L_azrael

Une certaine agitation avait envahie la petite maisonnée ce soir d’hiver 1455. Le couple recevait à diner les plus riches fournisseurs en tissus de la ville pour parler affaire. Il dépendait de cette soirée l’avenir professionnel de l’époux et donc par extension du couple. Son encordé tenait l’une des plus grosses boutiques de vêtements des halles parisienne. Et cette nuit au terme d’un repas gargantuesque un gros contrat devait être signé entre les différents acteurs du commerce d’étoffe. Le bruit des cuisines avait retentit gaiment toute l’après-midi dans la grande bâtisse. Le fumet alléchant des plats en sauce était venu aguicher les narines délicates de la maitresse de maison lui intimant l’ordre de descendre pour une ultime vérification.
Un dernier regard dans le miroir lui renvoie l’image d’une belle jeune femme. Toute juste revenue de noce elle s’était vue couverte de pierreries et de bijoux comme un joli bibelot qu’exhibait fièrement son homme. Pour le repas de ce soir, Constance avait revêtu une robe de velours de soie rouge foncé qui mettait en exergue la pâleur de son teint et la clarté de ses yeux. Ainsi elle savait qu’elle plairait à son mari et bien que cela ne soit pas réciproque elle y tenait…A son cou et son poignet de fine rangée de Jaspe et de coraline rehaussaient le tout. Elle était belle.
Fixant une dernière épingle dans sa chevelure de jais, la jeune femme suivit le colimaçon juste qu’a l’antre frémissante de la demeure. Dans les cuisines plats et chaudrons s’agitait au rythme d’un petit personnel engagé pour l’occasion. Il fallait paraitre riche, il fallait faire comme si ils n’avaient besoin de personne. Un monde de faux semblant. L’œil inquisiteur se laisse séduire, et l’élégante marâtre s’en alla rejoindre sa moitié au salon.
A peine entrée dans la pièce, une tension se laisse ressentir. Les épaules de Jehan ont cette raideur qu’elle lui connait si bien les jours de mauvais temps. Une chose semble chagriner l’homme. Ses yeux d’orages fixent les flammèches de la cheminée alors que de sa gorge sort un bourdonnement inaudible. Puis un coup d’éclat. Fort. Tonitruant.
Tout est de ta faute !!!
La silhouette de la coquelicot se tend, et recule devant un doigt accusateur qu’il lui tend. Que se passe-t-il ? Qu’a-t-elle fait ? La surprise qu’il lit alors sur le minois de sa femme ne fait que décupler la colère qu’il ressent à son égard. Ses bras dessinent dans l’air lourd du salon, des volutes saccadés à chaque reproche qu’il lui fait. Une énième dispute conjugale… Celle-ci s’annonçait sans doute bien plus terribles que les précédentes. L’enjeu de la soirée y était sans doute pour beaucoup. Mais la Docile épousée attendit de connaitre le fond du problème pour répliquer et l’apaiser comme elle le faisait à chaque fois.
Qu'est ce que...
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