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[RP] Sur vous je veille

Clemence.de.lepine
RP épistolaire ouvert à tous, la narration étant bien entendu acceptée. Clémence étant partie en pèlerinage pour Rome, ce topic servira de lien entre sa "retraite" et le reste du monde. Tout le monde, proches ou inconnus, est le bienvenu pour lui raconter tous les potins, rumeurs, ou baratins possibles et imaginables.


Les mots sont interchangeables. De veiller à surveiller, il n'y a qu'un préfixe...

Citation:
Cher Aimbaud,

Comme promis, je vous laisse quelques notes. En lieu et place de recommandations, il s'agit plutôt là – surprise ! – de consignes sur des tâches que je n'aurai pu mener à bien avant mon départ. Prenez-en bonne note et évitez de trop jurer contre moi si certaines choses vous semblaient ennuyeuses, futiles ou inutiles.

- On m'a rapporté il y a quelques semaines que le pont sur la Loire à Decize, reliant le bourg de part et d'autre du fleuve, aurait besoin de réparations. Le parapet serait en partie démoli, le pavé couvert de mousse et glissant, et en cas de grand vent (je dirais plutôt en cas d'inattention, mais bon...), il est arrivé une ou deux fois (j'ai oublié le chiffre exact) qu'un gamin se retrouve à l'eau et se noie. Il faudrait à tout prix remédier à cela en fortifiant et sécurisant le pont, ou en leur apprenant à tous à nager.

- J'ai lancé il y a deux ans la production de miel de coquelicot. Avec toute cette abondance de coquelicots à Nemours, il aurait été dommage de ne point s'en servir, n'est-ce pas ? Quoiqu'il en soit, son commerce fonctionne très bien malgré mon malheureux manque d'assiduité sur ce sujet, nous ne l'avons pour le moment vendu qu'à la foire locale de La Ferté-Alais, mais nous avons réalisé l'année dernière un meilleur chiffre que nos asperges qui pourtant sont d'ordinaire notre produit phare (car excellentes, sans exagération). Pour en augmenter la production, nos apiculteurs ont fait quelques essais et il apparaît que le sainfoin offre au miel une qualité et un goût incomparables. Défrichez donc quelques bouts de forêt pour sa culture, et je vous parie que la saison prochaine, nous vendrons du miel de Nemours en quantité à la foire de Provins et de Lyon. Trouvez-nous un meilleur marchand que l'actuel qui ne compte pas assez vite et ne voit pas assez grand.

- Soyez gentil avec Isaure.

- Il m'a été rapporté que le meunier moulait son grain dans un moulin voisin au lieu du moulin banal. Aucune exception ne sera tolérée et si l'information se révélait exacte, le meunier sera pénalisé d'une amende correspondant aux taxes dont il ne se sera pas acquittées en n'utilisant point le moulin banal, multipliées par dix, ou cent, à votre bon vouloir. Ne lui coupez pas de main, son grain fait de l'excellent pain.

- Les taxes des marchandises vendues lors des jours de marchés n'ont pas été augmentées depuis au moins cinq ans et nous perdons de l'argent en enrichissant les marchands puisque ceux-ci ne se gênent pas à prétexter la guerre et la dangerosité des routes pour augmenter le prix de vente de leurs biens. Augmentez les taxes sur, notamment, le vin, les soieries et les épices en surveillant les marges pratiquées par les marchands et en leur interdisant de revenir si des abus étaient constatés. N'hésitez pas à demander conseil à notre bailli.

- Soyez amical avec Isaure.

- Contrôlez les vols, les larcins en ville à Nemours sont en nette hausse selon le rapport du capitaine. Offrez des récompenses pour la délation, motivez la milice par un joli discours sur le fait qu'ils sont in-di-spen-sables au maintien de l'ordre en ville, et menacez le capitaine de le rétrograder si le taux de criminalité ne baissait pas rapidement.

- Le jour de doléance, à Nemours et à Decize, est le jeudi. Si vous ne pouvez vous y trouver, faites-vous suppléer, il est important de ne jamais manquer ce jour sous peine de révolution car les paysans, marchands et villageois aiment à se plaindre et à se faire entendre. Vous pouvez vous faire aider du sénéchal et du maréchal.

- N'oubliez pas ma cousine, et combien je serais fort marrie si j'apprenais que vous ne la traitiez pas en invitée de marque qu'elle est. Soyez gentil avec elle, donnez-lui de l'argent pour ses robes et aidez-la à choisir son nouveau cheval. Cela lui fera plaisir, et je sais que vous n'avez pas envie d'instaurer au château un climat de discorde en mon absence.

- Pensez à partir vite pour le Languedoc afin de rencontrer Thibert d'Euphor et transmettez-lui, ainsi qu'à sa famille, mes respects et mes excuses de ne pouvoir être là avec vous. Ne le ménagez pas mais ne soyez pas trop désagréable avec lui tout de même...

- Soyez un bon cousin pour Isaure.

- Honorez les invitations que nous pourrions recevoir, mariages, cérémonies ou joutes, il est important d'entretenir les relations. Allez-y avec Isaure à votre bras, elle sera délicieuse et heureuse de pouvoir voir un peu de monde.

- Les tapisseries sont à changer à Nemours. Il y en a trop qui ont été bouffées par les mites ou l'humidité et certaines sont vieilles de plusieurs siècles j'en suis sûre, tellement elles empestent le vieux. Je ne vous raconte pas la honte qui pourrait s'abattre sur nous si nous montrions ce genre de choses démodées lors de nos prochaines réceptions. Commandez-en de Flandres, de Bruges, mais évitez Arras même si on vous en dit le plus grand bien. Je serais fort chagrine à l'idée d'enrichir les Artésiens... Prenez surtout des scènes courtoises, mythiques ou allégoriques. Je suis lassée de toujours voir des scènes de chasses ou de guerre, c'est d'un ennui et d'un commun...

Il me semble que c'est tout, je vous ai dit le principal. Ah non, j'oubliais de vous inciter à être courtois, affable et correct avec Isaure. Je vous ferais suivre d'autres consignes s'il m'en venait à l'esprit plus tard.

Je penserai à vous et vous placerai tous les soirs dans mes prières.
Soyez un bon marquis.
Que Dieu vous protège.

Clémence

PS : message subliminal, traitez Isaure avec respect et bienveillance.
PPS : ne laissez surtout pas Aymon ou Cassian s'approcher d'elle. Sous peine de... graves sévices.

_________________
Clemence.de.lepine
Clémence à Isaure a écrit:
Ma douce,

Je compte sur vous.
Soyez sage. Mais point trop.

Avec amour,
C.



Clémence a écrit:
Très chère Yolanda,

Quelques mots à la hâte avant de partir. Puissent-ils vous trouver souriante comme j'aime que vous le soyez. Vous allez me manquer. Pensez un peu à moi et ne m'oubliez pas trop vite.
Que le Languedoc vous soit doux.

