant elle, et que c’était ça les raisons de son interminable silence… et si et si… elle oubliait que c’est elle qui se cachait depuis des mois, et si tout était de sa faute à ELLE… Avoir eu envie de Lui, de l’Autre… elle avait douté, péché par manque de confiance… et tout le monde sait qu’une femme qui a péché accouche d’un monstre, diable ou animal. Une femme insecte abjecte ne pouvait donner naissance qu’à une abomination… et il devait le savoir…


Le cri qui retentit dans la chambre est empli de terreur. Assise, en sueur elle tremble, incapable de raisonner.
Que ne l’avait-il tué au premier jour… Non, évidemment… Cela eut-été bien moins intéressant, moins amusant.
Le regard se fixe sur un point du mur jusqu’à ce que le souffle se calme, que les tremblements s’amenuisent, jusqu’à ce qu’enfin il prenne un air de froide folie. Maintenant elle sait… Un rictus d’ironie… Un jour, un pont, et il sera satisfait où qu’il soit.

Gestes d’une monotone routine que de se vêtir et de jeter quelques affaires dans un sac, puis de descendre picorer un bout de pain en cuisine. Nourrir la chose avant de s’en défaire. Le paquetage est ficelé. Léger pour un corps au bord de la rupture.

Du perron un regard sur le firmament brumeux et scintillant de la capitale. Parfois il lui semble qu’elle se tient à égale distance de tous les points de l’horizon, et que là sous ses pieds la Cité endormie ronronne. La ville s’offrait à son regard, et ses murailles et ses tours se fondaient imperceptiblement dans la blancheur environnante de la terre et du ciel.
Un volatile sans intérêt quitte sa main, porteur d’un message tout aussi dénué d’intérêt pour l'ensemble des mortels:


Citation:
O Spadassin de mon cœur,
Tout va bien, ne t’en fais pas.
Je reviens bientôt.
Ta Fourmi…


Un pieux mensonge, mais qu’aurait-elle pu écrire d’autre ?
Le soleil ne tarderait pas à glisser ses rayons froids sur les toits parisiens et déjà l’on entendait les échos des premiers étals qui s’ouvraient au marché. Il était temps pour elle… Quitter la ville, sortir des murs qui l’étouffaient et… Elle ne sait pas, elle n’a jamais su… Et ça n’a aucune espèce d’importance. Tant que ses pieds la portent…

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Cymoril
[C'est là que ça se gâte...]

C’est au plus profond de la forêt qu’elle a trouvé refuge pour la nuit. En dépit du froid mordant de l’hiver, c’est là qu’elle se sent à l’abri. Loin de ses congénères et de ce monde insensé. Calée entre les grosses racines moussues d’un chêne plusieurs fois centenaire, la brunette s’est ensevelie sous sa grosse cape de laine et plusieurs couvertures de facture grossière. Inconséquente certes, mais quand même. La route elle connait et elle fréquente assez peu les auberges miteuses aux abords des villes croisées pour être équipée correctement. Son regard se perd sur les flammèches qui s’échappent de ce feu qui crépite, sursautant un peu à chaque craquement de ce bois humide dont elle l’a nourri…

Le passant ne verrait là qu’une petite jeune femme recroquevillée sur elle-même, de grands yeux sombres presque devenus trop grands à force de cernes bleues pour ce visage émacié d’une pâleur extrême. Mais s’il la voyait de plein pied, alors il verrait… tout d’abord un ventre et quelques secondes plus tard seulement il remarquerait le corps malingre qui semblait faire partie de la même entité que la proéminente protubérance. Le tout mal dissimulé sous une bure informe et aux couleurs passées.
Depuis des semaines elle n’est plus capable de tenir en selle, trop douloureux, et trop risqué. Alors elle s’use à marcher encore et encore, c’est comme cela qu’elle a traversé ses terres natales. A Lui. Sait-on jamais… des semaines qu’elle se nourrit dix fois pas jour, deux bouchées à chaque repas, et pourtant elle est sans force. Comme si cette chose qui grandissait en elle, se nourrissait d’elle en bon parasite, écrasant son estomac au point qu’elle a l’impression que les aliments s’arrêtent à mi parcours.
Et pourtant, à chaque mouvement qu’elle sent, chaque fois qu’elle pose sa main sur son ventre, et malgré la peur panique de devenir mère qu’elle ressent toujours, la jeune femme ne peut empêcher ce sentiment de l’envahir. Elle l’aime. Parce qu’il est un bout de Lui. Parce que c’est un garçon elle en est certaine et qu’il sera grand et fort comme son père, forcément… Si c’était une fille elle serait petite et fragile à l’image de sa mère, sans intérêt.
Enfin, ça c’est dans les bons jours…

