Afficher le menu
Information and comments (0)
<<   <   1, 2, 3, ..., 16, 17, 18, 19, 20   >   >>

[RP] Journal d'une chiasse en goguette

Andrea_
[De l'utilité d'une nourrice.]



Orthez, taverne Chiassique -"Cocue la praline" pour ne pas faire de pub, deux couples discutent.

Bout de table à droite, deux hommes, qui, on le notera, prennent quand même soin de finir leurs phrases par un " Hein chérie". C'est mignon tout plein les jeunes couples.


- C'est évident, nous aurons une nourrice, la meilleure, comment voulez-vous vous passer d'une nourrice avec un enfant, c'est in-dis-pen-sable, hein chérie? Ça, c'est Gauttier, un peu dépassé par le ventre pas encore rond de sa femme.
- Je suis to-ta-le-ment d'accord avec vous, hein chérie? Et ça, c'est Beren, mon cher et tendre, qui prêche pour sa paroisse en souriant de toutes ses belles dents pour m'amadouer.


De l'autre côté de la table, deux femmes, qui se regardent sans aucune animosité, et qui ne disent rien puisque chacune lève les yeux en entendant son mari. Mais une femme qui ne parle pas n'est pas une femme, solidarité féminine oblige, on ne finit pas les phrases avec des " hein chérie" mais des " n'est ce pas?" qui sont bien sûr adressés à l'autre femme, une question de torchon et de serviette à ne pas mélanger peut être.
- Je ne dirais pas que c'est indispensable non plus, j'ai deux mains, on devrait s'en sortir, n'est ce pas?Susi, femme de poigne, deux poignes même.
Nan. C'est inutile, n'est ce pas? Une femme terriblement attachante, belle et rebelle, et re-belle et re-rebelle, parfaite et divinement rabat joie. Ah oui, c'est moi, je m'étais auto-aveuglée, pas au point d'être amadouée par celui qui m'a mise en cloque.



Vint donc le moment où chacun veut en savoir plus sur le pourquoi et le comment. Version officielle, ce qu'il se passe en public :

Et pourquoi ?
Parce qu'elle a raison, j'ai deux mains, et vous aussi.
Point, j'aurais du rajouter "point, fin de la discussion, mais rassurez vous, j'ai pas dit "point", mais j'ai balancé le regard delamortquitue, celui qui veut dire " c'est non négociable".
Mais enfin Andrea Chérie, nous avons six enfants! Moi dans ma tête, je me disais que ça faisait quand même plus d'une demi main par enfant et que c'était largement suffisant, à moins de devoir les étrangler, y a pas besoin d'deux mains par gosse!
SIX !
Je fais un long calcul mental, Enolia le pouce, Myla l'index, Hartasn le majeur, Pauline l'annulaire, Hélias le petit didi, merd' je prends la seconde main, Victoire le pouce, Nicolas l'index, et Persil/Piotre/Bébé le majeur.
Huit.
HUIT !


Et c'est là que Beren sort la phrase qui tue. Mais genre vraiment, il la sort en se penchant vers l'homme devenu son meilleur ami, en se marrant comme une baleine, alors que j'avais juste envie de chialer comme une madeleine -sans la bosse-. Tenez, lisez ça, et encadrez là, je vous présente LA phrase qui m'a foutu en rogne :

Huit gosses, et elle me prive de nounou !


Je crois que je lui aurais collé mon pain dans la gueule si j'en avais eu un sous la main, mais comme j'en avais pas, je me suis contentée de sourire poliment à nos hôtes qui ont sûrement senti le malaise puisqu'ils ont décidé de s'éclipser. Je les ai pas retenu je peux vous dire, Beren était encore mort de rire de sa blague de l'année, et moi j'avais juste envie qu'il meurt littéralement de rire. Genre là, sur sa chaise, étouffé avec son petit foulard en soie de mes deux, parce qu'il aurait malencontreusement reçu une dague dans chaque oeil et que sa langue se serait de façon totalement fortuite coincée dans une paire de ciseaux, j'aurais du faire un garrot et je l'aurais fait avec son SUPERBE foulard autour de son MIGNON petit cou qui s'agite au gré de ses éclats de rire qui me GAVENT.

Moi? MOI j'le prive de nounou ?!
J'ai bien envie d'lui foutre au cul la nounou, il est SÉRIEUX ?!
Oh Oui, TOI, Beren Hartasn De la Fiole Ébréchée de Sparte, tu es sérieux?


Nan parce que, qu'on soit d'accord tout de suite!
Moi j'adore l'idée d'avoir une nourrice. Embaucher une pauvre dinde pour qu'elle se pavane auprès de mes gosses, qu'elle change leur lange plein de ... de ce que vous voulez qui ne se mange pas et qui sent fort-. J'aime beaucoup l'idée que ça soit à Elle qu'on tire les cheveux parce que Pauline a décidé qu'elle voulait jouer à la poupée grandeur nature avec SES cheveux. J'adorerais la voir attachée à une chaise parce que Victoire et Hartasn ont décidé de jouer aux indiens. Je peux même tolérer que ça soit elle qui fasse les couchers à ma place, qu'elle se fasse chier à lire des histoires -toujours les mêmes- en boucle jusqu'à ce qu'enfin la totalité des enfants -ou au moins 80%- s'endorment, en sachant que le lendemain ça sera ELLE qui se lèvera avant le chant du coq pour s'occuper de mes chères têtes blondes -et brunes-, bref, tout ce qui mesure moins d'un mètre cinquante.
Je crois que je suis même prête à passer mon tour quand il faudra jouer au ballon, cueillir des fleurs, panser des blessures imaginaires, séparer deux -ou plus- enfants qui se battent pour le même jouet alors que merd', ce jouet on l'a acheté en triple pour éviter qu'ils se battent et qu'ils se battent quand même, parce que c'est comme ça un gosse, ça veut le même jouet, au même moment, mais ça serait son boulot à Elle, la nourrice, de gérer ce genre de situation.
Je suis même prête à l'augmenter tout de suite parce que c'est vraiment un boulot de dingue. Bah ouai, faut pas croire que ça fait que de jouer une nourrice hein.


Pour tout vous dire, je suis même presque prête à lui tapoter dans le dos quand elle me dira qu'elle ne veut pas d'enfants et qu'elle voudra se reconvertir en capitaine d'armée -ce qui n'est rien de plus qu'une garderie géante mais où on est payé en nature-.

Sauf que non.
Non c'est non.

J'suis pas comme ça, à détester les nourrices pour rien hein, ma HAINE des nounous ne s'est pas manifestée tout d'un coup, sans aucune raison, genre j'me lève un matin et hop, j'ai décidé que nourrice était le boulot le plus ingrat du monde et que les nourrices, de toutes façons ne sont que des câtins qui veulent seulement se taper le pères des dits -ou Dix- enfants qu'elles gardent.
Ah mais oui, c'est ça le problème.

Beren s'est tapé, à vue de nez hein, 75% des nourrices qu'il a employée. Et j'le vois venir, j'ai le traducteur moi, Quand il dit qu'il veut une nourrice, ça veut dire qu'il veut une maîtresse.
Quand il dit qu'il va bien falloir quelqu'un pour allaiter notre enfant, je le vois déjà passer des heures à regarder les lèvres ourlées de notre gamin mais SURTOUT lorgner sur l'ÉNORME nibard qui lui sert de garde manger.
Quand il dit qu'on aura du temps pour deux, c'est surtout du temps pour faire numéro neuf, ou dix, ou peut être 9 ET 10 en même temps tout ça pour avoir le privilège d'embaucher une nouvelle nounou-catin.
J'suis peut être parano, mais entre folle et cocue, j'ai choisi mon camps.


Alors je t'en prie mon choux, Continues de me passer dessus autant de fois que tu le voudras, je ne changerai pas d'avis. Smack sur ta fesse!

_________________
Beren
[Voyage au bout de l’enfer]



Ce périple à travers les duchés et comtés français s’annonçait déjà mal. A l’idée foireuse de base d’Andrea de faire épouser sa meilleure amie à son ex-mari (ou l’inverse, au final), s’était adjointe la notion la plus problématique aux yeux de Beren : l’ex-mari en question n’est autre que le ravisseur de la fille du Fiole, Enolia.

Ayant profité de la seule et unique occasion où le blond barbu avait pris retraite, ce qu’il croyait être un groupe de malfrats violents et surentraînés avait donc embarqué sa fille, qui, captive, avait été tenue éloignée de lui des mois durant. C’est fou comme l’esprit se fait des idées, comme il se persuade lui-même de choses montées de toutes pièces, comme ici l’assurance que l’enlèvement a rimé avec torture, avec contrainte, avec douleur.

Pas seulement celles de la petite, mais aussi les siennes. Celles d’un père torturé de culpabilité de n’avoir pas su protéger sa fille, contraint à l’absence de son adorée petite chérie et endolori d’inquiétude et de remords. S’il n’était pas parti en retraite, ils n’auraient pas pu l’emmener ; s’il ne s’était pas isolé après sa séparation d’avec Margareth, il aurait été un meilleur père, plus attentif, plus attentionné, aussi.

Les pas qui le mènent vers Orthez sont traînants ; il n’a pas envie de cette confrontation et pourtant il la désire. A chaque fois que la semelle de ses bottes touche le sol ou l’étrier qui l’entraînent un peu plus vers la vengeance, l’esprit se plombe, se charge de ressentiment, d’idées pesantes de duels, de fracas d’épées ou de poings, de sang, de rage. Il laisse ses épaules se nouer, se gorger de tension ; il laisse l’esprit vagabonder sur le chemin tortueux des plans qu’il s’érige seul. Il le sait, il le sent ; au premier regard, ils se reconnaîtront, et au diable la bienséance et les égards qu’on lui a inculqués ; la part sera faite au lâcher de fauves.

Sauf que.

S’il ressent une haine viscérale pour ce type-là, il ne le croise pas de suite. A la place, il a le droit à quelques rencontres – passes d’arme avec la meilleure amie d’Andrea, la promise, donc. Force est de constater que l’approche est difficile, quand bien même y ait-il mis les formes. Il est comme ça, le Fiole : lorsqu’il est tendu, il devient un con guindé dont les allures arrogantes sont rédhibitoires à quiconque le rencontrerait. Il en est conscient et plus il tente d’être patient et avenant, plus il s’empêtre dans une préciosité et une obséquiosité aussi pénibles qu’horripilantes pour une femme telle que celle-ci, qui demeure loin des cours et des considérations raffinées dans lesquelles Beren a toujours évolué.

Il tente un dernier effort, pour Andrea, mais celui-ci, vain, le voit considérer l’amie comme irrécupérable et toute relation vouée à échouer. Contre toute attente, alors qu’il a demandé à Andrea d’aller voir sa copine et que lui, a choisi de demeurer dans la taverne où il a bien l’intention de savourer une coupe de vin, en paix, Yohanna fait son entrée et l’attire à côté.

Là se trouvent Enolia, Andrea, une jeune femme déjà croisée et un homme inconnu. Aucun jeu n’est en cours comme l’avait annoncé Yohanna, personne ne présente l’homme, même pas lui-même et il s’avère qu’il s’agit du fameux Marc, ex-mari, ex-ravisseur, nouvel ennemi.

Las, c’est lui, l’ennemi rêvé, honni, conchié ; l’ennemi fantasmé et terriblement… décevant. Pas de lice, pas de combat, pas de revanche, pas même de haine réciproque. Que du dédain, que du mépris, le rire a même supplanté aux insultes rêvées, c’est triste. Et il a envie de gueuler, et il a envie de frapper, et de beugler, et de crier, yeux clos, comme un gosse fait une colère « hey, tu m’as volé ma gamine, me vole pas ma haine ! Je ne veux pas cesser d’accuser, je ne veux pas cesser de maudire, Dieu, ne me laissez pas pleurer ! »* Pas là, pas là. Il veut rêver encore, toucher encore, malmener encore en songes le corps de celui qui lui aura un jour fait hurler, désespéré « L'enfant que j'avais tout à l'heure, Quoi donc ! je ne l'ai plus ! »*.