Tendrement,
Clémence



Clémence a écrit:
Chère Blanche,

Loin le temps où je t'écrivais, mon cœur guidant ma plume. Les mots sont difficiles à trouver quand je ne sais quoi penser de nous.
Mais je pense pourtant chaque jour à toi.
Je m'en vais là où j'espère retrouver un peu de paix et de baume pour mes cicatrices. Le Chemin sera long et ma rédemption, délicate.
Je sèmerai des prières derrière chacun de mes pas et tu en seras l'Âme.

Pour toujours.
Clémence



Clémence à Charlemagne a écrit:
Votre Altesse,

Je fus ravie de vous voir à mes noces, moins de ne pouvoir avec vous discuter, partager quelques mots ou quelques souvenirs. Je me suis un moment demandé qui était l'homme qui vous escortait jusqu'au sein de cette noble cathédrale de Paris, et réponse me fut donnée par Isaure, ma charmante cousine. Point de commentaires.

Je doute que nous puissions nous revoir avant longtemps, car apprenez que je m'en vais pour Rome et que le chemin sera long, pour y aller comme pour m'en retourner. Je souhaitais vous en informer, en tant que mon suzerain, je me dois de vous communiquer ce genre de nouvelles. Car il se peut que je n'en revienne pas, les voyages sont périlleux. Aussi suis-je dans l'obligation sinistre de vous transmettre mon avis, humblement, et ne vous exhortant bien entendu nullement à le suivre, quant au devenir de la seigneurie de Decize au cas où je viendrais à disparaître. Feue votre mère m'en ayant dotée par bonté et par bienveillance, je considère ce fief comme un legs de notre amitié, et mon souhait le plus cher est que perdure entre nos familles ce respect et cette affection que nous nous vouions mutuellement, qu'ils soient alors symbolisés par Decize par delà les générations. Or, la famille étant avant tout représentée par le sang, prenez en considération le fait que je ne porte en mon sein aucune descendance, et que si quelque fâcheuse chose devait advenir au cours de ce pèlerinage, ne resterait de mon sang qu'une seule et unique personne : ma cousine Isaure Wagner, fille de feu le Duc de Brienne, mon oncle.

Ne voulant pourtant point explicitement déposséder Aimbaud de Josselinière des droits que je lui ai donnés par notre mariage, et sur Nemours et sur Decize, je vous laisse seul juge pour Decize. S'il vous agrée que mon époux en garde l'appartenance en tant que votre vassal - ce à quoi je ne m'oppose pas tant qu'il vit et vous montre respect - que cela soit selon votre volonté, mais sachez que je serais chagrine de savoir que sa progéniture puisse hériter un jour de Decize quand elle ne serait pas de mon sang.

Gardez s'il vous plaît le nom d'Isaure en tête, au cas où quelque chose de regrettable devait m'arriver en route. Votre mère l'aimait bien je crois, elle connaissait mon amour pour elle.

A vous revoir bientôt, je l'espère.

Que le Très-Haut vous protège.

Clémence de L’Épine


_________________
Clemence.de.lepine
Citation:
De Clémence de L’Épine, Marquise de Nemours, Dame de Decize et de Saint-Robert,
A Valère d'Arezac, Comte d'Ossau, quadruple Vicomte et Baron de Lunel.


Salutations.

Êtes-vous mort ? Il ne me semble pas. C'est que ayant si peu de fois été en contact avec vous, et ne l'ayant jamais maintenu, je suis en droit de me poser la question, avant de vous demander si vous vous portez bien. Ce qui est sûr, c'est que dans le cas où vous auriez trépassé, je risque fort peu d'obtenir une réponse de votre part. Davantage une de votre épouse peut-être, courroucée sans doute par mon courrier qui lui rappellerait douloureusement votre souvenir. Excepté si elle non plus n'était plus de ce monde. Dans ce cas malheureux, j'aurais peut être une réponse explosive de l'un de vos enfants. Avez-vous des enfants ?

Vous avez en tout cas une filleule. Vous en souvenez-vous ? Brune et charmante, parlant à tort et à travers, mais charmante, oui, certainement. Vous savez, ma cousine ? Je suis sûre que vous vous souvenez, maintenant.

Elle se porte très bien. Je l'ai accueillie chez moi il y a quelques mois. Je me disais que vous aimeriez avoir de ses nouvelles, nous l'avons en commun, elle, et vous-savez-quoi. La Champagne, je veux dire. Vous n'aviez pas aimé que je l'évoque, lors de notre dernière correspondance. Pardon, j'ai recommencé, mais j'avais peur que vous ne compreniez pas à quoi je faisais allusion.

Bref. Je m'en vais en pèlerinage, cela arrive parfois aux gens de foi, et j'aimerais que vous vous occupiez de donner un peu d'attention à Isaure en mon absence. Non point en la visitant, cela fait loin, bien que je ne serais pas contre. Je vous fais d'ailleurs de ce pas un laisser-passer, et pour Nemours, et pour Decize. Je crois que vous aurez plus de chance de la trouver à Decize. C'est en Bourgogne et c'est très joli. Si vous n'aviez pas envie de bouger de ce Béarn au sein duquel je suppose que vous vieillissez toujours, ne vous en faites pas je ne vous en voudrais pas. Envoyez juste quelques lettres à Isaure pour l'assurer de votre affection. Cela lui fera plaisir, cette petite a besoin de se savoir aimée.

Merci beaucoup, pour elle.

Que le Très-Haut vous garde,
Clémence de L’Épine.


_________________
Charlemagne_vf
Charlemagne à Clémence a écrit:
Votre Magnificence,

    Me rendre à vos noces était un devoir. Je regrette aussi de ne pas avoir pu parler de Decize, de Chastellux avec vous, et je crois qu'échanger des souvenirs eut-été difficile, hormis ceux dont Sa Majesté ma Mère serait l'objet. Je suis content que vous ayez pu recevoir votre héritage, et que vous ayez honoré ces gants, dont Sa Majesté ma Mère ne se séparait que pour caresser mon visage avant de m'endormir.
    L'homme qui m'escortait suscite un commentaire toutefois : il s'agit de Monsieur mon Frère, fils illégitime de Sa Majesté mon Père.

    Madame ma vassale, je vous souhaite bon voyage, et j'espère que vous reviendrez en France saine et de corps, et d'esprit. Il me plairait que vous soyez ma marraine, si je devais choisir pour confession la foi Aristotélicienne. Monsieur mon Frère est théologien, il m'enseigne maintes choses. Je prierai pour que vous ne partiez pas en route, comme le fis Maman.
    Vous êtes une bonne vassale, vous pensez à moi.
    Je pense que la noblesse ne saurait être ôtée à une Maison qui la mérite, et qui est illustre, alors si vous décidiez de ne pas m'obéir, et de mourir, Decize irait, si la Hérauderie le permet, à votre époux, puis à votre héritier, à vous : Isaure Wagner, si tel est votre souhait. Lui aussi est de sang illustre, même si je n'aime pas sa soeur.

    Je garde le nom de votre parente en tête. Ma mère aimait bien un nombre conséquent de personne. Trop peut-être.

