Blanche_
Pour aider le lecteur, nous dirons d'abord que cette scène se situe à Gondomar, Castille et Léon, au vendredi 12 novembre 1459.
Il était une fois une baronne, et un marquis. Ils avaient tous deux vécu fort loin l'un de l'autre, et parcouru des chemins très différents, traversé des périodes heureux et d'autres moins ; et pour une raison inconnue, ils avaient subitement décidé de convoler en justes noces.
Se marier. Bien qu'elle fut bretonne, et lui espagnol, et que pour l'épouser elle devait quitter la terre de sa naissance et de son enfance pour embrasser une contrée complètement inconnue ; car Gondomar, sise en Galice, était une terre mystérieuse pour Blanche qui n'y avait jamais posé de pied. Rapidement, quelques échanges de courriers scellèrent le pacte ; elle donna sa parole, il envoya de l'argent, fit appareiller un bateau, et vint la chercher.
En novembre 1459 elle voyait les Îles de Gondomar pour la première fois, empreintes de brumes et camouflées du soleil par de gros nuages... C'était une terre semblable à celle de Bretagne, ce qui lui fit penser, l'espace d'un instant, qu'il s'agissait peut être de la disparue Avalon, et de ses brumes légendaires.
Accueillie selon son rang, elle obtenait tout ce qu'elle souhaitait, mais n'en abusa pas. Elle savait de toutes façons, que son affection serait testée par un cadeau ou un autre, par une pierre précieuse ou un collier de perles, et qu'elle n'aurait pour cela rien à demander ; l'attente était, de fait, beaucoup moins amusante.
Elle avait en plus de ça, un tout nouveau rapport avec l'argent, un peu d'appréhension, de dégoût, sans doute pour en avoir manqué énormément les dernières années : car si Gondomar était terre d'opulentes richesses, Donges était une baronnie qui périclitait, abandonnée par les nobles alentours, et dont le Grand Duc n'avait que faire. Alors s'il lui arrivait d'offrir à sa promise quelque bijou, ou apparat qu'il lui aurait plu de voir vêtir, elle s'en gardait bien et s'obstinait à ne porter que ses propres acquisitions. Donges ne ployait pas devant Gondomar, quelles que fussent les manigances pour accéder à son désir.
Le Marquis aura t'il le temps de me recevoir aujourd'hui ?
C'était non.
Toujours non.
Astaroth n'a pas le temps. Sa Majesté Astaroth, Roy de Castille de facto, n'a pas le temps de vous recevoir, car il a convoqué les Pairs. Car il destitue le Duc Bidule. Car il condamne truc pour trahison. Car il prépare l'élection du prochain Roi. Car il se rend au chevet de feu sa Majesté William. Car...
C'était non. Indubitablement non, car si Blanche devait rester à Gondomar selon son bon désir, elle ne pouvait pas non plus échanger avec lui plus que quelques mots par jour, elle ne pouvait pas discuter avec lui de sa prochaine condition, quand bien même... Ses épousailles se trouveraient être au lendemain. Tel était son bon plaisir, et elle devait obéir.
C'était tout.
Mais j'aimerais vraiment le voir ce soir insista t'elle en s'adressant au domestique. L'intonation seule avait suffi, de toute façon son interlocuteur ne parlait pas breton, extrêmement mal français, et la seule chose qu'il pouvait comprendre c'était sans doute juste les sourcils qui se fronçaient et les yeux qui lançaient des élciars courroucés. Je veux, je veux, je VEUX !
Quelques minutes d'argumentation suffirent ; Je suis presque sa femme avait elle envie de hurler, sa FEMME. Il avait donné des ordres, en plus, la traiter comme la Marquise de Gondomar bien que la cérémonie n'ait pas encore eu lieu, alors quoi, devait-elle réellement attendre ? L'idée seule que ce nouveau statut la reléguait au dernier échelon hiérarchique du castel l'exaspérait. Visiblement, les galiciennes avaient oublié leur condition de femme et d'épouse pour vivre rien que pour leur époux, et leur unique satisfaction.
On l'emmena aux appartements du Marquis. Du Roy, pardon. On l'y emmena, on l'y déposa, et on l'y abandonna, seule, habillée très simplement. Elle avait presque honte de sa tenue, mais l'heure extrêmement tardive l'en excusait à elle-seule, et après tout, n'était-ce pas la propre faute de Gondomar, si elle était ainsi si peu élégamment vêtue ? Il l'avait convoquée à 10 heures, au beau milieu de la soirée, il écoperait donc de sa future en peignoir et cheveux à peine coiffés, souffrirait de voir l'opalescente chemise de nuit bomber sur son ventre, là où la grosseur n'avait pas encore disparu.
C'était bien fait pour lui, pensa t'elle. Et il aimerait sans doute la voir sans apparat, les cheveux abandonnés sur une épaule, tel qu'il en aurait l'occasion toutes les nuits suivantes.
Les mariées, c'est bien connu, s'accordent quelques libertés dans la chambre conjugale.