On lui vole sa colère, on lui dérobe ses envies de vengeance. Il a envie de se pencher sur la froide pierre où il aura traîné la carcasse de Marc et relever la tête vers une Andrea, yeux froncés, pour lui dire « Ne vous irritez pas que je sois de la sorte, Ô [ma Déesse] ! cette plaie a si longtemps saigné ! L'angoisse dans mon âme est toujours la plus forte, Et mon cœur est soumis, mais n'est pas résigné.* Je devais le faire, je le devais !»

Parce que c’est une partie de lui, cette ire courroucée. Elle a été le moteur de sa sortie de léthargie, une source d’énergie inépuisable quand la douleur prenait sa jambe déjà abîmée, quand la main se faisait calleuse d’être trop appuyée au pommeau de la canne qui devenait pommeau d’épée en pensées, quand la fatigue lui tendait les muscles en crampes le vrillant de douleur et l’éveillait au milieu de la nuit. On ne pouvait pas la lui arracher comme ça et, trop affligé, trop frustré pour assister à l’amputation de cette part de son âme qui se rêvait vengeresse, il était sorti gueuler ailleurs, s’enfoncer dans un fauteuil et faire ce qu’il savait faire le mieux : boire en ayant l’air d’un déterré. Parce qu’avec le rire, le mépris, le dédain, la vérité était elle-même sortie ; Enolia n’avait pas été enlevée, elle avait suivi de son plein gré.

Et c’était justement là que le bat blessait. Il l’avait senti dans les silences gênés d’Enolia quand il évoquait l’épisode, dans les excuses bafouillées d’Andrea, dans leur volonté commune de changer de sujet dès lors qu’il l’abordait. Marc avait porté, absent, les reproches dont il avait envie de les ensevelir, de les noyer, de leur faire avaler jusqu’à la lie la coupe de fiel qui lui rongeait l’estomac, quand il choisissait de se taire, et de consentir à avoir l’air d’un imbécile abusé en faisant mine de se laisser embarquer vers un sujet de conversation moins lourd. Alors, dans chaque ville visitée, il a joué le jeu pervers qu’il avait mis en place pour sauver la face devant ses hommes et ses domestiques et qui consistait en l’embauche de gardes supplémentaires, en contacts avec la maréchaussée pour s’assurer de la sécurité de sa famille. Lentement, insidieusement, la certitude au cœur que sa fille lui mentait s’était ancrée, nouée, sans qu’il veuille vraiment y croire mais là… Là, c’était lâché. Là, c’était dit. Là, c’était confirmé.

Il l’a détestée quand elle a prononcé les mots. L’idée de se barrer en l’abandonnant l’a pris, il a failli reprendre la route tout seul. Il lui en veut encore, bien sûr. Bien sûr. La confiance n’est plus de mise, elle a brisé la foi qu’il avait en elle et qu’il pensait inaltérable. Quand elle est partie, Constant lui a fait comprendre, à demi-mots, que la petite n’aurait pas quitté la ville sans le vouloir, et il n’a pas eu la force, à ce moment là, de courir à sa suite pour la ramener au bercail poussiéreux d’une vie passée et révolue.

Elle voulait voir le monde, qu’elle le voit, quand lui ne voulait plus voir personne. Il a écrit mille lettres, toujours la même ; un poème qu’il lui avait toujours refusé et qui pourtant était le seul à sortir de sa plume. Avant qu’Andrea ne le rejoigne, il avait parcouru à nouveau l’exemplaire froissé qui ne quittait jamais sa poche :

« Tu peux pas t'casser, y pleut
Ça va tout mouiller tes ch'veux
J'sais qu' tu s'ras jolie quand même
Mais quand même tu s'ras partie
Moi, y m'restera à peine
Que ma peine et mon envie
De te coller quelques beignes
Et quelques baisers aussi

Fais gaffe, dehors c'est pas mieux
Y'a d'la haine dans tous les yeux
Y'a des salauds très dang'reux
Et des imbéciles heureux
Je suis mille fois meilleur qu'eux
Pour soigner tes petits bleus
Tu peux t'casser, y pleut
Ça va tout mouiller tes ch'veux

Tu peux pas t'casser parc'que
T'as pas l'droit c'est pas du jeu
On avait dit que tous les deux
On resterait près du feu
T'aurais pu attendre un peu
J'allais bientôt être vieux
Tu peux pas t'casser, y pleut
Ça va tout mouiller tes ch'veux

Tu peux pas t'casser, je t'aime
A m'en taillader les veines
Et pis d'abord ça suffit
On s'casse pas à [neuf] ans et d'mi
Allez, d'accord, t'as gagné
Je te rallume [tes soirées]
Mais tu n'peux pas t'casser, y pleut
Ça va tout mouiller tes ch'veux

Tu n'peux pas t'casser, y pleut
Ça va tout mouiller mes yeux »**


Il avait raison de parler du temps qu’il faisait quand, son absence emplissant tout l’espace de la maisonnée, il pleurait dans son cœur quand il pleuvait sur la ville.*** Y avait cependant de l’orage, au moment où la gamine avait rejoint ses parents, qu’elle avait répondu à la fureur silencieuse de son père, à sa prétendue surdité et à sa cécité, par des coups sourds frappés à la porte derrière elle, yeux fermés. Jusqu’à ce qu’il explose, jusqu’à ce qu’il éructe sa colère et ne lâche les mots qu’il avait tenté de retenir jusque là. S’en était suivie une explication poussée sous l’arbitrage d’Andrea, qui n’était intervenue qu’une fois et non des moindres, puisqu’elle avait mis fin à l’engueulade familiale avec une efficacité redoutable.

Nouveau départ. Nouvelles bases. Tous ensemble.

Bientôt se dessinait Dax… Dax et ses fantômes, Dax et ses tourments.




*Victor Hugo, A Villequier (passage à la négation)
** Renaud, Il pleut, légèrement modifiée.
*** Allusion à Paul Verlaine (changement de temps)


_________________
Andrea_
Le ciel depuis longtemps s'était voilé de noir lorsque nous sommes allés nous coucher. En silence nous nous sommes embrassés avant de nous endormir, et puis plus rien, tu le sais, toi, que cette soirée a été éprouvante. Tu le sais, toi, qu'aucun mot ne pouvait apaiser les démons qui avaient refait surface.
Pourtant la bougie éclaire encore faiblement la pièce lorsque je me réveille à nouveau, le corps comme posé dans un écrin moelleux, les yeux perdus dans le vide, à chercher désespérément une ombre chancelante, l'oreille tendue, à l'affût d'une respiration plus calme, plus posée, besoin impérieux de sentir ta présence, pour rester encore dans cette torpeur qui me fait du bien. Ne pas dormir pour ne pas rêver, ne pas se réveiller pour ne pas affronter, entre deux, sur un fil auquel on s'accroche irrémédiablement.


    Puisque l'ombre gagne
    Puisqu'il n'est pas de montagne
    Au-delà des vents plus haute que les marches de l'oubli
    Puisqu'il faut apprendre
    A défaut de le comprendre
    A rêver nos désirs et vivre des "ainsi-soit-il"
    *



Je te sens tout près et pourtant si loin, je t'imagine comme toujours assis dans ton fauteuil, peut être en train d'écrire une missive, ou en pleine réflexion, la pulpe de tes doigts usant un peu plus le velours de l'accoudoir. Peut être alors masses-tu tes tempes, frottes tu ta barbe, peut être te dis-tu qu'il serait temps de la tailler à nouveau, qu'en sais-je.
Mes yeux se ferment à nouveau, écrasant au passage quelques eaux salées qui perlent et glissent contre ma joue.

Tu as été odieux Beren, tu m'as poussé plus loin que personne ne l'avait jamais fait. Tu aurais pu panser la plaie qui s'ouvrait, béate, à tes yeux, tu aurais pu la panser et la recouvrir de mille baisers, l'effacer d'un éclat de rire, tu sais, celui qui me fait fondre. Tu aurais pu fuir Beren. Me laisser le faire alors que mes ongles paniottaient cette table qui savait que l'orage grondait sourdement.
Mais tu as souri. D'un sourire qui ravive les blessures. Celui qui fait péter les coutures et saigner un peu plus. Tes mots tranchent le vif, et toujours plus narquois, tu creuses, encore et encore. Tu insistes. Tu remues ce couteau que je porte dans le dos depuis bien trop longtemps. Tu ne lâches rien. Tu me renvoies la balle. Sans cesse. Avec hargne. Dédain. Dégoût. Et tes mots encore plus vifs. Et tes yeux encore plus noirs. Et tes doigts encore plus tendus. Et ce ton plein de rage. Et ce sourire qui ne te quitte plus, posé là, assorti à ton regard suffisant que soudain je déteste. Et cet être tout entier qui se moque de faire mal, de pousser à bout. Cet être qui se fiche bien d'avoir écorné l'image si parfaite que j'avais de lui. Cet être qui cherche l'explosion de l'implosion. Tu as souri Beren.
Combien de temps croyais-tu que j'allais te tenir tête, alors que j'implosais sous mes maux, que j'écrasais sous le poids de TES mots, de ton regard, de la haine que tu me craches au visage, combien de temps Beren?
N'as tu donc pas vu dans mes yeux que tu allais trop loin?
Et ce "Crachez le Andrea, crachez moi tout ça", mais si j'avais voulu garder tout ça dans ma bouche, moi? Si j'avais préféré que tout reste au dedans pour ne pas faire de mal au dehors, si j'avais voulu garder mes blessures secrètes? Si j'avais préféré que la gangraine me bouffe de l'intérieur plutôt que de t'avouer des choses qui ne guériront jamais?
Qu'attendais tu Beren? Qu'attendais tu de moi quand tu fourrais tes mains à l'intérieur de mon coeur, que tu en faisais de la charpie, que tu continuais de dégueuler tes mots quand je te sommais d'arrêter? Tu ne voulais pas fuir, mais si moi, je voulais le faire? Que croyais-tu Beren? Que ce coeur que tu as broyé allait soudain se remettre en route et battre à nouveau comme si tu n'avais PAS SOURI ?!
Qu'attendais tu de moi sinon des salves de reproches, des mots emplis de haine, de la moquerie gratuite et des insultes? Des coups? Ceux qui ont fendu ta lèvre et fait gonflé ta pommette, ceux là Beren, ceux là même que tu as essuyé sans broncher ? Etait-ce suffisant pour que tu comprennes le mal que tu me faisais à dire des vérités qu'il vaut parfois mieux taire? Aurais-je du crier en plus? Des "SOUFFRES", des " PLEURES" et peut être des "CREVES" ?
Tu as simplement souri, je ne savais pas qu'un sourire pouvait tuer.


    Parce qu'il est des douleurs qui ne pleurent qu'à l'intérieur
    J'aurais pu fermer, oublier toutes ces portes, tout quitter sur un simple geste mais tu ne l'as pas fait
    *


Aucun frisson ne parcoure mon échine alors que mes mâchoires doucement se serrent, peut-être ne devrais-je pas retenir ce soupir qui force contre mes lèvres, celui qui signifierait que non, non Beren, je ne dors pas, que des dizaines de mots sont encore bloqués dans ma gorge et ne demandent qu'à voir la lumière, qu'à s'écraser avec violence contre ton doux visage.


Ma vie ne sera jamais simple, il parait que c'est le prix à payer quand on veut toujours gagner. Qu'une fois que l'on perd, on a du mal à digérer, et tu peux dire que c'est la vie, qu'il faut faire avec, je ne suis pas femme à m'en contenter.
Si tu savais Beren, qu'une légende raconte que le battement d'aile d'un papillon quelque part au bout du monde peut dévaster un pays entier de l'autre côté, tu comprendrais alors pourquoi tes mots m'ont fait du mal. Tu as pris mon nez et tu me l'as plongé avec violence dans la merd' que j'avais mis une vie à pondre. Tu as détruit une à une les barrières que j'avais érigées tout autour de moi, mais ça ne te suffisait pas Beren, il t'a fallu Pandore, fallait-il vraiment que nous entamions une danse avec nos fantômes ?