    A vous revoir, alors.

SAR C.d.C.

_________________
Yolanda_isabel
Pas scellé de rouge pour faire banal, mais fermé d'un ruban bleu pour être original.

Citation:

    A ma soeur,

    Je vous déteste de m'avoir fait croire que nous allions vivre tous heureux. Je vous déteste de m'avoir abandonnée et de me causer tant de frayeur à vous savoir sur les routes. Je vous déteste de ne pas venir en Lengadoc avec nous. Je vous déteste d'avoir ôté de ma vue votre sourire que j'aimais tant. Je vous déteste puisque vous allez certainement loupé la floraison des coquelicots.

    Que votre Dieu vous garde, moi, je vous aime.

    Moi.

_________________
Varden
En Béarn, les anciens répétaient depuis des mois l'inlassable répartie.

L'hiver vient.

A défaut d'un hiver plus rigoureux que les précédents, moins funeste pour lui et sa Province, une missive vint du nord. Des missives ainsi scellées, Valère en recevait parfois de trop à son goût, alors quand il reçut celle ci, c'est avec un dédain certain qu'il la mit de côté. Elle demeura donc là, reposant des jours durant sur son secrétaire sans que personne n'ose y toucher.

Le temps, l'envie, l'intérêt, tout lui manquait pour s'occuper du contenu de cette lettre dont il n'avait point rompu le sceau de cire rouge.

Ce n'est que revenant de voyage, de débats en révoltes, de défense en cheminement solitaire que le Comte prit la peine de décacheter la missive et, enfin, la lire ...

Clémence de l'Epine. Ainsi donc Nemours vivait encore. Un petit sourire accompagna la lecture du courrier. Qui eut pu oublié Isaure, ange adorable, filleule chérie, aimée comme une fille légitime ?

Pas lui. Et si le temps, le recueillement, la foi l'avaient détourné de ses amours terrestres, il en était revenu grandi, assagi et, à l'image de tout Arezac, plus fort encore.

Eut-il gagné en orgueil qu'il se serait vexé qu'on le prétende mort ou équivalent.

A défaut, il prit le parti d'en rire, emplissant son bureau, froid en cette aube sans soleil, de ses éclats.

Se saisissant d'un parchemin, d'une plume et d'un pot d'encre, il s'attela à une réponse digne de la qualité de la désormais Marquise de Nemours.


Citation:
De Nous, Valère d'Arezac, Comte d'Ossau et cætera,

A Vous, Clémence de L’Épine, Marquise de Nemours, Dame de Decize et de Saint-Robert,

Saludi et Patz !

Au grand regret de beaucoup, je crains de ne pouvoir répondre par l’affirmative sur mon éventuelle mort annoncée. Je suis bel et bien vivant. Plus que jamais même, selon les dernières rumeurs en date.

Et en homme sage et avisé, je n'ignore pas que les rumeurs sont souvent fondées. Certaines vous prétendent orpheline et croyez bien que je le regrette. D'autres vous disent mariée, et j'espère que cela n'est en rien plus regrettable.

Il est dit des voies du seigneur qu'elles demeurent impénétrables, parfois même aux plus pieux de nos Prélats. Mais vous qui marchez vers lui, peut-être trouverez réponses à ces obscurs questionnements sans fin sur la vie, la mort et les différences existentielles entre hirondelles d’Asie et hirondelles d’Afrique

Vous n'aurez donc nulle réponse courroucée de mon épouse, si tant est qu'elle ne déclenche un jour son courroux contre qui que ce soit.

Encore moins de notre fille, bien trop jeune pour prétendre à rédiger missives aussi belles que celles dont vous vous faîtes la calligraphe.

C'est donc par ma main, encore sûre, que je vais éclairer vos doutes, rendre possible l'improbable et, je l'espère, vous apporter satisfaction.

Concernant vos doutes, je n'ai jamais oublié ma filleule. Isaure est partie prenante de mon cœur, quand bien même elle ait prit le parti d'être désormais loin de ma vie. Bien plus qu'une filleule, elle est telle ma fille. Et je l'aime sans commune mesure à ce tire. S'il lui plaît de se l'entendre dire ou de le lire sur vélin béarnais, je le lui écrirai volontiers.

Quant à l'improbable, il est apparemment des plaies qui guérissent par le temps et la prière. J'aime la Champagne comme ma terre, car elle l'est tout simplement. Un jour, un Arezac refoulera ses vastes plaines et, si le Très-Haut le veut, s'y réinstallera pour la grandeur de Reims, du Duché et de la Couronne de France. Peut-être même pourra-t-il admirer les falaises de Troyes ? Je ne m'interdis plus aucune utopie voyez vous.

J'écrirai à Isaure. Mais pour ces deux mois à venir, je crains de n'être vu en Bourgogne. L'envie ne me prend pas de ne faire que vieillir en Béarn mais les obligations électives auxquelles ma vie aura été bien trop souvent liées font qu'actuellement, je n'ai pas loisir d'aller visiter l'arrière-pays Bourguignon et ainsi rendre grâce à de trop vieilles connaissances en même temps que d'aller embrasser ma délicieuse filleule.

J'ose croire que le temps m'apportera cette liberté dans un avenir un peu moins proche.

Je vous souhaite de trouver ce que vous êtes partie chercher dans votre pèlerinage. Il n'est guère quête plus périlleuse que de faire acte absolu de foi.

Puisse le Très Haut vous préserver de tous les malheurs.



Signé et Scellé de notre main.
A Mauléon,
Le 1er Jour du Mois de Mars de l'An Mil Quatre Cent Soixante.

_________________
Clemence.de.lepine
La lettre du Comte d'Ossau l'avait contrariée. Elle avait escompté une réponse un peu plus agacée, la sienne s'étant voulue, sinon provocante, des moins agréable alors. Mais il avait choisi d'ignorer les diverses piques qu'elle lui avait sciemment lancées, évitant soigneusement les perches qu'elle lui avait grossièrement tendues. Soit. Elle avait affaire à un pacifique, un homme posé.

Mon plan est tombé à l'eau. Il ne s'est pas énervé. Et du coup, je ne suis absolument pas amusée.


Arrêtée dans une auberge pour la nuit, entièrement privatisée pour elle et sa troupe, elle était attablée seule devant un plat de rôti cuisiné au miel auquel elle n'avait pas touché. Ruminant d'un air morose les nouvelles pourtant bonnes que lui apportaient Valère d'Arezac, elle s'adressait d'une voix distraite au soldat qui se tenait gauchement, et mal à l'aise, sur un tabouret quelques pas en arrière d'elle. Elle l'avait choisi au début du voyage comme étant son oreille officielle, en faisant ainsi la risée de ses camarades, vexant en même temps le curé qui l'accompagnait dans sa quête spirituelle et était donc censé être plus que n'importe qui son confident.


