Le loup semblait apaisé alors que les premiers rayons d'un matin vinrent les frapper de plein fouet, réveillant en eux de primaires instincts. Depuis combien de temps n'avaient ils mangé? L'Être ne se souvenait plus. Depuis ce serment, il ne s'était nourri, et portant sa main à son ventre, il vit le loup s'enfuir.
Calmement, il s'assit dans l'herbe, laissant la rosée du matin pénétrer entre ses doigts écartés. Comme arrosé d'une vie nouvelle, il se laissa ainsi bercer par le matin. Pas ensoleillé, car jamais à la Cour l'on ne verrait un rayon digne de ce nom. Tout n'était que nuages et embruns, et pourtant en cet instant, le calme de son esprit était reflet d'un extérieur de survie.
Il va revenir...
Cette pensée, elle l'avait.
Anaphore éternelle, la Créature se la répétait ainsi, comme pour s'en convaincre.
Pourtant elle ne doutait pas de lui, de cet être qui comme l'être qu'il était, combattait ses douleurs, seul et sans aide, et les conservait en lui. Se laissant aller à l'abandon de l'âme et de l'esprit.
Le revoici. Son coeur qui s'était arrêté se mit à battre douloureusement. Il exaucait son souhait de survivance, ainsi le nourissait-il, être aimant d'une vie, s'occupant d'elle en un serment, réciproque celui-ci. La Créature liée à lui était désemparée, charmée, envoutée de voir comme la survie à ses côtés semblait si douce. De douleur à douceur, douleurs mêlées et échangées en une douceur complète et mutuelle...
Un lapin de toute blancheur. Allégorie même de la sauvagerie, qu'elle ne voyait ainsi, taché de sang. Preuve d'amour immortel de son serment, l'Être lui sourit.
Sa main s'abandonne à la sienne, il l'écoute tandis que la Sombrâme lui parle. Pas de paroles, mais de regards d'abord. Des yeux partant d'une cour déchirée, livrée à elle même en ces heures damnées. D'une cour immortelle, pourtant mortifiée, morbide en son coeur, pourrie en ses côtés. D'une cour d'un appel, pour eux deux. Rien n'était fait, tout à faire. Qu'y pourraient-ils?
L'Être ne le savait. Mais ils seraient ensemble. En son coeur c'est ce qui importait.
Tant à faire...
Echo de sa propre voix, de ses pensées premières. Sa main dans la sienne se posa sur son coeur, en écoutant les battements de douleur, de douceur en elle car la Survivance était son serment, leur serment à présent. Plus de peur de la vie. L'affronter, malgré le peu d'envie, mais l'envie de l'autre sans un sursis.
Tant faire pour l'autre, toujours se donner sans compter même parmis les immondices d'une Cour destructurée, parmis deux âmes, corps et esprits mélés en un mais torturés.
Nous sommes le serment l'un de l'autre. Si mortel et fragile aux yeux de tous, immortels de notre regard, éternels aux yeux des semblables.
Car sommes nous seuls? Je ne le sais pas. Je ne suis plus seule près de toi.
Si je suis un ange, mes ailes sont bien noires, coulant d'écarlate dans les rigoles carmins de la Cour. Et pourtant je suis là, à tes côtés, gravissant le Mont de Peine pour te le prêter, encore, ce serment de mon amour, de ma fidélité, de mon aliénation de douleur, de douceur pour toi à tout jamais.
Sa main libre se pose sur sa joue, frôlant sa peau blanche et douce en un souffle d'une bise matinale. Matin nouveau, si sombre, si lumineux à son regard.
Je suis l'être, je suis à toi, pour toi. Concu de tes pleurs, je reste près de toi, amante, amant, aimant, aimante, compagnon et compagne de toutes les peines et haines et joies sans douleur que tu trouveras.
Quel est l'être que j'aime?_________________
- Te protéger, je le ferai, car j'en ai fait le Serment -