Je n'ai pas demandé à te voir arriver dans ma vie, je n'ai pas demandé à te connaitre et encore moins à t'aimer. Je n'ai pas demandé à ce que tes blessures soient intimement liées aux miennes. Je n'ai pas demandé à guérir, je n'ai pas demandé à souffrir encore. Je n'ai pas demandé de second round quand le premier m'avait mis KO. Je n'ai pas demandé qu'on me mette le nez dans la merd' à nouveau et je n'ai surtout pas demandé que ça soit Toi qui le fasses.
Toutes tes paroles sont vaines, seuls les actes me prouveront que j'avais raison depuis le début. Rien de ce que tu diras ne pourra apaiser la crainte de te voir un jour partir avec un autre, qui t'apportera ce que je ne pourrais jamais te donner.



    Et puisque je pense, comme une intime évidence, que parfois même tout donner n'est pas forcément suffire, et puisque je pense que c'est ailleurs qu'ira mieux battre ton coeur,*


Continue Beren, perds patience à m'expliquer en long en large et en travers pourquoi j'ai tort de penser ça. Énerves toi encore quand je suis jalouse d'un brun, d'un blond ou d'un roux. Dis moi combien tu m'aimes et combien je suis indispensable à ta vie. Redis moi combien tu m'as attendu, que ta vie a pris son sens le jour où j'ai accepté de nouer mes doigts aux tiens. Fatigues toi à me répéter encore et toujours qu'il n'y a que moi, mais saches que le jour où tu ne le feras plus, que le jour où je ne serais plus inquiète, jalouse, plus torturée par mes démons. Que le jour où quelqu'un pourra poser les yeux sur toi sans que rien ne voile mon regard, alors ce jour Beren, Ce jour sera simplement le dernier que nous passerons ensemble.


    Puisque ma maison
    Aujourd'hui c'est l'horizon ,
    Garde en mémoire.
    *

Que ça ne sera pas mes démons qui auront gagné Beren, simplement mon Amour qui est parti.



* : Puisque tu pars, Jean Jacques Goldman, changement de pronom personnel sujet.

_________________
Beren
[Veiller tard]


Tu es étendue et je ne sais pas si tu dors. Mon coude au bras d’un fauteuil, index et majeur scellés posé sur ma tempe, j’observe les courbes de ton corps qui me tourne le dos. J’y dévale à ton flanc, je gravis la ligne de ton épaule, je coule à l’arrondi de l’orbe dessiné de l’endroit où ton dos ressemble à la lune, sous un rai de lumière que la flamme d’une bougie presqu’éteinte sculpte d’une lumière vacillante.

Tu es belle quand tu dors. Tu es belle quand le calme suit la tempête, quand bien même tu resplendis dans la fureur. Le spectacle déroutant de ce volcan que tu sais être n’est pas suivi des cendres comme je l’avais craint. J’espère t’avoir fait cracher la lave que je sais te faire bouillir les tripes. J’ai eu peur qu’elle ne dévaste tout mais je crois bien être certain, maintenant, que le feu qui t’anime est en partie né de moi, puisqu’il ne nous a pas décimés.

Tu es étendue et je ne sais pas si tu dors. On a voulu se découvrir, s’affirmer des choses qu’on n’avait jamais dites avec pour seule règle de ne pas se poser de questions. Des idioties sont sorties, d’affreux secrets, aussi. Des révélations, des tourments, des mensonges, des faux semblants. J’ai écorné l’image du beau chevalier blanc, tu as dévoilé certains aspects sombres ; on est devenus deux mélanges de bien et de mal, deux unions de tu et de revendiqué, deux êtes imparfaits dont les passés se rejoignent, se fondent, se mêlent… Deux combattants s’étant fourni mutuellement nos armes quand l’intime a été trop frôlé.

Je t’ai blessée et tu m’as cogné ; je t’ai fait des bleus à l’âme et tu m’as crucifié. On s’est guéris. On a essayé, du moins.

J’aurais dû te dire hier, quand l’idée de « jouer » est venue sur le tapis, j’aurais dû te dire que les jeux ne me réussissent pas, qu’à chaque fois que je joue aux dames, l’échec me mate.

Quand j’ai vu que je pouvais t’atteindre et peut-être, percer l’abcès pour que tu sois libérée, purgée, j’ai appuyé là où ça faisait mal, jusqu’à ce que tu te jettes sur moi, que tu déverses maux et mots, que tu fasses pleuvoir une pluie de « souffre ! », une avalanche de coups. A mon corps défendant, je n’ai pas fait l’ombre d’un mouvement pour arrêter tes mains, pour esquiver tes poings. Il fallait que ça sorte, même si ça brûle, même si ça ravage, même si ça vrille, même si ça mord. Cette armée de conquête quand ton corps ne pouvait plus faire céder les barrières de ton autre, ce projet abandonné en même temps que l’enfant, ces injustes serments détournés que tu as prononcés sans les vouloir vraiment, cette tolérance d’une tierce personne dans la chanson que tu t’étais échinée à composer, cette marche des Walkyries que tu avais rêvé voir annoncer ton arrivée dans des villes bientôt soumises, asservies, quand tu peinais à coucher ton mari, à faire ployer ses penchants, à faire craquer ses travers quand la verticalité de son désir ne naissait pas que de toi ?

Il faut composer pour faire réussir un couple, mais comment composer quand être mari et femme est un rôle de composition pour l’un des deux ? Faire des compromis jusqu’à renier ce qu’on est, intrinsèquement, est-ce que c’est ça, la vie ? Je voulais que tu te débarrasses de ça. Que tu cesses de m’imaginer partir avec… Ce n’est même pas un homme que tu imagines m’arracher à toi, c’est un chibre et des valseuses. Comme je te l’ai dit tout à l’heure, tu savais pouvoir supplanter n’importe quelle femme et cette angoisse que tu nourris au plus profond de toi, tu la tiens justement du fait que tu n’as ni chibre, ni valseuses, et que ça te rend impuissante.

Mais je te l’ai dit, je te l’ai répété. Ce n’était pas ta faute. Tu n’y pouvais rien. Et tu dois accepter de ne pas avoir le contrôle sur certaines choses. Bien sûr, c’est facile à dire, bien sûr. Bien sûr j’ai eu envie de te frapper quand tu as retourné le couteau que je manipulais dans tes plaies, pour les plonger en les miennes, bien sûr. Bien sûr que lorsque tu as abordé Lara, tu as tapé dans le mille, bien sûr. Bien sûr que j’ai eu envie de te hurler de ne pas parler d’elle, que j’ai eu envie de te sortir des horreurs, pas pour t’aider, cette fois, mais pour te blesser. Bien sûr.

Ce soir, je ne sais pas comment je vais quitter mon fauteuil, je ne sais pas comment je vais bouger la carcasse que j’ai engoncée ici, parce que mes côtes me font mal, parce que ma lèvre fendue me lance et que j’arrive trop bien à voir ma pommette en baissant le regard… et elle est pas très belle à voir. Ce soir, comme tous les soirs, tu as su coucher ton mari, chérie. Vois comme je suis différent. Vois comme je ne m’émeus pas des autres que je croise, filles ou garçons, regarde, regarde comme j’accepte sciemment de ployer sous ton égide, comme j’aime à être conquis, comme je sais mieux que quiconque te céder et te résister dans le même temps.

Ce soir, chérie, tu l’as couché, ton mari. Pas seulement par ta force. Par ta faiblesse, aussi, par ta fragilité. Par celle que je file rejoindre, alors que je te vois bouger au creux de ces draps que j’imagine froids puisque je ne m’y tiens pas, contre toi.

Ce soir, chérie, tu l’as couché, ton mari. Et vois comme je te rejoins, que mon torse se plaque à ton dos alors que mon bras, lentement, vient barrer ta taille pour cueillir ton ventre d’une main protectrice.

Il est là, le futur, il y couve, il y dort. Ne le laissons pas être rongé par les feux de nos passés respectifs. Qu’il n’ait peur que des monstres sous son lit. Pas des fantômes de nos vies, pas des cadavres dans le placard. Ni ceux dans des puits. Ni ceux dans des cages.

J’y suis, j’y reste. Ne fantasme pas mon départ.

Tu serais déçue.

_________________
Andrea_
[Cueillette ]



C'est l'histoire d'une femme qui voulait faire crier son mari mais... il a dit oui.

Et voilà comment on se retrouve sur la route, en pleine nuit, avec un autre couple, dans l'espoir de croiser quelques personnes à détrousser.

Moi, à la base, je passais le temps. Je remuais un peu le passé histoire d'occuper la soirée que je passais en tête à tête avec un inconnu. Il se trouve qu'il était plutôt réceptif et qu'on avait plein de points communs. Il était amoureux -enfin il l'a pas dit hein ,mais j'suis pas née d'hier-, comme moi. Mais surtout c'était un ancien brigand. Le genre qui reprendrait bien son petit commerce illicite mais qui se rend bien compte que tout seul, ça va pas être simple. Surtout que le brigand, par nature, n'aime pas être seul, mais c'est un autre sujet. Sa moitié, comme la mienne, n'y connait strictement RIEN en brigandage. Le genre pucelle de truandaille.
De fil en aiguille, Rolin -oui, c'est son nom-, et moi - Moi-, avons décidé d'embarquer nos amoureux pour un petit séjour sur les routes, avec la ferme intention de les initier à la "cueillette" -le brigand ne dit pas qu'il brigande, il cueille des champignons, une sorte de nom de code-.


Alors voilà, Rolin est parti et Beren est arrivé. Je faisais pas la maline genre j'étais plutôt... tendue. Une olive dans le fondement, je t'en faisais un litre d'huile, ça te donne une idée. Alors j'ai commencé à sortir le laïus que j'avais préparé avec tout un tas d'arguments qui tenaient la route sauf que... Il a dit "oui". Genre juste "oui". Je n'ai même pas eu besoin de sortir UN argument, c'était à la limite de la déception, surtout que j'avais AUSSI préparé une petite moue boudeuse et un odieux chantage au cas où les arguments n'auraient pas suffit.
Je n'avais pas précisément envie qu'il cède hein! Je crois que j'attendais justement un "non", un "non" qui aurait pu me donner une bonne raison de bouder, qui aurait déclenché une petite engueulade ou la troisième guerre, j'sais pas, un truc, pas un simple : "oui".
Je me suis sentie amputée. Amputée du petit plaisir de le faire céder. Amputée d'une prise de bec. Amputée, en putée même.


Donc puisque j'avais un "oui" sur les bras, autant prendre les problèmes à la suite.
1- Beren n'a jamais brigandé, je le sais, je lui ai demandé et il a dit que la seule chose qu'il avait volé, c'étaient des sourires. Et ça, c'est le second problème.
2 - Beren est un poète, pas un violent. J'imagine non sans mal qu'il s'autoflagèle dès qu'il écrase par mégarde un escargot, alors truander comment dire... Chaud.
3 - Une canne et des lunettes, je crois qu'il est assez loin du voleur de base. Tout au plus il pourrait voler le compte rendu du CAC, et encore.
Je préfère m'arrêter là, je n'ai pas toute la nuit.