- A qui aurais-je dû écrire pour en retour recevoir une réponse odieuse, méchante, colérique...?
- Sa Magn...
- Aimbaud ? Non. Trop facile à provoquer.
- La demois...
- Isaure ? Je ne joue pas à ce jeu avec ma propre cousine.
- La Marq...
- Blanche ? Vous êtes idiot ou quoi ?
- La Princ... 
- Armoria de Mortain ? Vous voulez ma mort, c'est cela ? Triple idiot. Vous me faites penser à Aymon.
- Aym... ?
- Oui, l'écuyer de mon époux. Il présente mal, je vous jure... Normalement, on prend les écuyers dans la caste noble. Je ne comprends même pas pourquoi Aimbaud... enfin... le Marquis... l'a choisi lui. Si tous ses choix s'avèrent par la suite aussi judicieux, je crois qu'il faudrait bien que je songe à rentrer maintenant, finalement. Le pire, c'est que je ne peux même pas le virer.
- Votre ép... ?
- Mais non. Aymon ! L'écuyer débile. Tiens... d'habitude j'attribue ce qualificatif à Cassian et... cela me fait penser... Qui est le plus débile entre Aymon et Cassian ? La question mérite réflexion. J'y songerai plus tard, ça me fera passer le temps entre deux prières.
- …
- Hum. Cela me donne une idée. Donnez-moi, vous, de quoi écrire.


Clémence/Aimbaud à Aymon a écrit:
Aymon,

Tu as merdé. Tu es renvoyé. Que je ne te revois plus traîner dans mes pattes. Remballe ton paquetage et sois parti dans une heure.

Aimbaud, Marquis de Nemours.


- Croyez-vous que j'ai bien réussi à imiter le style d'Aimbaud ? Si on peut appeler cela un style... J'ai ajouté les trois couleurs de scels, cela ne veut rien dire mais impressionnera sûrement bien plus Aymon puisqu'il n'y entend rien. Et puis je suis sûre qu'il ne connaît même pas la différence entre mon scel et celui d'Aimbaud. Enfin, celui du Marquis.
- Je...
- Vous, rien. Vous êtes viré vous aussi. Vous êtes trop idiot pour rester dans ma garde. Attendez... non ! Vous êtes promu messager. Vous allez transmettre cela à Aymon et le lui lire, puisque je suppose qu'il ne sait pas lire. Vous savez lire, vous ?
- N...
- Bon. Alors je vous lis la missive, et vous lui rapportez mot pour mot en lui disant que c'est de la part de Monsieur le Marquis. Arrangez-vous pour qu'il ne soit pas dans les parages quand vous irez rencontrer Aymon. Le mieux, c'est de le tirer de sa sieste. Je suis sûre que ça, ça l'agacera vraiment. Ça ira ?
- …
- Bien. Vous allez voir, la vie de messager, c'est vraiment pas mal. C'est un peu comme soldat, finalement. Vous voyagez beaucoup. Et puis, vous avez les avantages du métier : vous êtes payé à la commission. Plus vous livrez de lettre, plus vous recevez d'écus. Tandis que soldat... on ne vous paye pas au nombre de types que vous aurez passé au fil de votre épée je suppose ? Et messager, c'est quand même beaucoup plus glorifiant. Il ne s'agit pas de bêtement tuer des gens. Il s'agit de porter des missives et de faire le bonheur des gens. Ou bien le malheur. Mais c'est tout aussi plaisant. Allez. Non... attendez ! Cette histoire de Cassian m'a donné une autre idée. Je sais à qui écrire et de qui recevoir une lettre amusante. Bon, ça me mettra sûrement très en colère également, mais j'en ai marre de ne faire que chevaucher, me taire et prier. A la longue, ça pèse. J'ai besoin de me détendre.


Clémence à Eusaias a écrit:
Votre Grâce,

J'ai appris que vous convoitiez le trône de France. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une très bonne nouvelle, enfin en ce qui me concerne. Je ne vous ai jamais porté dans mon cœur, ni très haut dans mon estime, mais je dois dire que je ne vous déteste pourtant plus autant qu'auparavant. Après tout, nous avons ensemble traversé une douloureuse épreuve il y a maintenant si longtemps, me semble-t-il, et je vous ai vu alors sous un jour différent. Cela me laisse d'ailleurs songeuse aujourd'hui, et je me dis que vous ne ferez sans doute pas un mauvais roi.

Ne vous y trompez pas. Je ne vous aime toujours pas. Mais quand vous serez roi, je vous adorerai, ne vous en faites pas. Car j'ai l'intuition que ce sera vous, bientôt, qui porterez la royale couronne. Après deux règnes féminins, c'est assurément un homme qu'il nous faut, et étrangement, je crois que les gens vous préféreront à d'autres. C'est pour cela que je n'aime pas les gens. Ils pensent étrangement, et font des choses étranges.

D'ailleurs, on dit souvent que je change par trop d'avis, et tout le temps. Je ne changerai pas d'avis sur vous, vous êtes une horrible personne, mais sachez que j'approuve plutôt et soutiens assez votre démarche, ce n'est pas une mauvaise chose. Vous avez beaucoup trop de défauts pour me plaire en tant que personne, mais en tant que roi, je crois que vous serez acceptable, et un roi n'est pas censé se faire trop aimer.

Je suis pourtant contrariée, cela voudrait dire que je deviendrais votre vassale et qu'il faudrait que, en plus de plier l'échine devant vous, je vous jure allégeance et tutti quanti. Je crois que j'enverrai mon époux à ma place. Moi, je serai malade ce jour là. Et puis, il me semble que vous aimez bien Aimbaud. Vous serez plus content de le voir.

Par contre, ne vous faites pas d'illusion. On dit « jamais deux sans trois » et si vous devenez effectivement le troisième, alors vous êtes condamné à mourir très vite. Je pleurais encore Béatrice quand la Malemort est partie à son tour. Deux telles morts, et consécutives, cela laisse présager le pire pour le prochain qui prétendra à la couronne de France.

En tout cas, vous serez roi, j'en suis certaine. Mon intuition ne me trompe jamais. Si vous ne l'êtes pas, vous aurez le droit de me réclamer cette partie de dés que je vous refusai alors. Parce-que vous m'aviez demandé de jurer je ne sais plus quelle sottise sur le livre des Vertus. Je suis une femme de foi, la preuve en est, je marche sur Rome. Enfin, vers Rome. On ne demande pas à une femme de foi de jurer comme ça. Nous jouerons ce que vous voulez, à la limite du raisonnable.

Mais de toute façon, cela n'arrivera pas, vous serez roi, et moi, désespérée de vous être finalement soumise, par la force des choses. Bravo.

Que le Très-Haut nous fasse la bonté de vous envoyer auprès de Christos et Aristote avant les résultats des suffrages.
Mais qu'Il vous garde un peu en attendant car je ne peux pas vous souhaiter uniquement du malheur. Il faudrait dès lors que j'en fasse la confession à ce curé joufflu qui m'accompagne et à qui je déteste parler. Il postillonne.

