Anaon
" Maudite soit la nuit aux plaisirs éphémères
Où mon ventre a conçu mon expiation ! "
[ Au premier frémissement dautomne ]
[ De lautre côté de la porte ]
_________________
Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - Montage LJD ANAON----[Clik]
Où mon ventre a conçu mon expiation ! "
- - Charles Baudelaire -
[ Au premier frémissement dautomne ]
La grande salle est calme. Cest le petit matin. Lauberge se réveille doucement avec les murmures des premiers ouvriers qui viennent boire un peu de chaleur avant dentamer leur journée de labeur. Beaucoup sont encore endormis, mais Eldrick lui est déjà sur le pied de guerre. Dune main nonchalante, il essuie les quelques verres encore sales de la veille, surveillant dun il calme les trois charpentiers qui discutent dans un coin. Le tenancier aime ces petits matins. Tranquilles. Il aime sa taverne de façon générale. Létablissement est banale, sobre, qui sait attirer une clientèle moyenne. Parfois un peu plus pauvre, parfois un peu plus riche. Une enseigne sans grande prétention, comme beaucoup dautre. Avec ces surprises comme ses magouilles. Et de magouille, il en crèche une belle à létage.
Elle était arrivée, quelque part entre Mars et Avril sil se souvient bien. Aves le faciès banales des torturés, mais qui force quon sen souvienne. Cétait une femme qui trempait dans des trucs pas très nets. Elle avait demander une chambre, elle avait payé plus pour lui imposer certaines conditions. Tant quelle paye, la chambrée lui appartient, entièrement, personne ny entre quelle soit là ou non. Et surtout, elle veut de la discrétion. Loin dêtre particulièrement impressionné par le profil il avait pourtant accepté, sur la défensive. Un mois tout dabord, avant de se rendre compte que la femme ne se payait pas sa tête et que largent quelle lui versait parfois en plus nétait pas négligeable. Depuis, elle ne lui a jamais attiré dennuie. Transparente au possible. Il ne disait rien quand il la voyait rentré avec quelque large sac de toile. Et quand elle lui posait une bourse sous le nez, il se convainquait quil ne valait mieux pas savoir ce quils contenaient. Pas particulièrement cupide le Eldrick, il savait simplement ne pas dire non aux bonnes choses. Et largent est une belle chose qui fait tourner le monde. Il lui suffisait de fermer les yeux sur ce quil ne voyait pas.
La dernière chope est posée sur létagère et le torchon est abandonné dans un coin. La grosse main ouvre une porte et la voix sapprête à héler sa femme avant de sarrêter aussi sec. Arf! Il ny a personne encore, il a du temps, autant laisser Aslade dormir. Le tenancier sempare dune corbeille de drap blanc, demander la veille par lun des hôtes. Lhomme prend alors le chemin de létage. Les escaliers sont grimpé dans le silence puis il parcoure le couloir, passe devant les portes avec discrétion. De la numéro sept séchappe des bruits étranges. Organiques. Laubergiste sarrête, tend loreille. Le poing hésite, puis cède, venant sabattre de quelque coup sur le bois de la porte.
_ LAnaon, vous allez bien?
[ De lautre côté de la porte ]
- Une fois encore elle rend au plancher la bile dacide qui lui brule la gorge. Doigts recroquevillés contre la gorge quelle nose serrer, elle en a les larmes au yeux. Ca lécorche à chaque passage et çà ne sarrête pas! Il ny a plus rien a rendre dautre dans son ventre que cette écume blanche qui lui crame le palais. Des jours que çà la prend ses nausées insupportables! Elle avait arrêter de boire, sétait forcer à manger, mais rien ne semblait vouloir calmer les caprices de son ventre. Le poing sabat sur le plancher souillé alors quelle recrache une fois de plus sa substance incendiaire.
Soudain bruit contre la porte. La tête affolée se relève, les dents se serrent. Sa respiration se stoppe. Le tenancier! Silence dans la chambre, la mercenaire se fait oublier. Aucune envie de voir du monde aujourdhui et encore moins le tavernier. Lhomme se fait patient et lAnaon pivoine alors quelle se refuse de prendre une inspiration salvatrice. Le plancher craque, le tenancier semble reprendre son chemin. La balafrée se prend une respiration précipité avant de sétouffer dans une quinte de toux douloureuse.
A genoux sur le plancher, elle tremble de fatigue, mais aussi dangoisse.
_ Non .
Dans la caboche brune, çà tourne. Ca se précise. Ca fait peur. Ca simpose. Une main vient se poser sur son ventre et ses doigts se referment sur létoffe de la chemise dune poigne nerveuse. Les azurites se perdent dans le vague. Lévidence. Elle la rejette depuis des jours car elle lui est insupportable. Pourtant Non Tout, mais pas çà. Pas çà! Dans lesprit alarmé, une nuit lui revient. Des souvenirs en soupir, des plaintes langoureuses. Des corps qui se cherchent, quémandent et se prennent. Un désir, un plaisir un homme. Une envie assouvie dans des draps éprouvés. Péché originel. Contre le ventre, la main tremble. Elle réalise. Elle se maudit la mère.
Là, plus bas, plus loin, dans lécrin... Il y a la vie.
_________________
Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - Montage LJD ANAON----[Clik]