Alors quoi ? Alors toc. Toc.
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Il était une fois une baronne, et un marquis. Ils avaient tous deux vécu fort loin l'un de l'autre, et parcouru des chemins très différents, traversé des périodes heureux et d'autres moins ; et pour une raison inconnue, ils avaient subitement décidé de convoler en justes noces.
Se marier. Bien qu'elle fut bretonne, et lui espagnol, et que pour l'épouser elle devait quitter la terre de sa naissance et de son enfance pour embrasser une contrée complètement inconnue ; car Gondomar, sise en Galice, était une terre mystérieuse pour Blanche qui n'y avait jamais posé de pied. Rapidement, quelques échanges de courriers scellèrent le pacte ; elle donna sa parole, il envoya de l'argent, fit appareiller un bateau, et vint la chercher.
En novembre 1459 elle voyait les Îles de Gondomar pour la première fois, empreintes de brumes et camouflées du soleil par de gros nuages... C'était une terre semblable à celle de Bretagne, ce qui lui fit penser, l'espace d'un instant, qu'il s'agissait peut être de la disparue Avalon, et de ses brumes légendaires.
Accueillie selon son rang, elle obtenait tout ce qu'elle souhaitait, mais n'en abusa pas. Elle savait de toutes façons, que son affection serait testée par un cadeau ou un autre, par une pierre précieuse ou un collier de perles, et qu'elle n'aurait pour cela rien à demander ; l'attente était, de fait, beaucoup moins amusante.
Elle avait en plus de ça, un tout nouveau rapport avec l'argent, un peu d'appréhension, de dégoût, sans doute pour en avoir manqué énormément les dernières années : car si Gondomar était terre d'opulentes richesses, Donges était une baronnie qui périclitait, abandonnée par les nobles alentours, et dont le Grand Duc n'avait que faire. Alors s'il lui arrivait d'offrir à sa promise quelque bijou, ou apparat qu'il lui aurait plu de voir vêtir, elle s'en gardait bien et s'obstinait à ne porter que ses propres acquisitions. Donges ne ployait pas devant Gondomar, quelles que fussent les manigances pour accéder à son désir.
Le Marquis aura t'il le temps de me recevoir aujourd'hui ?
C'était non.
Toujours non.
Astaroth n'a pas le temps. Sa Majesté Astaroth, Roy de Castille de facto, n'a pas le temps de vous recevoir, car il a convoqué les Pairs. Car il destitue le Duc Bidule. Car il condamne truc pour trahison. Car il prépare l'élection du prochain Roi. Car il se rend au chevet de feu sa Majesté William. Car...
C'était non. Indubitablement non, car si Blanche devait rester à Gondomar selon son bon désir, elle ne pouvait pas non plus échanger avec lui plus que quelques mots par jour, elle ne pouvait pas discuter avec lui de sa prochaine condition, quand bien même... Ses épousailles se trouveraient être au lendemain. Tel était son bon plaisir, et elle devait obéir.
C'était tout.
Mais j'aimerais vraiment le voir ce soir insista t'elle en s'adressant au domestique. L'intonation seule avait suffi, de toute façon son interlocuteur ne parlait pas breton, extrêmement mal français, et la seule chose qu'il pouvait comprendre c'était sans doute juste les sourcils qui se fronçaient et les yeux qui lançaient des élciars courroucés. Je veux, je veux, je VEUX !
Quelques minutes d'argumentation suffirent ; Je suis presque sa femme avait elle envie de hurler, sa FEMME. Il avait donné des ordres, en plus, la traiter comme la Marquise de Gondomar bien que la cérémonie n'ait pas encore eu lieu, alors quoi, devait-elle réellement attendre ? L'idée seule que ce nouveau statut la reléguait au dernier échelon hiérarchique du castel l'exaspérait. Visiblement, les galiciennes avaient oublié leur condition de femme et d'épouse pour vivre rien que pour leur époux, et leur unique satisfaction.
On l'emmena aux appartements du Marquis. Du Roy, pardon. On l'y emmena, on l'y déposa, et on l'y abandonna, seule, habillée très simplement. Elle avait presque honte de sa tenue, mais l'heure extrêmement tardive l'en excusait à elle-seule, et après tout, n'était-ce pas la propre faute de Gondomar, si elle était ainsi si peu élégamment vêtue ? Il l'avait convoquée à 10 heures, au beau milieu de la soirée, il écoperait donc de sa future en peignoir et cheveux à peine coiffés, souffrirait de voir l'opalescente chemise de nuit bomber sur son ventre, là où la grosseur n'avait pas encore disparu.
C'était bien fait pour lui, pensa t'elle. Et il aimerait sans doute la voir sans apparat, les cheveux abandonnés sur une épaule, tel qu'il en aurait l'occasion toutes les nuits suivantes.
Les mariées, c'est bien connu, s'accordent quelques libertés dans la chambre conjugale.
Alors quoi ? Alors toc. Toc.
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