Clémence de L’Épine

_________________
Clemence.de.lepine
Citation:
Ma chère Yolanda,

Les coquelicots fleurissent partout et je suis certaine d'en voir éclore sur ma route. Ils ne seront sûrement point aussi rouge que ceux de Nemours, ni tout aussi charmants, mais je penserai à vous alors, quand je croiserai le tout premier.

Vous faites bien de me parler de coquelicots, j'ai une mission de la plus haute importance à vous confier. J'espère que vous l'accepterez car je vous sais la plus à même à la remplir.

Je n'ai mis les pieds à Saint-Robert qu'à l'occasion de la négociation et signature de mon contrat de mariage et je n'ai depuis pas eu – ou pas pris - le temps de m'y rendre et de m'y présenter en tant que Dame des lieux. Pourtant, je dois vous avouer que j'aime le Limousin, j'aime y avoir une seigneurie, j'aime même, sans la connaître tout à fait, être la vassale de Sa Seigneurie Marie Alice Jagellon.

Savez-vous que c'est à Limoges que je fis pour la première fois connaissance avec ma cousine Isaure ? J'y ai habité quelques temps, et Aléanore Jagellon-Alterac y vivait en même temps que moi, bien qu'à l'époque, nous ne nous connaissions pas, et que nous n'entretenions donc pas les mêmes relations qu'ensuite. D'ailleurs, les mots de votre missive me font penser que je la détestais autant que je pouvais l'aimer. J'aime donc l'idée d'être la vassale de la mère d'Aléanore. J'aime à penser qu'elle aurait adoré cela et qu'elle n'aurait pas hésité à s'en moquer, à me rire au nez, face à ce jeu du sort. Elle savait me mettre en colère, elle connaissait mes susceptibilités.

S'il vous plaît, rendez-vous, quand vous le pourrez, à Saint-Robert et préparez-les tous à mon arrivée. Parlez-leur de moi, soyez-y mon ambassadrice. Que mon nom entre dans toutes les oreilles. Qu'ils sachent à quoi je ressemble, et qu'ils ne soient pas offusqués de mon absence, du fait que je ne me sois pas encore présentée à eux. Dites-leur donc qu'à mon retour je ne m'arrêterai ni à Decize, ni à Nemours, avant de m'être arrêtée à Saint-Robert. De votre côté, observez un moment la vie se déroulant là-bas. Le mieux serait que vous y restiez une ou deux semaines. J'ai besoin de votre vision des choses, totalement objective. Celle d'Aimbaud ne le serait pas et je vous sais, en outre, assez réfléchie pour ouvrir l’œil et constater. Apprenez-moi comment y est la vie, les bonnes choses et les mauvaises, ce qu'on y fait et ce qu'on n'y fait pas.

Si tout cela vous semble ennuyeux ou fastidieux, ne vous inquiétez pas, je me débrouillerai autrement.

J'ai cependant une requête plus légère et facile à vous faire : pourriez-vous vous renseigner, ou voir par vous-même, et me dire si le champ de coquelicots que votre frère avait promis de semer pour moi à Saint-Robert est toujours inscrit à sa mémoire ? Cela devait être fait pour mon vingtième anniversaire, et il se trouve que j'aurai vingt ans au printemps.

Donnez-moi quelques nouvelles de vous. Il me tarde d'en recevoir. Quand partez-vous pour le Languedoc ? J'aimerais tellement pouvoir vous y accompagner... Le Languedoc aussi est cher à mon cœur, parce qu'il est tout autant, et bien davantage encore, terre d'heureux souvenirs. S'il advenait que votre union avec Tibert d'Euphor se concrétisât, je viendrais vous voir souvent, là-bas, une fois les noces passées.

Que Dieu vous protège. Je Lui en fait la prière chaque jour.

Clémence



Citation:
Votre Altesse,

Serait-il possible que vous cessiez d'utiliser les formules d'usage pour préférer m'appeler Clémence ? Béatrice m'appelait ainsi, et je l'appelais Béatrice dans mes lettres et en privé. J'aimerais que nous ayons une relation étroite, assez en tous les cas pour que vous m'appeliez par mon prénom. J'aurais toujours pour vous le respect et la considération qu'une vassale se doit d'avoir pour son suzerain, et cela, sûrement, imposera toujours une certaine et logique distance entre nous deux, mais il me ferait plaisir, également, que nous nouions une bonne amitié dépassant quelque peu les simples liens vassaliques.

Aussi, je serai bien entendu très heureuse de devenir votre marraine afin de vous guider dans la foi Aristotélicienne. Je m'inquiète un peu de vous sentir douter et de vous voir parler de choix. Il n'y a pas de choix. Il n'y a qu'une seule vraie Foi. Une seule foi légitime. Que vous apprend donc votre frère ? Je serais bien curieuse de le savoir. Il s'agit d'un de ces réformés, n'est-ce pas ? Je ne comprends pas que l'on puisse parler de « réforme ». On réforme les lois, on ne réforme pas la foi. Qui en a le droit ? Les écrits que nous avons se rapportent à des faits qui se sont déroulés il y a des siècles de ça. De quel droit peut-on maintenant en contester la légitimité ? Sur quelles bases ? Et pourquoi maintenant, que sait-on de plus aujourd'hui qu'on ne savait hier ? Vous a-t-il appris tout cela ? Vous a-t-il apporté des réponses qui vous ont parues assez censées pour que vous en arriviez à douter de vouloir appartenir un jour à la communauté aristotélicienne ? Je ne me suis pas intéressée à ces sornettes, parce qu'elles ne me concernaient pas directement, parce que je ne m'intéresse pas à l'inutile et que je préfère ignorer ce qui ne me plait pas. Mais vous voilà maintenant à vivre sous l'éducation théologique de Sancte Von Frayner, et vous êtes mon suzerain, et les choses alors sont différentes.

J'aimerais beaucoup qu'il m'écrive. Pouvez-vous le lui dire ? A moins qu'il ne lise vos lettres, et dans ce cas, vous n'auriez pas besoin de le lui dire. Ces leçons de théologie m'intéressent, et m'inquiètent à la fois, au plus haut point.

Que Dieu vous guide, Votre Altesse. Qu'Il vous montre le chemin.

Clémence de L’Épine

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Clemence.de.lepine
Citation:
Mon époux,

Le néant de nouvelles que je reçois de vous me convient fort peu parce qu'il me siérait de savoir comment les choses se passent à Nemours et à Decize. Ce n'est pas très délicat de votre part de me laisser dans l'ignorance parce que l'ignorance vous fait vous poser toutes sortes de questions et je ne suis pas partie en pèlerinage pour trop me torturer l'esprit.

De mon côté, tout se passe bien. J'ai passé il y a trois jours les frontières de Provence et je serai sous peu en République de Genève. Je vous envoie d'ailleurs une demie livre de ces douceurs de Provence faites de miel et de noix confites. Ils appellent cela nugo dans leur jolie langue d'oc, et un marchand de Marseille m'en a gracieusement fait cadeau d'une caisse pleine, si bien que j'en ai assez pour nourrir un régiment tout entier pendant deux semaines. J'y avais déjà goûté plusieurs fois auparavant, et je suppose que vous connaissez ces confiseries, mais celles-ci sont immanquablement les meilleures qu'il m'ait été donné de manger. D'ailleurs, il ne s'agit pas tant de manger que de déguster, tant elles fondent sur la langue. Je compte sur vous pour en donner une pleine poignée à Isaure, et davantage à Yolanda parce-que je connais sa gourmandise.