Un à un, nous avons pris les problèmes à bout de bras. Nous avons, J'AI tout repris. Depuis le début, et je ne m'attendais pas à ce que ça soit si compliqué dès le début.
Quand je lui ai demandé de prendre la pose du méchant, il a remonté ses manches -proprement, plié au cordeau les revers de sa manche -, il a ré-ajusté ses lunettes, il a levé les mains, croché un peu ses doigts et ...il a ronronné. Mais il me l'a assuré : il a une technique. Je ne connaissais pas la technique du chat qui ronronne, c'est tout.
Je vous passe les détails, mais il a fini par m'arrêter -je faisais la pauvrine qui allait se faire brigander- avec un -tenez vous bien- "Halte là jeune demoiselle" -vous pouvez rouler des yeux, je l'ai fait aussi, de désespoir-. J'allais intervenir parce que le " Halte là", c'est juste PAS possible. A moins d'être Karadok ou Perceval, on ne PEUT PAs dire Halte là.
Mais il a enchainé : "Auriez vous l'outrecuidance de me faire partager vos richesses?".
Et là, précisément là, j'ai dit STOP. Nan mais c'est bon quoi, ohé Beren, c'pas une demande en mariage, c't'un brigandage!

J'ai tenté une approche, moins orthodoxe, plus colorée, qui consistait simplement à lui coller des gnions en sautillant, un peu comme l'aurait fait Mohammed Ali, sauf que j'étais plus petite, plus fine, et plus enceinte. Puis de reprendre l'entrainement, à sa manière, une sorte de jeu de rôle où je jouais la paumée et lui le brigand.
On a presque touché le but -presque-, quand soudain il a improvisé un " WOOOH!", il l'a répété plusieurs fois, un peu fort, et il était puta'inement fier mais... Mais il a continué sa phrase " WOOOH Qui voilà, Auriez vous l'amabilité de" Blablabla. J'étais comme une suicidaire en haut d'une falaise, et même à l'intérieur de la taverne, j'entendais déjà les vagues m'appeler.


Ç'en est suivi un long échange entre un Beren typiquement bleu et une Moi particulièrement irritée, sur la place de la diplomatie dans la brigandage, l'intérêt ou non de politesse en plein action, les différentes zones qu'il faut viser avec ses bottes, l'interdiction formelle d'utiliser des mots de plus de deux syllabes, bla, bla, bla.
Et j'vais vous dire, j'sais pas ce que Beren aura retenu de tout ça, mais Moi, j'ai bien compris.

On est mal. On est TRÈS mal.

_________________
Andrea_
[J'aimerais être la réponses à toutes tes questions *]


La voilà la missive qui fera tout basculer. Qui m'ennivre autant qu'elle te terrifie. Les voilà les mots que j'attendais autant que tu les craignais. La voilà la discussion que nous évitions soigneusement depuis des mois.

Le rêve de ma vie qui reprend sève, l'essence même d'un voeu cher à mon coeur que j'ai touché du doigt bien trop longtemps pour l'abandonner d'un seul coup.
Le voilà le fossé qui se creuse entre nous alors que même que je te tends la missive de la discorde. Ce sourcil haussé surplombant un oeil bien plus noir qu'à son habitude. Je les vois, tes bras qui se tendent et des doigts qui se crispent alors que la rage bat en ton sein. Je suis au bord de la falaise et tu tiens en tes mains la corde qui me retiendra suspendue dans le vide, celle que tu lâcheras, peut être, si tu as peur.
Je la sens ta colère, je la vois s'insinuer sur la courbe d'une joue que tu contractes. Je la sens la peine quand ton regard à nouveau se plonge sur les mots qui noircissent cette lettre. En silence. Sans un mot. Le noir complet, dans tes yeux et dans mon coeur. Au milieu des bois. Seule. Avec pour seule compagne un être empli de colère. Ta colère. Ta colère à mon égard.

Et je ne peux pas te mentir. Et je ne peux pas te dire ce que tu voudrais entendre. Tu vois Beren, nous sommes pareils.


Tu as choisi l'éthique où j'ai choisi le larcin, peut être avais-tu raison, peut être que ce n'est pas conciliable, peut être que l'Amour ne suffit pas, peut être que c'est une connerie, cette histoire d'opposés qui s'attirent. Peut être que Cupidon s'est bien foutu de not'gueule le jour où il t'a posé sur ma route. Peut être qu'il s'est doucement marré de nous voir si vite tomber dans son piège, peut être qu'il a fait des paris, en se demandant lequel de nous deux était le moins bête, le plus terre à terre ou le plus lâche. Mais il n'a rien à perdre, Lui.
Tu allumes la pipe et je sens que tu lâches ma main. Je ne pensais qu'on puisse être côte à côte et te sentir si loin. Je ne suis plus rien, sinon cette pauvre femme qui n'aurait pas dû exister. C'est ça que je ressens. Du dédain, du dégout. Tu n'es que le reflet de l'homme que j'aime, paralysé par l'abnégation. La résignation. Oui Beren, tu lâches ma main, doucement, et je ne suis pas sûre de vouloir la rattraper.


J'aimerais être la réponse à toutes tes questions.*
J'aimerais te dire que ce n'est pas grave, qu'après tout j'ai eu mon temps. Je l'ai eu, mon ère de gloire, alors que j'arpentais les royaumes, étendard à la main, mon armée de walkyries obéissante n'attendant que mes ordres. J'aimerais te dire que je l'ai réalisé, ce rêve de toute puissance, ce souhait de domination, cette inspiration de craintes. Que c'était beau, que c'était bien, mais que ce temps est révolu, qu'il faut accepter ce temps qui passe et que je n'en éprouve aucun regret, aucune mélancolie, que lorsque je m'imagine à la porte de la mort, c'est entouré de mes enfants que je me rêve, que c'est dans tes bras que je veux soupirer une dernière fois, avant de m'éteindre irrémissiblement.

J'aimerais être la réponse à toutes tes questions.
J'aimerais te dire que c'est injuste de devoir renoncer à ces rêves, que c'est tyrannique, de devoir faire un choix. Que c'est dégueulasse de ne pas pouvoir vivre tout ce que l'on veut quand on le veut.
Mais tu ne peux pas l'entendre. Pas encore. Pas maintenant, laisse moi juste espérer encore un peu.

Je ne pourrais pas vous offrir ce que vous attendez de moi, je ne serais jamais la personne que vous attendez, que vous espérez, ce ne serait pas moi. C'est de vous ça Beren. De vous. Peut être aurais-je dû vous dire combien l'inverse était vrai aussi.
Les filles rêvent du prince charmant, de leur faire des enfants et de mourir ainsi. Dans les bras de leur Aimé, en esquissant un sourire après avoir dit tout un tas de choses ô combien niaises, de promets moi de refaire ta vie avec quelqu'un de bien, de dire à mes enfants combien j'étais une mère formidable, que je vous aime, et bla et bla. Bla. Foutaises. Ce n'est pas mon rêve ça Beren, ce n'est pas moi. Je ne veux pas être mise en terre sous un parterre de tulipes blanches, je ne veux pas qu'on vienne pleurer sur ma tombe en se rappelant combien j'étais gentille, douce et aimante. Je ne veux pas être gentille, douce et aimante. Pas seulement ça.
Non, moi je veux mourir sur un champs de bataille, je veux pisser sur un cadavre et me faire embrocher par un ennemi. Je veux m'écrouler au sol, regarder mon assassin dans les yeux et lui rire au nez. Je veux passer ma main sur le sang qui s'échapperait d'un corps qui ne m'appartiendrait déjà plus en me disant que voilà, c'est fait. Je veux pouvoir balancer une dernière fois un "crêve, suppo de Satan", un " Amenez moi d'la bière". Et t'étreindre une dernière fois. Que le soleil s'incline, que le firmament s'accomplisse, plonger dans l'infini, le gouffre sacré**. Je veux une stelle à ma gloire, une statue à mon effigie, je veux qu'on se dise que " quand même, elle avait du chien malgré son caractère de merd'". Je veux qu'on baise sur ma tombe, que la grâce s'accomplisse comme immortelle jouissance.** Je ne veux pas que tu aimes à nouveau, je veux que tu livres l'histoire de mes batailles, que nos enfants s'endorment en se disant que je n'étais pas qu'une mère mais une guerrière accomplie.


J'aimerais être la réponse à toutes tes questions.
J'aimerais ensevelir la tristesse que je ressens. J'aimerais enterrer cette missive, la trouver déraisonnable, m'offusquer. Mais pas pour son contenu, ni pour la proposition qu'il renferme. Simplement pour y avoir cru, un peu.
Pour avoir cru, que Toi, tu ferais le sacrifice de vivre mon rêve. Que tu prendrais goût, Toi aussi, à ces veillées au coin du feu. A ces soirées pleines de rires et de chants. A ces amitiés improbables qui ne rapprochent que les gens comme Moi. A ces plans, parfois foireux. A ce sentiment de toute puissance quand il faut donner l'assaut. A ce sentiment, grisant, de braver l'interdit.
Pour avoir cru, que Toi, tu voudrais goûter à ma vie.
Pour y avoir cru, tout simplement.



Mais tu es la réponse à toutes mes questions.
Laisse-moi le temps d'ouvrir d'autres horizons, d'inventer de nouveaux rêves. D'en vivre quelques uns. Embrasse moi et rappelle moi comme ça en vaut la peine. Montre moi comme le monde peut être beau même si la lumière a remplacé l'ombre.
Je saurai t'aimer comme j'aime les étoiles, jusqu'à ce qu'à nous deux nous écrivions le plus beau des poèmes. Il me semble même que je pourrais construire un empire juste pour ton sourire, **, après tout le siècle est mort, mais puisque brûlent encore les soleils aux couleurs sangs de nos amours, au coin du feu de tes yeux je me pose en testament ; ***

Mon monde n'est pas pour Toi,
Ton monde n'est pas le mien,**
Mais tu es la réponse à toutes mes questions.
Et si je peux survivre sans réaliser ce rêve, je ne peux vivre sans toi.



* : Je ne sais pas qui, mais probablement quelqu'un de très romantique. Et torturé. L'un ne va pas sans l'autre, ou peut être que si, vous avez quatre heures.
** : Saez " j'veux qu'on baise sur ma tombe."
*** : Saez " à nos Amours".

_________________
Andrea_
Je suis au fond du trou. Mais alors bien au fond. Bourganeuf, dans le Limousin. Et personne, pas un pélos à l’horizon. Niet, nada, un coup à crever seule dans le froid et que personne ne te remarque. L’avantage c’est qu’avec le temps qu’il fait, tu vas pas salir le beau paysage hein, ils te retrouveront à la fonte des neiges.
Génial.


Je sais pas ce que je déteste le plus aujourd’hui. A part mon père pour m’avoir mise au monde j’veux dire.
J’hésite j’hésite…

Le morpion pas encore né qui prend ma vessie pour un ballon de soule et qui me pette les côtes régulièrement.
La neige, qui va de paire avec le froid. Les gosses qui sont insupportables et qui me donnent des envies de faire des bonhommes de neige en les enfermant à l’intérieur.
La cousine de mon cher et tendre qui se colle un peu trop à lui et qui me donne des envies de meurtre.
Les gens. Ou plutôt l’absence de gens.

Bin j’vais vous dire, ce que je déteste le plus c’est quand vous prenez tout ça, que vous mélangez et que vous obtenez LA situation de Merd’ par excellence.
J’explique.

Il est dix heures, les enfants –tous- sont enfin habillés, j’ai réussi à m’extirper du lit seule, sans aucune aide extérieure –j’ai une technique de rouler bouler sur le côté qui va faire des jalouses-, je les colle dehors, je les compte –y en a toujours un pour se barrer- et je soumets l’idée du siècle :

Morpions, morpionnes, le temps est à la fête, boules de neige à volonté.

Si je peux me permettre, faut vous préparer psychologiquement à ce que l’idée du siècle finisse en pugilat international. Ou alors faut pas s’arrêter à une phrase et donner tout un tas de recommandations qui sur le coup, peuvent vous paraitre futiles mais qui au final, seront bien utiles.

