Ayena
[Baronnie de Crussol, Château de Charmes - pénultième jour de l'an 1459 ]
Le paysage était blanc. Ou par endroit gris, jaune ou boueux. La neige faisait ses ravages, en somme. Par bonheur, elle avait cesser de tomber hier au matin. Par malheur, le timide soleil avait pris sur lui d'en faire fondre une partie, ce qui donnait cette aspect boueux et terriblement glissant à la route.
Le convoi de Crussol, comprenant le Baron et la Demoiselle, était revenu la veille de son voyage vers Limoges où ils avaient ravitaillé les soldats. Rapidement, la troupe avait élu Charmes plutôt que Crussol pour les quelques jours de repos qui suivraient : c'est que par ce temps, grimper vers Crussol aurait été une folie. Oh, bien entendu, le chemin menant vers le château de Charmes était lui aussi semé d'embuches. Mais le groupe, usé jusqu'à la moelle lui avait fait un sort, pressé de retrouver un bon feu, une bonne soupe et un bon lit.
Ce matin, l'un des derniers de l'année, l'air était vif et glacé. L'intérieur de la bâtisse seigneuriale avait été chauffée tant et si bien que d'Alquines y avait trop chaud. Aussi, au petit matin, elle avait pris l'excuse d'une prière pour sortir emmitouflée vers le dehors. Claudiquant, elle s'était rendue vers la tout petite chapelle, s'y était agenouillée un bon moment, regrettant qu'une messe ne puisse être dite à l'instant. Mais l'on était ni dimanche ni mercredi, et il lui faudrait attendre pour écouter un bon sermon. En pensant aux habitants de Mende, elle rajouta quelques bonnes paroles pour que le Très-Haut les aide à faire fuir la racaille : c'est qu'à peine arrivés, Adrien et Ayena avaient appris que des hérétiques titillaient le Languedoc. Nan, mais quelle idée... Bref. Un Credo, un Amen, et la jeune femme se releva, satisfaite. Elle se sentait toujours mieux après un moment de recueillement.
Sortie, elle fit un tour sur elle même. Elle aurait aimé pouvoir poser son séant un instant, mais le petit banc était recouvert d'une brassée de neige. Qu'à cela ne tienne. La Boiteuse, après un regard vers les fenêtres derrière lesquelles le Baron s'éveillait peut être, se dirigea vers l'endroit qui permettrait d'avoir une vue dégagée sur la vallée.
De sa bouche, à chaque respiration, sortait des nuages. Si cela aurait amusé un enfant, Ayena en fronça les sourcils, se demandant si un jour elle pourrait rencontrer un alchimiste qui lui expliquerait enfin à quoi cela était du. C'était embêtant d'être ainsi entourée de choses dont on ne comprenait pas les origines. Peut-être qu'Adrien saurait ? Il faudrait qu'elle lui pose la question.
Alors, son esprit glissa, comme souvent, vers son sujet favori. Adrien n'avait pas été insatisfait de la voir arriver à Limoges où il était déjà. Ca avait été comme naturel. Elle en avait été soulagée, elle qui ne savait qu'imaginer des scénarios catastrophes. Mais finalement, depuis bientôt 3 mois qu'ils vivaient sous le même toit (oh, en tout bien tout honneur !), ils semblaient s'apprécier. S'apprécier. Ou s'aimer. Des regards, des gestes. Ayena se doutait bien que c'était ce que l'on appelait l'amour. Parfois, elle se prenait à espérer que ça irait plus loin. Mais finalement, ce n'était pas à elle de faire le premier pas... Si ? Oh, non, ça aurait été indécent pour une femme. Et pourtant, ce n'était pas l'envie qui lui manquait.
Les joues rougies, où de la honte ressentie à ces pensées ou du froid, elle fit le constat que la vie était une chose bien compliquée. A cause des sentiments : comment allier la peur de l'inconnu et le désir de vivre un amour sincère ?
Une bourrasque de vent envola sa grosse tresse. Purée, qu'il faisait froid !