Quand des choses comme ça nous arrive, le curé qui m'accompagne n'est pas ravi. Pour lui, je devrais jeûner et afficher une mine triste de jour comme de nuit. Il nous force à garder le pas à cheval, et parfois, magnanime, il nous autorise le trot. Je suis certaine que c'est parce qu'il n'a jamais appris à monter et qu'il a bien trop peur que le cheval ne s'emballe et qu'il tombe alors de sa selle. Nous avons quelques fois été invités par des seigneurs que nous croisions sur la route à manger et à dormir. Les gens sont courtois et affables envers les pèlerins, et bien plus encore quand il s'agit d'une suite marquisale. Le curé n'était jamais content parce qu'alors, il s'agit de banqueter et de manger grassement. Pourtant, je peux vous dire que de son côté, il ne se gênait pas pour s'empiffrer royalement.

Un ménestrel nous a suivis pendant quelques jours, abandonnant la cour d'un seigneur à l'hospitalité bienveillante pour reprendre avec nous le chemin, et il m'a régalée de sa prose et de ses vers. Il avait une voix fort agréable et le verbe plaisant et brillant. Parce-qu'il me faisait trop rire et qu'il me divertissait trop, le curé ne m'a pas adressé la parole ni un regard pendant des jours, c'est d'un puéril, vous ne trouvez pas ? Vous pensez, vous, que pèlerinage doive forcément être synonyme de pénitence et tristesse ?

Il n'y a pas longtemps, je suis partie sans lui avant l'aube. Il nous a rejoint le soir à l'étape que nous avions fixée la veille, même si je fus un instant tentée de la remplacer par une autre pour l'abandonner pour de bon. Il n'a pas apprécié la plaisanterie et a menacé de me laisser continuer toute seule. Seulement, il n'avait aucune escorte à disposition pour rentrer en France, et ça n'est pas moi qui lui aurait laissé quelques hommes ou de quoi s'acheter les services d'hommes armés. Après tout, sa présence est indispensable sinon, il ne s'agirait que d'un vulgaire voyage vers Rome. Donc autant le garder avec moi.

Mais ne pensez pas que je regrette d'être partie. Et ne croyez pas que je ne fasse que boire, manger, chanter, danser, rire, ou contester la présence de l'ecclésiastique. La vérité, c'est que la majeure partie du temps est consacrée aux prières, aux questionnements, aux confessions, aux repentances, aux discussions théologiques. Et malgré tout, je pense que le curé m'aime bien. Il est avare de sourires, mais il m'en distribue parfois quand j'ai une réflexion juste et intéressante. On dirait un maître qui récompense son élève et l'encourage à continuer sur la même voie. Moi, par contre, je ne peux définitivement pas le voir en peinture. Mais je vous épargne les détails dont je vous ai à vrai dire déjà bien assailli.

Je pourrais arriver à Rome sous quinzaine mais je songeais à rester à Genève quelques jours pour attendre le début de la foire. Il ne me sera pas donné trop de fois de voir une foire d'une telle envergure dans ma vie et je suis impatiente à l'idée de pouvoir m'y rendre. S'il vous faut quelque chose de particulier, faites-le moi savoir.

Nous n'avons pour le moment pas rencontré d'embûches particulières et nous n'avons perdu aucun de nos hommes dans les diverses petites embuscades que nous avons dû contrecarrer. Ils sont valeureux même s'ils n'ont rien dans le cerveau. Ils ne connaissent sûrement que la seule signification du mot « obéir » mais cela me convient.

Je vous espère en bonne santé et point trop oisif.

Je pense à vous.

Clémence.



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Clemence.de.lepine
Citation:
Chère Della,

C'est l'inquiétude qui me pousse à prendre la plume pour vous écrire ce jour. La dernière fois que je le fis, c'était pour vous inviter à mes noces et vous parler de nos amitiés communes.

C'est cette fois nos liens vassaliques communs qui m'incitent à venir vers vous.

Je n'ai appris qu'il y a peu de temps la présence de notre suzerain aux côtés de son frère bâtard Sancte von Frayner. Je ne m'étais à vrai dire pas vraiment posé de questions, et je n'avais écouté que d'une oreille les rumeurs qui le disaient passé sous l'emprise du von Frayner quand il aurait dû, si j'en crois le testament de Béatrice et si ma mémoire ne me fait défaut, se trouver sous votre tutelle féodale. Les circonstances ne m'intéressent pas à l'heure actuelle. Seul le résultat me paraît assez préoccupant pour que l'on s'y intéresse. Et je suppose que vos réflexions vous ont déjà amenée à la question, puisque vous connaissez la situation depuis plus longtemps que moi. J'espérais, alors, que vous pourriez me rassurer.

Charlemagne m'a récemment fait part de son souhait de me voir devenir sa marraine si jamais il choisissait d'embrasser la foi aristotélicienne. Je vous sais fervente croyante, fervente aristotélicienne, nous avons aussi cela en commun, et je me doute que ces mots provoqueront la même réaction à la fois navrée, peinée et fâchée qu'ils auront su provoquer en moi. Sûrement que cela ne vous surprend pas. La réputation de Sancte von Frayner n'est plus à faire, c'est un nom qui éveille de sombres échos dans les esprits de nous autres aristotéliciens. Je ne connais pas son histoire, je ne connais pas sa personne, je sais juste qu'il n'est pas apprécié dans les sphères aristotéliciennes et cela suffit à alimenter ma crainte.

Et que ferions-nous, alors, si Charlemagne se décidait à renier la foi de sa mère ? Parviendriez-vous à passer outre et, pour Béatrice, à supporter de garder Railly malgré la corruption de l'âme de votre suzerain ? Je ne sais pas si je le pourrais, c'est tout à fait contraire à ma morale, et je ne cesse d'y songer depuis quelques nuits. Cela me désole, car Decize me rattache à Béatrice et j'espérais retrouver en Charlemagne un peu de sa mère.

Il n'est qu'un enfant, mais un enfant intelligent et puissant. Il deviendra un homme encore plus intelligent ce qui le rendra d'autant plus puissant. Sancte von Frayner a choisi là un allié potentiel de poids, une arme en puissance dangereuse pour étendre sa réforme absurde. L'éducation nous forme et nous forge. Et nous ne pouvons, nous, influencer la pensée de Charlemagne car il me semble obstiné et orgueilleux, et il n'aura sûrement pas l'envie d'écouter des sermons de vassales qui n'ont rien de commun avec lui. Sancte a le sang, du sang mêlé mais ils ont la même part de Guise en eux et cela les relie. C'est Sancte, qu'écoutera Charlemagne. Car qui d'autre a-t-il à écouter, sinon les souvenirs d'une mère qui fut reine et qui n'eut pas assez de temps à lui accorder ?

