Clemence.de.lepine
Ce n'est pas Isaure qui pousse la porte la première : c'est une tête blonde qui dans l'embrasure vient se faufiler. Yolanda.
Sa sur, oui sa sur, et c'est un sourire qui l'accueille, un sourire réjoui et des yeux qui s'embrasent. Oh, Yolanda, sais-tu seulement le plaisir que tu me fais en me nommant ainsi ?
J'ai perdu une amie, une presque sur, une alter-ego et mon ombre, dans mes joies et dans mes peines. Nous n'avons pas survécu. Je me suis brûlé les ailes à trop vouloir, à tout vouloir, tout à la fois, tout en même temps. J'ai tout perdu.
Pas tout. Pas tout non, puisque te voilà Yolanda. Et comme l'Etoile du matin tu viens la première illuminer les sombres nuées pour nous montrer le chemin.
Elle l'a gagnée, elle l'a gagnée cette étoile, à la sueur de ses larmes et de ses regrets. Et c'est étrange comme la récompense lui semble à la hauteur de ses douleurs, quand elle pensait que rien ne pourrait jamais panser ses blessures, quand elle pensait qu'elle ne mériterait rien d'autre que de souffrir pour l'éternité. Se languir dans sa culpabilité. Pleurer les morts et les vivants qui ne l'aimaient plus assez.
Elle rit. De l'empressement de la petite qui ne sait rien. De ses propres ignorances et de ses appréhensions. Les deux mains jointes, l'une si fine, et froide, et l'autre chaude et potelée, et toutes deux portent encore quelques marques de cette enfance qu'on ne voudrait voir s'envoler. Clémence presse les petits doigts entre les siens, et retient la course de l'Etoile filante. Encore un peu.
La porte s'ouvre à nouveau et de blonde l'apparition se fait brune. Isaure, son sang, sa cousine puînée, la seule qui reste, au parfum de Sicile. Cueillir au vol une main avant d'être à son tour cueillie. Réunir un peu de sa jeunesse qui s'évade et serrer contre son cur celles qui, là, par leur simple présence, l'ont conduite au bonheur.
Isaure, je vais avoir besoin de ton aide pour me conduire au lit et me retirer ces couches de tissu. Et après... après... demain... j'aimerais que tu restes auprès de moi, que tu deviennes ma demoiselle de compagnie, la première, la plus importante. Nous serions toujours ensemble, tu vivrais bien, et je serais heureuse.
Elle lui glisse ces quelques mots à l'oreille, n'attend de réponse immédiate, hoche la tête et soupire.
Allons-y Yolanda. Guidez-nous.
Et de pièces en pièces, de portes en portes, elles parviennent à l'antichambre, minuscule, étriquée, dont les murs oppressants lui mettent le cerveau en bouillie et les nerfs en pelote. Tandis qu'on la défait de ses étoffes et de ses fourrures, ne lui laissant sur le corps que cette chemise de soie que ce matin elle rechignait à enfiler, elle glisse des coups dil anxieux vers la porte damnée, menaçante et moqueuse.
Nous allons dire bonne nuit à votre frère, Yolanda. Voulez-vous bien entrer avant moi et demander si tout est bien prêt pour moi... pour nous ?
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Sa sur, oui sa sur, et c'est un sourire qui l'accueille, un sourire réjoui et des yeux qui s'embrasent. Oh, Yolanda, sais-tu seulement le plaisir que tu me fais en me nommant ainsi ?
J'ai perdu une amie, une presque sur, une alter-ego et mon ombre, dans mes joies et dans mes peines. Nous n'avons pas survécu. Je me suis brûlé les ailes à trop vouloir, à tout vouloir, tout à la fois, tout en même temps. J'ai tout perdu.
Pas tout. Pas tout non, puisque te voilà Yolanda. Et comme l'Etoile du matin tu viens la première illuminer les sombres nuées pour nous montrer le chemin.
Elle l'a gagnée, elle l'a gagnée cette étoile, à la sueur de ses larmes et de ses regrets. Et c'est étrange comme la récompense lui semble à la hauteur de ses douleurs, quand elle pensait que rien ne pourrait jamais panser ses blessures, quand elle pensait qu'elle ne mériterait rien d'autre que de souffrir pour l'éternité. Se languir dans sa culpabilité. Pleurer les morts et les vivants qui ne l'aimaient plus assez.
Elle rit. De l'empressement de la petite qui ne sait rien. De ses propres ignorances et de ses appréhensions. Les deux mains jointes, l'une si fine, et froide, et l'autre chaude et potelée, et toutes deux portent encore quelques marques de cette enfance qu'on ne voudrait voir s'envoler. Clémence presse les petits doigts entre les siens, et retient la course de l'Etoile filante. Encore un peu.
La porte s'ouvre à nouveau et de blonde l'apparition se fait brune. Isaure, son sang, sa cousine puînée, la seule qui reste, au parfum de Sicile. Cueillir au vol une main avant d'être à son tour cueillie. Réunir un peu de sa jeunesse qui s'évade et serrer contre son cur celles qui, là, par leur simple présence, l'ont conduite au bonheur.
Isaure, je vais avoir besoin de ton aide pour me conduire au lit et me retirer ces couches de tissu. Et après... après... demain... j'aimerais que tu restes auprès de moi, que tu deviennes ma demoiselle de compagnie, la première, la plus importante. Nous serions toujours ensemble, tu vivrais bien, et je serais heureuse.
Elle lui glisse ces quelques mots à l'oreille, n'attend de réponse immédiate, hoche la tête et soupire.
Allons-y Yolanda. Guidez-nous.
Et de pièces en pièces, de portes en portes, elles parviennent à l'antichambre, minuscule, étriquée, dont les murs oppressants lui mettent le cerveau en bouillie et les nerfs en pelote. Tandis qu'on la défait de ses étoffes et de ses fourrures, ne lui laissant sur le corps que cette chemise de soie que ce matin elle rechignait à enfiler, elle glisse des coups dil anxieux vers la porte damnée, menaçante et moqueuse.
Nous allons dire bonne nuit à votre frère, Yolanda. Voulez-vous bien entrer avant moi et demander si tout est bien prêt pour moi... pour nous ?
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