Comme elle se sent pathétique à cette heure. Elle qui s’était jurée de ne jamais vouloir paraître devant Lui dans cet état… était tout simplement morte de trouille et donnerait n’importe quoi pour retrouver le ton rassurant de sa voix, la chaleur protectrice de ses bras… Pauvre fille qui veut une chose et son contraire. Certes elle connaissait les gestes, comme toute personne du sexe féminin. Toutes les fillettes de la roture avaient assisté à des accouchements, cela faisait partie de la vie tout simplement… Mais entre être spectatrice et protagoniste, y’a une très nette différence. Comme elle le maudissait par moments de lui avoir joué ce sale tour… Lui et ses bons conseils…Arrête de prendre tes cochonneries d’herbes, tu vas te bousiller la santé… Par contre lui refiler une maladie longue durée potentiellement mortelle ça… Lui avait pas trop posé de problème. Fatale et dangereuse qu’il avait dit… Fatalement stupide et définitivement dangereuse mais uniquement pour elle-même. Frôlant les portes de la folie dans les pires moments, quand ses peurs rejaillissaient au cœur de la nuit.

Une douleur la transperce, coup de poignard dans le bas du dos. La main instinctivement cherche la source. Mais d’origine externe il n’y a… Et sa conscience malmenée lui rappelle sa pitoyable condition. Des jours déjà que le drame se profile et la maison lui semble encore si loin…
Mâchoires qui ne desserrent plus, elle se relève péniblement appuyée au tronc de l’arbre, cherchant peut-être à y puiser des forces. Rassemblant ses quelques affaires avant de prendre sa monture d’occasion par la longe et de reprendre la route par nuit noire. Au loin, une meute hurle avant de partir en chasse

******************

Presque deux jours qu’elle marche sans quasiment prendre le moindre repos quand elle arrive enfin en vue de la maison.
La porte est poussée et le canasson abandonné en arrière cour sans le moindre soin. Qu’il crève de faim ou de fatigue elle s’en fout, il n’est que viande sur pattes. Et lorsque qu’elle entre enfin dans la cuisine, grimaçante et épuisée, laissant tomber ses sacoches au sol pour allumer le feu et mettre de l’eau à chauffer, dans ses yeux une lueur jusqu’alors inconnue.
Attention danger…

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--Harlem..s
Une Harlem à livres d'études ouverts se tenait dans la cuisine, studieuse dans l'espace abandonné. Le nez penché sur les cours de navigation, travaillant d'arrache pied ses connaissances.
Un mode ermite, une envie de silence l'avait tenu en la maison, au chaud, au sec. Harlem pouvait se suffire à elle même des mois entiers et oublier facilement que dehors existait...

Elle était là, visiblement, sans que l'on sache depuis combien de temps, d'ailleurs ce n'était guère important.
C'était peut être une trève salutaire après quelques facéties. Les gens ont si peu d'humour quand il s'agit de marchés aussi...
Elle n'avait pas l'air coupable se ceux qui se cachent. Juste l'air sage, tranquille, attentive à ces lignes qui se devaient retenir.

La porte grinça sans qu'elle l'entende vraiment, comme toujours, elle se recroquevilla un peu plus au courant d'air bien froid qui s'invita dans la demeure. Gromellant vaguement dans ce fauteuil où elle avait élu domicile, près du feu.

La visite faisait du bruit, harlem leva le nez, sans s'interroger sur la silhouette. Elle était chez elle. revenue comme on revient toujours. Au petit jour, chargée de besaces.
La marchande la regarde calmement. Un sourire qui se veut accueillant.

Oh! Bonjour.
Tu as fait bon voyage ?
Laisse...


