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[RP] Une salamandre et un balbuzard pour une couronne

Eusaias
[Ardenne, château de Bouillon, fief des Blanc Combaz.]



La nuit était encore bien présente sur les collines ardennaises et seule la lune éclairait les quelques brumes grisâtres qui étaient remontées de la Sémois et qui s’étaient accrochées aux roches autour de la forteresse.

Deux piquiers veillaient la porte close, alors qu’un archer sur le « qui vive » les surplombait. La veille l’annonce de la mort de la reine était arrivée à Bouillon et le duc, en catimini avait lancé le branle-bas de combat.

Le duc d’ailleurs traversait à pas de loups la cour accompagné de Sulpice, Ratbold et Glaber. Les quatre étaient en armure, épée sur le côté et les couleurs passées. A leur approche une compagnie de piquiers flamands resserraient les rangs dans un bruit sourd de bois et de ferraille.

Les deux jumeaux morvandiaux, Guillaume et Adalbert firent signe aux archers et arbalétriers de Digoine d’avancer, alors que les quatre hommes montaient leur destrier.



Ratbold, les cabochiens sont ils informés ?

Oui ils neutraliseront les gardes et nous ouvrirons la porte à notre arrivée.

Bien, Glaber as-tu pensé à contacter la compagnie franche qui stagne en Brionnais ?

Oui ils couperont toutes manœuvres militaires si besoin vous aurez peu d’ennui.

Parfait ! Sulpice, as-tu fini les préparatifs ?

Oui on aura les vivres nécessaires livrées par les marchands normands dont je vous avais parlé. J’ai aussi fait prévenir madame la comtesse.

Pardon ?!

On aura les...

Non pas ça, la comtesse.

J’ai fait prévenir votre épouse, on n’allait quand même pas lui faire ça.

P*tain….


Le froid venait de lui glacer l’échine. Lui qui pensait faire sa campagne militaire tranquillement, son projet risquait de tomber à l’eau si son épouse s’en mêlait.
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Gnia
De base, la Saint Just était un oiseau de nuit. Autant dire que les réveils à l'aube ne l'avaient jamais mis de bonne humeur. Alors que dire quand en sus c'était un roux qui s'occupait du réveil, et ce pour lui annoncer une nouvelle qui la prit en sursaut ?

Un chapelet de jurons tout à fait dignes de paraitre au registre licencieux des campements de soudards clôtura cette cérémonie du lever saint justien. Frissonnant d'une colère rentrée, elle prit à peine le temps de passer lourd mantel sur ses habits de nuit et se rua dans les couloirs du castel de Bouillon direction le parvis surplombant la cour.

Elle ne rêvait pas, son sommeil étant à présent bien chassé. Devant elle s'étalait une petite mer de casques et cuirasses qui luisaient à peine sous la lune timide.
Une profonde inspiration préluda à un véritable rugissement, résonnant par dessus les cliquetis et les rires gras.


Blanc Combaaaaaaaz !

Un "au pied" aurait assurément ponctué l'interjection d'encore plus d'autorité. Mais la Saint Just préférait éviter la volée de phalanges qui pouvait s'en suivre.
Instinct de survie.
D'autant que les dites phalanges recouvertes d'un gantelet pouvaient tout à fait achever de défigurer son minois hautain déjà passablement écorné par la fine balafre qui bordait l'une des ses joues.

Et la comtesse de fendre la mer de fer jusqu'à son balbuzard d'époux. Le petit coq artésien se dresse sur ses ergots, sans parvenir à dépasser le garrot de la monture. Mais il en faut plus pour impressionner une artésienne, échevelée, en chemise de nuit, mal réveillée et en colère.
La voix rauque au fort accent picard gronde


On peut savoir ce que vous faites ?
'Fin non, je le sais déjà !
Je vous préviens, si vous persévérez, je fais partir messagers à Paris et vous trahit dans l'heure.
Les urnes ne sont pas faites pour les chiens !


Sourcil haussé, elle plante un regard acéré en dessous de la visière qui la surplombe, chassant la pensée qu'elle pourrait dans cette position se manger un coup de jambière impromptu dans la tronche. Encore plus efficace que le gantelet.

Daigneriez-vous à présent entrer un instant afin que nous parlions, Sa Grasce mon époux ?
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Eusaias
Très machinalement au « Blanc Combaaaaaaaz ! » il entra la tête dans les épaules, faisant teinter la ferraille. Non pas par crainte, car seul le froid savait le faire trembler, mais par dépit. Il regarda sa toison d’or qui reposait sur sa cuirasse, il grimaça de nouveau, ça serait pas aujourd‘hui quelle serait maculée de sang comme celle de tout bon chevalier bourguignon.

Foutu rouquin… je vais soigner ton cas. Tu vas d’éteindre une tradition bourguignonne là !

Il lança un regard vers le ciel qui commençait à peine à s’éclairer, la mine déçue, il n’y aura pas de festivité rue du temple. Le temps de rebaisser les yeux et son artésienne d’épouse était déjà sous son nez.

Sa grandeur ma femme n’a-t-elle épousé ma personne pour son audace, ses talents militaires, sa soif de pouvoir, ses titres et mon don en couche ? Alors soyez rassurée, j’ai l’audace de prendre la forme dans ma poigne, mes talents militaires feront que j’écraserai mes rivaux, nous serons alors souverain et je pourrais vous culbuter sur le trône royal.

D’un geste brusque de la main, il relève la visière de son casque.

Vous voyez vous serez comblée !

Puis un regard acéré vers ses hommes pour détourner la conversation.