Par exemple, moi, si j’avais su, en plus d’être restée au lit bien plus longtemps, j’aurais ajouté qu’il était interdit de mettre des cailloux dans les boules de neige, ça aurait évité à Hélias de se prendre un cocard.
Au hasard, mais les stalagmites, ceux qui montent, bah… Bah pareil, j’aurais dit qu’on les laissait où ils étaient, peut être que Victoire ne serait pas restée collé une demi heure la langue contre le glaçon en agonisant.
Puis les lacs là, ils sont gelés c’est beau, mais on est à Limoges là, pas dans les Alpes, donc la glace bah elle est pas solide solide. Du genre tu lances un bâton, elle tient, tu montes dessus, elle tient pas. Là, j’y suis pour rien, mais si Hartasn a choppé la grippe, faudra pas qu’il vienne pleurer, et encore moins qu’il la refile à toute la fratrie.

Et puis les recommandations c’est bien, mais y a pas plus mal chaussé qu’un menuisier*, alors la probabilité qu’en me levant je fasse le grand écart pour éviter une boule de neige bien tassé –merci Pauline- et que je me ramasse de tout mon long sur une flaque pas assez gelée pour être sèche, bref, la probabilité, elle était minime hein ?

Ouai, elle était minime.
Vous le direz au merveilleux bleu que je me tape sur le flanc.

Nan vraiment, je savais pas ce que je détestais le plus, mais maintenant je sais : ma vie.



* Dea n’a pas inventé l’eau chaude, on la pardonne.

_________________
Andrea_
J’ai acheté un foulard.
La probabilité pour que j’achète un foulard à la pire ennemie de ma vie, c’était combien ?


Nan parce que des ennemies, j’en ai un bon paquet, j’aime bien ça, quand je vais quelque part, je me fais des ennemis, ça me permet de ne pas oublier que je suis passée dans telle ou telle ville.
Alors y a les ennemis amis, enfin les… Y a Yohanna quoi. On s’aime et on se déteste mais au fond on s’aime. Et on se déteste. Mais on s’aime.
Et puis y a les autres. Ceux que tu tolères même si tu rêves de leur sortir les yeux des globes. Tu peux rêver que tu les tatanes mais à moins qu’ils te poussent à bout, tu ne les toucheras pas. –T’façon la merd’ ça éclabousse-
Et y a les Ennemis à buter. Ceux que t’as envie de démonter dès que tu les vois. Que rien que d’y penser t’as les mains qui te démangent et les poings qui se ferment. Ceux que tu peux pas piffrer DU TOUT. Généralement, dans cette catégorie, y a pas beaucoup de monde, tu peux pas en vouloir à la terre entière hein !

Dans cette dernière catégorie, y a Hida.
Pour vous faire un petit état des lieux, avant, j’étais mariée à Louis. Mon premier amour. C’était beau, c’était fort, blablabla, deux enfants, et. LA maitresse. Elle l’a chauffée tant qu’elle a pu, des mois que ça a duré, et à peine j’avais lourdé père et enfants que MADAME se faisait remplir par monsieur mon ex mari. –qu’était pas un ex, à l’époque, y avait pas eu de dissolution-.
La maitresse c’était Hida. Y a même eu une chanson qui a tourné, sur son compte, mais si on me demande, je nierais tout lien avec les paroles.


Ça a un peu gâché ma joie, j’avoue.
Moi, j’étais arrivée, toute pimpante au marché. En formes et même très en forme, je pense d’ailleurs que j’irais plus vite en roulant mais je m’évertue à marcher, les jambes arquées et le bassin plus large que les épaules, autant vous dire qu’on est loin du balancement de hanches aguicheur qui m’a permis d’en at-tirer dans mes filets.
J’aurais pu chanter, mais j’étais bien trop occupée à retrouver ma respiration et à la contrôler un tant soit peu pour éviter à ressembler à un veau ayant couru le marathon. Je respirais donc, et ça prenait toute mon attention. Je me suis même nonchalamment posé contre un mur, officiellement pour profiter des rayons du soleil sur ma peau diaphane, officieusement pour reprendre mon souffle.
Et puis j’ai flâné, à mon rythme –doucement donc-, entre les étals du marché. A la recherche du cadeau idéal pour mon Berenounet. J’ai hésité entre un saucisson et une côte de bœuf, mais j’ai finalement opté pour un sandwich au blanc de poulet cornichon qui sentait tellement bon que je l’ai mangé, en juif, dans une ruelle où je m’étais –encore- posée pour réfléchir –et calmer les crampes qui prenaient les tripes-.
J’ai donc refait un tour de marché, en évitant de justesse un point de côté et je suis tombée sur LE foulard. Le genre de truc doux et soyeux, qui coûte un rein et la peau des roupettes. Importé, à n’en point douter, mais je suis POUR la délocalisation des entreprises, surtout quand c’est original –et moins cher que le mèd’ in France.
Alors je l’ai senti, je l’ai touché, je l’ai soupesé, et j’ai demandé à ce qu’on me l’emballe fissa. J’ai cherché mes pièces, je les ai comptées. Je l’ai tendu à l’encapuchonnée de vendeuse.
J’ai pris mon paquet, je l’ai fourré dans ma besace –que je ne peux plus porter en bandoulière tant mon bide a pris de l’ampleur-, j’ai amorcé un demi tour et elle m’a remercié.

Et c’est là, PILE au « merci » que j’ai reconnu sa voix. On me le fait pas à moi hein, j’oublie les prénoms et les visages mais pas les voix.


Je me suis retournée. Je l’ai fixée. Je me suis approchée, j’ai sauté par-dessus son étal. Je lui ai défoncé la tronche à coups de poings, j’ai Sali ses bottes avec les miennes, j’ai enfoncé mes ongles dans ses yeux et mes dents sur son nez jusqu’à ce que le sang dans ma bouche m’indique que j’en avais arraché un bout. Et je l’ai laissé là, gisant dans son sang.
Enfin ça, c’est ce que je voulais faire.
Mais j’vous jure que l’effort fourni pour le demi-tour m’a coupé l’envie de faire quoique ce soit.
Je me suis donc contentée d’un :


La putinerie ne suffit plus à ton train de vie ? Après les culottes tu fais dans le foulard maintenant ?


Ça a suffit à mon bonheur.
Et j’ai même pu faire le retour sans pause. Une seconde jeunesse j’vous dis.
Comme quoi, acheter un foulard donne des pouvoirs insoupçonnés.

_________________
Andrea_
Fais moi Confiance.


Tu ne sais pas ce dont je suis capable par Amour, et comment le pourrais tu ? Je ne vais pas te balancer tous mes exploits passés, tu sais que je suis capable du pire, tu découvriras, avec le temps que je peux aussi le meilleur.
Laisse le temps au temps. Laisse-le apaiser les douleurs d’hier et les craintes de demain. Laisse lui le temps présent, profite, savoure, offusque toi, guide moi, ne m’attaches pas.
Tu sais, j’ai toujours aimé les méchants, les gars bien salissants, ceux qui ont de la poigne, à qui il est facile de répondre, sur qui je n’avais pas peur de cracher, de frapper même, parfois. Je n’avais pas demandé à rencontrer un homme comme toi. Et tu as détruit tous mes préjugés, tu as pris une à une toutes les barrières que j’avais dressée pour ne pas ressembler à toutes ces femmes soumises qui courent après leur époux, les supplie de les garder et de ne pas les abandonner. Tu en as fait un énorme feu de joie que je ne cesse d’alimenter de peur qu’il ne s’éteigne.

Fais-moi confiance, rien qu’une fois.

Ma vie n’est pas la tienne, et nous n’y pourrons rien, c’est ainsi.
Tu pourrais être mon choix involontaire, de vivre ma vie jusqu’au bout, tu pourrais être celui que j’aimerai toujours, tu pourrais être celui qui écoute mes questions les plus indiscrètes.
Je serai là dès que je le pourrai mais je suis occupée à réparer les morceaux cassés de la vie que j’ai eu avant, d’abord il y a eu ceux qui ont défié, tous mes rêves et tout mon équilibre même s’ils ne pourront jamais être aussi bien que toi. Oui, tu pourrais être mon choix involontaire*, mais je t’ai choisi, on avance non ?

Ceci est notre histoire, qu’on le veuille ou non, alors ce feu, oui, je l’entretiens. De gré ou de force, de rires ou de colères, de gestes tendres, parfois d’un soupçon de jalousie que je ne prends même plus la peine de cacher. Je renais lentement à la vie, tu effaces les ombres du passé**, et ce ventre qui s’arrondit nous y aide, malgré tout, avouons le.
Je lui écrirais, à cet enfant, sans faux semblants, sans raccourcis : « Sache reconnaître l’amour à temps, tu ne le croiseras pas souvent. Dans tout ce que tu feras sois vrai, reste fidèle à qui tu es »**. Et j’espère que vous ne me contredirez pas, Beren. J’espère qu’alors, vos yeux verts entourés de pattes d’oies, plongeront dans les miens -pas ridés- et qu’ensemble nous tourneront la tête vers notre chère tête blonde pour lui que j’avais raison, que nous avons réussi. Malgré nos différences. Malgré les disputes. Malgré les tentations et le temps qui passe.

Je fuis un peu, prétextant le voyage, la fatigue. Je ne sais comment aborder le sujet qui me préoccupe. C’est qu’il est facile, pour nous, de fermer les yeux et de se contenter d’œillères lorsqu’on les rouvre un peu trop longtemps. Mais cessons le mensonge Beren, ce que vit votre cousine nous pend au nez. Nous aussi nous le, et depuis le premier jour. Pourtant on se bat, encore et… il me semblait que nous arrivions.
Je t’ai des yeux pour les aveugles et des battements cardiaques pour le mari d’la veuve. Je t’ai promis des jambes pour nos idées cul-de-jatte, l’Andorre, médaille à ton veston, je t’ai promis mille campagnes à défendre tes opinions, mais surtout, je t’ai promis une route, qui, sans doute, ne menait à rien, pour que tu ne partes pas trop loin.***

Et les promesses…


***

Je suis désolé.
Tu avais promis Louis ! Tu avais promis, tu avais craché tu… tu m’avais promis !
A trop faire de promesses, on ne peut toutes les tenir.
J’ai respecté la seule et unique promesse que je t’ai faite, et je suis encore là aujourd’hui, à me pavaner devant toi malgré les cornes que tu m’as taillées sur mesure. Alors regarde-moi Louis. Observe moi, et imprime bien ce visage car je te promets que la prochaine fois que tu le verras, il accompagnera ton dernier souffle. Je te jure d’y arriver moi, je te jure de les tenir, toutes.
Et je mettais, encore aujourd’hui, un point d’honneur à les tenir, aussi rares étaient elles.


***

Quoiqu’il en coûte. Contre vents et marées je les tenais. Alors, plus l’échéance approchait, et plus je me devais d’honorer l’ultime.

Le grand bureau est à peine éclairé, le papier subit les ombres d’une flamme qui vacille dangereusement au gré du souffle Colombesque. La nuit couvre la ville depuis plusieurs heures et seuls quelques oiseaux osent bafouer le silence assourdissant de la nuit. L’heure est propice à la réflexion, loin du brouhaha incessant des enfants et des tumultes qu’ils peuvent causer, loin des yeux qu’un mari protecteur pourrait jeter au dessus de ses épaules pour lire ce qui n’a pas encore franchit la plume.

Les yeux d’acier sont cernés, le visage a les traits tirés d’avoir trop pensé, la nuque est douloureuse, tableau sombre en coin de chambre. Seul un couple de lèvres framboisines ose célébrer la vie qu’une grappe de dents essaye de décrocher. Nulle gourmandise pourtant, seulement des tourments.





Je t’avais promis, dès nos premiers échanges, d’être toujours honnête. De te dire la vérité, quoiqu’il en coûte, sans craindre l’impact que tout ce que je dirais aurait sur toi.