Harlem désigne l'eau qui a été mise à chauffer.

Je m'occupe de nous faire une tisane, t'as l'air fatiguée.

Le Livre est replié et abandonné sur le fauteuil, elle se lève, ne peut que remarquer cette protubérance ventrue qui pare la dame...

Pfiou...Je me demande comment tu peux encore marcher...

C'est juste une réelle interrogation, Harlem est impressionnée.

C'est pour quand ?

La voilà qui se met à vaquer sereinement dans la cuisine...Elle est contente de revoir la Fourmi.
Cymoril
Un sursaut alors que la voix d'Harlem se fait résonnante dans la cuisine. Pas vraiment à cause du timbre de voix éraillé, plutôt que ça fait longtemps qu'elle évite ses congénères. Au Berry les arbres lui ont suffit, et le reste du chemin, un canasson sans intérêt à qui elle n'a daigné adressé le moindre mot. N'est pas monture andalouse qui veut...

Enregistrant les paroles lâchées, elle délaisse l'eau chauffante pour retourner à son barda afin d'en extraire sachets d'herbes. Une oreille attentive par contre à ce qui pourrait se passer en arrière cour, à savoir le cheval qui s'écroulerait de fatigue sous le poids de son chargement.


Tiens...

Mets moi un peu de ça dans ma tisane, s'il te plaît... Je sens que je vais en avoir besoin.


Parait que le coquelicot a certaines vertus se rapprochant du chanvre, sans en avoir les inconvénients.


Marcher... Est-ce que j'ai l'air de marcher ? J'ai plutôt l'impression de tanguer dangereusement à chaque pas et d'avoir...

Elle s'arrête net, nouvelle onde de douleur qui s'insinue au creux de ses reins avant de se répandre dans son bas ventre. Pas loin de rayer la table quand ses doigts se crispent dessus. Elle expire, l'air de rien, enfin elle essaye pour l'air de rien. "Bordel... C'que ça fait mal..."
Reprenant.


C'est pour...

Quand j'aurai déchargé mon stock de braies tombées d'une cariole... Tu connais personne qui achèterait ça au prix de gros ?


Allez donc écouler un lot de presque 200 braies vous... Sans être du métier en plus.

Et pis j'vais prendre un bain, ça me détendra un peu...

Avant la grande catastrophe... Et que sa commande spéciale d'herbes pour parturiente serve aussi.
Une tentative de sourire, c'est beau comme elle arrive encore à faire illusion, comme si la douleur qui la tenaille depuis des jours n'était pas en train de la rendre complètement marteau.

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--Harlem..s
Harlem vaque, saisit les herbes, s'active aux melanges sans garantie du dosage. Harlem est pas une experte en sciences qui infusent. Parfaitement cancre en matière médicale, à l'école des grandes catastrophes Harlem a fait buissonière...Aussi croit elle à une vaste plaisanterie. Ca peut etre que cela. Sacrée Fourmi quel boute en train!!!

Ahahaha. Très drôle Cymoril.

Donc elle voit rien. Si ce n'est une Fourmi fatiguée après un voyage.

Ben t'as l'air d'avoir des courbatures en tout cas. Ca se voit! Puis marcher c'est pas trop le mot auquel je pensais mais j'osais pas le dire tu comprends!

Cymoril semble chercher son air, se plie un instant. Se raccroche un instant à la table.

T'es enrhumée ? Tu tangues ? Han...T'as bu ? Faut pas!!

Vrai quoi parait que c'est pas bon pour ce qu'elle a dans le ventre. Harlem lui tend avec empressement une tasse qu'elle a touillé avec solicitude.

Tiens!

Ben je connais des gens que ça pourrait interesser si...Pas les gens dans le besoin qui manquent en ce moment...En même temps pas sûre qu'ils soient solvables...Pis Gascogne et Béarn ça fait une trotte.


Harlem aussitot se tait, se rabrouant de penser de façon si malicieuse! heureusement que nul ne peut l'entendre, la maison ayant des murs epais.

Je m'occupe de décharger t'inquiète. Puis je me renseignerai, mais je pense qu'ouvrir un stand et brader le tout peut être interessant. Des que j'aurai sorti le baquet j'irai voir.