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Héraldique
Le paysage était blanc. Ou par endroit gris, jaune ou boueux. La neige faisait ses ravages, en somme. Par bonheur, elle avait cesser de tomber hier au matin. Par malheur, le timide soleil avait pris sur lui d'en faire fondre une partie, ce qui donnait cette aspect boueux et terriblement glissant à la route.
Le convoi de Crussol, comprenant le Baron et la Demoiselle, était revenu la veille de son voyage vers Limoges où ils avaient ravitaillé les soldats. Rapidement, la troupe avait élu Charmes plutôt que Crussol pour les quelques jours de repos qui suivraient : c'est que par ce temps, grimper vers Crussol aurait été une folie. Oh, bien entendu, le chemin menant vers le château de Charmes était lui aussi semé d'embuches. Mais le groupe, usé jusqu'à la moelle lui avait fait un sort, pressé de retrouver un bon feu, une bonne soupe et un bon lit.
Ce matin, l'un des derniers de l'année, l'air était vif et glacé. L'intérieur de la bâtisse seigneuriale avait été chauffée tant et si bien que d'Alquines y avait trop chaud. Aussi, au petit matin, elle avait pris l'excuse d'une prière pour sortir emmitouflée vers le dehors. Claudiquant, elle s'était rendue vers la tout petite chapelle, s'y était agenouillée un bon moment, regrettant qu'une messe ne puisse être dite à l'instant. Mais l'on était ni dimanche ni mercredi, et il lui faudrait attendre pour écouter un bon sermon. En pensant aux habitants de Mende, elle rajouta quelques bonnes paroles pour que le Très-Haut les aide à faire fuir la racaille : c'est qu'à peine arrivés, Adrien et Ayena avaient appris que des hérétiques titillaient le Languedoc. Nan, mais quelle idée... Bref. Un Credo, un Amen, et la jeune femme se releva, satisfaite. Elle se sentait toujours mieux après un moment de recueillement.
Sortie, elle fit un tour sur elle même. Elle aurait aimé pouvoir poser son séant un instant, mais le petit banc était recouvert d'une brassée de neige. Qu'à cela ne tienne. La Boiteuse, après un regard vers les fenêtres derrière lesquelles le Baron s'éveillait peut être, se dirigea vers l'endroit qui permettrait d'avoir une vue dégagée sur la vallée.
De sa bouche, à chaque respiration, sortait des nuages. Si cela aurait amusé un enfant, Ayena en fronça les sourcils, se demandant si un jour elle pourrait rencontrer un alchimiste qui lui expliquerait enfin à quoi cela était du. C'était embêtant d'être ainsi entourée de choses dont on ne comprenait pas les origines. Peut-être qu'Adrien saurait ? Il faudrait qu'elle lui pose la question.
Alors, son esprit glissa, comme souvent, vers son sujet favori. Adrien n'avait pas été insatisfait de la voir arriver à Limoges où il était déjà. Ca avait été comme naturel. Elle en avait été soulagée, elle qui ne savait qu'imaginer des scénarios catastrophes. Mais finalement, depuis bientôt 3 mois qu'ils vivaient sous le même toit (oh, en tout bien tout honneur !), ils semblaient s'apprécier. S'apprécier. Ou s'aimer. Des regards, des gestes. Ayena se doutait bien que c'était ce que l'on appelait l'amour. Parfois, elle se prenait à espérer que ça irait plus loin. Mais finalement, ce n'était pas à elle de faire le premier pas... Si ? Oh, non, ça aurait été indécent pour une femme. Et pourtant, ce n'était pas l'envie qui lui manquait.
Les joues rougies, où de la honte ressentie à ces pensées ou du froid, elle fit le constat que la vie était une chose bien compliquée. A cause des sentiments : comment allier la peur de l'inconnu et le désir de vivre un amour sincère ?
Une bourrasque de vent envola sa grosse tresse. Purée, qu'il faisait froid !
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Héraldique