Il est possible que je m'inquiète pour du vent. Il est possible, alors, que les mots de notre suzerain n'aient pas tout à fait la signification que je leur ai immédiatement prêtée. Peut-être que son « si » était en réalité un « quand », ce qui voudrait dire qu'il souhaite bien rejoindre la communauté aristotélicienne mais qu'il préfère patienter, attendre la maturité, pour comprendre pleinement ses intentions.

Dans cette optique, je serais un peu rassurée, mais j'avoue que la présence de Sancte von Frayner à ses côtés continuera de me préoccuper.

J'espère que vos mots seront réconfortants et que vous m'apprendrez que le von Frayner a à cœur le bien être de l'enfant et qu'il ne l'incitera pas à s'engager sur des chemins boueux d'où il pourrait ne pas revenir. Ce qu'ils mettent en place irrite et fait peur, à raison, et je sais bien ce qu'on fait à ceux qui irritent et font peur. On les traque et on les fait taire. Je ne veux pas que Charlemagne soit un jour mis en danger par la faute de cet homme.

Je finirai cette lettre en vous demandant des nouvelles de votre famille. Comment se porte votre fils, votre héritier ? Je suppose que votre époux et vous vous trouvez toujours dans l'euphorie de la naissance. Il est heureux que vous ayez déjà engendré un garçon et je me réjouis pour vous. Puisse le Très-Haut veiller sur lui et puisse-t-Il lui accorder une santé vigoureuse.

Qu'Il vous garde, vous aussi.

Transmettez mes respects à votre époux.

Amitiés.

Clémence.

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Della
Citation:
Chère Clémence,


Le bonjour vous va !


Votre lettre vient ranimer un tourment que j'avais lâchement, à vous je peux le dire, tenter de mettre de côté.
Mais vous faites bien et pour cela, je vous remercie.
Car il est temps, maintenant, que je reprenne cela en considération.
Cela étant le fait que Charlemagne me fut enlevé.
Enlevé, oui, Clémence, de force.
L'animal Sancte profitant de mon état de grossesse enleva l'Enfant lors des joutes du Lavardin. Si je n'avais été grosse, je l'aurais étripé, à coup certain ! Mais, las, je ne pus qu'assister, impuissante à l'enlèvement de la chair de notre Bien Aimée.

Je tentai bien d'entretenir un courrier avec Charlemagne mais je ne pus m'y tenir parce que j'appris que l'hérétique ouvrait systématiquement mes lettres et ordonnait à Charlemagne d'écrire les réponses sous sa dictée.
Mon fils naquit et il devint mon seul intérêt.
Le temps passa.
Votre lettre arriva.

Je me questionne sur ce qu'il convient de faire.
Mon sang de Bourguignonne me hurle de partir sur-le-champ pour régler son compte à ce lâche.
L'espèce de sagesse que j'ai acquise me dit de ne rien tenter encore et d'attendre l'opportunité. Et là, c'est moi que je trouve lâche.

Voyez-vous, ma chère Clémence, je suis tiraillée, triste de cette situation et déçue de devoir constaté combien je suis désarmée devant les faits.
Peut-être lorsque le temps sera venu, me rendrais-je là où réside Sancte, en terre d'hérésie, et alors...
Mais ce temps n'est pas encore là.
Aujourd'hui, je me dois de rester aux côtés de mon époux, Duc d'Orléans et de servir le Roi Vonafred, en mon Office.
Demain aura une autre perspective. Si Dieu le Veut !

Ma famille se porte bien, tout autant mon fils que mon époux et ma mère, merci.
A votre tour, donnez-moi encore de vos nouvelles, mon amie.
A deux, peut-être arriverons-nous à trouver la solution pour ne pas manquer à notre serment fait à Béatrice de la servir.

Que Dieu vous garde.

Amitiés.

Della.

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Sancte
Citation:
Clémence, très chère Marquise,
Je vous souhaite bien le bonjour.

    Je n'ai pas manqué d'être mis au courant de votre désir d'échanger avec moi quelque correspondance. Connaissant les relations qui vous unissent à monsieur mon frère et le profond respect que vous portiez à feu sa mère la Reyne Béatrice, je ne puis que me plier de bonne grâce à votre volonté. Je ne vous demanderais néanmoins qu'une chose. Si d'aventure vous me considéreriez comme un ennemi et que vous en veniez à vouloir me juger, engagez-vous à avoir la sagesse d'oublier que j'ai pu vous offenser, et de ne conserver en votre réflexion que la seule froide vérité des faits. En cela, nous épargnerons à nos rapports les malheureux travers inhérents à votre sexe, tant il n'est rien de plus exaspérant que l'hystérie aux cheveux longs.

    Cette condition posée, si vous l'acceptez, je suis dès lors en mesure de vous demander le genre de nouvelles que vous souhaiteriez recevoir de ma part. Rien qui ne relève de celles que l'on s'échange en étant poussé par de nobles sentiments tels que l'amitié, l'estime, ou la fraternité, je présume. Mais plutôt de celles, plus dangereuses, qui se placent, si Dieu veut, sous le signe du sacré, propres à débusquer le faux derrière le masque séduisant du démon pour entrevoir la cruauté du vrai sous l'austérité de l'archange. Il est des correspondances qui changent une vie. Êtes-vous certaine de vouloir ouvrir la porte au doute, quand les bonnes certitudes offrent tant de sécurité et d'avantages ?

    Dans un contexte de fronde généralisée dans le Royaume où l'autorité des Roys n'a jamais été aussi violemment contestée, il est de bon ton de se poser la question de savoir si l'on a réellement envie de courir le risque de douter de celle des présumés représentants de Dieu. Je demeure quoi qu'il en soit à votre libre disposition, s'il vous prenait l'envie de procéder à un examen de votre Aristotélicienne conscience.

Puisse le Très-Haut vous conserver en sa Sainte Garde.
En attendant de vos nouvelles, permettez-moi de vous témoigner de l'authenticité de mes sentiments les plus respectueux,

Iohannes

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Clemence.de.lepine
Clémence à Sancte a écrit:
Monsieur,

Vous faites bien de tenter de poser vos conditions, il est certes toujours avisé et prudent de le faire, même s'il est audacieux, voire téméraire, de risquer la tentative avec certains. Soit. Vous êtes donc audacieux, téméraire peut être, mais en ces gens là, monsieur, moi, je vois plutôt de la folie. Ça n'est pas forcément que je sois femme à refuser d'office les conditions que l'on souhaiterait me voir accepter. Il s'agit davantage du fait que je me fiche de vos conditions. Je me fiche également bien que le tempérament impétueux que possèdent certaines personnes de mon sexe et que vous qualifiez vulgairement, et insolemment, d'hystérique, puisse vous déplaire. Et je me fiche absolument de la tournure que nos rapports pourraient prendre.

