Judas
Ce RP peut heurter la sensibilité des lecteurs non avertis...
Insomnie
Il fallait qu'il en ait le coeur net. Depuis la tragédie qui avait vu mourir le gardien de la Rose Noire dans la pièce la plus interdite du castel Petit Bolchen, Judas avait recouvré une forme relative, plus bancale qu'il n'y paraissait . Depuis les cris, le sang et le massacre qu'avaient vu les murs du castel cette fameuse nuit, Judas dormait mal, voir pas du tout. Frappé d'insomnie, ses yeux s'étaient cernés de sombre, rivalisant presque avec le bleu de son oeil poché. Sa peau pâle faisait ressortir la fatigue qui s'accumulait de soir en soir, le seigneur avait l'air moribond. L'Anaon était repartie vers Paris, le laissant avec l'image encore exsangue d'un geste fou et les conséquences qu'il impliquait.
Cette nuit, tiré de son non-sommeil par de trop sombres idées, le Von Frayner déserta sa couche pour aller hanter les corridors du castel. Le pas lent, il marqua parfois quelques pauses près des tapisseries peuplées de créatures fantasques aux cornes étranges et aux crins diaboliques. Errant, les yeux perdus dans le vague, les cheveux défaits d'avoir trop tourné en rond dans les draps froids. Mèche folle, regard creux, il fallait qu'il en ait le coeur net.
La pièce aux poisons était restée fermée depuis des jours, comme en deuil, condamnée à garder ses secrets pour elle, là derrière sa porte crainte. Nul n'avait le droit de l'ouvrir, jusqu'à ce qu'enfin le maistre des lieux en donne l'ordre. d'une gauche presque hésitante, il s'appuya au chambranle encore marqué par une trainée noircie par les jours... Interminable moment d'attente, attente non productive, vide qui comble le vide. Lorsqu'enfin la silhouette s'anime, elle s'immisce, interdite, a demi collée contre le mur. A l'intérieur, l'air est vicié. Tressaillement silencieux.
La dextre avance le candélabre qui éclaire ses pas, l'endroit n'est plus veillé depuis le drame, la petite veilleuse qui habituellement encense les précieuses fioles est morte elle aussi, certainement de solitude. Même les épeires ont déserté leur nids, laissant à Judas une impression vertigineuse de néant. Dans le halo qui se déplace lentement s'animent les reflets de mille brisures cristallines, de poisses asséchées et de poudres mélangées. Le contenu des étagères à volé en éclat, les meubles sont souillés de sombres giclées et d'indicibles désordres. Anarchie.
Sssss...
En osant un pas, Judas a marché sur les crêtes acérées d'une falaise de verre, vestige d'une bouteille dont l'étiquette semble avoir été arrachée. La plante du pied en mouvement réflexe reste suspendue entre ciel et terre, pendant que le seigneur éclaire d'un geste agité l'objet de sa blessure. Craignant une infection, ou pire, que les éclats soient ceux d'une fiole de poison, le palpitant s'emballe. Flash.
Nyam était là, avec ses cris stridents, c'est elle qui a précipité le chaos lorsque le vieux fol s'est jeté sur lui. Il revoit les menottes affolées jetant comme d'innofensibles cailloux les contenants de la mort. Les fioles du diable. Une pluie de verre qui s'éventre et qui vomit ses méfaits sur la rixe, sur les coups, sur les cris, sur le sang.
Amertume. Ce soir là, Judas avait perdu trois de ses chiens, empoisonnés par dieu savait laquelle de ses bombes fragiles... Ce soir là, Judas avait perdu pas mal de choses. Relevant la tête dans un élan rageur, il s'extirpa fissa de la petite salle maudite, boitant sur le talon. Il en avait le coeur net. Cette nuit passée n'était pas un rêve. Tout s'était joué. Hoquet horrifié:
Nyam...
Petite écervelée... Il se traina jusqu'à la chambrine de la jeune esclave, l'ouvrit de sa clef personnelle, décidé à passer ses nerfs et ses craintes sur la Frêle. Cette blessure, son tourment, sa solitude... C'était à elle qu'il le devait. Faute de trouver le réconfort chez son amante absente, c'est la jeune femme qui ferait les frais du passage à vide du maistre.
Nyam...
L'instant d'après, il était déjà dans sa couche, serrant d'une manière bien étrange le petit corps de la blondine. Entre force et fragilité, entre rage et besoin d'apaiser, le collier de ses mains enserra la fine gorge dans son sommeil. Le pied blessé raviva un élan impulsif, la piquûre du verre avait rendu son souffle saccadé. Que n'avait-elle pas fait de perdre ses moyens ce soir là... Et les projectiles du diable, c'était ces mains qui les avaient balancés... Ces fines mains... Ces.. Douces mains..
Cette innocence fallacieuse. Il était temps d'y mettre un terme. Brutalement.
Nyam!
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" Nous sommes les folles plumes des inspirations sans règles "