Alors nous y voilà. J’ai failli.
Je ne t’ai pas menti, j’ai juste failli à ma promesse.
J’ai cru pourtant, que cette fois, je tenais l’histoire de ma vie, que je pourrais baisser les armes et dormir en paix. J’ai cru qu’en me tenant par la main, tu me tiendrais par la vie.
Je ne suis pas heureuse Beren. Cette vie ne me convient pas. Peut être que c’est mon destin, de ne jamais trouver ma place dans ce monde qui m’est étranger et de faire souffrir, inlassablement, toutes les personnes qui m’ont tendu la main, à un moment ou un autre.

Même si le temps passe, jamais je n’oublie le souvenir de ma vie gravée en moi ; les nuits blanches, les insomnies, les rêves que j’ai nourri au son de ta voix. Les barrières que j’ai du franchir seule, j’ai du partir chercher ma chance, avec ta force j’ai pu construire seule mon avenir malgré le silence Jamais je n’oublie l’amour qui a nourri chacune de mes heures, pardonne moi pour ce que je n’ai pas dit pour tous ces mots qui réchauffent mon cœur. Les barrières, que j’ai du franchir seule. Je vois à travers tes yeux chaque jour blottie contre toi, j’en ai tant voulu au ciel du noir tout de moi, c’est pour toi que je me bats. ****

Mais je ne peux plus me battre pour deux. Je ne peux plus voir ta souffrance et fermer égoïstement les yeux. Je ne peux plus te dire que tout va bien quand à l’intérieur, mon âme se révolte à m’en donner la nausée. Tu te bats seul Beren, tu te bats pour une cause que je ne défends plus depuis longtemps. Tu défends la veuve et l’orphelin, tu t’épuises pour quoi au juste ? Mon honneur ?
Mon honneur, sérieusement Beren, il s’est fait la malle depuis bien longtemps, et plusieurs fois. Quand j’ai épousé Louis. Et Marc. Quand j’ai laissé mes enfants grandir loin de moi. Quand j’ai quitté ma vie d’errances pour une vie de voyages touristiques. Quand j’ai renié mon passé pour t’épouser, toi, bien loin des standards de ma vie.

Toute ta putain de vie à mes côtés, tu vas souffrir Beren. Du regard des autres, de leurs paroles, des cancans qu’ils vont te rapporter après les avoir déformés, et amplifiés. Des injures, des insultes. Des hommes qui ne feront pas la différence entre la moi d’avant et celle qu’ils ont en face d’eux. De ceux qui se ficheront de l’anneau que tu as poussé autour de mon doigt, de l’enfant qui dort à mes côtés.

Et si toute cette putain de vie, tu dois la passer à ne dormir que sur une oreille, à te demander ce que je prépare. Et si toute cette putain de vie tu la gâches à te faire des ennemis, à fuir les autres pour sauver mon honneur qui n’existe que dans tes pensées. Et si toute cette putain de vie te fatiguait au point de devoir t’éloigner de moi au point de ne jamais revenir ? Et si cette putain de vie Beren, tu l’abrégeais un beau matin car tu ne la supportais plus ?

Et si…
Pardon.


Tu vois, je suis capable du pire, même de te quitter par Amour, quand j’en serais prête.
Alors, comme on ne fait pas de régime en habitant au dessus d’une boulangerie, j’ai besoin de partir loin de ceux qui hantent notre vie.



* Traduction d’Unintended, Muse.
** Une lettre à l’enfant que j’étais, Johnny Hallyday (oui, j’ai osé)
*** Soan, pas pour lui.
**** Jane Constance, A travers tes yeux.

_________________
Andrea_
[Brigandage pour les nuls débutants.]


Après les formules de politesse, les excuses faite au mâle brigandé,
Après avoir intentionnellement saboté mon matériel pour que je ne sois plus opérationnelle –il a quand été jusqu’à me piquer ma bûche de bois et j’ai dû lancer l’assaut armée d’une ESPADRILLE-,
J’ai eu besoin de m’isoler. Officiellement pour la petite commission, officieusement pour la grosse. Et c’pas facile, de démouler en plein air, mais rassurez vous, j’ai pu trouver un coin isolé. J’avoue que j’ai été surprise par l’hiver, et l’absence de feuilles sur les arbres, mais être brigand c’est aussi savoir improviser, alors… Alors voilà, je n’ai plus qu’un bas, mais celui qui reste est propre !

Bref, Beren, dans son immense bonté, a décidé de bien faire. Il a décidé de se donner à fond, de tout donner. J’ai bien vu, en allant au petit coin, qu’il était empli de bonne volonté, d’une envie de renouveau, qu’il avait vraiment la niaque. Nan mais c’est vrai, je sais au fond de moi qu’il en est capable, et qui sait, peut être qu’un jour, avec …. Avec beaucoup de patience de ma part et…. Beaucoup d’entrainement, il pourra devenir LE brigand que tous les groupes s’arracheront. Mais pas demain quoi. Ni après demain. Ni le mois prochain. Peut être en fin d’année ou… Ou pas. Mais on sait jamais hein !
Alors j’étais là, accroupie, à galérer pour me relever sans marcher dans mon cake, et c’est pas facile quand t’es enceinte jusqu’aux dents, c’est vraiment. Pas. Et merd’… Ah non, c’était que de la mousse.
Et c’est là que j’ai reçu un pigexpress. C’est comme un pigeon mais c’est plus petit, plus rapide, avec une forme aérodynamique prouvée. Ça sentait la fleur, c’était bien plié, et à voir les gouttes de sang, c’était typiquement Berenesque.





Chérie !

Vous allez être TROP fière de moi! Comme vous l'allez pouvoir constater, j'ai mis les petits plats dans les grands pour notre escapade champêtre, et, comme j'ai insisté pour préparer moi-même mes malles, j'y ai mis ce qui me semble être LA tenue de camouflage PARFAITE, celle qui, indispensable, saura porter aux nues mes ambitions brigandes.

Tout ceci est mûrement réfléchi : la chemise jaune, c'est pour vous aider à me repérer sous la lune, et le bonnet rouge, parce que ça fait révolutionnaire, sanguinaire et, il faut bien l'avouer, un peu pirate. J'espère que les braies blanches ne sont pas trop salissantes, mais j'ai un léger doute. Pour être libre de mes mouvements, je suis même allé jusqu'à ne mettre ni ceinture ni bretelles, c'est dire ! Même mon veston est resté au placard, si j'ose dire. Je trouve ce jeu de mots très fin, j'espère que vous l'apprécierez.

J'ai entré mes braies dans mes bottes, je trouve ça nettement plus classe, non? Qu'en dites-vous ? J'ai négligemment laissé les lacets un peu défaits, je trouve que ça donne un genre "rebelle" séduisant.

Je fais des efforts pour vous satisfaire au mieux, et être le partenaire de rapines rêvé. Je vous espère conquise.

Je vous aime,

Votre Beren.

PS : J'ai quand même pris la lanterne. Je suis sûr qu'il y a des bêtes ; j'ai entendu du bruit.
PS 2 : Ne craignez rien. Je vous protège.
PS 3 : Je trouve votre pause pipi un peu longuette.
PS 4 : Le sang sur le parchemin, c'est parce que je m'y suis coupé l'index. Dans le doute, j'ai fait un garrot.
PS 4 : ... Il faut revenir, maintenant. J'ai cru entendre un sanglier.
PS 5 : Peut-être était-ce un ours.
PS 6 : N'ayez pas peur. Je viens vous chercher.



J’étais saisie. Frustrée. Lasse. Désespérée. Blasée. Au bord du gouffre.
Heureusement pour moi, j’étais aussi terriblement amoureuse et c’est bien la seule qui faisait qu’à ce moment précis, je n’avais pas encore rebroussé chemin pour lui tordre le cou.

J’ai soupiré. Plusieurs fois. Un mélange de détresse et de découragement. L’air était soudain moins froid, mais je n’arrivais pas encore à savoir quelle en était la raison. Peut être la faute au soleil, peut être la faute à…


Put’ain de Merd’. Par courrier la description était détaillée et surprenante. En vrai c’est encore pire. Je n’ai pas assez d’yeux, j’ai besoin de lunettes de soleil en pleine nuit. Rire ou pleurer j’hésite encore, j’opte pour l’expression mitigée cochon-dinde : le sourire mi large et les narines au vent.

Vous m’avez trouvée. L’expression mitigée, et le repli, avec un peu de chance il ne va pas voir que je me retiens d’en dire plus. C’était ça ou « vous vous êtes coupé ? », mais faut savoir être originale. Et surprenante. Mais pour le coup, je suis très très surprise. Trop peut être.

h, Dieu soit loué, vous êtes là ! Evidemment, que je vous ai trouvée. Vous avez vu, je développe déjà des stratégies et des compétences de trappeur ! Ecoutez, je crois qu’il y a des bêtes. Peut-être des sangliers, des ours, des loups ou pire encore, des écureuils. Si Vous voulez mon avis, il n’y a rien qui vaille dans le coin. J’en veux pour preuve l’odeur qui embaume le lieu. Nous sommes près des enfers. Retournons auprès du feu, voulez- vous ? Vous avez vu comment je suis beau ?! Je me trouve vraiment effrayant comme ça. On va faire des ravages, ce soir ! Ce foulard rouge que vous m’avez offert est déjà signe de notre futur larcin ! ... Les bottes, c'est mieux hein, si j'y rentre les braies ? Bieeeeen, j’vois qu’il n’y a pas que moi qui suis tendue par la situation, mais visiblement, si les animaux sont la cause de sa diarrhée verbale, moi c’est tout l’inverse. Je suis en pleine contemplation du sapin de Noêl limite fluorescent qui se trouve devant moi. Et ça, y a pas à chier, ça me coupe le sifflet.

Vous êtes… Tellement… Si… Et le foulard c’est… Au secours, si Deos existe, qu’il m’envoie directement la foudre sur le coin du museau. Amen. Et le voilà qui se tourne, pour que je l’admire, et y a rien à dire hein, il est éblouissant. Il est… On ne voit que lui, je ne vois que lui, les écureuils ne voient que lui, les ours ne voient que lui, les sangliers. Les gens. Les gens à dix lieues le voient, même les aveugles. Beren est un miracle, mais c’est pas le miracle de la vie.
Cette tenue. Vous comptez porter CETTE tenue, cette nuit, pour bri-gan-der. J’articule, et je parle lentement, en insistant bien sur les mots, pour voir s’il se rend compte, lui-même que c’est à mourir de rire. Ou d’effroi, je suis vraiment pas sûre de me tenir à un seul adjectif.

    Lui sourit, béatement, voyant à quel point l’émoi qui la gagne est rassurant : elle est comblée, forcément. Elle doit clairement avoir le souffle coupé, c’est palpable ; elle en détache ses mots, c’est dire à quel point elle doit être subjuguée. Lorsqu’elle l’interroge, il éclate d’un rire sonore tout en opinant, fier de lui.


Oui !! Vous voyez que j’arrive à m’y faire, et que je peaufine déjà ma technique ! Je ne dis pas que j’encourage le coup de la bûche, hein, je reste persuadé qu’avec un peu de civilités et le sourire, on peut obtenir ce qu’on veut des gens. Mais tout-de-même, n’avez-vous pas peur que je vous fasse de l’ombre ?
Ah mais non ! Non non non, pas de l’ombre, pas. DU. TOUT. Justement Beren, c’est tout le contraire, c’est la lumière que je crains, c’est que les gens qu’on est censé surprendre, vous voient et nous filent entre les doigts. J’ai envie d’éclater, je parle pas de mon ventre là, mais de ma colère. Je sens ma patience s’envoler et je n’ai pas les bras assez longs pour la rattraper. C’est désolant. Le spectacle est désolant. Mais je garde le sourire et je tente …. Le Tact.
C’est juste… On vous voit. Genre… beaucoup. Je n’ai toujours vu que vous mais là c’est le monde entier qui vous voit. De loin. J’ai peur que ça… attire les sangliers. Avec une pointe de mensonge, c’est fourbe, c’est vil, mais là c’est la seule version non censurable qui me vient.

