Clemence.de.lepine
[Hôtel de Nemours, Paris]
A l'aube, le matin du dix décembre
Branle-bas de combat. C'était LE jour. Celui qu'elle attendait depuis des semaines, depuis des mois, avec une impatience telle qu'elle s'en tuait les ongles à force de les ronger. Elle n'en dormait plus, et lorsqu'elle y parvenait, c'était pour en faire des rêves étranges ou des cauchemars effroyables. Elle avait froid, elle avait chaud, elle tremblait, elle se consumait à petit feu, elle s'usait à force de prières et de remerciements, à Dieu, aux servantes, à Isaure, au chien.
Enfin, enfin, enfin... ne cessait-elle de répéter dans une stupide litanie qui pouvait fort bien vous casser les oreilles au bout de cinq minutes ou vous assassiner le cerveau et vous faire tourner schizophrène. J'ai hâte. Disait-elle parfois pour ponctuer ses soupirs. Et elle lançait un regard alangui à sa cousine, ne pouvant empêcher son visage de se détendre d'un sourire mièvre.
C'est un jour à marquer d'une pierre blanche. Et elle insista sur ce dernier mot. Un jour que je n'oublierai sûrement jamais ! Vous m'entendez Isaure : ja-mais. C'est très important, ce qu'il va se passer aujourd'hui.
Elle cessa d'arpenter la pièce en long, en large et en travers et se posta devant cette jeune fille qui avait trop vite grandi. Depuis combien de temps ne l'avait-elle pas vue ? Trop de temps. Assez pour que la demoiselle se décidât à faire n'importe quoi de sa vie. Assez aussi pour qu'elle devienne aussi grande qu'elle, voire davantage, non ? Mais était-ce si difficile ? Assez pour qu'elle embellisse et prenne des formes de femme et que Clémence, à la regarder, en éprouve un pincement au cur. De jalousie, d'envie, elle n'en savait trop rien. Isaure n'était plus tellement une enfant et cela signifiait qu'elle aussi, alors, avait vieilli.
Je me demande, parfois, si nous avons bien un peu de sang en commun. Murmura-t-elle, pensive, les yeux rivés sur cette chevelure d'ébène et ces jolies courbes de femme. Secouant la tête, elle chassa ses pensées et repartit sur son idée fixe.
Allons donc, soyez toutes heureuses, car aujourd'hui est un grand jour !
Elle s'arrêta au milieu de la pièce, radieuse, et se campa, droite, fière, les poings sur les hanches.
Blanche et moi, nous allons nous retrouver !
Elle vacillait, pourtant, cette voix qu'elle voulait si ferme. Ce cri du cur n'était qu'un cri de courage. Et son regard soudain se voila pour venir se poser, affolé, dans celui de la petite Wagner.
Elle va venir, n'est-ce pas ? Vous croyez que je devrais avoir peur ? Si ténu, le timbre. Hésitante, frissonnante, elle se frictionna les bras, tentant vainement de faire disparaître cette chair de poule qui lui boursouflait salement la peau.
Elle ne portait pour le moment rien d'autre qu'une chemise, frigorifiée, tandis qu'on s'affairait autour d'elle à réunir toutes les pièces de sa tenue. Car aujourd'hui, hormis le retour de Blanche, on fêtait aussi un mariage, et la mariée, ce serait elle.
Youpi.
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A l'aube, le matin du dix décembre
Branle-bas de combat. C'était LE jour. Celui qu'elle attendait depuis des semaines, depuis des mois, avec une impatience telle qu'elle s'en tuait les ongles à force de les ronger. Elle n'en dormait plus, et lorsqu'elle y parvenait, c'était pour en faire des rêves étranges ou des cauchemars effroyables. Elle avait froid, elle avait chaud, elle tremblait, elle se consumait à petit feu, elle s'usait à force de prières et de remerciements, à Dieu, aux servantes, à Isaure, au chien.
Enfin, enfin, enfin... ne cessait-elle de répéter dans une stupide litanie qui pouvait fort bien vous casser les oreilles au bout de cinq minutes ou vous assassiner le cerveau et vous faire tourner schizophrène. J'ai hâte. Disait-elle parfois pour ponctuer ses soupirs. Et elle lançait un regard alangui à sa cousine, ne pouvant empêcher son visage de se détendre d'un sourire mièvre.
C'est un jour à marquer d'une pierre blanche. Et elle insista sur ce dernier mot. Un jour que je n'oublierai sûrement jamais ! Vous m'entendez Isaure : ja-mais. C'est très important, ce qu'il va se passer aujourd'hui.
Elle cessa d'arpenter la pièce en long, en large et en travers et se posta devant cette jeune fille qui avait trop vite grandi. Depuis combien de temps ne l'avait-elle pas vue ? Trop de temps. Assez pour que la demoiselle se décidât à faire n'importe quoi de sa vie. Assez aussi pour qu'elle devienne aussi grande qu'elle, voire davantage, non ? Mais était-ce si difficile ? Assez pour qu'elle embellisse et prenne des formes de femme et que Clémence, à la regarder, en éprouve un pincement au cur. De jalousie, d'envie, elle n'en savait trop rien. Isaure n'était plus tellement une enfant et cela signifiait qu'elle aussi, alors, avait vieilli.
Je me demande, parfois, si nous avons bien un peu de sang en commun. Murmura-t-elle, pensive, les yeux rivés sur cette chevelure d'ébène et ces jolies courbes de femme. Secouant la tête, elle chassa ses pensées et repartit sur son idée fixe.
Allons donc, soyez toutes heureuses, car aujourd'hui est un grand jour !
Elle s'arrêta au milieu de la pièce, radieuse, et se campa, droite, fière, les poings sur les hanches.
Blanche et moi, nous allons nous retrouver !
Elle vacillait, pourtant, cette voix qu'elle voulait si ferme. Ce cri du cur n'était qu'un cri de courage. Et son regard soudain se voila pour venir se poser, affolé, dans celui de la petite Wagner.
Elle va venir, n'est-ce pas ? Vous croyez que je devrais avoir peur ? Si ténu, le timbre. Hésitante, frissonnante, elle se frictionna les bras, tentant vainement de faire disparaître cette chair de poule qui lui boursouflait salement la peau.
Elle ne portait pour le moment rien d'autre qu'une chemise, frigorifiée, tandis qu'on s'affairait autour d'elle à réunir toutes les pièces de sa tenue. Car aujourd'hui, hormis le retour de Blanche, on fêtait aussi un mariage, et la mariée, ce serait elle.
Youpi.
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