Harlem s'empresse vers le réduit, tire ledit devant l'âtre. Une grimace nouvelle et ce sourire crispé dans le vis à vis...Harlem compatit.


Ca à l'air d'être douloureux. Il bouge ?

Et de se dire que ça doit faire un drôle d'effet. Le miracle de la vie. Ouais...

Pffffffff fadaises oui!
Cymoril
Une grimace... Pôv elle d'abord ! Pourquoi personne ne la croit jamais ?
Ca doit être à cause de sa tendance à toujours vouloir tout dédramatiser. Comme si le fait de dire les choses sans y mettre forme larmoyante la décrédibilisait systématiquement...

Nan, c'est pas ça.
En fait Harlem est encore moins expérimentée qu'elle pour ce genre de choses c'est tout...
Ca va pas être de la tarte, entre celle qui plane à des années lumière de ce qui se prépare et l'autre qui échangerait volontiers sa place contre n'importe quelle charge de cavalerie, on sent de suite que ouaip, ça va tenir du miracle cette histoire !



Nan j'ai pas bu... J'ai promis...

Sainte Boulasse n'a jamais connu quelqu'un lui rendant aussi peu honneur. Dernière bière bue... Gascogne, pour fêter le départ !
Tendant une main fébrile vers la tasse fumante.


Merci...

Broaf... Qu'ils restent cul nu les gascons, ça leur apprendra un peu l'humilité, ça leur ferait pas de mal !


Cym suit du regard Harlem qui n'a de cesse de bouger. Pour un peu elle lui donnerait le tournis, si le fourmilion ne revenait se rappeler à son bon souvenir. Main posée sur le ventre qui s'agite et se déforme, à croire qu'il fait une tentative de sortie expérimentale. Gloups !

Tu sais le chargement va pas s'envoler hein...

En fait elle dirait n'importe quoi plutôt que d'admettre que le morpion pousse au portillon, paniquée qu'elle est. Entre la surprise que cette affaire soit déjà si douloureuse, à se demander comment font les autres... Ca doit être la faute du père ça... Pas idée d'être aussi grand. Et si le machin était difforme, cornu...
Cuisses qui se resserrent d'un coup. Chassez le naturel il revient au galop... les peurs infondées et surréalistes avec !


Dis... Harlem...

Tu crois aux monstres toi ?


"Mais tais-toi donc ! T'es de plus en plus ridicule t'en as conscience au moins ?"
Nan, elle s'en rend pas compte, l'est morte de trouille et elle a mal.
Et d'une toute petite voix étranglée de dire :


J'crois qu'il veut sortir...
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--Harlem..s
Fou ce qui passe dans un regard ou la plus infime félure de voix...Harlem qui avait baissé sa garde, se reçoit l'immense vague d'inquiétude qui déborde d'une fourmi au pied du mur. Il est rare que notre marchande se laisse envahir, elle protège son cercle de l'extérieur, survolant la vie, les gens...
Elle s'en trouve démunie, comme une plante qu'on aurait rempotée dans un environnement pas fait pour elle. Et qui se réveillerait brutalement les deux pieds dans une mouise pas possible!
Le premier réflexe c'est de se fermer et de retourner à la douceur de l'autisme qui est le sien. Eluder à la dérisoire. Arguer d'une course à faire et prendre la clé de la fuite en évitant de courir.

Elle croise le regard de la jeune femme qui va accoucher. Y lit sans le vouloir tout un désarroi, difficile à nier...Contaminée par l'urgence et l'imminence d'un drame. Il semble bien que pendant quelques instants elles semblent toutes deux pétrifiées dans cette pièce.

Alors voilà la fourmi...C'est ainsi que tu m'arraches à mon insouscience. A mon petit monde.
Je veux pas moi... Alors c'est sérieux cette fois dis ? L'heure est grave. Fini la rigolade.

Harlem hésite, semble même se dérober et reculer pour finalement ne pas réussir à faire taire ses scrupules.

Arrêt.

Elle aime bien la Fourmi malgré tout ce qui les sépare. Elle fait partie des rares capables de l'atteindre dans sa bulle.

Ca va aller...