Oh.Oui, parce que l’idée d’attirer les sangliers, ça n’est pas du tout flatteur. Encore que l’idée de provoquer une attirance animale, ça… ça, c’est assez bon pour l’ego. Mais il aurait préféré, clairement, qu’il s’agisse plutôt de la rendre sauvage, elle. Non, vraiment, la perspective de se faire charger le fait plutôt soudain paniquer, et tourner la tête de droite et de gauche, tout en s’accroupissant.
Mais croyez-vous que c’est risqué ? Il faut que je me change, non ? Je dois avoir un merveilleux chandail vert émeraude et des braies marron, ça fera camouflage, non ? C’est quand même pitié d’ôter votre joli foulard… J’en suis bien marri, chérie. Le voilà qui évolue, toujours accroupi, avec la démarche mal assurée d’un canard boiteux et qui chuchote :
Il me semble plus prudent de retourner au campement comme ça… Par où est-ce ?

Je retiens ma main qui a soudain l’envie de s’écraser sur mon front. C’est vrai, c’est bien connu, que les sangliers ne chargent pas les gens accroupis. Tout le monde le sait hein ? Non ? Non. Vous pensez que si je lui demande d’imiter le loup pour faire peur aux sangliers il le fera ? J’avais déjà envie de lui proposer un brigandage nudiste histoire qu’il se débarrasse de ses fringues…
Mais déjà je retrouve le courage, et par la même mon rôle de « tuteur es brigandage ».


Voilà. Le camouflage c’est mieux. C’est… Beren, le but c’est d’être discret. Oui je sais, je suis dure et sans cœur, vous pouvez vous moucher dans son foulard.
On s’habille en sombre, et si vraiment vous tenez à ce foulard –qui m’a couté un bras et demi-, mettez le sur le bas de votre visage pour éviter qu’on vous reconnaisse. Ce qui sous entend donc que vous cessez de donner votre nom en vous présentant. Et… Faites vos lacets. Ouai, c’est peut être un détail pour vous mais j’ai pas envie de le voir s’étaler et risquer de se faire mal.
Et bientôt le coup de grâce.


Et on va éteindre le feu. Discrétion oblige.


Et on n’était pas au bout de nos peines.
_________________
Andrea_
[Un jour, l’élève devient le maître.]



Je crois qu’on a trouvé notre rythme de vie. Un peu sur les chemins, un peu dans les villes, le principal c’est d’être ensemble.
Le pire, c’est que mon Blond prend goût à tout ça, et j’avoue que je fais beaucoup moins la maline. J’en suis pas encore rendue à me méfier de lui quand je me balade avec un peu d’oseille dans les poches mais disons que je vais pas non plus tenter le diable.

Tiens, hier par exemple. Le feu était déjà éteint, on était en position, Beren derrière moi donc, en train de claquer des dents, soit disant de froid, je fais semblant de le croire mais je sais que c’est pour faire fuir les animaux, mais je dis rien, il a rangé son clairon vous voyez, faut savoir l’encourager. Et puis avec le bol qu’on a et sa façon de toujours me rejeter la faute dessus, il serait capable de se faire attaquer par un animal sauvage et ça serait de ma faute, alors je l’aime oui, mais j’ai pas envie d’en entendre parler pendant des années hein. Donc bref, il claque des dents, il reste derrière moi et tout le monde est content.

Nous étions en place depuis au moins douze minutes quand j’ai eu besoin d’aller changer l’eau des patates aka pisser. Je l’ai donc laissé là, en lui demandant de compter jusqu’à trente –et de pas faire de bruits, et de pas parler au gens qu’ils connaissaient pas, et en lui rappelant le but de notre nuit-.
J’ai donc fait ma petite affaire et à mon retour, surprise de ma vie, un tas de bouteilles de lait, un tas de bois, une bourse bien remplie, le tout à côté d’une femme visiblement amochée et inconsciente et d’un Beren en transe.
Quand je dis en transe, c’était pas : roulé en boule en train de se balancer d’avant en arrière en priant sa mère de lui pardonner hein, c’était plus le genre révolté le Blond.
Dans ces moments là, j’ai fait ce que toute femme aurait fait, j’ai regardé si la dite pigeonnée avait la bouche souillée et le pantalon descendu, et comme c’était pas le cas, j’ai repris ma vie comme si je n’avais rien vu. C'est-à-dire que j’aurais rien trouvé à dire et qu’en plus j’avais pas envie de féliciter mon mari pour un truc dont il n’était pas responsable.

Parce que bien sûr, c’était pas lui. Ça ne pouvait pas être lui. On parle de Beren là. Frapper déjà c’est un concept qui lui échappe, alors frapper une femme j’en parle même pas. La laisser inconsciente en plus de ça, et pire, lui faire les poches… Non, c’était un accident.

Je peux vous dire que toute la nuit j’ai mouliné, et Dieu sait que j’ai eu le temps vu qu’on n’a pas recroisé un seul pélos de TOUTE la nuit, et que je me suis retenue d’aller pisser de peur que le scénario recommence, un peu comme dans les films de série B avec un budget minimum, où on reprend les mêmes scènes par souci d’économie quitte à prendre le public pour des pigeons et…
Et puis j’avais des questions qui se bousculaient, mais comme Beren, lui-même ne s’en remettait pas, j’avais peur d’avoir des explications vaseuses, avec des phrases sans fin, des blancs et des balbutiements qui me montreraient clairement qu’il est en train d’essayer de me mentir, un peu comme le soir où il est allé juste boire un verre avec Constant et que le lendemain j’ai retrouvé ce cheveu sur sa veste et qu’il est devenu écarlate quand je lui ai fait remarqué, mais qu’il s’est défendu comme il a pu en disant qu’il avait la gueule de bois et aucun souvenir –et mon œil, c’est du poulet ?!-
Donc j’ai attendu le lendemain.
Après quelques heures de sommeil sous les rayons du soleil, j’ai enfin engagé la conversation.


J'étais en train de pisser Beren, je reviens et elle est KO ? Oui j’ai engagé comme ça, j’allais pas tourner autour du pot.
Vous avez vu ça ?
Avouez, vous avez trébuché et en vous rattrapant à elle, elle s'est cognée, c'est ça? Je suis un peu sceptique, ça se sent ?
Non, j’ai fait votre méthode.
Pardon ? Ma méthode consistant à montrer mes cuisses, charmer et tabasser quand mes proies sont vulnérables, je me permets donc vérifier que j’ai bien compris.
Vous n'lui avez pas montré vos attribut quand même?!
Pardon ? Au temps pour moi, il ne devait pas connaitre ma méthode.
Ah oui, ma méthode ! Mais oui… Vous lui avez tapé dessus ou… hm ?
Ben… Elle a pris un sacré coup quand même, pis par derrière, elle a rien vu venir celle là ! J'ai paniqué quand ma méthode a pas fonctionnée, elle m'est passée devant, j'ai chopé le premier truc qui venait, et je lui ai éclaté sur l'arrière de la tête. Je deviens sacrément violent, hein. J’aime pas qu’on me passe à côté.
Berdol… C’est le Berdol qui m’a assise. J’étais sur le cul, littéralement. Choquée. Fière un peu aussi, mais putai*inement choquée. Qu’avais-je donc fait ? Où était passé mon tendre amour ? En avais-je fait un monstre ?

Note pour plus tard : ne pas lui passer à côté.
Je remerciais le ciel que ce qui se trouvait à côté de lui soit un bout de bois et non une châtaigne car le résultat n’aurait pas été le même, mais Wouaou ! Quel homme !

J’avais peut être raté ma nuit en allant pisser au mauvais moment, mais j’avais réussi ma vie en épousant cet homme.

Maintenant il me restait à lui expliquer qu’une partie de son butin devrait rester sur place parce qu’en laissant la gonzesse repartir il lui avait laissé sa charrette.

_________________
Andrea_
Tu quittes une vie pour une autre, moins rangée, moins réfléchie. Tu troques une famille contre une autre, où les liens du sang n’ont plus leurs places. Tu échanges une ville contre une autre, toutes les mêmes au final.
Tu refuses les compromis. Tu te réveilles avec la certitude que tu étouffes, que rien ne pourra te sauver sinon rassembler quelques affaires et partir. Tu sors l’homme de main d’un sommeil sans rêves et tu l’envies, le chanceux, de pouvoir fermer les yeux pour se reposer. Tu ne penses pas, tu fonces, tu écris la lettre qui changera ton destin à tout jamais, en cherchant d’abord tes mots, puis en les laissant glisser. Tu embrasses un à un tes enfants, ceux que tu abandonnes encore une fois, tu ne leurs dit pas Adieu, mais au revoir, de ça seulement tu es persuadée.
Tu passes une dernière fois ta main au dessus d’un corps que tu as étreint mille fois, et que tu continueras d’étreindre, en sueur, le souffle court, dans tes songes quand la nuit, peut être un jour, te donnera un peu de répit. Tu ne mêles pas tes doigts à la crinière blonde pour ne pas le réveiller. Tu crains de croiser son regard depuis quelques jours ce n’est pas pour le croiser maintenant que tu pars.

Tu pars, sans prévenir, abandonnant ici une vie qui ne te convient pas, ou plus, et tu repousses dans un soupir les doutes qui t’assaillent. Tu étouffes, et tu sais que seul l’immensité du nouveau monde qui te tend les bras saura apaiser ton souffle, alors, oui tu pars.

Tu te surprends à refaire des plans, tu retrouves rapidement la souplesse qui autrefois ont fait ta renommée. Tu avances, féline dans ce monde que tu redécouvres avec la même curiosité qu’autrefois. Tu es, et tu resteras la Colombe. Et tu t’en persuades, tu créés l’illusion avec une facilité déconcertante, ton masque bien vissé sur le visage. Tu mens. Tu mens comme tu respires, sourire au bec, carnassière, tranchante, dominatrice. Tu deviens cet être torturé que rien n’arrête. Tu as la puissance, tu as le contrôle.


Ce contrôle que tu perds dès que la porte d’une chambre louée pour la nuit se ferme. Que la nuit t’enveloppe en te laissant seule, en tête à tête avec toi-même. Ce toi-même que tu ne reconnais plus, que tu regardes comme si ton esprit se détachait de ton corps. Ce corps qui s’agite, frappe, gronde, maltraite, que l’esprit tente de raisonner. Cet esprit, qui calcule sa vengeance avec cette perfection perfide qui distingue les gens faibles, s’amusant à zoomer sur une alliance, un pendentif, une douleur aux seins que tu bandes le plus souvent pour oublier qu’il n’y a pas si longtemps, un petit blond y prenait son repas.


Mais dans le marasme d’une vie tu as un allié dont tu ne sais rien, sinon qu’il a ce besoin vital de liberté. Faire du mal pour exister. Se faire du bien pour oublier.

Oublier qu’il serait bien plus simple de crever.

_________________
Andrea_
Et regarde-toi, pauvre petite chose agonisant dans des bras qui ne sont pas les siens.
Regarde-toi, lui tenir tête comme si ton honneur en dépendait, comme si céder sur la couleur d’une chemise changerait ta vie à tout jamais, comme si tu en avais quelque chose à foutre de cette chemise. Regarde toi, jouer un rôle qui n’a jamais été le tien que dans les pires instants de ta put’ain de vie, dans un monde qui ne t’a jamais porté, auprès de gens dont tu détestes tout à commencer par l’odeur.
Regarde-toi t’auto-persuader que tu as fait le bon choix, prendre ton pied entre deux cuisses, serrer ce ruban autour de tes doigts jusqu’à ce qu’il te soit douloureux dès qu’un enfant s’approche de toi ou qu’une jeune épouse embrasse tendrement son mari.
Regarde-toi, redevenir à nouveau celle que tu fuis chaque fois, celle que tu finis par renier, exécrer, par dégueuler tellement elle te dégoute pour, inlassablement, reprendre sa place. Tu fuis la famille et finit par ne rêver que d’elle, tu fuis la rapine pour ne penser qu’à elle. Que fuis-tu réellement sinon toi-même ?

