Mai
La nuit est froide sur les murailles de Rennes, alors que la silhouette opalescente de la Duchesse avance lentement sur le chemin de ronde. Seule la proéminence de son ventre laissait deviné l'état qui était le siens. Marie est plus proche de lallure dune banshee que dune femme enceinte épanouie... Emmitouflée dans un lourd manteau, la jeune femme prend lair, ou plutôt tente de respirer. Son pas est lent, et difficile sur le chemin de ronde. A quelques mètres derrière elle, la suivent deux hommes, le grand maure dont personne ne connaissait rien, et Gauvin, le fidèle et collant de la première heure. Ordre a été donné par dieu-sait-qui, sans doute Cassius ou Elfyn, de ne point laisser seule la jeune femme. Le terme de sa grossesse nétait prévu que dans trois semaines mais létat de santé de la blonde sétait dégradé a vue dil ces derniers jours. La fatigue avait marqué son visage, et la tristesse avait marqué son âme. Dukez Breizh sétait éteinte. Morte de lintérieure alors quelle était pourtant pleine de vie. Deux pour être exacte.
Les yeux posé sur lhorizon, la Montfort contemple le pays rennais qui sendort sous la pleine lune alors que Morphée ne veut pas delle. Lhériter est agité ce soir et sapplique à lempêcher de dormir. A intervalle régulier, la respiration de Marie se coupe sous leffet dune contraction. Gauvin dans son dos, arrête le monologue egocentrique dont il baratine le grand maure depuis une demi-heure pour sinquiéter de létat de sa maitresse. Regard silencieux vers la blonde qui finit toujours par se redresser pour reprendre sa marche. Lintendant grincheux respire et reprend sa palabre.
Pendant ce temps, entre les tempes de la Myosotis des milliers de questions se bousculent, raison et cause du mal être grandissant qui lassassine. Chaque jour de nouveaux soucis viennent alourdir le poids sur ses épaules et la Kem senfoncent peu à peu. Elle repense à sa journée, à lautodémobilisation des soldats alors que des armées menacent Rennes, aux querelles ridicules de ses conseillers, à lignorance crasse de certaines personnes, à la tristesse dans les yeux de Nael, à la lettre de Thoros, au désarroi de Gwilherm et surtout à labsence de Cassius et dElse auprès delle. Son époux et sa sur étaient ses repères en tout temps, et en ce moment, ils nétaient pas là, alors quelle en avait tant besoin. Si physiquement Marie était présente, mentalement elle létait de moins en moins. LAnkou gagnait du terrain sournoisement, alors que la dépressive saccrochait aux bouées quon lui tendait. Les sourires de ses blondes, les paroles de ses suzerains, les épaules propices aux pleures de ses amis tant de petites choses qui font tout quand ça ne va pas.
Et, alors quun pas fut sans doute de trop dans cette promenade nocturne, la duchesse sentie couler entre ses jambes le signe annonciateur de larrivé de lhéritier. Immobile, mais étrangement calme, Marie tourne la tête vers son intendant.
Gauvin Il arrive.
Il nen fallut pas plus à lhomme pour comprendre et quil lui fallait désormais faire le nécessaire. Confiant la duchesse au bras salvateur du grand maure il faudra quelle songe à lui trouver un prénom le vieil homme lui fit comprendre ou la mener par quelques gestes qui semblaient défini davances. A croire que lintendant, attendait cet enfant avec bien plus de sérieux que la futur mère. Se laissant porter par les évènements, la dukez se contenta de suivre, un peu sonnée, lesclave à la peau sombre qui lemmenait vers sa chambre.
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