Cessez de regarder mon épouse ainsi bande de vicelards. Regardez vos pieds et pas qu’un seul casque ne se relève ou j’assomme le possesseur avec ma masse !

Décrochant la masse de la selle du destrier il l’a brandit pour que nul ne puisse l’ignorer.

EXECUTION !

Puis se laissa alors glisser du destrier, la masse toujours à la main, le regard cette fois planté dans les yeux d’Agnès.

Vous avez gagné ! Rentrons, de toute manière vous avez gâché ma journée.

D’un geste rageur il lança sa masse à travers la cour qui s’écrasa sur le sol. Le bourguignon, d’un pas décidé se dirigea vers le castel non sans crier :

Sulpice, sale fourbe, vas voir à Digoine si j’y suis et tu y vas à pied c’est un ordre !
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Gnia
Tandis que le Balbuzard rebroussait chemin direction la maison, une mine satisfaite éclaira la trogne de l'artésienne. Elle n'alla pas jusqu'au sourire triomphant, mais elle secoua négativement la tête à l'adresse du rouquin rabroué. Trop précieux pour s'en passer, elle saurait plaider sa cause.
Trottinant derrière le Blanc Combaz furieux, son esprit calculait à toute vitesse le meilleur angle d'attaque pour ramener son époux à de meilleures dispositions, tout en sachant fort bien ce qui marcherait le mieux.

Elle trouva le Balbuzard dans la salle d'armes, un écuyer s'empressant de lui retirer prudemment les plates de l'armure. Se piquant d'une moue boudeuse, elle s'approcha de son époux et lui fit remarquer d'une voix enjôleuse


Vous alliez partir sans me dire au revoir, en sus ?

Secouant légèrement la tête, elle passa un main délicate sur la cicatrice qui barrait la joue de son époux.

Vous voulez donc devenir Roy ?

Dans la conquête du trône, mon époux, votre audace et votre ambition vous donneront plus certainement la victoire qu'une manoeuvre militaire à l'issue douteuse.
Voulez-vous donc souffrir de pire réputation que la Malemort ?
Si elle s'est fait élire pour ses ambitions guerrière, la France n'en est aujourd'hui plus là, et c'est la paix et le retour à la vie paisible des pécores dans leurs bonnes villes qu'il faut prôner. Même les châtelains veulent espérer engranger cet été leurs moissons, en ayant suffisamment de main d'oeuvre valide et ne pas avoir à chasser les charognards sur leurs semis.
Passés les primes instincts qui poussent l'homme à aimer le sang, ceux dont le métier n'est pas la guerre veulent tous revenir dans leur chaumière, trousser leur épouse, torcher leurs mômes, profiter des veillées au coin du feu, un godet de tord boyau local à la main, et vaquer à leur petite routine quotidienne.


Le front se plisse, les sourcils se froncent, et c'est alors qu'arrive à point nommé le vin coupé d'eau commandé par la Saint Just avant de confronter la colère de son époux. Se saisissant des hanaps, elle en tend un à Eusaias.

Plutôt que de vouloir m'évincer de vos ambitions, mon cher, essayez de vous rappeler vous même pourquoi vous m'avez épousé.
Et plutôt que de me voir en ennemie, tâchez de vous rappeler que je suis votre alliée.

Alors fi de vos velléités guerrières totalement hors de propos, et menez donc campagne, non point militaire, mais dans les règles de l'art.
Je n'ai aucun doute sur votre capacité à écraser l'ennemi et à conquérir le trône.

Mais pas comme ça.
Vous parviendrez bien mieux à vos fins en enjôlant qu'en forçant. C'est certes moins rapide, mais plus concluant. Comme avec les femmes...


Et de retenir un sourire mauvais, tout en ancrant son regard de glace dans celui de son époux, avant d'enfin porter la coupe à ses lèvres.
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Eusaias
L’armure commençait à peine à être retirée que le visage sombre du balbuzard avait pris entièrement place. Bras écartés il regardait l’écuyer retirer les pièces alors que la comtesse commençait sa sérénade.

Vous alliez partir sans me dire au revoir, en sus ?

L’œil bondit sur la comtesse et les dents grincèrent, allait elle l’ennuyer toute la journée. Un poing se ferma bien fort, un œil bleu ou une lèvre fendue ? C’était la question que le Balbuzard se posa quand à la décoration qu’il voulait offrir à l’artésienne.

Mais la caresse eue vite raison de la colère bourguignonne. Agnès de Saint Just, comtesse et épouse bien complexe. Il l’aimait, il la haïssait aussi, deux aimants qui cessaient de s’attirer pour mieux se repousser, ou inversement. Il lui souhaitait tout le bien possible, mais lui offrait les pires tourments.


Tout compte fait j’aime votre tête pleine de pensées malines et de conseil avisés.

Se fondant d’un sourire requin.

Je vais vous écouter. Je vais rallier les fiefs alliés à la Bourgogne ainsi que les grandes familles. Vous allez me trouver flamands et artésiens, puis nous irons sur Paris. De là nous pourrions rallier encore quelques soutiens.

Un court moment de réflexion passa avant qu’il ne reprenne.

Bon sang ! Par les armes on gagnerait temps et énergie… Tant pis, faisons comme vous le dites.

Il but une gorgée de vin et grimaça.

Il est affreux ce vin ! Il n’a pas de gout ! Ou dirait du vin d’Anjou.

Le contenu de l’hanap macula le visage de l’écuyer.

Dépêche toi ! Je dois discuter avec mon épouse, puis l’honorer pour la remercier, alors plus vite !
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