Harlem n'aime pas mentir. Mais là elle a décidé que c'était salutaire. Elle va aider malgré sa furieuse envie de déguerpir.

J'ai déjà fait. C'était des jumeaux même!

Nouveau mensonge qui lui brûle les lèvres. Harlem ne se rappelle pas de sa naissance... Elle a bien assisté à la ponte d'une poule une fois mais Harlem gage que cette histoire là n'a rien de commun. Parait que faut rassurer pour etre moins tendue. Sauf qu'elle s'avance beaucoup la marchande car si elle sait comment on les fabrique les bébés, certains ne se privant pas en taverne pour mettre a vue de tous ce principe élémentaire...

Non je crois pas. Je sais que les monstres ça existe pas. C'est comme la mort.

L'esprit toujours pragmatique a cela de positif, qu'il ne donne de prise aux fadaises et autre romances tirées de légendes. Tout se crée et a un sens bien tangible, tout s'explique avec la logique. Suffit d'en saisir la mécanique.
Donc Harlem réfléchit. C'est entré par là, ça ressort par le même chemin forcément.
Elle grimace. Ca va être dégoutant assurément. Elle a dû même palir. Car à vue de ventre cela semble bien prétentieux de faire passer un etre nouveau par ce biais.

"Dis la fourmi t'aurais pas une issue de secours dans ta manche ? Tout ça pour quoi ? quelques galipettes et celle de trop surtout!"

Harlem s'assombrit, prenant cet air sérieux et présent tout à fait nouveau et encore étonnée d'avoir franchi la frontière qui mene de son monde à ceux des autres...Pas à l'aise donc.
Mais elle se donne l'air de celle qui sait, calme et posée. Levant un index docte elle y va d'un :

Faudrait être sûre. Puis s'il veut, il veut. Faut pas serrer comme ça tu vas lui écraser la tête!! Faut pas contrarier la nature! Je sais que dans ces cas là y a rien à faire. Pousse et laisse glisser...

Voilà le mot clé et professionnel est laché. Harlem va peut être prendre de l'assurance. Juste que...

Euh.. Attend! Pousse plus!! Si tu fais ça là il va se faire mal à la sortie. Le plancher est dur.

Oui... Harlem sourit à sa compagne de "vive la vie", sûre de bien maitriser la situation. Et de rassembler sa longue chevelure en un chignon et de se retrousser les manches...

C'est salissant ? Sinon je vais me changer...J'ai le temps ?

On a beau faire un pas vers l'autre, y a des choses fondamentales dont on ne défait pas. Harlem réfléchit aussi à comment positionner la Fourmi qui contrairement à ses congèneres n'a pas eu l'heure d'avoir la bonne idée de nous pondre une pti oeuf tout rikiki. C'est du lourd qui toque à la porte.
Si gros bidon ne saurait mentir
Cymoril
[Je panique, tu paniques, nous paniquons... l'air de rien ça va de soi !^^]

Une gorgée après l'autre, elle a attaqué sa tisane de coquelicot de façon méthodique. C'est qu'on ne plaisante pas avec la pharmacopée, et la demoiselle est en passe de devenir experte en la matière. Avec le nombre de bougies coulées au fil de ses lectures... Et quand on sait le prix d'un simple cataplasme à l'arnica dans le quartier.^^

Evidemment ça n'a pas l'effet aussi rapide que le chanvre, mais le fait d'être à la maison procure une forme de bien être relativement calmante,rassurante...
Jusqu'à ce qu'Harlem parle de jumeaux... Histoire de lui coller des sueurs froides supplémentaires.


Keuf... Keuf.. gleurps...

Du coup la dernière gorgée est passée de traviole.

Tu veux m'tuer ou quoi ?

Déjà en faire sortir un... mais deux... Pourquoi pas cinq tant que t'y es... nan mais... j'suis pas une chatte... j'suis une fourmi lambda...


Vrai quoi !^^
Par contre, la scène prend un aspect nettement moins tranquilisant. Surtout avec le fugace regard réprobateur qu'elle croise. Comme s'il pouvait s'agir de simples galipettes...
Revenant à l'écoute de propos, elle esquisse un sourire à demi amusé. Harlem si pragmatique en est à mettre la charrue avant les boeufs. Aussi se lance-t-elle à son tour dans une explication du fonctionnement de Dame Nature, l'index docte en moins.


