Rosalinde
Il avait dit qu'il ne l'accompagnerait que jusqu'à Nevers. Ferme et décidé, en plus. Non, il ne se laisserait pas embrigader par une donzelle, le père Lebrun attendait sa livraison de drap avec impatience. Il avait déjà failli ne pas pouvoir rentrer chez lui... C'est qu'en passant par Dijon, il avait perdu son cheval aux cartes ! Il se demandait encore comment il allait pouvoir faire pour livrer sa marchandise, quand elle était apparue.
Elle, une magnifique rousse, au teint de lait et visage d'ange, inondé de la pâle clarté de l'aube se levant sur la capitale bourguignonne. Et, Ô surprise, dans sa main fine se tenait la bride du cheval perdu précédemment aux cartes. Une seule justification :
- On m'en a fait cadeau, mais il sera de nouveau à vous si vous me conduisez à Nevers.
Comme par miracle, c'était là où il allait ! Quelle coïncidence ! Il n'avait pas remarqué l'ombre, tapie dans un coin, pendant qu'il jouait, la veille. L'autre non plus d'ailleurs, et si on le lui avait demandé, à la fin de la partie, il aurait répondu que jamais il ne ferait don de son gain, et encore moins à une femelle. Maintenant, il avait perdu le cheval, et deux doigts.
Rosalinde se demandait encore comment elle avait fait pour passer les trois jours de trajet sans étrangler ce benêt de garçon de courses. L'avantage, c'est qu'il n'avait pas été difficile de le convaincre de la conduire jusqu'à Petit Bolchen plutôt que de s'arrêter à Nevers et de la laisser terminer le chemin à pieds. A pieds... Il ne manquait plus que cela. Elle regrettait simplement que la bête n'eut pas été sellée le soir où elle l'avait récupérée, sinon quoi elle y serait allée toute seule, cela lui aurait épargné le tourment de devoir faire la conversation à l'imbécile.
Enfin. L'important était qu'il l'avait menée à bon port, juste devant la grille, après qu'ils eurent longé les murailles entourant le domaine. Descendant de la charrette, elle adressa un regard méprisant à son compagnon, qui sans doute devait s'attendre à un merci, ou à un adieu. Elle n'en fit rien. Mais alors qu'il allait lever le camp...
- Attends !
Et la voilà qui déballe le paquet qu'elle avait emporté avec elle, contenant la robe volée, la cape et le bracelet de perles.
- Je vais me changer, en me cachant entre ta charrette et le mur. Si tu me regardes, je t'arrache les yeux.
De longues minutes plus tard, elle était enfin sanglée dans sa robe, qui lui allait comme un gant. Il fallait dire qu'elle l'avait légèrement retouchée à l'auberge. Heureusement que la bourgeoise avait également un décolleté généreux. Rabattant la capuche sur sa chevelure, mais point sur son visage tout entier, elle s'avança donc vers l'entrée de la demeure... D'où quelqu'un sortait. Et faisait tomber une pelle, qui se retrouva en un rien de temps en bas des marches. Accélérant, pour les quelques pas qu'il lui restait à faire, la Rousse se retrouva vite en bas de ces mêmes marches.
Se baisser, pour ramasser la pelle de cette femme qui semblait bien chargée ? On en a pas idée. A la place, une apostrophe :
- Judas von Frayner, c'est par où ?
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Elle, une magnifique rousse, au teint de lait et visage d'ange, inondé de la pâle clarté de l'aube se levant sur la capitale bourguignonne. Et, Ô surprise, dans sa main fine se tenait la bride du cheval perdu précédemment aux cartes. Une seule justification :
- On m'en a fait cadeau, mais il sera de nouveau à vous si vous me conduisez à Nevers.
Comme par miracle, c'était là où il allait ! Quelle coïncidence ! Il n'avait pas remarqué l'ombre, tapie dans un coin, pendant qu'il jouait, la veille. L'autre non plus d'ailleurs, et si on le lui avait demandé, à la fin de la partie, il aurait répondu que jamais il ne ferait don de son gain, et encore moins à une femelle. Maintenant, il avait perdu le cheval, et deux doigts.
- [Petit Bolchen, ou presque]
Rosalinde se demandait encore comment elle avait fait pour passer les trois jours de trajet sans étrangler ce benêt de garçon de courses. L'avantage, c'est qu'il n'avait pas été difficile de le convaincre de la conduire jusqu'à Petit Bolchen plutôt que de s'arrêter à Nevers et de la laisser terminer le chemin à pieds. A pieds... Il ne manquait plus que cela. Elle regrettait simplement que la bête n'eut pas été sellée le soir où elle l'avait récupérée, sinon quoi elle y serait allée toute seule, cela lui aurait épargné le tourment de devoir faire la conversation à l'imbécile.
Enfin. L'important était qu'il l'avait menée à bon port, juste devant la grille, après qu'ils eurent longé les murailles entourant le domaine. Descendant de la charrette, elle adressa un regard méprisant à son compagnon, qui sans doute devait s'attendre à un merci, ou à un adieu. Elle n'en fit rien. Mais alors qu'il allait lever le camp...
- Attends !
Et la voilà qui déballe le paquet qu'elle avait emporté avec elle, contenant la robe volée, la cape et le bracelet de perles.
- Je vais me changer, en me cachant entre ta charrette et le mur. Si tu me regardes, je t'arrache les yeux.
De longues minutes plus tard, elle était enfin sanglée dans sa robe, qui lui allait comme un gant. Il fallait dire qu'elle l'avait légèrement retouchée à l'auberge. Heureusement que la bourgeoise avait également un décolleté généreux. Rabattant la capuche sur sa chevelure, mais point sur son visage tout entier, elle s'avança donc vers l'entrée de la demeure... D'où quelqu'un sortait. Et faisait tomber une pelle, qui se retrouva en un rien de temps en bas des marches. Accélérant, pour les quelques pas qu'il lui restait à faire, la Rousse se retrouva vite en bas de ces mêmes marches.
Se baisser, pour ramasser la pelle de cette femme qui semblait bien chargée ? On en a pas idée. A la place, une apostrophe :
- Judas von Frayner, c'est par où ?
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