Donc, je n'accepte pas votre condition, mais je vous ferai tout de même une faveur. Je ferai comme si vous ne m'aviez jamais rien demandé et dès lors, nous pouvons repartir sur de bonnes bases, aussi neutres que possible.

Il me plaisait simplement de savoir ce que vous pouviez bien apprendre à mon suzerain pour qu'il en vienne à douter de rejoindre la communauté aristotélicienne. Il est des choses que j'ignore, mais je n'ignore pas votre réputation, et vous pouvez vous douter que cette réputation n'est pas à votre avantage dans les sphères que je fréquente. On vous dit engagé dans quelque chose qui porte atteinte à notre croyance vraie et unique, et je vous dirais franchement que vous savoir alors aussi proche de Charlemagne m'inquiète. Que lui enseignez-vous ? Lui parlez-vous donc de la foi, des principes, des écrits aristotéliciens ? Et si vous le faites, est-ce d'une manière totalement objective ou vous contentez-vous de porter aux nues votre vision des choses en riant et vous moquant de l'aristotélisme ? Je suis comme beaucoup de monde, ce que je ne connais pas me dérange, ce qui va à l'encontre de ma foi me scandalise. Il ne serait pas juste que Charlemagne soit éduqué selon de troubles préceptes que la majorité réprouve et qu'il ignore au contraire tout de l'aristotélisme.

Il ne s'agit pas de mes doutes, cherchez-vous à me provoquer ? J'aurais pu douter cent fois, mille fois, et jamais pourtant ma foi ne me fit défaut. Vous n'avez pas le pouvoir de me faire douter. Il ne s'agit pas de moi, il s'agit de Charlemagne, il s'agit de vous, il s'agit de savoir à quel point vous vous échinez à le perdre. Ne vous avisez pas de croire un seul instant que vous pourriez me convertir à votre réforme obscure.

Je lirai vos idées, vos extravagances, et je saurai alors véritablement entre quelles mauvaises mains se trouve Charlemagne. Et, le cas échéant, ce qu'il convient de faire.

J'attends avec impatience votre lettre.

Clémence de L’Épine

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Aimbaud
Citation:

    À Clémence de l'Épine,
    Ma dame,

    Votre voyage se passe à merveille, j'en suis bien aise. Pardon de ne vous avoir pas écrit plus tôt, c'est que j'étais moi-même en route. Il n'est pas aisé d'écrire dans les conditions où je me trouve. Asteure je garde le lit car un mal me tient cloîtré dans une auberge... Cela empire, pour mon malheur. Et je crains que ce pustuleux de Montpensier, s'étant penché à ma table la fois dernière pour me vanter la qualité d'une vinasse, ne m'ait refilé son fléau à force de postillons... Je souffre, mais point d'alarme. Ce voyage d'agrément prend seulement fin là où je me trouve, et je vais sans doute retourner en ma Bourgogne...

    Voici, avant que je ne m'étourdisse, quelques nouvelles dans l'ordre où elles me viennent. J'ai prétendument la variole. J'hérite du duché de mon père. L'usurpateur Vonafred s'est emparé du trône. Yolanda sera tantôt fiancée à Thibert. Nemours est entre de bonnes mains. J'ai envoyé un acquéreur en Castille pour votre cheval. Lugh s'est malencontreusement repu d'une part de vos nugo, le reste était bon quoi qu'un peu baveux. Isaure se porte comme un charme. Aymon est toujours mon serviteur en dépit de vos intrigues, que je qualifierai de VILAINES. Je suis éreinté, je brise là...

    Si vous le permettez, mon écuyer précédemment cité s'essayant aux lettres, il va procéder sur cette missive à un petit exercice d'écriture.

    Tous mes embrassements,

    Aimbaud de Josselinière



      Ma damme. Je vous saie grès de tenté de m'ofrirre des vaquence. Cependant, devent temps de bonthé, je me vois obliger de servire avec plus de dévossion que jamès Vos Deux Maniffisensse.

      Aveque tout mais récepaix,

      Aymon


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Isaure.beaumont
Deux ou trois lettres avaient été écrites et envoyées à la poursuite de Clémence depuis son départ. Pourtant, aucune ne lui était encore parvenue.

La dernière missive qu’Isaure envoya arriva enfin à bon port, à savoir entre les doigts fins et délicats de la Marquise de Nemours.


Citation:

D’une esseulée brune
A une pèlerine blonde

Ma très chère cousine,

Comme il me tarde de vous revoir enfin. Chaque jour que le Très-Haut fait loin de vous me semble interminable et sans saveur. Quand me reviendrez-vous enfin ? Etait-il nécessaire d’aller si loin pour qu’Il entende vos prières ? Si seulement vous m’aviez emmenée avec vous…

Me voilà prisonnière d’une chambre sans éclat dans une ville toute aussi terne. Nous sommes à Aurillac depuis plusieurs jours, si ce n’est plusieurs semaines. Je ne sais plus. J’ai cessé de compter et l’ennui me gagne chaque jour un peu plus. Sachez que je me trouve dans cette inconfortable situation par la faute de votre époux qui ne quitte plus son lit. La vérole le tient coucher, mais je gage que s’il voulait vraiment, nous pourrions continuer notre chemin vers la Castille. N’est-ce pas affreusement égoïste de sa part ? L’autre jour, moi aussi j’étais malade, et pourtant nous avons tracé notre chemin sans nous arrêter. Mon nez coulait pourtant à flot et il m’arrivait même de tousser parfois. Me suis-je plains ? A peine. Et j’ai avancé, sans retarder le groupe. Dieu ce que les hommes sont faibles !

Recevez-vous quelques nouvelles de notre beau Royaume ? Savez-vous que nous avons un nouveau roi ? Et qu’il n’est pas celui que nous attendions ? Mon suzerain, puisqu’il est l’épouse de ma suzeraine, n’est pas montré sur le trône, pour ma plus grande déception. Je rêvais du Louvre et de ses bals. De Paris et de ses robes !

Oh, pardonnez-moi, il est vrai que je ne vous ai pas informé de cela. Depuis quelques jours, déjà, si ce n’est quelques semaines puisque nous somme coincées à Aurillac depuis si longtemps par la faute de votre époux comme vous le savez déjà, je suis devenue Damoiselle de Miramont en sus de Morvilliers. Agnès de Saint-Just, que vous connaissez, m’a fait l’honneur de me prendre comme vassale. Je ne me suis pas encore rendu à Miramont et j’espérais que vous accepteriez de vous y rendre avec moi dès que vous serez de retour, si le temps nous le permet.

Quand reviendrez-vous ? Avez-vous déjà passé les portes de la Saint Ville ? Peut-être êtes-vous sur le retour ? Je ne sais encore si notre voyage pour la Castille est maintenu, mais si vous rentrez bientôt, j’espère que je serai là pour vous accueillir !

Que le Très-Haut veille sur vous, Clémence. Et qu’il écarte de votre chemin tous les dangers.

A vous revoir bientôt.

Isaure, votre dévouée cousine

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