Anaon
"Savez-vous pourquoi on ne renonce jamais aux chevaux?"
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Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]
- - "Danse avec Lui" de Valérie Guignabodet -
- Le ciel s'est munit de bleu clair et il flotte dans l'éther les premières exhalaison printanières. Ça sent le soleil. Les premières effluves végétales. La rosée ne se fait plus cristal figé quand nait le petit jour. C'est la chaleur qui revient en ce matin de dimanche. Jour du seigneur, jour de glandeur. Voilà un dogme sur lequel personne n'avait jamais rien eu à redire. Le Louvre ne manque pas à la règle et en ces temps troublés personne n'oserait contredire les divines règles du Très-Haut. Un principe ecclésiastique que la païenne ne viendra pas non plus contester. Elle ne crachera pas sur un jour de légitime repos. Au revoir tornade rousse et caprice de rouquine! Au revoir Paris et son ambiance sirupeuse, l'air pâteux qui alourdit ses venelles! Aujourd'hui l'Anaon prend le chemin d'une autre atmosphère.
Elle a quitté la capitale et son enceinte pour cheminer dans ses faubourgs puis rejoindre les hameaux qui parsèment ses campagnes. L'insomnie a de nouveau fait ses ravages sur le visage qui avait retrouvé ses pleines courbes. Des cauchemars chroniques qui faisaient son quotidien depuis plus d'un an déjà. Une routine qui détruit devenue banalité. Malgré sa fatigue, l'humeur de la balafrée se faisait légère. Sans doute le fait de revoir un bout d'herbe qui fait défaut aux pavés de la capitale. Soulagement aussi d'oublier le Louvre et ses gens à cran. La Reyne était morte, le Louvre courbait l'échine, le visage contre-terre. Nebisa, ce nom elle le connaissait bien avant qu'il ne soit celui d'une Reyne. Pas assez pourtant pour en être affecté et partager le deuil de ceux qui la pleurait. Laissons les éplorés là où ils sont et menons l'Anaon la où elle doit être.
Les chemins dévalent sous le pas souple du cheval et les chaumières défilent sous les azurites et leurs calme lueur. Quelques qu'arrêts pour s'assurer de sa direction et la balafrée reprend sa route. Une bâtisse se révèle alors, un peu à l'écart des autres. Maison de bourgeois à l'apparence plutôt spacieuse sans en être pompeuse. Une famille qui a du savoir rouler sa bosse dans un quelconque commerce. Sans quitter les murs de son regard d'azur, la mercenaire met pied à terre.
Une main vient se fourrer dans la crinière épaisse de l'ibérique. Cheval à la robe bâtarde, crins trop sombre pour un palomino, trop clair pour un isabelle. Elle l'a toujours décrété faux-isabelle même s'il n'en a jamais été. La main abandonne la toison grise pour glisser sur les poils d'or. L'index se heurte à un sillon grisâtre qu'il redessine d'une pulpe délicate. Une balafre parmi d'autre qui n'avait pas retrouver ses poils. Probablement qu'il ne repousseront jamais sur les lignes devenus blanches. Témoins d'un courroux qu'elle n'a jamais réprimandé. Ah, Judas. Marquer ma vie ne t'as pas suffit. Il a fallu que tu le marque lui... Depuis ce jour, le cheval était à l'image de sa cavalière. Une beauté brisée, à jamais stigmatisée. Encore un être que l'Anaon a été incapable de protéger...
La dextre termine sa caresse d'une claque amical sur l'encolure musculeuse avant d'avancer calmement, Visgrade sur ses talons. Le poing se ferme et les phalanges viennent frappées le bois de la porte. Attente. Une main repousse vaguement le nez du chafouin qui cherche à lui mordiller les reins.
Aujourd'hui pas de gamine à surveiller, pas d'homme à traquer, pas de combattant à écraser. Aujourd'hui la mission sera toute autre.
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Images originales: Victoria Francès, concept art Diablo III - [Clik]