Quand j'dis qu'il veut sortir... C'est que c'est le jour hein... Pas qu'il VA sortir dans le quart d'heure... C'est que ça prend du temps ces choses là... Et pis j'en ai déjà vu, quand j'étais petite... enfin plus p'tite... tu m'as comprise.

Si j'me rappelle bien, faut pas pousser trop tôt, parce que ça sert à rien à part à se fatiguer ; alors on va éviter si c'est possible !
Et pis faut que la flotte dans laquelle il barbote elle se...


Elle cherche ses mots, tout en continuant de siroter, se reservant même et invitant Harlem à boire la sienne. C'est pas pire qu'une bière après tout, et pis si ça leur permet de passer ce mauvais moment plus légèrement...

Enfin, faut d'abord qu'elle sorte l'eau ... Pis avant l'eau, doit bien y avoir un bouchon quelque part !^^

Comme une baignoire nan ? On dégoupille, l'eau file dans le syphon et le tour est joué!

Pour ça qu'avant on prend un bain avec ces herbes là... Parait que ça détend et pis comme ça quand on sort de l'eau ben, le tour est joué, y'a plus qu'à...

A se demander si elle n'aurait pas mélangé quelques cours de médecine avec ceux de navigation toute cette histoire. D'ici qu'elle nous cause de Saturne qui entre dans la maison des Cancer avec la lune en opposition parce qu'elle aura confondu Astronomie avec Astrologie...

Ceci dit, elle semble tout à fait sérieuse en parlant de son bain et en désignant son second sachet d'herbes. Mélange bien connu et préconisé par les sage-femmes de l'époque de mauve, de camomille, de fenouil, de lin et d’orge. Déjà qu'elle a refusé la mixture supposée miracle de poudre de matrice de lièvre mélangée à du lin... Pas ragoutante pour deux sous, même gratos en fait. Pas parce que les hases accouchent rapidement qu'il faut avaler n'importe quoi.

Alors, aussi surprenant que ça paraisse, voici une petite demoiselle, un peu pliée en deux, qui entreprend de s'affairer à remplir le baquet gentiment ramené un peu avant le vent de panique par Harlem, à vitesse de croisière réduite, d'accord, mais parait que la marche a du bon dans ces affaires, alors... elle prend tout ce qui est.


Mouais...
Bah j'sais pas si les monstres ça existe ou pas, mais une fois, j'me rappelle, quand j'étais gosse, y'avait eu une histoire avec un nouveau né.. L'était né tout marron... Et la sage femme avait hurlé en le voyant, et couru chercher le curé hein.
Ca avait fait un de ces foins...
Jusqu'à ce qu'on le lave le marmot...
L'curé l'a prétendu que c'était parce qu'il avait marmonné quelques formules secrètes.


L'anecdote lui arrache un nouveau sourire. Avant de lui faire froncer les sourcils.

Harlem...
Quoi qu'il arrive, quoi qu'il sorte... Surtout me ramène pas de curé ici...


Quoi que...
Avoir un truc sur lequel taper pourrait avoir un avantage certain. Bah quoi... Vous pensez qu'on faisait sortir les bonhommes pourquoi ? Pour qu'ils restent en vie, uniquement !
A moins que ce ne soit pour qu'ils ne voient pas les souffrances endurées par leurs épouses et qu'ils puissent sereinement continuer à les engrosser comme si de rien n'était...

Et pendant ce temps là, le bain se prépare tranquillement, les herbes commencent à infuser.


Tu sais tu peux aller te changer, le blanc c'est p'têt pas recommandé... Et puis j'sais pas, mais la cuisine ça me semble pas franchement approprié pour la suite hein...

A moins de vouloir se filer des nausées à chaque fois qu'elles y passeront plus tard...

Et si tu veux des braies, sers-toi... C'est pas ce qui manque...

Tout en continuant de serrer les cuisses, histoire de gagner du temps, comme si ça pouvait passer par enchantement... Et une contraction,une !^^



[Amis poètes bonsoir, pardon aux familles toussa...^^]
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