Tu souhaites montrer aux gens ce qu’ils ne devraient pas voir, un monde sans eux, un monde sans loi ni contrôle, sans limites ni frontières, un monde où tout est possible.* Mensonge. Utopie.

Pourtant tu y crois.
Tout devient flou, muée d’un besoin irrépressible de liberté et une soif d’argent, tu uses et abuses de chacun des sept péchés capitaux dans le but ultime d’arracher des chaines encore brillantes d’un mariage qui puait l’amour et la tendresse.
Pourtant Toi seule à la clé, encore faudrait-il la trouver.

De nœud en nœud, de ville en ville, de duché en duché, tu écumes toutes les tavernes que tu croises chipant, comme il est tradition depuis des mois, à chacune une chope. Une chope, et désormais le bouchon d’une bouteille -Calamophle, camisophile, chinosphéréphile, colombopgile, échéphile, scalaglobuphile, et tout un tas de mots en phile, d’ailleurs tu collectionnes les collections, et y a même pas un nom chiant pour expliquer le phénomène-. Tu bois pour oublier. Et tu oublies d’oublier.


A peine la route reprise que déjà les pigeons affluent, certains plus lourds que d’autres. Les missives sont classées, les plus importantes à droite, du plus offrant au moins foireux. Les lettres privées rejoignent le centre et seront traitées en priorité. Les amis envoyant leurs félicitations, leurs condoléances ou réclamant un peu d’oseille rejoignent expressément l’âtre où ils brûleront sans suite. Une seule lettre trouve refuge dans le repli de son corset, d’où elle dégage un peu de chaleur à l’âme et au corps. Une lettre signée d’un B, qui plus que le bas d’un parchemin s’est gravé dans ton cœur.


Pourtant au milieu de ce marasme, la vie t’offre parfois, au détour d’une taverne, d’agréables surprises comme ce maire –Oui Soro, c’est de toi qu’on parle, coucou !-, qui s’est jeté à tes pieds pour me supplier –c’est le mot employé- de ne pas attaquer sa mairie.
Du coup tu t’interroges : Est-ce ta renommée qui t’a précédée ou avait-il simplement envie de te toucher les panards ?

De sujets qui fâchent en petits bonheurs simplistes, de rires gras en souffles coupés, de joutes verbales en chopes brisées, la seule chose que tu n’as pas oublié, c’est bien de vivre.



* Tiré de Matrix.

_________________
Andrea_
[Ma, Mon, Mes.]


Y a un truc que je déteste, c’est qu’on prenne mes affaires.
Autant je suis partisane du « ce qui est à toi est à moi », autant je n’ai toujours pas intégré l’inverse.
Encore que même ce concept de partage unilatéral me laisse sans voix quand il concerne certaines choses. Perso, ça m’viendrait même pas à l’idée d’piquer la culotte de ma sœur ou la brosse à dents de mon frère, même en ayant bu, bien qu’en y réfléchissant, en étant très saoule, je ferais sûrement bien pire que ça avec ma fratrie mais ce n’est pas le sujet.

Le sujet ce sont MES affaires. MES. Les miennes. Si je me casse le cul à ajouter un possessif, c’est pas pour que tu puisses te servir impunément. Ou alors, tu fais comme moi, et tu la joues intelligent. Moi quand je prends soin de te faire les poches, j’attends que tu dormes et je subtilise. Je n’emprunte pas, et si jamais une once de bonté me passait par le bocal et que ça devait arriver, je prendrais soin, MOI, d’effacer les indices.

C'est-à-dire que si, au hasard hein, il me prenait l’envie de me brosser les cheveux, et que –ô miiiince- je n’avais ni brosse ni peigne, peut être –peut être- que j’aurais pris la confiance et que je serais allée EMPRUNTER celle d’un autre. Que je connais bien. Après avoir inspecté l’odeur. La présence de poux. De croutes. De pellicules. De… Bon imaginons que j’aurais emprunté ton peigne, bah après m’être coiffée, j’aurais pris son de… de ? De ??? De retirer MES cheveux oui. Pas parce que ce sont MES cheveux, mais parce que c’est TON peigne, et que tu y tiens à TON peigne, et que j’aimerais pas que tu me crames bêtement en retrouvant MON cheveu sur TON peigne. C’t’aussi simple que ça.

Mais pas pour tout le monde. Sinon on aurait épargné aux voisins de chambrée une petite crise Colombesque.


Un poil. Un poil de CUL, je suis SÛRE que c’est un poil, c’pas possible d’avoir les cheveux dans cet état, il connait pas l’hydratation capillaire celui-ci ? Il connait pas les… On peut RIEN laisser trainer, RIEN. C’est quand même dingue cette manière de servir de mes affaires, c’était journée porte ouverte et personne ne m’a prévenu ? Mais de mieux en mieux, j’t’en prie Ansoald, prend mon peigne, mes rubans et même mes braies tiens, fais toi plaisir ! Et bla et bla et blablabla…


Et c’est suite à ça que je lui ai volé son dé, un prêté pour un pas rendu.
Et j’sais pas ce qu’il a de magique ce dé, mais l’Ansoald, il déploie trésors d’ingéniosité pour le récupérer. Alors bien sûr il fait le mec qui s’en tamponne le coquillard –avec une babouche taille 42- mais dès qu’il en a l’occasion, il rabâche à qui mieux mieux que c’est son dé.
Sans entrer dans les détails –mais vous aimeriez au moins autant que moi-, il a été jusqu’à fouiller partout –vraiment partout- pour le retrouver. C’qu’est con –pour lui-, c’est que je l’avais simplement mis dans ma poche. M’enfin son inspection l’avait trop fatigué pour qu’il y glisse la main.

Tiens, ce soir encore. J’ai dit que j’voulais jouer aux cartes, et il a dit oui –l’est pas trop chiant le gars-. Moi j’y connais rien aux cartes, strictement rien, je paye quand il faut, quand j’ai des cartes rouges je mise, quand c’est trop sombre je me couche, jusque là ça n’a jamais vraiment joué en ma faveur, mais cette fois, à croire que l’Bon Dieu était avec moi –et pourtant je l’avais un peu sali en souillant sa maison-, bref, cette fois, vas-y que je commence à tout perdre, que je commence à grommeler un peu, que je commence à perdre patience et HOP. Cul bordé d’feuilles de coquelicots : du rouge à foison. Des rois, des valets, des dix, j’étais dé-gou-tée parce que je les avais en double, je voyais pas l’intérêt d’avoir deux cartes pareilles, mais je continue, je suis une battante moi.
Jusqu’au deux final –ouai, un deux-. Bim, je pense que tout est perdu, l’Anso’ voit ma mine déconfite et balance tout le reste de son pognon sur la table, trois écus et des miettes, alors moi, forcément, j’hésite. J’me dis que je ferais mieux de mettre la même somme que lui, mais bon, il a plus rien, alors je fais pareil. Je donne tout.

Et j’lui ai tout baisé.
Tout. Vraiment tout. La bouche, le pognon, le dé et l’olisbos –copie parfaite de celui qu’il a entre les jambes, mais plus dur, et plus froid- et moins vivant- et moins, bref-. Et sa bonne humeur aussi.

Mais après tout, c’est SA bonne humeur, j’peux bien lui laisser.

_________________
Andrea_
[Monastère. ]


Quelques jours d’arrêts.
Assez pour en redemander, pas assez pour croire en Deos. Mais je m’améliore, j’avance comme dirait l’autre, et il se murmure même que j’ai été touchée par la grâce.
Moi, j’voulais pas y croire, y a qu’à voir la tête que j’ai faite quand l’Abbé m’a regardé droit dans les yeux et m’a fait des trucs avec ses mains –flippant les trucs-, j’étais à deux doigts de faire un malaise, persuadée qu’il m’avait gourouté la tronche.
Mais j’avais gagné aux cartes. Et j’avais compris tout ce qu’Edvald m’avait raconté sur la religion.
J’avais même mangé des légumes sans grimacer et bu une tisane. Bu. Une. Tisane. Pas jetée en douce dans un pot de fleurs, bu. La grâce j’vous dis.

J’étais tellement sûre de ça, que lorsqu’Anso’ a proposé une revanche –en me trainant comme une poupée de chiffon soit dit en passant-, j’étais chaude comme la braise, persuadée de le laminer encore.
Forcément j’ai proposé son dé. Forcément il a ajouté un peu de piment au jeu.
Forcément j’ai misé. Forcément j’ai perdu.
Mais je ne retiendrais qu’une chose au final, on peut perdre et gagner en même temps.


La grâce donc.
C’est qu’ils ont tous un discours à la limite du fanatisme. Entre l’autre en bure qui me balance des gouttes d’eau sans que j’ai soif, qui me tourne autour en bougeant ses mains comme s’il tentait de virer des toiles d’araignées et qui a cette fichue manière de m’appeler ma sœur -alors que je n’suis pas sa sœur !- le tout en m’invitant bien cordialement à aller à la messe et l’Edvald, qui…
AH ouai, nan mais pour Edvald, vaut mieux que je retourne à la ligne.
Edvald donc, on parle quand même d’un gars atrophié et balafré qui se permet de te faire tout un discours sur les croyances. Alors j’veux bien être une gentille fifille –parce que quand même, c’est lui qui va nous payer-, et l’écouter raconter des histoires à faire dormir un enfant en pleine crise de croissance, je ne saisis toujours pas ce qu’il a vécu pour en arriver là. Et vas-y que j’utilise des mots compliqués comme Spinozistes, Cisterciens, et vas-y que je dénigre Rome, et vas-y qu’on est tous des frères et des sœurs. Et vas-y que la guerre c’est mal mais pas trop, que le baptême je suis pour mais pas trop, que de toutes façons je n’ai pas de Dieu mais l’Très haut me jugera. J’ai envie d’lui dire entre quatre yeux : « bon, écoute Ed’ » - je l’appelle pas Ed en vrai, mais dans ma tête je me dis que ça ferait plus amical- « Bon, écoute Ed’, faut savoir mec, t’as pas de Dieu mais l’Très haut va te juger, c’est peut être un peu ça qu’on appelle un Dieu ? ». Bah quoi, s’il suffisait de se mettre à genoux pour être une ouaille, j’en suis une.
Ah, le Ed’, il a un discours particulier. En gros, il dit qu’il faut tous se faire l’Amour mais pas la guerre, mais que même si on se faisait la guerre son Dieu oublierait et pardonnerait parce que Dieu n’est qu’Amour –et un peu porté sur la partouze si j’ai bien compris-, et qu’il suffirait pour ça de faire des offrandes et aller se confesser.
En partant de ce principe, je me demandais ce qu’il entendait par offrandes, est ce que si je lui offre une famille de lépreux il prendrait ça pour de la générosité ? Un crime ? Une offrande ?
Une offrande, c’est aussi filer des écus. Soit. Est-ce que si je donne des écus mais qu’ils servent à payer les armes de la guerre c’est quand même considéré comme une offrande ?
Est-ce que si je vais me confesser je repars de zéro ? Ça signifierait que l’Très haut est généreux ou juste très bête ?

La religion, c’est quand même une grande zone d’ombre dans mon paysage. La religion est pour moi ce que Marc a été dans ma vie sentimentale, une énigme. Ou un truc sans importance qui en aurait peut être eu si j’avais creusé. Aaaaaah si j’avais une pelle. M’enfin j’ai eu beau en rouler à Marc ça ne m’a pas aidé alors…


Alors, touchée par la Grâce, j’ai accepté d’être Marraine. De porter une robe comme au bon vieux temps, d’être sage et même de réciter le crédo. J’sais pas encore ce que c’est mais ça a l’air chouette.
Après tout, qu’importe le lieu tant qu’y a d’la piquette.

_________________
See the RP information <<   <   1, 2, 3, ..., 16, 17, 18, 19, 20   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)