Dioscoride.
[14 octobre 1459.]
Premières gouttes...glaciales.
Piotr, vaillant cheval de labeur, massif, rude et puissant tirait la charrette sur le chemin rocailleux qui menait au hameau accroché au flanc du Crêt de la Neige à l'ouest de Genève, là où résidait le menuisier, celui à qui commande d'un berceau et d'un petit lit avait été faite.
Avant la pierre, les premières planches d'un désir souvent évoqué, partagé, et sur le point de se réaliser : revenir chez elle, à Genève, en famille pour Phonya, s'ancrer à une vie si éloignée de celle qui fut la sienne, la découvrir, en épouser les moindres aspects et la revendiquer, pour Dioscoride.
Le temps tranchait avec les routes ensoleillées qu'ils avaient laissé dans le sud, la pluie imprévisible qui venait de franchir l'arrête montagneuse rendait la progression délicate, et sollicitait une charrette modifiée, rendu plus longue et mieux équilibrée pour transporter les multiples malles jusqu'à Genève et pour le confort de la petite famille (nous partîmes deux, mais par un prompt désir nous nous vîmes trois en arrivant au Phare)...mais aussi moins apte à subir les chocs et moins adaptée aux mauvais sentiers.
Enveloppés sous la large pelisse des temps de guerre, les amants/époux dans le fracas de l'averse sur la maigre toile au-dessus d'eux (qui ne leur servait plus vraiment d'abri, par contre pour l'ombre rien à dire...mais bon lHelvétie...) échangeaient peu, sinon des regards si intenses que de mots ils pouvaient se passer....un temps.
Et voilà que depuis qu'ils avaient commencé lascension, suite à un soubresaut, le tombereau oscillait sensiblement de droite à gauche. Perdu dans ses pensées, emporté dans les vagues des révélations de la veille le borgne ne l'avait pas remarqué immédiatement mais le balancement des bras de chaque côtés de Piotr éveilla son attention.
Ronchonnant et râlant après son inattention, il stoppa l'attelage, sauta dans la boue, manqua de glisser sur les pierres pour vérifier la charrette. Son attention se portant plus précisément sur les moyeux et les grande roues cerclées.
Le ciel s'ouvrait un peu plus pour déverser sur eux l'onde froide.
Le Borgne constata les dommages. L'essieu se fissurait sur sa partie droite, et laissait apparaitre les premières éclisses.
Il se glissa sous le véhicule pour à l'aide de sa ceinture entourer la fente béante, renonçant à la diminuer, se contenta de la maintenir fermement serrée.
Un moment dissipé dans son ouvrage par la présence de sa moitié, il songea à utiliser également les lacets de sa chemise, de ses bottes, qu'ils jugeaient souvent tout deux bien superflus...
Les dents, le bras droit pour aide, une main gauche unique, il refusa, orgueil misérable, protection exagérée, l'aide de son épouse...
_________________
Premières gouttes...glaciales.
Piotr, vaillant cheval de labeur, massif, rude et puissant tirait la charrette sur le chemin rocailleux qui menait au hameau accroché au flanc du Crêt de la Neige à l'ouest de Genève, là où résidait le menuisier, celui à qui commande d'un berceau et d'un petit lit avait été faite.
Avant la pierre, les premières planches d'un désir souvent évoqué, partagé, et sur le point de se réaliser : revenir chez elle, à Genève, en famille pour Phonya, s'ancrer à une vie si éloignée de celle qui fut la sienne, la découvrir, en épouser les moindres aspects et la revendiquer, pour Dioscoride.
Le temps tranchait avec les routes ensoleillées qu'ils avaient laissé dans le sud, la pluie imprévisible qui venait de franchir l'arrête montagneuse rendait la progression délicate, et sollicitait une charrette modifiée, rendu plus longue et mieux équilibrée pour transporter les multiples malles jusqu'à Genève et pour le confort de la petite famille (nous partîmes deux, mais par un prompt désir nous nous vîmes trois en arrivant au Phare)...mais aussi moins apte à subir les chocs et moins adaptée aux mauvais sentiers.
Enveloppés sous la large pelisse des temps de guerre, les amants/époux dans le fracas de l'averse sur la maigre toile au-dessus d'eux (qui ne leur servait plus vraiment d'abri, par contre pour l'ombre rien à dire...mais bon lHelvétie...) échangeaient peu, sinon des regards si intenses que de mots ils pouvaient se passer....un temps.
Et voilà que depuis qu'ils avaient commencé lascension, suite à un soubresaut, le tombereau oscillait sensiblement de droite à gauche. Perdu dans ses pensées, emporté dans les vagues des révélations de la veille le borgne ne l'avait pas remarqué immédiatement mais le balancement des bras de chaque côtés de Piotr éveilla son attention.
Ronchonnant et râlant après son inattention, il stoppa l'attelage, sauta dans la boue, manqua de glisser sur les pierres pour vérifier la charrette. Son attention se portant plus précisément sur les moyeux et les grande roues cerclées.
Le ciel s'ouvrait un peu plus pour déverser sur eux l'onde froide.
Le Borgne constata les dommages. L'essieu se fissurait sur sa partie droite, et laissait apparaitre les premières éclisses.
Il se glissa sous le véhicule pour à l'aide de sa ceinture entourer la fente béante, renonçant à la diminuer, se contenta de la maintenir fermement serrée.
Un moment dissipé dans son ouvrage par la présence de sa moitié, il songea à utiliser également les lacets de sa chemise, de ses bottes, qu'ils jugeaient souvent tout deux bien superflus...
Les dents, le bras droit pour aide, une main gauche unique, il refusa, orgueil misérable, protection exagérée, l'aide de son épouse...
_________________